Cryptogamie, Mycologie, 2011, 32 (3): 255-276
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Redécouverte et typification des champignons
de la région de Montpellier
illustrés par Michel-Félix Dunal et Alire Raffeneau-Delile
Pierre-Arthur MOREAU a, Pascal HÉRIVEAU b, Véronique BOURGADE c,
Jean-Michel BELLANGER d, Régis COURTECUISSE a,
Françoise FONS e & Sylvie RAPIOR e
a UE
7144. Laboratoire de Botanique. Faculté des Sciences pharmaceutiques
et biologiques. Université Lille Nord de France. F-59006 Lille cedex
email : pierre-arthur.moreau@univ-lille2.fr (auteur correspondant)
b Rue
des Combats de Kervernen. F-56930 Pluméliau
c Herbier
MPU. Pôle Patrimoine scientifique. Université Montpellier 2.
Institut de botanique. 163 rue Auguste Broussonnet. F-34090 Montpellier.
veronique.bourgade@univ-montp2.fr
d Rue
de la Poste. F-34830 Clapiers
e Laboratoire
de Botanique, Phytochimie et Mycologie, UMR 5175 CEFE
Faculté de Pharmacie. Université Montpellier 1. BP 14491.
15 avenue Charles Flahault. F-34093 Montpellier cedex 5
Résumé – Successeurs d’A.-P. de Candolle à Montpellier, M.-F. Dunal (1789-1856) et
A. Raffeneau-Delile (1778-1850) ont laissé une importante iconographie inédite des
champignons de cette région. Les investigations conduites au Pôle Patrimoine scientifique
de l’Université Montpellier 2, installé à l’Institut de Botanique, ont permis la redécouverte
et l’inventaire de ces collections méconnues. Dix espèces ont été publiées comme nouvelles
par É. Boudier, J. F. Lagarde et J. de Seynes à partir de ces documents. Chacune est
présentée et lectotypifiée ici : Agaricus concolor Delile ex De Seynes, Ag. convivarum
Dunal ex De Seynes, Marasmius delilei De Seynes, Panaeolus regis De Seynes, Morchella
dunalii Boud., Peziza atroviolacea Delile ex De Seynes, P. cynocopra Dunal ex De Seynes,
P. viridifusca Delile ex De Seynes, Plicaria planchonis Dunal ex Boud. et A. sulcatus Dunal
ex De Seynes. Deux variétés publiées par de Seynes sont invalides : Agaricus sericeus var.
infundibuliformis De Seynes et A. translucens var. squamulosus De Seynes. Un épitype est
désigné pour Ag. concolor. Les combinaisons suivantes sont introduites : Tricholoma
concolor (Delile ex De Seynes) P.-A. Moreau, J.-M. Bellanger et Courtec., T. concolor
f. bisporum (Bon) P.-A. Moreau et Courtec. et Marasmiellus delilei (De Seynes)
P.-A. Moreau et Courtec. (synonyme de M. trabutii (Maire) Singer).
Basidiomycota / diversité fongique / taxinomie / Marasmiellus delilei / Marasmius trabutii /
Tricholoma concolor / Tricholoma psammopus
Abstract – As successors of A.-P. de Candolle in Montpellier (France), M.-F. Dunal (17891856) and A. Raffeneau-Delile (1778-1850) let a consequent unpublished iconography of
fungi growing in this area. Investigations at the “Pôle Patrimoine scientifique” of the
University Montpellier 2, based at the Institute of Botany, allowed the rediscovery and
256
P.-A. Moreau, P. Hériveau, V. Bourgade et al.
inventory of these forgotten collections. Ten species were published as new by É. Boudier,
J. F. Lagarde and J. de Seynes based on these documents. Each of them is listed and
lectotypified : Agaricus concolor Delile ex De Seynes, Ag. convivarum Dunal ex De Seynes,
A. sulcatus Dunal ex De Seynes, Marasmius delilei De Seynes, Panaeolus regis De Seynes,
Morchella dunalii Boud., Peziza atroviolacea Delile ex De Seynes, P. cynocopra Dunal ex
De Seynes, P. viridifusca Delile ex De Seynes, and Plicaria planchonis Dunal ex Boud. Two
varieties published by de Seynes are invalid : Agaricus sericeus var. infundibuliformis De
Seynes et A. translucens var. squamulosus De Seynes. An epitype is designed for Ag.
concolor. The following combinations are introduced : Tricholoma concolor (Delile ex
De Seynes) P.-A. Moreau, J.-M. Bellanger et Courtec., T. concolor f. bisporum (Bon)
P.-A. Moreau et Courtec., and Marasmiellus delilei (De Seynes) P.-A. Moreau et Courtec.
(synonym of M. trabutii (Maire) Singer).
Basidiomycota / Fungal diversity / Taxonomy / Marasmiellus delilei / Marasmius trabutii /
Tricholoma concolor / Tricholoma psammopus
INTRODUCTION
La mycologie à Montpellier au XIXe siècle
Au début du XIXe siècle, alors qu’une solide tradition botanique
linnéenne s’était instaurée à Montpellier grâce aux botanistes Antoine Goüan
(1733-1821) et François Boissier de Sauvages de la Croix (1706-1767), l’arrivée
du botaniste genevois Augustin-Pyramus de Candolle (1778-1841) au poste de
directeur du Jardin des plantes de Montpellier en 1808 fut à l’origine d’un
renouveau de la pensée naturaliste, inspiré des Lumières et héritier de la
« classification naturelle » d’Antoine-Laurent de Jussieu (1748-1836). Candolle,
déjà associé à Jean-Baptiste Monnet de Lamarck (1744-1829) pour la 3e édition
de la Flore Française dont il avait rédigé la partie cryptogamique (Lamarck et
Candolle, 1805), publia ses observations mycologiques réalisées à Montpellier
dans le 5e tome (6e volume) de ce célèbre ouvrage (Candolle, 1815). Il y recruta
un illustrateur de talent, Toussaint-François Node-Véran (1773-1852), et forma
un disciple, Michel-Félix Dunal (1789-1856), fils d’un banquier de la région et
botaniste minutieux.
Au départ de Candolle en 1816, le poste de directeur du Jardin des
Plantes fut assuré provisoirement par Dunal, puis échut en 1819 à Alire
Raffeneau-Delile (dit Delile) (1778-1850), médecin né à Versailles, fondateur du
Jardin botanique du Caire lors de la campagne d’Égypte, nommé professeur
d’Histoire naturelle à la Faculté de médecine de Montpellier cette même année
1819. Dunal se retira alors des activités universitaires, puis, après la réouverture
d’une chaire de botanique à la Faculté des sciences de Montpellier, obtint ce poste
en 1829, puis devint doyen de la faculté en 1830.
Aussi bien Delile que Dunal s’intéressèrent aux champignons, en marge
de leurs nombreuses activités botaniques et administratives, et tous deux firent
illustrer leurs récoltes notamment par T.-F. Node-Véran et ses fils. Ils les
identifiaient dans la tradition nomenclaturale de Candolle (1815) et Duby (1830),
en se référant parfois à Persoon (1801) ou Bulliard (1791-1812). Delile laissa de
nombreuses notes descriptives manuscrites, des croquis macro- et microscopiques,
et les aquarelles correspondantes des Node-Véran, regroupées en 334 dossiers
Redécouverte et typification des champignons de la région de Montpellier
257
(Raffeneau-Delile, 1820-1840). L’herbier Delile fut racheté en 1851 par le
Conservatoire botanique du Jardin des plantes et intégré à l’herbier général par
Aimant Touchy (1792-1875), conservateur au Conservatoire de la Faculté de
médecine depuis 1840 (Germain de Saint-Pierre et Schoenefeld, 1857 : 677).
Touchy archiva lui-même un grand nombre de champignons sans doute identifiés
par Delile, certaines collections correspondant aux spécimens illustrés dans son
Iconographie inédite (Raffeneau-Delile, 1820-1840). Dunal fit également dessiner
par les Node-Véran 341 aquarelles de champignons sur papier (Dunal, 18331843), ainsi que 27 vélins représentant 34 collections (nos 940 à 967 ; Node-Véran,
1809-1852) destinés à illustrer un projet, resté inabouti, de Flore des champignons
de Montpellier. Les noms apposés par Delile et Dunal sur leurs planches, lorsqu’ils
ne sont pas nouveaux, sont issus de la Flore française (Candolle, 1815 ; Duby,
1830) et dénotent une profonde méconnaissance de la systématique moderne
initiée par Fries (1821) en n’accordant que peu d’importance à des caractères
pourtant attentivement observés comme la couleur de la sporée (ou des lames).
Tous deux, remarquables observateurs, ont laissé des études microscopiques très
pertinentes de certaines de leurs trouvailles (dont des coupes d’hyménium
montrant asques ou basides, cystides…), mais ne leur accordaient qu’une valeur
descriptive, sans perspective de classification.
Ni Delile ni Dunal ne publièrent leurs observations sur les champignons
de Montpellier. Jules-Émile Planchon (1823-1888), élève et récolteur de Dunal,
puis à son tour directeur du Jardin des plantes en 1881, transmit cette tradition à
son fils Louis-David Planchon (1858-1915), qui en consigna quelques éléments
dans sa thèse de doctorat en médecine (Planchon, 1883). Mais c’est surtout à
travers la thèse de doctorat ès sciences naturelles de Jules de Seynes (1833-1912),
lui-même élève de J.-É. Planchon et disciple du célèbre anatomiste Joseph-Henri
Léveillé (1796-1870), l’un des pionniers de l’étude microscopique des
champignons, que ces planches et d’autres documents contemporains (notamment
les spécimens d’herbier archivés par Dunal et par Touchy, une collection de
champignons en cire de Dumas, et une collection d’aquarelles de Roubieu) furent
analysés pour la première fois. La thèse de de Seynes (1863) ne traitait cependant
qu’une partie des « Agarics » (correspondant aujourd’hui aux Agaricales) ; il
publia par la suite des notes sur les « Pézizes » incluant les observations de Delile
sur plusieurs espèces inédites (1886).
Par la suite, Boudier (1887) analysa les planches d’Ascomycota de Dunal,
en extrayant deux espèces qu’il jugea inédites. Boyer et Jaczewsky (1894), à
l’occasion d’un congrès de la Société botanique de France à Montpellier,
proposèrent un catalogue synthétique des champignons de Montpellier reprenant
une grande partie de ces données, sans toutefois distinguer les informations
collectées par eux de celles reprises de de Seynes ou de Boudier.
À J.-É. Planchon succéda Charles Flahault (1852-1935), dont les
nombreux travaux botaniques ne traitent guère des champignons, mais son très
proche collaborateur, Joannès Fulcrand Lagarde (1866-1934), préparateur à
l’École de pharmacie, les étudia de façon approfondie, en correspondant avec de
Seynes et Boudier, et en proposant à son tour (Lagarde, 1901) une relecture
moderne des planches de Delile et de Dunal, avec la description de quelques
nouvelles espèces extraites de ces planches inédites.
Depuis Lagarde, il n’existe plus aucune mention de ces iconographies dans
la littérature. À l’exception de la reproduction de deux planches de Delile par
Lagarde (1901) de huit vélins par Rioux (1994) et d’une brève présentation
de nos propres recherches (Moreau et al., 2009), ces nombreuses illustrations
demeurent inédites et inconnues de la communauté mycologique.
258
P.-A. Moreau, P. Hériveau, V. Bourgade et al.
De tous ces documents et spécimens nous sont parvenus les 334 dossiers
de Delile, classés et étiquetés de la main de J. de Seynes (Seynes, 1895) et
regroupés en sept volumes cartonnés, les planches de l’iconographie de Dunal
reliées en un unique volume, et enfin la partie mycologique de l’Herbier général
de l’Université Montpellier 2 (MPU), dans lequel sont rassemblés, dans l’ordre
systématique que leur attribua de Seynes, les exsiccata mis en herbier par Dunal
(ancien Herbier de la Faculté des sciences), Delile et Touchy (ancien Herbier de
la Faculté de médecine, intégré au précédent en 1851).
Précieusement conservés au Pôle Patrimoine scientifique de l’Université
Montpellier 2, le volume des Champignons de Dunal et les sept classeurs
regroupant les fascicules de l’iconographie de Delile ont pu être consultés en
détail. Nous proposons ici une révision des documents identifiés comme ayant une
valeur nomenclaturale, en tant que matériel original des espèces publiées
validement par de Seynes (1863, 1886), Boudier (1887) et Lagarde (1901).
L’Iconographie des champignons de Montpellier par A. Delile
Regroupées en tomes cartonnés et numérotés de 1 à 7, intitulés
« A.R. Delile. Iconographie des champignons de Montpellier peints par NodeVéran 1820-1840. Institut de botanique de Montpellier », les aquarelles et notes
descriptives sont classées par espèces en 334 chemises de facture récente1, sur
chacune desquelles a été recollée une étiquette imprimée, intitulée « Delile –
Icones Fungorum ». Sur ces étiquettes est reporté d’une écriture constante et
soignée un nom d’espèce attribuable par recoupement d’écritures et de textes à
J. de Seynes, qui se chargea de les identifier et de les classer (Seynes, 1895).
Les fiches descriptives sont écrites de la main de Delile, d’une écriture
variable, tantôt en français, tantôt en sténographie, précisant généralement le lieu,
la date et les circonstances de la récolte ; parfois y figurent également une étude
microscopique des spores ou de la structure du carpophore, et d’autres notes
ajoutées sur des récoltes ultérieures rapportées à la même espèce. Peu de notes
sont reportées sur les aquarelles elles-mêmes.
Les aquarelles (Roumeguère, 1887, en dénombre 236) sont presque
toutes attribuables aux Node-Véran : dans la plupart des cas l’auteur n’est pas
précisé, mais quelques factures dans le fascicule final n° 334, et des notes çà et
là dans les textes, permettent d’attribuer avec certitude certaines planches à
T.-F. Node-Véran ou à ses trois fils (Alexandre, Charles et François-Saint-Ange).
Au moins trois aquarelles signées « Fannie » semblent dues à Stéphanie, la propre
fille de Delile ; elles ont été réalisées en 1836, un an avant son décès prématuré à
l’âge de vingt ans. Le fascicule n° 323 contient des fac-similés de huit dessins
inédits de Candolle, dont les originaux sont actuellement inconnus, sans autre
commentaire que le nom de l’espèce dans la nomenclature de Candolle (1815).
Enfin les pochettes nos 324, 325, 330, 331 concernent des hépatiques et algues
(respectivement : Riccia, characées, Rivularia, Ulva), la pochette 329 des
cyanobactéries (Nostoc), les pochettes nos 296, 302 à 310 des Mycetozoa.
De Seynes, qui a consulté ces aquarelles alors qu’elles étaient en
possession de Nicolas Joly, élève de Delile et professeur de zoologie à la Faculté
des sciences de Toulouse (avant d’être rachetées par l’Institut de botanique de
Montpellier en 1895 ; Seynes, 1895), s’est chargé du classement de ces documents
1. Cette restauration effectuée au cours des années 2000 n’a consisté qu’en un remplacement des chemises
d’origine, l’ordre des chemises et de leur contenu ne semble pas avoir été modifié.
Redécouverte et typification des champignons de la région de Montpellier
259
vraisemblablement en désordre, rassemblant – parfois avec doute – notes et
aquarelles correspondantes ; on trouve ainsi réunies dans une même chemise des
récoltes différentes représentant parfois des espèces distinctes, mais assimilées ou
confondues par de Seynes. Ses commentaires détaillés sur quelques espèces qu’il
jugea inédites, accompagnés d’une diagnose latine, sont reportés à la suite des
notes de Delile, parfois sur feuille libre dans la chemise correspondante ; certains
de ces commentaires sont datés de 1899. Lagarde (1901) releva parmi ces notes
deux taxons signalés par de Seynes comme inédits, qu’il publia en recopiant la
diagnose latine de de Seynes.
Les dessins inédits de champignons par M.-F. Dunal
Bien que l’œuvre mycologique de Dunal soit restée confidentielle, elle
est cependant riche de nombreuses notes et d’une belle collection de dessins de
champignons. Avec son ami et ancien élève Frédéric de Girard (1810-1851), ils
avaient eu l’idée, pour leur « Flore de Montpellier », de commencer par les plantes
cryptogames, d’où les études entreprises sur les champignons. Dunal fit
reproduire, par les Node-Véran, des champignons des environs de Montpellier,
récoltés par lui-même ou par d’autres collecteurs, dont F. de Girard ou
J.-É. Planchon. Accompagnées pour quelques-unes de notes manuscrites,
347 planches réalisées entre 1833 et 1843 sont réunies dans un fort volume. Les
noms des espèces ont été généralement apposés au crayon, d’une écriture
attribuable à Dunal lui-même, et la plupart ont été raturés ou corrigés plusieurs
fois de la même main. Dunal précise généralement une référence à Duby (1830),
notée « Dub. » suivie du numéro de l’espèce jugée la plus proche dans la « Flore
de France ». D’autres écritures, au crayon ou à l’encre, suggèrent une
identification plus contemporaine, qui suit la nomenclature de Patouillard (1887) ;
la plupart de ces noms actualisés sont suivis de la mention « sec. Boudier », et
nous paraissent attribuables avec réserves à J. Lagarde, qui aurait pu les apposer
d’après les indications de Boudier. Ainsi que de Seynes (1863) et Boudier (1887)
l’ont noté, la plupart des noms apposés par Dunal sont inédits ; certains sont
cependant repris par Delile dans sa propre Iconographie.
Le volume contient des Ascomycota pour les planches 6 à 39 (révisées
par Boudier, 1887) et des Basidiomycota pour les planches 40 à 327 et 334 à 342
(dont 150 espèces d’Agarics répartis en 194 planches d’après Seynes, 1863). En
marge des champignons, les planches 1 à 5 représentent des hépatiques (Riccia
spp.), les planches 343, 344 et 347 des algues et lichens, les planches 328 à 333 des
Mycetozoa, et les planches 345 et 346 des cyanobactéries (Nostoc). Les planches
307 à 314 sont des reproductions de dessins originaux de Candolle, correspondant
à ceux du dossier n° 323 de l’iconographie de Delile.
MATÉRIEL ET MÉTHODES
Les collections complètes des aquarelles et vélins ont été consultées au
Pôle Patrimoine scientifique (PPS) de l’Université Montpellier 2 et inventoriées
(V.B., J. Mathez et P.-A.M.). L’herbier mycologique général MPU a été inventorié
et révisé (Agaricales, Boletales et Pezizales), les spécimens cités ont été étudiés et
décrits ; les observations microscopiques ont été effectuées sur coupes fines réalisées
à l’Herbier MPU et étudiées au Laboratoire de botanique de l’Université Lille 2
(P.-A.M).
260
P.-A. Moreau, P. Hériveau, V. Bourgade et al.
Les descriptions microscopiques ont été réalisées sur microscope optique
Nachet Andromede 018, sur coupes d’exsiccata regonflées dans une solution
d’hydroxyde de potassium (KOH, 5 %) puis observées dans la même solution ou
dans le rouge congo ammoniacal (solution aqueuse d’ammoniaque à 10 %), ou
montées directement dans le réactif de Melzer (solution aqueuse d’iode 0,5 g,
iodure de potassium 1,5 g et chloral hydraté 20 g pour 22 cl d’eau).
TAXINOMIE
Analyse des taxons fondés sur les planches de Delile et Dunal. Les noms
sont cités ci-dessous d’après leur basionyme, classés par ordre alphabétique
d’épithète.
I. Basidiomycota
I.1. Agaricus concolor Delile ex De Seynes, Fl. mycol. Montpellier : 143. 1863 Fig. 1A
≡ Collybia concolor (Delile ex De Seynes) Gillet, Hyménomycètes : 314. 1876.
Lectotype désigné ici : aquarelle du dossier n° 24 de l’iconographie
Raffeneau-Delile (1820-1840) : « Jacou2, 3 décembre 1824 », Pôle Patrimoine
scientifique, Université Montpellier 2.
Autre matériel original étudié : aquarelle du dossier n° 24 de
l’iconographie Raffeneau-Delile (1820-1840), « Fontfroide3, décembre 1821 » et
novembre 1844 ; aquarelle n° 236 de l’iconographie Dunal fig. 2, « Fontfroide,
10 décembre 1836 ». Aucun exsiccatum n’a été trouvé dans l’herbier mycologique
général MPU.
Observations : les planches réalisées tant pour Dunal que pour Delile
figurent sans ambiguïté un Tricholoma fréquent dans les pinèdes calcaires des
environs de Montpellier, habituellement identifié à T. psammopus (Kalchbr.)
Quél. Bien que la planche de Dunal n° 236 soit de qualité supérieure, de Seynes
(1863 : 143) se fonde explicitement sur les notes de Delile, dont il choisit
également le nom, aux dépens du nom choisi par Dunal pour ses propres
collections (« Agaricus ochraceo-rufus », corrigé plus tard en « Ag. concolor », sur
la planche de Dunal).
L’absence de reproduction de ces planches dans la littérature a rendu la
description transcrite par de Seynes très difficile à interpréter. L’espèce est citée
par Gillet (1874 : 314) qui reprend la description de de Seynes et place Ag.
concolor dans le genre Collybia, auprès de C. maculata et C. semitalis, suivi par
Quélet (1886 : 28). Corbière (1929 : 69) qui semble être le seul à reprendre ce nom
dans la littérature du XXe siècle (comme « Collybia concolor Delarb. », en se
référant à la description de Gillet, loc. cit.), l’interprète à la suite de celui-ci
comme une variété « à teinte alutacé pâle du chapeau » de C. maculata.
2. Parc de Jacou (Hérault), à 8 km au nord-est de Montpellier.
3. Commune de Montferrier-le-Lez, au nord de Montpellier. Une partie de cette forêt (« Fontfroide-le-Bas »)
était la propriété de la famille Leenhardt ; Edmond Leenhardt fut l’architecte de l’Institut de botanique de
Montpellier.
Redécouverte et typification des champignons de la région de Montpellier
261
Fig. 1. A. Agaricus convivarum, lectotype (Node-Véran, Vélin n° 963). B. Peziza atroviolacea,
lectotype (Raffeneau-Delile 1820-1840, pl. 295, Tonnelle). C. Peziza viridifusca, lectotype
(Raffeneau-Delile 1820-1840, pl. 300, Grammont, 30 nov. 1828). Reproductions A : original
réduit de 70 % ; B-C : grandeur nature. Avec l’autorisation du Pôle Patrimoine scientifique de
l’Université Montpellier 2.
262
P.-A. Moreau, P. Hériveau, V. Bourgade et al.
Lagarde (1901 : 241), cite Collybia concolor d’après Delile « à Jacou et
Fontfroide », mais aussi sur de nouvelles localités : « parcs de Château-Bon, de
Caunelle, de Lavalette, hiver et printemps ». Par ailleurs il cite T. psammopus des
environs de Montpellier (sur la base de citations de Dunal : « bois de Fontfroide,
de Boussairolles, de Flaugergues », peut-être redéterminées par Boudier), ce qui
laisse planer le doute sur son interprétation de C. concolor. Par ailleurs, Bon
(1976 : 219) cite une récolte de l’herbier Boudier (PC), sous le nom « Tricholoma
polyphyllum, Montpellier, 1900, leg. Lagarde », qu’il rapporte à T. psammopus.
L’interprétation de ces planches de Delile et de Dunal est pourtant
aisée : le chapeau « on ne peut plus feutré » exclut un Collybia et renvoie au genre
Tricholoma, sous-section Imbricata.
Dans l’état actuel de la connaissance de ces taxons, Ag. concolor est
considéré comme synonyme de T. psammopus, et nous proposons donc de
reconnaître ce taxon au rang spécifique, et de l’épitypifier par une récolte récente,
effectuée à quelques kilomètres de la station originale, dont nous fournissons ciaprès une description complète.
Tricholoma psammopus (Kalchbr.) Sacc., décrit dix ans après Ag.
concolor (Kalchbrenner, 1873), est originellement récolté sous mélèzes. Les
récoltes sous pins ont déjà été distinguées de T. psammopus par les auteurs
contemporains, comme forme : T. psammopus f. bisporum Bon (Bon, 1984), ou
variété : var. macrosporum Noordel. et Mort. Chr. (Christensen et Noordeloos,
1999). Nous avons comparé entre elles nos récoltes pinicoles et laricicoles, ainsi
que l’holotype de T. psammopus f. bisporum. À l’exception de ce dernier, à spores
naturellement plus volumineuses, toutes nos récoltes ont des dimensions sporales
sensiblement identiques. En revanche, les récoltes pinicoles présentent un
renflement net des extrémités des hyphes des revêtements, déjà observé par
Noordeloos et Christensen (2003) sur la var. macrosporum, et aussi observées sur
la récolte bisporique décrite par Bon (1984). L’habitat et la forme des hyphes des
revêtements incitent donc à rechercher d’autres différences d’ordre anatomique
ou moléculaire, et nous n’excluons pas qu’une étude plus approfondie permette
de distinguer deux taxons et de conserver le nom de T. psammopus pour les
récoltes laricicoles.
Tricholoma rufulum R. Heim, décrit des pinèdes de Catalogne, est un
autre synonyme méconnu de cette espèce (Bon, 1976 : 220), avec les mêmes
petites spores : « 6-7 × 4,3-4,6 µm » (Heim et al., 1934 : 105).
I.2. Agaricus convivarum Dunal ex De Seynes, Fl. mycol. Montpellier : 131. 1863 Fig. 1B
≡ Pleurotus convivarum (Dunal ex De Seynes) Lagarde, Bull. Soc. Mycol.
France 17 : 231. 1901.
Lectotype désigné ici : vélin de la Faculté des sciences n° 963 (non daté),
T.-F. Node-Véran, Pôle Patrimoine scientifique, Université Montpellier 2.
Autre matériel original étudié : deux aquarelles regroupées dans le dossier
n° 157 de l’iconographie Raffeneau-Delile (1820-1840), l’une « Lyon, décembre
1826, chez M. Balbis4 »), l’autre « H.M.5, agaric du creux de marronnier,
décembre 1831 », toutes deux ré-étiquetées « Pl. convivarum Dunal ». Aucun
exsiccatum correspondant n’a été trouvé dans l’Herbier mycologique général
MPU.
4. Giovanni-Batista Balbis (1765-1831) était alors directeur du Jardin botanique municipal de Lyon.
5. Hortus Monspeliensis (Jardin des Plantes de Montpellier).
Redécouverte et typification des champignons de la région de Montpellier
263
Observations : de Seynes (1863 : 131) valide le nom d’Ag. convivarum, en
l’attribuant (avec doute) à Dunal, et en faisant référence à trois illustrations : le
très beau vélin exécuté par Node-Véran pour Dunal (n° 963), et deux aquarelles
dans le dossier n° 157 de l’iconographie Delile, l’une d’elles (Montpellier,
décembre 1831) reproduite par Lagarde (1901, pl. IX fig. 2). Ces illustrations
représentent, comme de Seynes (1863 : 131) et Lagarde (1901 : 231) le
soupçonnaient, des aspects monstrueux de Pleurotus ostreatus (Jacq. : Fr.) Fr.
développés dans des conditions anormales. Lagarde (1901 : 231) signale
également P. convivarum sur la tannée.
Le nom original est clairement attribué à Dunal dans l’Iconographie de
Delile. De Seynes insiste sur la qualité du vélin, que nous choisissons donc comme
lectotype de ce taxon.
I.3. Marasmius delilei De Seynes in Lagarde, Bull. Soc. mycol. France 7 : 223. 1901
Figs 2A, 3A
= Agaricus amadelphus var. a. alba stipite nigro De Seynes, Fl. mycol. des
environs de Montpellier et du Gard : 138. 1863 (invalide: ICBN, art. 24.1).
= Agaricus scirpi-holoscheni Delile in sched., in herb. (MPU).
Lectotype désigné ici : « Maurin6, Scirpus holoschenus, novembre 1837 »,
sept basidiomes en bon état de conservation (MPU, herbier mycologique
général).
Autre matériel original étudié : « 23. Plage à l’embouchure du Lez,
21 décembre 1824, petit agaric un peu plus grand que l’autre, dont les feuillets
sont plus nombreux. Sur les tiges des joncs à leur base », huit basidiomes dont un
détérioré (MPU, herbier mycologique général) ; dossier n° 120 de l’iconographie
Raffeneau-Delile (1820-1840), Pôle Patrimoine scientifique, Université
Montpellier 2, contenant des notes détaillées de Delile et de de Seynes, ainsi que
l’aquarelle publiée par Lagarde (1901) et reproduisant le lectotype.
Observations : l’heureuse redécouverte par M.-J. Mauruc des deux
planches d’exsiccata de M. delilei égarées dans l’herbier phycologique général de
MPU n’a pu que confirmer l’identité de ce taxon avec le « classique »
Marasmiellus trabutii (Maire) Singer, ce que laissait facilement deviner la planche
de Delile reproduite par Lagarde (1901). Il est possible que ces échantillons
n’aient jamais été vus par les différents mycologues s’étant succédé à Montpellier :
au contraire de diverses planches d’herbier et des Icones de Dunal et Delile, les
seules écritures sur ces planches sont celles de Delile lui-même ; aucune
actualisation du nom n’y figure. Néanmoins de Seynes (1863, fig. 4) dessine bien
deux spores de son « Agaricus amadelphus », mais comme il signale également des
récoltes personnelles (« abonde dans les marais de la Camargue »), ces spores
peuvent parfaitement provenir d’autres spécimens que ceux cités ici. Elles sont
néanmoins concordantes avec nos observations sur le lectotype (fig. 3B).
L’herbier de Seynes, légué par ses enfants à l’École supérieure de Pharmacie de
Paris à la mort de celui-ci (Lutz, 1914 : 212), semble avoir été perdu ; aucune de
ses collections n’a été conservée à MPU.
Marasmius delilei a échappé à l’attention des monographes du XXe siècle
(Bon, 2004 ; Antonín et Noordeloos, 1993, 2010 ; etc.) ; il n’est cité que par
Bataille (1918 : 79), qui, ne s’intéressant qu’aux espèces connues d’Europe, ne
mentionne pas ses synonymes, alors connus seulement de Tunisie : Clitocybe
6. Cette localité proche de Montpellier est également la localité originale d’Agaricus dunalii DC. (Lamarck et
Candolle, 1815 : 47), où sont signalés les « prés marécageux » propres à Marasmius delilei.
264
P.-A. Moreau, P. Hériveau, V. Bourgade et al.
Fig. 2. A. Agaricus concolor, lectotype (Raffeneau-Delile 1820-1840, pl. 24, Jacou, 3 déc. 1824).
B. Agaricus concolor, épitype (coll. JMB2010110701, LIP), photo J.-M. Bellanger. C. Marasmius
delilei, lectotype (Maurin, nov. 1837, MPU), photo P.-A. Moreau. D. Agaricus sulcatus, lectotype
(Dunal 1833-1843, pl. 117). E. Peziza cynocopra, lectotype (Dunal, 1833-1843, pl. 16, Lattes,
12 déc. 1841). F. Morchella dunalii, lectotype (Dunal, 1833-1843, pl. 39, Montpellier, 10 mars
1843). Reproductions A et B : original réduit de 25 % ; C-E : grandeur nature. Avec
l’autorisation du Pôle Patrimoine scientifique de l’Université Montpellier 2.
Redécouverte et typification des champignons de la région de Montpellier
265
caespitosus Pat. (Patouillard, 1909, illégit.) et Marasmius trabutii Maire (Maire,
1909). C’est pourtant ce dernier nom qui, repris par les principaux ouvrages
monographiques « modernes » (Singer, 1951 ; Kühner et Romagnesi, 1953 ; etc.),
a été en usage depuis cette période.
Bien que la définition actuelle du genre Marasmiellus soit appelée à
changer dans un proche futur (Mata et al., 2004), dans l’attente de nouvelles
données phylogénétiques sur ce groupe d’espèces nous proposons la combinaison
nouvelle dans ce genre ci-après.
I.4. Panaeolus regis De Seynes in Lagarde, Bull. Soc. mycol. France 7 : 209. 1901
= Agaricus rotula Delile in sched., Iconographie des Champignons de
Montpellier n° 147 (inéd.).
Lectotype désigné ici : aquarelle du dossier n° 147 de l’iconographie
Raffeneau-Delile (1820-1840), « Montpellier, jardin du Roi, dans les platesbandes de l’École forestière, Nov. 1821 et Sept. 1825 », Pôle Patrimoine
scientifique, Université Montpellier 2 ; les trois spécimens (planche VIII, 1a-1c in
Lagarde, 1901) correspondent à la récolte du 28 novembre 1821. Aucun
exsiccatum correspondant n’a été trouvé dans l’herbier mycologique général
MPU.
Observations : les trois spécimens de la planche de Delile nous semblent
représenter Psathyrella spadiceogrisea (Schaeff. : Fr.) Maire, typiques par le pied
radicant et le chapeau bassement convexe, plus originaux par les cannelures
radiales du chapeau délimitant une sorte de calotte discale. La planche lectotype
a été publiée par Lagarde (1901 : pl. VIII fig. 1a-1c), qui recopiait les notes
manuscrites laissées par de Seynes (5 août 1899) dans le dossier n° 147 de
l’Iconographie de Delile.
D’après la disposition et le style des spécimens sur la planche originale,
tous semblent avoir été dessinés le même jour ; la description de Delile est datée
du 28 novembre 1821, la seconde récolte mentionnée par de Seynes étant
seulement citée par une note tardive ajoutée en dessous : « J’ai retrouvé ce
champignon parfaitement semblable dans le jardin aux serres de l’école forestière
fin de septembre 1825 après la pluie me promenant un jour avec MM. la Follerie
et Double ». Le spécimen en coupe illustré par Lagarde (1901) sur la même
planche (fig. 1d) ne figure pas dans la collection Delile, malgré cela la silhouette
est conforme et les lames largement adnées-uncinées sont typiques de
P. spadiceogrisea.
I.5. Agaricus sericeus var. infundibuliformis De Seynes, Fl. mycol. Montpellier :
98. 1863 (invalide: ICBN, art. 43.1)
Matériel original étudié : aquarelle n° 2227 de l’iconographie Dunal,
« Agaricus rotatus Nob., bois de Fabrègues8, dans l’herbe, 10 octobre 1835 »,
Pôle Patrimoine scientifique, Université Montpellier 2. Aucun exsiccatum
correspondant n’a été trouvé dans l’Herbier mycologique général MPU.
Observations : de Seynes (1863 : 98) propose cette nouvelle variété
d’Agaricus sericeus Bull. sur la base de la planche d’Agaricus rotatus de Dunal,
une belle aquarelle portant déjà plusieurs noms manuscrits raturés de la main de
Dunal : « Agaricus rotatus nob., Agaricus cyathiformis, Agaricus pleoplodius ».
7. De Seynes (1863 : 98) cite par erreur la planche n° 122 (correspondant à Ag. appendiculatus) au lieu de 222
(Ag. rotatus).
8. Villeneuve, à 13 km à l’ouest-sud-ouest de Montpellier (Amelin, 1827).
266
P.-A. Moreau, P. Hériveau, V. Bourgade et al.
Dunal note sur la planche : « Dub. p. 820 n° 150 », qui fait référence à Agaricus
sericeus Bull. (Duby, 1830 : 743), ce qui a sans doute influencé de Seynes pour la
publier comme variété de cette espèce. Agaricus sericeum Bull. est un nom
illégitime (non Ag. sericeus Schaeff.), le nom proposé par de Seynes est par
conséquent invalide et ne semble pas avoir été repris dans la littérature.
De Seynes cite en référence Agaricus sordidus Dickson (Dickson, 1785,
fig. 1), champignon clitocyboïde guère interprétable. Lagarde (1901) mentionne
cette même planche sous le nom « Omphalia onisca ? », sans rappeler le nom
proposé par de Seynes.
En rattachant ce champignon à Ag. sericeus Bull. (aujourd’hui :
Entoloma sericeum Quél.), de Seynes (1863 : 99) avait remarqué les lames roses
du champignon de Dunal, et avait été intrigué par la silhouette omphaloïde peu
courante dans ce genre ; il dit aussi avoir observé des intermédiaires entre cette
forme et la forme umbonée « typique ». Il s’agit en réalité d’une très belle
illustration d’Entoloma undatum (Gillet) M.M. Moser, espèce courante en zone
méditerranéenne.
Trois récoltes d’E. undatum conservées à MPU (Dunal : Montpellier,
novembre 1831, et bois Estor, 15 novembre 1840 ; Touchy : Montpellier,
novembre 1839) sont archivées sous le nom Agaricus (Omphalia) pyxidatus, sans
annotation de de Seynes. Une très belle aquarelle de l’iconographie RaffeneauDelile (n° 55, « à odeur de fiente de chat ») illustre aussi cette espèce ; elle est
aussi nommée Ag. pyxidatus, et accompagnée d’une note de de Seynes :
« rapporté par beaucoup d’auteurs aux Omphalia malgré les spores de
Rhodosporées », qui correspond aux remarques publiées dans sa thèse (1863 : 98,
sous Ag. pyxidatus). On ignore comment de Seynes distinguait Ag. pyxidatus de
Ag. sericeus var. infundibuliformis, sinon par l’apparition automnale du premier,
printanière du second.
I.6. Agaricus sulcatus Dunal ex De Seynes, Fl. mycol. Montpellier : 75. 1863
(illégitime, non Ag. sulcatus J.F. Gmel. 1792)
Fig. 1D
= Psathyrella sulcata Dunal ex Quél. 1886, Enchir. Fung. : 120.
Lectotype désigné ici : aquarelle n° 117 de l’iconographie Dunal, « Mas
Rouge 9, 2 décembre 1834 »), Pôle Patrimoine scientifique, Université
Montpellier 2. La planche porte une annotation attribuable à J. Lagarde :
« Psathyrella sulcata sec. Boudier ».
Autre matériel étudié : Aucun exsiccatum correspondant n’a été trouvé
dans l’Herbier mycologique général MPU.
Observations : de Seynes (1863 : 75) décrit cette espèce sur la base de
deux éléments : la planche n° 117 de l’Iconographie de Dunal (Fig. 1D), sans note
ni description, et l’étude microscopique d’une récolte personnelle (deux
exemplaires non conservés) caractérisée par des lames fourchues-anastomosées.
L’auteur lui-même met en doute la valeur de ce dernier caractère, non observable
sur la planche de Dunal. Il s’agit donc d’une description composite, dont le seul
élément original actuellement connu est la planche de Dunal, sans microscopie,
qui représente un petit Psathyrella difficilement reconnaissable. Dunal positionne
son espèce au voisinage d’Ag. coprophilus (actuellement Psilocybe ou Deconica)
illustré sur la planche précédente n° 116, en se référant à Duby (1830 : 805).
9. Domaine de la Planchude, ancienne métairie, sur la commune de Mauguio, 7 km à l’est de Montpellier
(Thomas, 1865 : 147).
Redécouverte et typification des champignons de la région de Montpellier
267
L’étude microscopique de de Seynes sur sa propre récolte concerne sans
doute un Panaeolus, peut-être Panaeolus uliginosus Jul. Schäff. d’après l’habitat
« en terrain tourbeux » et les spores mesurant 10-12 × 9 µm d’après l’auteur.
Le nom validé par de Seynes est illégitime ; c’est à Quélet (1886) que l’on
doit la publication légitime de l’espèce, sous le nom de « Psathyrella ? sulcata
Dun. », renvoyant implicitement à la publication de de Seynes.
I.7. Agaricus translucens var. squamulosus De Seynes, Fl. mycol. Montpellier :
97. 1863 (invalide: nomen nudum, ICBN, art. 32.1d)
Matériel original étudié : aquarelle n° 138 de l’iconographie Dunal,
« Agaricus translucens var. squammulatus, Château-Bon10, sur un arbousier,
novembre 1845 »), Pôle Patrimoine scientifique, Université Montpellier 2. Aucun
exsiccatum correspondant n’a été trouvé dans l’Herbier mycologique général
MPU.
Observations : Agaricus translucens DC. est abondamment illustré dans
les iconographies de Delile et de Dunal, en conformité avec la description
originale de Candolle (1815 : 43), également basée sur des récoltes
montpelliéraines. Cette tradition semble avoir été largement en usage dans cette
région, le nom étant repris par de Seynes (1863, sous « Agaricus translucens »),
puis Lagarde (1901, sous « Claudopus translucens »). Toutes ces récoltes
correspondent à Crepidotus mollis (Schaeff. : Fr.) Staude, espèce banale donc la
variabilité morphologique est bien connue (Senn-Irlet, 1995 ; Consiglio et Setti,
2009 ; etc.). La variété publiée par de Seynes n’est accompagnée que d’une très
courte note (« recueillie sur un Arbutus unedo ») et d’un report à la planche
n° 138 de Dunal ; elle est invalide en raison de l’absence d’élément descriptif dans
ce texte (McNeill et al., 2006, art. 32.1) et du fait que la planche de Dunal est
restée inédite (non-application de l’art. 42.3). Cette variété est également bien
connue de la littérature : elle est actuellement nommée Crepidotus calolepis var.
squamulosus (P. Cout.) Senn-Irlet (Coutinho, 1934 : 211 ; Senn-Irlet, 1995 : 37).
De Seynes cite la planche de Dunal n° 138 comme seule référence.
Il existe pourtant un dessin au trait réalisé par Delile (n° 54) sur une récolte de
M. Touchy, « sur l’Arbutus », 1844, portant le même nom que la planche de Dunal
(« Crepidotus translucens (squammulatus) DC. »), sans doute de même
provenance. Une fiche de Delile, consacrée à Ag. translucens sur une autre récolte
de Touchy (12 septembre 1845, parc de Château-Bon), décrit un revêtement
intermédiaire entre ces deux taxons : « La superficie du chapeau frais est blanche
finement pointillée de courtes peluches et passe à la couleur sale terreuse en se
fanant, principalement par les bords ».
II. Ascomycota
II. 1. Peziza atroviolacea (« atro-violacea ») Delile ex De Seynes, Rech. Veg. inf.
III : 84. 1886 (illégitime, non P. atroviolacea Bres., Fungi Tridentini II : 29. 1882)
Fig. 2B
= Marcelleina atroviolacea Delile ex Brumm., Persoonia suppl. 1 : 233.
1967 (nomen novum introduit comme combinaison nouvelle ; McNeill et al., 2006,
art. 33.4).
10. Montpellier, parc du domaine de Château-Bon, à l’ouest de la ville (aujourd’hui parc municipal de FontColombe).
268
P.-A. Moreau, P. Hériveau, V. Bourgade et al.
Lectotype désigné ici : aquarelle du dossier n° 295 de l’iconographie
Raffeneau-Delile (1820-1840) : « Peziza atro-violacea, Tonnelle près de Tarascon,
leg. G. Bentham », 3 décembre 1824, Pôle Patrimoine scientifique, Université
Montpellier 2.
Autre matériel étudié : Aucun exsiccatum correspondant n’a été trouvé
dans l’Herbier mycologique général MPU.
Observations : dans la description originale de cette espèce, de Seynes
(1886) recopie intégralement les notes manuscrites relativement détaillées de
Delile, qui cite trois récoltes : Tonnelle près de Tarascon, 3 décembre 1824, leg.
G. Bentham ; Montpellier, sur la terre du Jardin botanique (sans date) ; et
Grammont, novembre 1831. La planche illustre la première récolte, d’après la
date de réalisation (1824) précisée par de Seynes.
Il est curieux que Boudier (1887), ayant connaissance du travail de
Seynes (1886) qu’il cite au sujet de P. cynocopra, n’ait pas reconnu dans le Peziza
atroviolacea Delile ex De Seynes son Plicaria planchonis Dunal ex Boud. publié
un an plus tard sur la base de l’icône de Dunal n° 23 (« Peziza planchoni Nob. »,
voir ci-après).
La synonymie Peziza atroviolacea = Plicaria planchonis a été établie par
Van Brummelen (1967 : 233). Celui-ci, ignorant l’existence de l’homonyme
prioritaire P. atroviolacea Bres. (Bresadola, 1882), proposait la combinaison
nouvelle dans le genre Marcelleina Brumm., R.P. Korf et Rifai, actuellement
synonymisé à Smardaea Svrªek (prioritaire) et Greletia Donad. (Korf et Zhuang,
1991 : 427).
La planche de Delile est annotée de la main de J. de Seynes : « Pez.
(Plicaria) planchonis Dun. », et en plus petit : « Pez. (Aleuria) atroviolacea Del. de
S. Rech. sur les Végét. inf. III, 1886, p. 84 ».
Dans la systématique actuelle Marcelleina atroviolacea Delile ex Van
Brummelen est un synonyme de Smardaea planchonis (Dunal ex Boud.) Korf et
W.Y. Zhuang (Korf et Zhuang 1991 : 427).
II.2. Peziza cynocopra Dunal ex De Seynes, Rech. Vég. inf. III : 82, pl. 2. 1886 Fig. 2C
≡ Humaria cynocopra (Dunal ex De Seynes) Sacc. 1889, Syll. Fung. 8 : 124.
Lectotype désigné ici : aquarelle inédite de F. Dunal n° 16 : « Peziza
cynocopricola Nob., Lattes, leg. Planchon, sur crottin de chien sec, 12 décembre
1841 », Pôle Patrimoine scientifique, Université Montpellier 2.
Autre matériel original : de Seynes (1886), planche II fig. 10-12. Aucun
exsiccatum n’a été trouvé dans l’herbier général MPU.
Observations : de Seynes (1886 : 82) précise qu’il fonde sa description sur
deux récoltes : l’une figurée dans l’Iconographie de Dunal le 12 décembre 1841,
la seconde trouvée par lui-même à Méric le 17 janvier 1861 et illustrée par trois
ascomes fortement grossis (de Seynes 1886, pl. II figs. 10-12) ; les deux récoltes
ont été effectuées sur crottes de chien déjà blanchies. De Seynes (1874) avait déjà
évoqué (sans la nommer) sa récolte en décrivant un champignon parasite non
identifié.
Boudier (1887 : 90), sur la base de cette planche et des observations de
de Seynes (1886), l’indique très voisin d’Ascophanus carneus (Pers. : Fr.) Boud.,
mais de morphologie apparemment différente. De l’avis des experts consultés
(C. Lechat, J.-P. Priou, comm. pers.), la planche de Dunal représente un aspect
atypique d’Ascophanus carneus, espèce coprophile fréquente et non spécifique
des déjections canines, mais l’absence de spécimens ne permet pas d’approfondir
la comparaison.
Redécouverte et typification des champignons de la région de Montpellier
II.3. Morchella dunalii Boud., Bull. Soc. mycol. France 3 : 95. 1887
269
Fig. 2D
Lectotype désigné ici : aquarelle n° 39 de l’iconographie Dunal, « Morchella
biloba Nob., Montpellier, serres de l’École de Pharmacie, leg. J.-E. Planchon,
10 mars 1843 », Pôle Patrimoine scientifique, Université Montpellier 2.
Autre matériel étudié : Aucun exsiccatum n’a été trouvé dans l’Herbier
mycologique général MPU.
Observations : la planche illustre deux très jeunes spécimens, et une
coupe transversale du plus grand. Boudier (1887) trouve cette espèce très
intéressante en raison de la couleur pâle du fond des alvéoles, des côtes noires et
de la forme campanulée, ainsi que de l’absence de vallécule, au point de proposer
un nouveau nom : Morchella dunalii Boud. L’habitat précis est inconnu ; le même
jour au même endroit, J.-E. Planchon rapporte une autre morille, adulte, que
Dunal fait également représenter (n° 38, « Morchella deliciosa »), et que Boudier
(1887) identifie « Morchella conica Fr. », sans commentaire. Dunal note sur la
planche : « Dub. p. 757 n° 2 », qui fait référence à Morchella deliciosa Fr. (Duby,
1830 : 757).
Selon P. Clowez (comm. pers.), M. dunalii ne correspond à aucune
espèce décrite par ailleurs et pourrait représenter une espèce méditerranéenne
autonome, peut-être propre au chêne vert (Quercus ilex), abondant dans le jardin
de l’École de pharmacie.
II.4. Plicaria planchonis Dunal ex Boud., Bull. Soc. mycol. France 3 : 91. 1887
≡ Barlaea planchonis (Dunal ex Boud.) Sacc., Syll. Fung. 8 : 116. 1889.
≡ Barlaeina planchonis (Dunal ex Boud.) Sacc. et Traverso, Syll. Fung.
16 : 140. 1910.
≡ Lamprospora planchonis (Dunal ex Boud.) Seaver, Mycologia 6(1) : 21. 1914.
≡ Marcelleina planchonis (Dunal ex Boud.) J. Moravec, Ωeská Mykol.
23(4) : 233. 1969.
≡ Pulparia planchonis (Dunal ex Boud.) Korf, Pfister et J.K. Rogers in
Korf, Phytologia 21(4) : 206. 1971.
≡ Greletia planchonis (Dunal ex Boud.) Donadini, Bull. trimestriel Soc.
mycol. France 95 : 184. 1980 (’1979’).
≡ Smardaea planchonis (Dunal ex Boud.) Korf et W.Y. Zhuang,
Mycotaxon 40 : 427. 1991.
Lectotype : non désigné.
Matériel étudié : aquarelle n° 35 de l’iconographie Dunal, « Peziza
planchoni Nob., Jardin des plantes11, banquette de la “montagne” côté du midi »,
Pôle Patrimoine scientifique, Université Montpellier 2.
Observations : tout en reprenant le nom dédié par Dunal à son élève
J.-É. Planchon, Boudier (1887) précise qu’il fonde sa description sur une récolte
envoyée des Alpes-Maritimes par J.-B. Barla. La planche de Boudier qui
accompagne la publication, comme le précise l’auteur, est également élaborée à
partir du matériel de Barla, vraisemblablement conservé dans l’herbier Boudier
(PC). Par conséquent, la planche de Dunal ne peut être éligible comme lectotype
et n’a qu’une valeur documentaire, en illustrant l’une des récoltes de cette espèce
à Montpellier ; par ailleurs, il n’existe pas d’exsiccata correspondant dans
l’Herbier mycologique général MPU. La même espèce est représentée dans
l’Iconographie de Delile sous le nom de Peziza atroviolacea ; Boudier ne semble
11. Montpellier.
270
P.-A. Moreau, P. Hériveau, V. Bourgade et al.
pas avoir consulté ces documents, étudiés par de Seynes (1886 ; voir sous Peziza
atroviolacea ci-dessus).
Dunal note sur la planche : « Dub. p. 743 n° 34 », qui fait référence à
Peziza humosa Fr. (Duby, 1830 : 743).
Plicaria planchonis est le type du genre Greletia Donad. (Donadini,
1980a), actuellement considéré comme synonyme de Smardaea Svrªek (Korf et
Zhuang, 1991 : 427).
II.5. Peziza viridifusca (« viridi-fusca ») Delile ex De Seynes, Rech. Vég.
inf. III : 83. 1886 (illégitime, non Peziza viridifusca Fuck., Jahr. Nass. Ver.
Naturkunde 23 : 309. 1870)
Fig. 2E
= Humaria viridifusca Delile ex Sacc., Syll. Fung. 8 : 149. 1889.
≡ Galactinia viridifusca (Delile ex Sacc.) Boud., Discomyc. France : 23. 1907.
Lectotype désigné ici : aquarelle n° 300 de l’iconographie RaffeneauDelile (1820-1840), « Peziza viridi-fusca Nob., Grammont, 30 novembre 1828 »,
Pôle Patrimoine scientifique, Université Montpellier 2.
Observations : d’après les précisions fournies par de Seynes (1886 : 83)
dans sa description, il est probable que celle-ci soit fondée sur sa propre récolte
des pinèdes de Fontfroide (novembre 1882), plutôt que sur la planche de Delile
(parc de Grammont, 30 novembre 1828) qui ne montre pas autant de précisions.
Néanmoins les détails microscopiques illustrés par Delile sont évoqués,
notamment les spores au relief « chagriné » assez haut pour avoir été observé
par Delile. Delile illustre également, sur deux coupes radiales d’apothécie,
un contexte de structure Textura globulosa, que de Seynes traduit comme un
« pseudo-parenchyme d’une teinte blanc verdâtre, composé de cellules larges en
forme de sphéroïdes plus ou moins aplatis ».
La littérature moderne, depuis Saccardo (1889) jusqu’à Le Gal (1941),
Grelet (1979), Romagnesi (1978), Donadini (1980b, 1981), etc., cite à l’unisson
Peziza viridifusca De Seynes en recopiant fidèlement les indications de de Seynes,
notamment les dimensions sporales (« 14 × 8 µm »), ce qui laisse supposer que,
depuis de Seynes, personne n’a eu en main le champignon de Delile. Il est plus
raisonnable de penser qu’il fut décrit sous un autre nom… Quoi qu’il en soit, cette
belle espèce est à rechercher dans les localités montpelliéraines, et à renommer si
son originalité est confirmée sur de nouvelles récoltes.
Descriptions et combinaisons nouvelles
Dans les descriptions suivantes, les dimensions données correspondent
aux valeurs minimales et maximales observées ; les dimensions sporales sont
données par estimations d’après Fannechère (2005), sur dépôt naturel sur le haut
du pied : (valeur minimum observée) 1er décile – valeur moyenne calculée –
9e décile (valeur maximale observée).
Tricholoma concolor (Delile ex De Seynes) P.-A. Moreau, J.-M. Bellanger
et Courtec., comb. nov.
Fig. 3A
Mycobank MB 561227
Basionyme : Agaricus concolor Delile ex De Seynes, Fl. mycol.
Montpellier : 143. 1863.
≡ Collybia concolor (Delile ex De Seynes) Sacc., Syll. Fung. 5 : 205. 1887.
= Tricholoma rufulum R. Heim in Heim et al., Treb. Mus. Ciènces Nat.
Barcelona, Sèr. Bot. 15 : 104. 1934.
Redécouverte et typification des champignons de la région de Montpellier
271
Fig. 3. A. Marasmiellus delilei, lectotype (Maurin, nov. 1837, MPU) : spores. B-E. Tricholoma
concolor, epitype (coll. JMB2010110701, LIP). B : spores ; C : portion d’hyménium avec basides
et sous-hyménium ; D : revêtement piléique, coupe radiale ; E : revêtement du stipe, coupe
radiale. – Barres d’échelle = 10 µm.
272
P.-A. Moreau, P. Hériveau, V. Bourgade et al.
? = Agaricus psammopus Kalchbr., Icon. Select. Hymenomyc. Hung. 12 :
pl. 3. 1873.
≡ Gyrophila psammopus (Kalchbr.) Quél., Enchir. fung. : 12. 1886.
≡ Tricholoma psammopus (Kalchbr.) Quél., Mém. Soc. Émul. Montbéliard,
Sér. 2 5 : 433. 1875.
Description originale (Delile in de Seynes 1863 : 143) : « Agaricus
concolor (Agaric couleur de poterie). Pédicule haut de 1 à 2 pouces, plein, en
colonne, épais de 3 à 6 lignes, et dont l’épiderme, comme celui du chapeau, est on
ne peut plus feutré. Chapeau d’abord umboniforme, sans aucune trace de cortine,
étalé à maturité, ne se pelant pas ; le dessus du chapeau un peu mamelonné, uni,
rarement écailleux. Lames pâles, d’un blanc un peu couleur de poterie ou presque
blanc dans la jeunesse, moins pâles dans la maturité, non décurrentes sur le
pédicule, mais seulement adhérentes. Deux à trois portions de feuillets entre deux
feuillets complets. Chair égale en quantité à la largeur des feuillets, et blanchâtre
comme le sont les feuillets dans leur jeunesse. Saveur non piquante, mais amère
au bout d’un temps. Ne change pas de couleur quand on l’a entamée. Mtp12.
Jacou, 3 décembre 1824 ; Fontfroide, décembre 1831, novembre 1834 ».
Épitype désigné ici : FRANCE. Clapiers (Hérault), sous Pinus halepensis
sur calcaire, 7 novembre 2010, leg. J.-M. Bellanger, herb. LIP n° JMB2010110701.
Description de l’épitype : Chapeau 20-45 mm, largement umboné, ocre
carné pâle uniforme, devenant brun incarnat depuis le centre, puis tardivement
brun roussâtre terne, à marge restant longtemps pâle ; revêtement sec, mat,
d’aspect finement nacré au début, puis feutré, fibrilleux-apprimé à finement
tomenteux ou costulé vers la marge, devenant tardivement excorié à la marge ;
marge excédante, longtemps courtement incurvée puis érodée, concolore. Lames
étroitement uncinées, assez espacées (32-36 atteignant le pied, 2 (3) séries de
lamellules), larges, blanches puis crème pâle, tardivement maculées de roussâtre ;
arête lisse puis érodée avec l’âge. Pied 40-90 × 8-15 mm, cylindrique à légèrement
atténué-subradicant à la base, finement pruineux à l’apex, blanc ou blanchâtre sur
quelques millimètres sous les lames, fibrillo-pelucheux en deçà et brusquement
ocre incarnat concolore au chapeau, puis rapidement brun rougeâtre depuis la
base, par altération ou au toucher. Chair blanchâtre. Saveur amarescente.
Basidiospores (60 mesures) : (5.1) 5.8-6.26-6.7 (7.0) × (4.1) 4.5-5.10-5.6
(5.9) µm, Q = (1.10) 1.13-1.23-1.34 (1.42), obovoïdes à subglobuleuses, à paroi
mince ni amyloïde ni cyanophile, contenant une grosse guttule à maturité. Basides
25-38 × 7.5-8.5 µm, clavées à subcapitées à maturité, toutes tétrasporiques,
contenant une ou plusieurs grosses guttules à maturité. Arête fertile ; poils d’arête
épars, grêles, peu émergents. Sous-hyménium rameux, d’orientation divergente, à
articles cylindriques ou fourcus larges de 2,5-3 µm. Trame hyméniale parallèle,
jaunâtre pâle, à hyphes cylindracées larges de 4-8 µm, lisses, à paroi légèrement
épaissie. Revêtement piléique épais de 40-60 µm, en hyphotrichoderme couché, à
nombreux articles terminaux plus ou moins redressés ou fasciculés, à 0 (1) cloison,
à apex variable : cylindracé, clavé, atténué en bec ou plus typiquement subcapité,
larges de 4.5-12 (14) µm à l’apex ; hyphes à paroi lisse légèrement épaissie.
Hypoderme non distinct. Revêtement du stipe en hyphotrichoderme dressé épais
de 40-90 µm, à nombreux articles terminaux plus ou moins fasciculés mesurant
28-45 (60) × 4,5-12 (14) µm, à contenu jaunâtre soluble dans KOH ; paroi
légèrement épaissie, lisse à faiblement incrustée en profondeur ; terminaisons
cylindracées, arrondies, atténuées, clavées à subcapitées. Trame du stipe incolore,
12. Montpellier (note des auteurs).
Redécouverte et typification des champignons de la région de Montpellier
273
à hyphes cylindracées à caténulées, renflées, larges de 4-18 (22) µm, à paroi assez
épaisse jusqu’à 1.5 µm, incolore, plus ou moins incrustées-sablées. Boucles
absentes à toutes les cloisons.
Tricholoma concolor f. bisporum (Bon) P.-A. Moreau et Courtec., comb. nov.
Mycobank MB 561229
Basionyme : Tricholoma psammopus f. bisporum Bon 1984, Encycl.
Mycol. 36 : 224.
≡ Tricholoma psammopus var. bisporum (Bon) Bon 1990, Doc. Mycol.
20(79) : 62.
Observations : La bisporie stricte et les grandes spores sont les seules
différences observées avec les récoltes tétrasporiques pinicoles de T. concolor ;
cette forme sans réelle valeur taxinomique ne semble connue que de la récoltetype.
Marasmiellus delilei (De Seynes) P.-A. Moreau et Courtec., comb. nov.
Fig. 3B
Mycobank MB 561228
Basionyme : Marasmius delilei De Seynes in Lagarde, Bull. Soc. Mycol.
France 7 : 223. 1901.
Description originale (De Seynes in Lagarde, 1901 : 227) : « Stipite brevi,
glabro, nigro, sursum albicante, saepe excentrico, basi subbulbilloso. Pileo demum
umbilicato depresso membranaceo, lacteo, haud furcatis, intermixis. Hymeno laevi,
cystidiis non visis ; sporis oblongis, basi acutis. Autumno et hyeme viget in ramis et
foliis diversis. Les dimensions du chapeau comprises entre 15 et 20 mm sont très
supérieures à celles des espèces voisines citées plus haut13. Les bords gaufrés le
distinguent du M. amadelphus et le rapprochent de M. candidus dont il diffère par
les dimensions et par la forme des spores, enfin la couleur du stipe, qui est lisse
et non farinacé, est aussi un caractère constant. L’excentricité et quelques
irrégularités dans la marge du chapeau sont aussi à noter. »
Description du lectotype (Maurin, 1831, herbier général mycologique
MPU) : Exsiccata en bon état général, collés et aplatis sur une feuille d’herbier,
3 d’entre eux fixés greffés à leur souche de Scirpus holoschenus. Chapeau
circulaire ou un peu lobé, 8-22 mm de diamètre, de couleur gris-ocre, nettement
strié-gaufré. Lames longuement arquées-(sur 2 spécimens fixés par le chapeau)
décurrentes, blanc crème, très espacées, fortement anastomosées. Pied 8-25 ×
0.1 mm, excentré, greffé à base bulbilleuse, entièrement noir, d’aspect corné,
glabre.
Basidiospores (15 mesures) : (11.5) 12.5-15 (16) × (4.5) 5.5-6.5 (7) µm,
très polymorphes et souvent collapsées ou déformées, incolores, non amyloïdes
ni cyanophiles, très allongées, cylindracées, larmiformes à base atténuée, ou
fusiformes-losangiques, à large apicule déjeté et tronqué. Basides fortement
collapsées, majoritairement tétrasporiques mais mêlées de basides bisporiques
assez fréquentes. Arête garnie de cheilocystides allongées cylindracées, fortement
boursouflées, 20-35 × 4-6 µm. Trame distinctement gélifiée après regonflement
dans KOH. Revêtements très collapsés, non suffisamment déchiffrables.
Observations : cette espèce est très bien caractérisée morphologiquement
et écologiquement, et les caractères microscopiques altérés des spécimens étudiés
n’introduisent aucun doute quant à son identité. Les descriptions complètes de
13. Marasmius ramealis, M. candidus, M. androsaceus et M. epiphyllus [note des auteurs].
274
P.-A. Moreau, P. Hériveau, V. Bourgade et al.
cette espèce (sous le nom de Marasmiellus trabutii) sont nombreuses dans la
littérature européenne : par exemple Bon et Chevassut (1988 : 59), Antonín et
Noordeloos (1997, 2010), Moreno et al. (1994 : 246), Hausknecht et Zuccherelli
(1994 : 82), Moreau et al. (2007 : 54), etc.
Remerciements. Les auteurs remercient les collaborateurs du Pôle Patrimoine
scientifique de l’université Montpellier 2 et de l’herbier MPU en particulier : MarieJosèphe Mauruc pour ses recherches dans les collections de l’herbier MPU, P.A. Schäfer
pour les précisions sur l’historique des herbiers, Luc Gomel (directeur du PPS) et Joël
Mathez (ancien directeur de l’herbier MPU) pour nous avoir facilité l’obtention et la
consultation des documents utilisés pour ce travail. Nous remercions aussi les bibliothèques
de la Faculté de médecine et de la Faculté des sciences de Montpellier pour la mise à
disposition de leurs ressources documentaires. Merci à Philippe Clowez (Pont-l’Évêque),
Michel Hairaud et Christian Lechat (Villiers-en-Bois) et Jean-Paul Priou (La Gacilly) pour
leur aide à l’interprétation des Ascomycota des iconographies de Delile et Dunal. Merci
enfin à Jacques Melot pour son aide sur les points nomenclaturaux, et à Jean-Claude
Malaval (Grabels) et Franck Richard (CEFE-CNRS, Montpellier) pour leur aide dans la
recherche des anciennes localités citées par les auteurs du XIXe siècle.
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