Cola nitida

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Cola nitida est un arbre de la famille des Sterculiacées (classification classique) ou des Malvacées (classification phylogénétique), originaire d'Afrique de l'Ouest tropicale.

C'est une des espèces de kolatiers qui produisent la noix de kola, au goût amer, très prisée en Afrique de l'Ouest et du Centre, pour ses vertus stimulantes et ses valeurs symboliques.

Il est aussi appelé Cola vrai[1] ou goro au Cameroun.

Histoire de la nomenclature[modifier | modifier le code]

Après les premiers grands voyageurs arabes et européens, plusieurs botanistes pré-linnéens ont fait mention d'un fruit nommé Cola, très apprécié par certaines populations africaines. En 1550, le diplomate et explorateur Léon l'Africain mentionne une graine nommée Goro qui semble être la noix de cola (Cosmographia de Affrica[2]). Le Portugais Odoardo Lopez[3] et l'explorateur Italien Filippo Pigafetta signalent les propriétés de noix rouges sous le nom de Cola[4]. C'est alors que le naturaliste suisse Gaspard Bauhin les décrit dans Pinax (1596) d'après le récit de Filippo Pigafetta dans Le Royaume de Congo et les contrées environnantes[5] (1591).

Malgré ces nombreuses mentions, Linné n'a pas jugé souhaitable d'introduire de kolatiers dans Species plantarum[6] (1753).

La première description botanique est l’œuvre de Étienne Pierre Ventenat (1757-1808) publiée dans le Jardin de Malmaison tome2, en 1803. Dans cet ouvrage superbement illustré, il décrit en détail Sterculia monosperma à partir d'un « arbre provenu de graines envoyées de l'Inde et semées depuis trois ans… Il passe l'hiver dans la serre chaude… »[7]. Il donne ensuite une description latine de six Sterculia dont Sterculia nitida à partir de semences ramenées avec les esclaves africains aux Antilles[8]. C'est le basionyme de l'espèce traitée ici.

En 1932, les botanistes Schott et Endlicher créent le genre Cola auquel ils rapportent l'arbre.

Étymologie: le terme de cola a été emprunté à un dialecte d'Afrique de l'Ouest le temne (Sierra Leone, Liberia) où la noix de kola se dit kla[9], gola ou kola[10].

Orthographe : les deux orthographes cola et kola (ou de même colatier et kolatier) sont valides en français[11].

Description[modifier | modifier le code]

Fruit formé de plusieurs cabosses (follicules) boursoufflées contenant des noix de kola (graines)

Cola nitida est un arbre pouvant atteindre 25 m de hauteur et 50 cm de diamètre, à la cime arrondie et au fût court[1].

Les feuilles simples, alternes sont elliptiques rarement oblongues, obovales atteignant 33 x 12 cm, avec un apex acuminé.

Les inflorescences portent des fleurs mâles ou hermaphrodites. La fleur comporte 5-7 sépales blanchâtres ou jaunâtres, veinés de rouge et aucun pétale. Les 20 anthères sont en double couronne autour d'une colonne, avec au centre le gynécée formé de 5 à 7 carpelles, renfermant deux rangées d'ovules[1].

Il y a généralement une profusion de fleurs en juillet et août, au milieu de la saison des pluies, puis des floraisons sporadiques au cours de l'année, sauf en période de sécheresse. Les fruits sont mûrs quatre à cinq mois plus tard[12].

Le fruit est une capsule à 1-5 follicules attachés en étoiles, coriaces ou ligneux, verts à marron, boursouflés (plus que chez C. acuminata), de 10-20 cm de long, à bec bien marqué. Il y a 1 à 10 graines par follicule, entourées d'une fine pellicule beige et sous celle-ci d'un arille blanc, entourant en général de 2 à 4 cotylédons charnus, blancs ou rouges.

Dans la langue commune, un follicule (issu d'un seul carpelle) s'appelle une « cabosse » comme pour le cacao ; on dit aussi à propos des graines que la noix de la « grande kola » (Cola nitida), de couleur blanc-jaunâtre à rouge, se divise en 2 morceaux (« kola demi ») sensiblement plan-convexes, à la différence de la noix de la « petite kola » (Cola acuminata), de couleur rose à rouge, qui se divise qu'en plusieurs morceaux (au moins 4, « kola quart »).

La récolte se fait deux fois par an[13]. Au Cameroun, la grande kola, mûrit entre avril et juin[14] alors que la petite kola porte des fruits mûrs plus tardivement, entre octobre et décembre. En Côte d'Ivoire, l'entrée en production du colatier (C. nitida) intervient sur deux grandes périodes[15]:

  • la petite récolte se produit au cours des mois d'avril-mai
  • la grande récolte a lieu pendant les mois d'octobre-novembre
Clés distinctives de C. nitida et C. acuminata[12]
Cola nitida Cola acuminata
Cabosse boursouflée, incurvée, verte, douce au toucher assez droite, roux, rugueuse au toucher
Graines
noix de kola
deux cotylédons plus que 2 cotylédons, gén. quatre
Récolte d'octobre à décembre d'avril à juin

Distribution[modifier | modifier le code]

Port de l'arbre

Cola nitida est un arbre forestier originaire de l'Afrique de l'Ouest, probablement de la Côte d'Ivoire et du Ghana[1].

Du fait de sa culture, C. nitida s'est étendu vers l'ouest jusqu'au Sénégal et vers l'est via le Nigeria jusqu'au Cameroun et au Congo, aux alentours de 1900[12].

Le colatier a été introduit en Indonésie, aux Antilles, au Brésil, etc.

Usages[modifier | modifier le code]

Le colatier est cultivé d'abord pour ses graines, la « noix de cola », contenue à l'intérieur de la cabosse (follicule). Pour être consommée, la graine est débarrassée de son tégument.

Cabosse avec ses noix à l'intérieur
Les noix débarrassées de leur tégument de couleur crème, prennent la couleur rouge (ou blanc verdâtre) et se fendent en deux cotylédons

Composition[modifier | modifier le code]

La noix de cola de C. nitida est plus riche en caféine (jusqu'à 3.5%) que celle de C. acuminata (2.2%)[16]. La caféine forme une association moléculaire avec des dérivés catéchiques. Sa plus grande richesse en composés phénoliques (contenu phénolique total) lui donne un goût plus amer.

On note aussi la présence de polyphénols, surtout des flavan-3-ols: (+)-catéchol, (-)-épicatéchol et proanthocyanidols dimères du groupe B[17].

La noix de cola renferme[13]

Glucides Protides Eau Lipides Matires minérales Tanins Fibres
30 à 40 % 8 à 12 % 10 à 12 % 0,6 à 8 % 2 à 4 % 3 % 1,4 %

Mastication[modifier | modifier le code]

Les noix de cola fraiches sont mastiquées par de nombreux Africains pour leurs vertus stimulantes, et comme coupe-faim. Elles jouent aussi un rôle important dans les rites et coutumes de la vie sociale.

L'offre de quelques noix à quelqu'un est considérée comme un signe de bienveillance et de politesse. Elles accompagnent mariage, cérémonies funéraires, naissance. Elles sont réputées aphrodisiaques.

Médecine indigène[modifier | modifier le code]

Les feuilles, les fruits et les racines du colatier sont utilisés comme tonique ou contre la dysenterie, la diarrhée[1].

Boissons[modifier | modifier le code]

La noix de cola entre dans la composition de boissons, vin, sirops, bonbons, chocolats et pâtisserie.

À l'origine, le coca-cola en contenait aussi . Suivant son inventeur, Pemberton, sa boisson à l'origine « est composée d'un extrait de feuilles péruviennes de coca, du plus pur des vins et de noix de cola »[18]. Ces temps lointains sont bien révolus. Actuellement, sous le même nom évocateur, on n'y trouve plus que de l'eau gazéifiée, du sucre, du colorant E150d, de l'acide phosphorique E338 (et une longue liste de E), de la caféine et des arômes. [réf. nécessaire]

Culture[modifier | modifier le code]

Les colatiers commencent à produire à l'âge de quatre ans.

Le ravageur responsable de plus de dégâts est le charançon Balanogastris kolae qui attaque fruits et noix aussi bien sur l'arbre, à terre ou pendant le stockage.

La récolte s'effectue avant que les cabosses ne commencent à s'ouvrir. Le paysan monte dans l'arbre avec un long bâton armé d'une lame pour arracher les cabosses. Il ramasse aussi les fruits tombés à terre. Le rendement moyen d’un hectare de colatiers est de 5 tonnes

L'écabossage consiste à extraire les noix de la cabosse à l'aide d'un couteau ou d'une machette.

L'étape suivante est le dépulpage: elle consiste à enlever la pulpe qui couvre les noix à l'aide d'un objet tranchant. Pour faciliter l'opération, on laisse au préalable, macérer les noix dans de l'eau pendant quelques jours[19].

Pour bien conserver les noix à l'état frais, elles sont traitées avec un insecticide (Décis 12.5 DC). Elles sont conservées à l'abri de la lumière, dans un panier tapissé de feuilles d'attiéké (Thaumatococcus) ou en sac plastique.

Notes[modifier | modifier le code]

Références[modifier | modifier le code]

  1. a b c d et e O. Eyog Matig, O. Ndoye, J. Kengue et A. Awono (dir.), Les fruitiers forestiers comestibles du Cameroun, Rome, IPGRI / CIFOR / IRAD, , 204 p. (ISBN 978-92-9043-707-9, lire en ligne [PDF]), p. 80-81.
  2. Jean Leon, Historiale description de l'Afrique, tierce partie du monde, , 413 p. (présentation en ligne, lire en ligne), p. 40.
  3. (it) Odoardo Lopez, Relatione del reame di Congo et delle circonvicine contrade, tratta dalli scritti e ragionamenti di Odoardo Lopez portoghese per Filippo Pigafetta,…, Rome, Bartolomes Grassi, , 82 p. (présentation en ligne, lire en ligne), p. 41.
  4. Auguste Chevalier et Émile Perrot, Végétaux utiles de l'Afrique tropicale française, vol. 6 : Les Kolatiers et les noix de Kola, Paris, éd. Augustin Challamel, , 483 p. (lire en ligne).
  5. Filippo Pigafetta et Duarte Lopes, Le Royaume de Congo & les contrées environnantes, éds. Chandeigne, (1re éd. 1591) (lire en ligne).
  6. {{BHL}} : numéro de référence (359209#page/628) non numérique
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  7. Étienne Pierre Ventenat, Jardin de La Malmaison, t. 2, Paris, impr. de Crapelet, (lire en ligne).
  8. Aurélie Tricoulet, Les sodas à base de cola : des recettes secrètes au service de la médecine, à consommer avec modération (thèse, Université de Bordeaux, UFR des Sciences Pharmaceutiques), , 232 p. (lire en ligne [PDF]), p. 50.
  9. (en) Ernest Small, Top 100 Food Plants, NRC Research Press, , 636 p. (lire en ligne), p. 199.
  10. (en) Paul Lovejoy, chap. 5 « Kola nuts, The 'coffee' of central Sudan », dans Jordan Goodman, Andrew Sherratt & Paul E. Lovejoy, Consuming Habits: Drugs in History and Anthropology, Routledge, , 304 p. (lire en ligne), p. 100.
  11. « Cola », sur cnrtl.fr (consulté en ).
  12. a b et c (en) Emmanuel Tachie-Obeng et Nick Brown, « Cola nitida & Cola acuminata, A State of Knowledge Report undertaken for The Central African Regional Program for the Environment », dans Laurie E. Clark & Terry C.H. Sunderland, The key non timber forest products of Central Africa: state of the knowledge, University of Oxford, USAID, (lire en ligne [PDF]), p. 7-8.
  13. a et b Mickaël Albert, La noix de kola (Cola sp., Sterculiacées) (thèse, Université de Nantes, faculté de pharmacie), (lire en ligne).
  14. « Le Kolatier Cola acuminata et Cola nitida - noix de kola » [PDF], sur doc-developpement-durable.org, World Agroforestry Centre (consulté en ).
  15. J. Aloko-N'Guessan, « Cola, espace et sociétés : étude de géographie sociale et culturelle de la filière de la cola au marché de Gros Baouké », rev. CAMES, série B (Université de Cocody, Abidjan, Côte d'Ivoire), vol. 2,‎ , p. 25-35 (lire en ligne [PDF]).
  16. (en) Lim T.K., Edible Medicinal And Non Medicinal Plants, vol. 3 : Fruits, Springer Science & Business Media, , 898 p. (lire en ligne), p. 171.
  17. Bruneton, J., Pharmacognosie - Phytochimie, plantes médicinales, 4e éd., revue et augmentée, Paris, Tec & Doc - Éditions médicales internationales, , 1288 p. (ISBN 978-2-7430-1188-8)
  18. William Reymond, Coca-Cola, L'enquête interdite, Flammarion, , 432 p. (ISBN 9782080687647, présentation en ligne).
  19. Hyacinthe Legnate, Antoine Yapo et al., « Bien cultiver le colatier en Côte d'Ivoire » [PDF], Centre National de Recherche Agronomique (CNRA) de Côte d'Ivoire (consulté en ).

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Liens externes[modifier | modifier le code]