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Dossier spcial 2015

itoupe
2010

LES CAHIERS
SCIENTIFIQUES
DU PARC
AMAZONIEN
DE GUYANE

Les Cahiers scientifiques du


Parc amazonien de Guyane
Itoup 2010
tude pluridisciplinaire
sur le mont Itoup

Comit ditorial
Service Patrimoines Naturels et Culturels
Bertrand Goguillon
Raphalle Rinaldo
Malys Le Noc
Service Communication
Jean-Maurice Montoute
Graldine Jaffrelot
Guillaume Feuillet
Claudia Berthier

Parc amazonien de Guyane


1 rue Lederson
97354 Rmire Montjoly
Tlphone : 05.94.29.12.52
Tlcopie : 05.94.29.26.58
Site internet : www.parc-amazonien-guyane.fr

Prface

Le mont Itoup est lun des deux sommets les plus hauts de la Guyane, avec une altitude de 830 m, les monts
Bellevue de lInini le dpassent de peu avec 851 m. Ces montagnes situes en plein cur du Parc sont des tmoins exceptionnels des dix derniers millnaires qui portent la fois la signature de la prsence humaine et de
situations climatiques contrastes.
Elles ont certainement t des refuges de la diversit animale et vgtale et elles seront nouveau des tmoins
privilgis des changements globaux acclrs en cours. A ce titre elles mritent amplement dtre des hauts
lieux de la recherche dans un Parc national, dautant plus que leur isolement en fait des zones immenses trs peu
connues sur les plans des diversits humaine et naturelle.
Ds 2009, le Conseil scientifique du Parc amazonien de Guyane a choisi de faire du mont Itoup un premier
grand chantier dinvestigation. Il faut souligner le travail men par les quipes du Parc national sur le terrain,
ayant permis aux chercheurs de disposer des infrastructures daccueil et dispositifs dtude pour mener sur ce
site isol leurs prospections dans de bonnes conditions. Parmi ce collectif dagents, Nicolas Surugue, responsable
recherche et dveloppement lpoque au Parc national, a magnifiquement organis la premire mission, en
2010, dont les rsultats prliminaires sont exposs dans ce premier Cahier scientifique du Parc .
Vous constaterez comme moi quil y a de quoi faire rver les amateurs de toutes les disciplines et pourtant
leffort nest pas encore suffisant pour constituer un point zro afin de suivre lvolution sous changement climatique. Vous verrez aussi que lanalyse historique na mme pas encore commenc.
Les uns et les autres ont raison de dire que ce nest quun dbut (une deuxime mission vient dtre effectue en
2014) et quil faudrait aussi tudier les monts Bellevue de lInini et les monts Attachi-Bakka vers louest, les
monts Galbao au centre prs de Sal, la vaste plaine de la Waki, et les contreforts des monts Tumuc-Humac
lextrme sud-ouest et
Cela montre simplement quun chantier immense de connaissance des diversits en place, de leur histoire passe
et de leurs dynamiques actuelles doit nous mobiliser dans les dcennies qui viennent.
Cette mission Itoup est exemplaire car elle a permis de mobiliser ensemble des agents du Parc national, des
chercheurs professionnels et naturalistes amateurs rsidents en Guyane, ainsi que des spcialistes mondiaux de
certains domaines en sciences naturalistes. Elle rpond bien au souhait du Conseil scientifique de faire du territoire du Parc amazonien un lieu dexcellence pour les rencontres entre disciplines, entre scientifiques, agents du
PAG et populations locales porteuses de savoirs sous-estims sur les milieux et lhistoire de la Guyane de
lintrieur.
Ce cahier est le premier dune srie que le Conseil scientifique souhaite voir se prenniser la frontire entre les
publications scientifiques de rfrence internationale et la vulgarisation de qualit, destine au grand public,
porte par les Carnets du PAG, dont le premier sera consacr larouman.

Bernard THIBAUT,
Directeur de recherche mrite au CNRS, Prsident du CS du PAG de 2009 2014.

Rapport de synthse
Prambule
Les prcurseurs
Le contexte
o
o

Fort de montagne, fort de brumes


Biocnoses montagnardes en Guyane : tat de
lart

Objectifs et mthodologies
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Dispositif dtudes
tude Habitats
Les communauts darbres
Composition floristique en plantes suprieures
et fougres
Les mammifres non-volants et les espces gibiers
Avifaune
Les chiroptres
Les amphibiens
Les reptiles
Les poissons
Lentomofaune

Synthse des rsultats


o
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o

Caractrisation pdologique
Les communauts darbres Le point de vue
de lONF
Diversit floristique
Composition floristique des communauts
Structure des vgtations forestires
En rsum
Les communauts darbres Le point de vue
de lIRD
Diversit floristique
Composition floristique des communauts
Structure des vgtations forestires
Composition floristique
Analyse quantitative prliminaire
Analyse qualitative
Les fougres
Les mammifres non-volants et les espces gibiers
Comparaison de la densit avec dautres
sites
Lavifaune
Richesse spcifique
Compltude de linventaire
Structure des communauts doiseaux
Les chiroptres
Richesse spcifique
Structure des communauts
Compltude de linventaire
Les amphibiens
Diversit globale : linventaire du mont
Itoup
Compltude de linventaire
Richesses spcifiques locales : les diversits

o
o
o

Diversit et tagement altitudinal


Des espces submontagnardes ?
Les reptiles
Les poissons
Liste despces & abondances par station de
pche
Relations entre dbit hydrique et richesse
spcifique
Les insectes
Diversit globale : linventaire du mont Itoup
tude altitudinale

Les apports de la mission Itoup la connaissance globale


o
o
o
o
o

Actualisation des ZNIEFFs


Inventaire entomologique (SEAG)
Placettes forestires AMAP (IRD)
DIADEMA
Apports la biogographie
Le cas des poissons

Les originalits floristiques et faunistiques du


mont Itoup
o

o
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o

La flore
Taxons nouveaux pour la science
Taxons nouveaux pour la Guyane franaise
Rarets extrmes endmiques du mont
Itoup
Connus de 2 ou 3 stations au monde
Connu dune station en Guyane
Connu de 2 4 stations en Guyane
Endmiques de Guyane et des territoires
contigus
Les fougres
Les arbres
Les oiseaux
Les amphibiens
Les poissons
Les reptiles
Les insectes
Taxons rares ou nouveaux pour la science

Rendus scientifiques
Perspectives : le point de vue des participants
o

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o
o

Le point de vue des forestiers


Hypothses cologiques
Hypothses biogographiques
Conclusions et perspectives
Le point de vu dun ptridologue
Le point de vue des ornithologues
Le point de vue des chiroptrologues
Le point de vue dun herptologue
Le point de vue dun ichtyologue
Le point de vue des entomologistes
Rendus scientifiques

Bibliographie

Sommaire
Rapport de synthse. Etude pluridisciplinaire
du mont Itoup
p7
Caractristiques du peuplement forestier
mission Itoup
p73
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o

Prsentation gnrale du site


Description des habitats
Travaux raliss
Conclusions

Flore et vgtation du massif du mont Itoup


caractristation des communauts vgtales
arborescentes
p84
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o

Introduction
Matriel et mthodes
Bilan des relevs
Analyse du tableau dabondances des espces
Liste floristique des arbres du site mont Itoup
Conclusion et discussion
Rfrences
Annexes
Composition floristique du sous-bois

Composition floristique du sous bois p126


o

Taxons nouveaux pour la science

Les ptridophytes du mont Itoup sommet


Tabulaire
p130
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o
o

Introduction
Rappel du bilan de la mission de 1980
Mission de 2010 (et complment 2014)
Synthse des ptridophytes du massif du sommet Tabulaire
Conclusions
Remerciements
Rfrences bibliographiques

Inventaire ornithologique du mont Itoup


p148
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Introduction
Site dtude
Mthodes
Rsultats
Conclusions
Remerciements
Rfrences

Les peuplements de chiroptres du mont Itoup


p167
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Introduction
Matriel et mthodes
Rsultats
Discussion - conclusion
Les espces
Remerciements
Bibliographie

Lherptofaune du mont Itoup


o
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o

p186

Introduction
Etat des connaissances sur les communauts
forestires damphibiens
Site d'tude
Mthodologie
Rsultats
Analyse de la communaut d'amphibiens
Les amphibiens
Les reptiles
Des espces indicatrices ?
tudes taxonomiques et phylogographie
Bibliographie
Remerciements

Analyse Ichtyologique du mont Itoup p210


o
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o

Introduction et objectifs
Prsentation du secteur dtude
Participants
Chronologie de la mission
Mthodologie
Rsultats
Discussions
Conclusions
Recommandations
Remerciements
Rfrences

Les communauts de poissons du mont Itoup


p224
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o
o
o

Chronologie
Objectif du volet communauts de poissons
Mthodologie
Rsultats
Discussion
Perspectives
Bibliographie

tude et inventaire entomologique du mont


Itoup
p234
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o
o
o

Prsentation et Objectifs entomologiques de la


Mission
Remerciements
Conditions de ltude
Dispositif utilis
Rsultats
Inventaire gnral
Conclusions
Propositions dajustement du protocole pour
missions ultrieures

Citations

Ce cahier scientifique du Parc amazonien de Guyane doit tre cit de la manire suivante :
PARC AMAZONIEN DE GUYANE, 2015. Itoup 2010 - Les cahiers scientifiques du Parc, dossier spciale
2015. 244p.

Les rapports contenus doivent tre cits de la manire suivante :


DEWYNTER M., 2014. Itoup : Typologie, Climat, Biodiversit, Singularits ; vers un observatoire des changements climatiques. Rapport de synthse de la mission Itoup 2010, les Cahiers scientifiques du Parc amazonien de Guyane, 66p.
BRUNAUX O., GUITET S., 2011. - Caractristiques du peuplement forestier mission Itoup. Rapport de mission ONF, 11p.
SABATIER D. et al., 2011. Flore et vgtation du massif du mont Itoup, caractrisation des communauts
vgtales arborescentes. Rapport de mission, 41p.
TOSTAIN O., LEOTARD G., 2011. Composition floristique du sous-bois. Rapport de mission, 4p.
BOUDRIE M. ; 2015. Les ptridophytes du mont Itoup sommet Tabulaire. Rapport de mission, 18p.
CLAESSENS O., RENAUDIER A., 2011. Inventaire ornithologique du mont Itoup. Rapport de mission, 19p.
DELAVAL M., 2011. Les peuplements de chiroptres du mont Itoup. Rapport de mission, 19p.
DEWYNTER M., 2011. Lherptofaune du mont Itoup. Rapport de mission, 24p.
MONTOYA J., 2011. Analyse ichtyologique du mont Itoup. Rapport de mission, 14p.
BROSSE S., 2011. Les communauts de poissons du mont Itoup. Rapport de mission, 10p.
DALENS P.H., BLANCHET D., POIRIER. E., FERNANDEZ S., TOUROULT J., 2011. tude et inventaire
entomologique du mont Itoup. Rapport de mission, 9p.

Localisation du mont Itoup en Guyane

Rapport de synthse
Etude pluridisciplinaire du mont Itoup
Typologie, Climat, Biodiversit, Singularits
Vers un observatoire des
changements climatiques ?
1
Mal Dewynter (coordinateur de rdaction)
1

Biotope bureau dtude

Rsum
Ce rapport tablit la synthse de la mission mene sur le mont Itoup (sommet Tabulaire) en 2010 linitiative
du Parc amazonien de Guyane. Il prsente ainsi les diffrentes disciplines des sciences naturalistes couvertes
durant le programme par les divers organismes partenaires. Protocoles, principaux rsultats parmi la richesse
des donnes obtenues, intrts biologiques et cologiques mis en vidence, valeurs patrimoniales qui en rsultent, y sont abords. Il offre une premire valuation globale de la biodiversit de ce massif tabulaire, second
plus haut sommet de Guyane. Lintrt patrimonial du mont Itoup, est donc mis ici en exergue par ses singularits dhabitats forestiers, floristiques (peuplement darbres, plantes suprieures et fougres) et faunistiques
(vertbrs terrestres, poissons, insectes). Cette tude a galement pour vocation souligner les caractristiques
climatiques remarquables, imputables laltitude et la configuration du massif, qui confrent au mont Itoup un
intrt stratgique pour le suivi des impacts des changements climatiques. Nanmoins, dans cette approche
globale, il ne sagit pas encore ici de poser les bases dun suivi long terme des communauts ; mais dune
contribution la caractrisation dun tat initial restant complter, pralable ncessaire pour apprhender le
fonctionnement cologique de ce site remarquable.
En guise de conclusion, et ce stade des recherches menes qui marquent cette premire tape dans la connaissance acquise du site, il convenait simplement de donner la parole aux principaux scientifiques qui sont
intervenus dans cette mission de 2010, et mettre ainsi leurs propos en perspectives les uns aux autres.

Mots cls
Parc amazonien de Guyane, mont Itoup, inventaire taxonomique, biodiversit, gradient altitudinal, fort submontagnarde, fort nuages, changement climatique

Prambule
Le Parc amazonien de Guyane dans le cadre de ses
missions et de sa politique scientifique, a retenu le site
du mont Itoup pour lancer en 2010 une importante
mission pluridisciplinaire dinventaire de la biodiversit et de caractrisation cologique. Le choix sest
ainsi port sur une rgion demeurant mconnue et
prsentant une configuration particulirement intressante, lie son altitude majeure lchelle de la
Guyane. Cela dans une perspective de faire de cette
localit un site de rfrence pour capitaliser sur le long
terme lacquisition de connaissances et tmoigner des
effets des changements climatiques.

Les prcurseurs
La mission effectue par G. Cremers et J.J. de Granville stait droule du 19 aot au 5 septembre 1980,
soit 18 jours.
Lors de cette mission de dcouverte et de reconnaissance de la flore gnrale (cf. de Granville, 1980) une
partie du plateau tabulaire a t explore (principale-

ment la zone sud-ouest), ainsi que certaines criques et


forts de pente des versants est et ouest du sommet
jusqu la cte 600. noter que les altitudes indiques
en 1980 ne correspondent pas exactement celles
obtenues grce aux donnes gographiques actuelles
de plus grande prcision. Par exemple, laltitude du
plateau tabulaire est indique vers 750 m, alors quelle
est actuellement tablie 830 m. De ce fait, les autres
indications altitudinales de 1980 sont prendre titre
indicatif.

Le contexte
Lanalyse des rsultats de la mission Itoup 2010,
propose dans cette synthse, offre une premire valuation globale de la biodiversit du massif tabulaire.
Elle repose essentiellement sur la compilation des
rapports des naturalistes et des scientifiques restitus
au Parc amazonien de Guyane et sur des informations
recueillies au cours de conversations bilatrales.
Outre lintrt patrimonial du mont, qui est mis ici en
exergue par ses singularits floristiques et faunistiques, cette tude a pour vocation souligner les
caractristiques climatiques remarquables, imputables

laltitude et la configuration du massif, qui confrent


au mont Itoup un intrt stratgique pour le suivi des
impacts des changements climatiques.

Fort de montagne, fort des brumes...


Le mont Itoup est un massif imposant, coiff dun
plateau dtendue modeste culminant plus de 800 m
daltitude. Il ponctue lextrmit sud dun ensemble
montagneux vaste, dont environ 46 km sont situs audessus de lisoplthe dlvation 500 m. Le niveau de
base du mont (altitude des grandes criques environnantes) se situe environ 200 m daltitude : un transect de 4 km linaires permet donc dapprcier
lvolution des communauts vgtales et animales le
long dun gradient altitudinal de prs de 600 m.
Loriginalit du mont Itoup rside donc dans son
plateau sommital remarquable, deuxime plus haut
sommet de la Guyane, dans ltendue de ses forts
situes au-del de 500 m daltitude (46 km) et dans
son isolement des autres massifs montagneux : hormis
les quelques sommets, de superficie rduite, qui ponctuent le massif des merillons ( environ 6 km) et les
monts Bakra, situs une vingtaine de kilomtres, les
grands ensembles montagneux sont distant de plus de
50 km du mont Itoup.
Ltagement altitudinal de la vgtation en Guyane,
dcrit notamment par Granville (1990), a fait rcemment lobjet dun travail de thse (Delnatte, 2010). Au
regard des changements dans la composition floristique quil a mis en vidence sur le terrain, Delnatte
(2010) a propos de conserver la typologie des tages
de vgtation suivants :
du niveau de la mer jusqu 300 m, stend la fort
de basse altitude ;
de 300 et jusqu 500 m, se rencontre la fort du
pimont (basimontane forest sensu Huber, 1995) ;
de 500 700 m, apparat la fort submontagnarde ;
au dessus de 700 m, se distingue un facis de fort
de montagne de basse altitude (lower montane forest
sensu Lauer, 1986).
Le mont Itoup est donc recouvert dune fort submontagnarde montagnarde, mais cette fort peut-elle
tre qualifie de fort nuages ?
Les forts de brumes, ou forts nuages, sont, par
dfinition, des forts caractrises par la prsence
frquente et persistante de nuages en contact avec le
sol (Grubb, 1977). Selon leur densit, ces nuages
rasants, sont qualifis de brumes ou de brouillards. La
persistance des brumes affecte de faon trs significative les apports de lumire et dnergie et le rgime de
tempratures tout en fournissant un surplus deau soit
par une pluviomtrie plus abondante, soit par lapport
de prcipitations horizontales (interception de leau
des brumes). Le brouillard contribue donc gnrer
des conditions climatiques locales (que lon peut qualifier de microclimat) parfois trs diffrentes de celui
des milieux alentours.
Il existe une forte corrlation positive entre la prsence de brumes et laltitude. Cette relation implique
que les forts de brumes se situent prfrentiellement

dans une tranche altitudinale comprise entre le niveau


local de condensation par ascendance, cest--dire
laltitude o une parcelle dair en ascendance mcanique devient sature suite une expansion adiabatique due son refroidissement, et les tempratures
basses des hautes altitudes o la vgtation forestire
disparait au profit de flores plus adaptes (savanes
daltitude, appeles Pramo en Amrique du Sud).
En Guyane, laltitude nexcde pas 850 m et la vgtation ne subit pas de modification profonde de sa structure vers les sommets.
Le plafond nuageux (hauteur de la base des nuages)
varie considrablement dans lespace et le temps : il
dpend de la temprature de lair au niveau de la mer,
de lhumidit relative et du brassage de lair. Il est
donc difficile valuer localement et doit faire lobjet
de mesures prcises. Il est toutefois admis que les
forts des brumes apparaissent au-del de 500 m
daltitude et spanouissent surtout entre 1.200 et
2.500 m.
Selon Maybeck et al. (2001), le terme montagne
sapplique aux reliefs daltitude suprieure 500 m.
Au-dessous de ce seuil, les reliefs sont qualifis de
collines. Au sens strict, cette dfinition carte les
grands plateaux daltitude car elle tient compte galement de la rugosit du terrain (topographie). En
Guyane, les plateaux daltitude suprieure 500 m, de
faible tendue, peuvent toutefois tre considrs
comme des montagnes.
Ainsi donc, en Guyane, les forts situes des altitudes suprieures 500 m et dans des secteurs o la
topographie permet lapparition et le maintien de
brumes, peuvent tre considres comme des forts
des brumes de montagne (Tropical Montane Cloud
Forest). Nous attirons lattention sur les travaux de
Gradstein et al. (2010) qui ont mis en vidence la
prsence, notamment en Guyane, de forts de brume
en plaine. Ce type forestier assez atypique serait li
la proximit de la mer, des paysages gomorphologiques trs particuliers (terrains avec des nombreuses
collines et des valles assez larges) et un rgime des
vents trs faibles, notamment la nuit et en matine.
La prsence de brume est la principale caractristique
microclimatique qui conditionne la distribution et la
survie des plantes lies aux forts de brumes. Les
plantes montagnardes sont extrmement vulnrables
la scheresse (en possdant une marge troite de
scurit hydrique) : la prsence des brouillards minimise le dficit en eau des arbres et favorise donc la
survie des arbres (Oliveira et al., 2014).
La Nasa, dans la cadre du programme EOS (Earth
Observing System) destin lobservation long
terme des sols, de la biosphre, de latmosphre et des
ocans, offre des donnes extrmement prcises (250
m de rsolution spatiale) de la couverture nuageuse.

Figure 1 : Modle de la nbulosit de la Guyane 10h30 (Donnes


du Satellite Terra). La couverture nuageuse du mont Itoup (formation de nuages orographiques) est trs leve et significativement
plus importante que celle de la pnplaine alentour. Sources
NOAA/NASA.

Figure 3 : Modle de la nbulosit de la Guyane (Moyenne des


donnes des satellites Terra et Aqua). La baisse de la nbulosit
observe dans laprs-midi est compense par les fortes valeurs de
couverture nuageuse en fin de matine.

Figure 2 : Modle de la nbulosit de la Guyane 13h30 (Donnes


du Satellite Aqua). La couverture nuageuse du mont Itoup sest
relativement dissipe mais demeure nettement plus importante que
celle de la plaine de la Waki.

Ces donnes proviennent de MODIS (Moderate Resolution Imaging Spectroradiometer), une srie
dinstruments dobservation scientifique coupls un
systme embarqu satellitaire, lanc par la NASA
bord du satellite Terra en 1999, puis bord du satellite
Aqua (2002).
Les instruments enregistrent des donnes dans 36
bandes spectrales allant de 0,4 m 14,4 m avec une
rsolution spatiale de 250 m 1 km. Ensemble, les
diffrents spectromtres prennent une image complte
de la Terre tous les 1 ou 2 jours. Ils sont conus pour
fournir des mesures grande chelle de phnomnes
globaux, tels que les variations de la couverture nuageuse terrestre prsentes dans ce rapport (figures 1,2
et 3).

Biocnoses montagnardes en Guyane-:


tat de lart
Dune faon gnrale, les groupes floristiques tudis
par Delnatte (2010) rpondent diffremment aux gradients altitudinaux et ces rponses peuvent varier en
fonction des massifs.
Delnatte (2010) met lhypothse que la variation de
la diversit interfre dans la comparaison des massifs entre eux ; mais surtout que la diversit des caractristiques daphiques joue un rle important dans la
distribution des diffrents groupes tudis comme
souligns dans les tudes menes par lquipe de
Tuomisto lUniversit de Turku en Finlande (Tuomisto et al., 1995, 1998, 2002, 2003 ; Tuomisto et
Poulsen, 1996 ; Tuomisto et Ruokolainen, 1994 ;
Ruokolainen et al., 1997).
Il est indniable que le massif dItoup favorise la
formation de nuages orographiques bas qui permettent
le maintien dune fort (sub)montagnarde et de la
biocnose associe.
Les 3 groupes tudis par Delnatte (2010) prsentent
un patron de distribution altitudinal :
La diversit spcifique des Melastomataceaetend
ainsi augmenter avec laltitude. Cest une distribution que lon retrouve sur Atachi Bakka, DkouDkou et Galbao.
La diversit spcifique des ptridophytes semble
suivre une distribution avec une diversit maximale
aux altitudes mdianes. Cette distribution a t mise
en vidence sur Atachi Bakka, Cottica ainsi que sur le
versant ouest de la Trinit.
Les palmiers ne montrent pas de distribution particulire le long du gradient altitudinal. Toutefois, La
diversit spcifique des palmiers montre une diminution 500 m par rapport aux altitudes plus basses. Elle
semble cependant augmenter aux plus hautes altitudes.
Cest le cas sur Atachi Bakka, Galbao et le versant est
de la Trinit.

10

Ainsi, Delnatte propose de considrer les tages suivants :


du niveau de la mer jusqu 300 m, se trouve la
fort de basse altitude, mise en vidence par un cortge despces particulier de ptridophytes.
de 300 et jusqu 500 m, se trouve la fort du
pimont (basimontane forest sensu Huber, 1995). Elle
est dfinie par Granville (1990) comme une fort
haute sur pentes draines, vote jointive poussant
dans un sol argileux, profond et bien drain. Ce type
forestier a t mis en vidence par la composition des
Melastomataceae.
de 500 700 m, se trouve la fort submontagnarde.
Elle comprend notamment les forts sommitales sur
cuirasses latritiques et quelques zones de forts
nuage. Elle est mise en vidence essentiellement par la
modification de la composition des palmiers mais
galement et dans une moindre mesure avec les Melastomataceae.
au dessus de 700 m, apparat un facis de fort de
montagne de basse altitude (Lower montane forest
sensu Lauer, 1986). Ces forts sont dfinies par une
plus grande proportion en mousses, lichens et piphytes. Le sous-bois y est principalement compos
darbustes et dherbaces et les arbres y sont moins
levs que dans les formations de plaine. Ce type
forestier se caractrise dans les travaux de Delnatte
par sa composition en Melastomataceae et en ptridophytes.

Objectifs & mthodologies


Dispositif dtude
Le camp principal et la Drop Zone ont t installs
585 m daltitude sur le versant ouest du mont Itoup.
Le niveau de base (altitude des grosses criques environnantes) du massif se situe environ 200 m
daltitude plus de 3.500 m linaire louest du camp
principal.
Quatre layons de 3 km chacun (A, B, C et D) ont t
mis en place par les agents du PAG selon une configuration tablie pour les besoins de ltude Habitats de
lONF. Ce dispositif, rayonnant depuis le camp, a
structur la majorit des tudes : ces quatre layons ont
facilit laccs une vaste zone tout en servant de
dispositif direct pour ltude Habitats (ONF),
linventaire de mammifres (ONCFS) et des oiseaux
(Claessens & Renaudier).
En outre, les inventaires des amphibiens, des reptiles,
des chiroptres et des insectes ne se sont gure loigns de ce dispositif. Deux autres layons de 1 et
1,4_km (H et F) ont t ouverts afin de faciliter les
prospections naturalistes sur le plateau sommital.
Enfin, des extensions ont t ralises par lquipe des
ichtyologues afin de rejoindre les criques, tant sur le
versant ouest que le versant est. Les layons A et C

Carte 1 : dispositif dtude sur le mont Itoup (2010)


Source : SRTM 30m

traversent le massif douest en est depuis le piedmont


ouest jusquau mi-versant est en traversant le sommet
Tabulaire. Le layon B parcourt la crte sud en passant
par le sommet du mont Itoup. Le layon D monte
progressivement vers le nord du massif pour suivre la
ligne de crte jusqu un col sparant le sommet Tabulaire sud du sommet Tabulaire nord.

tude Habitats
Calendrier : 08 au 18 mars 2010
Equipe
Ouverture des layons : Gatan Mathoulin, Antonio
Lopes et Emeric Auffret (PAG DTC)
Inventaire forestier : Atidong Nano (ONF), Franois
Bagadi (PAG DTM)
Prises de donnes sur workabout : Jean-Pierre Simonnet (ONF)
Description des habitats, relevs topographiques et
sondages pdologiques : Olivier Brunaux et Stphane
Guitet ( ONF)
Relevs botaniques des plantes de sous-bois : Sophie
Gonzales (IRD, Herbier de Guyane)

Le dispositif mis en place par lONF pour le projet


Habitats est constitu de 4 layons de 3 km chacun,
inventoris sur 20 m de largeur. Chaque layon est
subdivis en placettes de 100 m environ sur lesquelles
sont rcoltes diffrentes catgories de donnes
Donnes dinventaire
Les arbres de diamtre >20cm et les palmiers prsentant un stipe form sont mesurs hauteur de poitrine
(D130) et leur essence est identifie par un nom vernaculaire correspondant une ou plusieurs espces.
Tous les palmiers atteignant 2 m de hauteur mais sans
stipes sont comptabiliss sans distinction de lespce.
La largeur de la zone de mesure (10 m de part et
dautre du layon) est contrle au tlmtre. Les
arbres en position limite sont comptabiliss une fois
sur deux.
Linformation principale tudie est donc la composition des peuplements darbres, recueillie par les ouvriers prospecteurs qui utilisent un rfrentiel vernaculaire de prs de 500 noms. Ces appellations correspondent parfois une espce mais plus gnralement
un groupe despces pouvant faire partie dun mme
genre, dune mme famille, voire faisant rfrence

11

plusieurs familles. Par ailleurs, certains noms issus de


dialectes diffrents peuvent tre synonymes ou navoir
au final aucune valeur taxonomique car se rfrant
un usage ou une caractristique physique non lie
lespce. La liste des 497 noms vernaculaires (245
aprs apurement par limination des synonymies
exactes) et ses liens avec les 1580 espces botaniques
ont t affins et complts en sappuyant sur les avis
dexperts (Brunaux et Sabatier, np.) et les donnes en
ligne de lHerbier de Guyane (CAY). La prcision
taxonomique de linformation vernaculaire a t teste
sur un jeu de donnes indpendant (2200 arbres sur 4
placettes permanentes dtermines botaniquement).
Les noms vernaculaires ont t classs en 3 catgories
en fonction des diffrents niveaux de prcision thoriquement attendus et les erreurs de dtermination
commises en fonction de ces types ont t mesures.
Une quatrime catgorie concerne les noms vernaculaires sans valeur taxonomique correspondant des
espces inconnues des prospecteurs ou non dterminables. Appliques au jeu de donnes utilis pour la
dtermination des habitats forestiers, la fiabilit estime au niveau des familles botaniques est de 93% et
celle estime pour le niveau le plus fin (espce ds que
possible, ou genre, ou famille) est de 79%.

tendue
du
dispositif
dinformation recueillie

Donnes msologiques
Un type topographique est attribu chaque tronon
(les placettes sont subdivises en tronons dlimits
par les ruptures de pente et de position topographique)
puis le type dominant a t attribu la placette. La
pente de chaque tronon est galement mesure au
clisimtre dans la direction du layon et dans la pente
maximale. Les longueurs sont contrles au tlmtre.
La surface de la placette et son altitude moyenne sont
calcules partir des donnes releves sur le terrain.
Labondance de diffrents indicateurs potentiels de
milieux est aussi note : blocs de cuirasse, prsence de
palmiers de zones humides (Euterpe oleracea) ou de
pseudo-indicateurs dans la strate basse (bambous,
Rapateaceae, etc.).

Calendrier : 07 mars au 02 avril 2010


Equipe
Jean-Franois Molino ( IRD-UMR AMAP) ;
Daniel Sabatier (IRD-UMR AMAP) ;
Michel Tarcy (IRD-UMR AMAP).

Donnes de structure
Des notes relatant la densit du sous-bois, le degr de
fermeture de la canope, les densits de lianes et de
palmiers sont attribues chaque placette. La hauteur
moyenne de canope est estime partir de mesures
au tlmtre rptes ds que possible sur chaque
placette. Les chablis sont inventoris en estimant leur
taille et emprise sur le layon au tlmtre. Densit
(tiges.ha-1) et surface terrire (m.ha-1) des arbres et
palmiers sont calcules partir des donnes
dinventaire.
Des sondages pdologiques sont raliss en diffrents
points stratgiques de chaque layon afin de reprsenter
la variabilit topographique et gologique du secteur.

et

quantit

Description de 144 placettes de 100 m * 20 m


(0,2_ha)
34 sondages pdologiques. Les prlvements ont t
tous conservs afin de faire lobjet dune reprise de
description aprs schage. Une fosse de 2 m de profondeur a t ouverte au dbut du layon C sur une
croupe du versant afin deffectuer des prlvements
analysables en laboratoire (notamment analyse du
C13 permettant de dtecter dventuelles anciennes
phases de savanisation).
Une deux placettes de descriptions botaniques du
sous-bois (5 x 5 m chacune) ralise chaque sondages pdologiques.
Enfin, des prlvements de cambium ont t effectus
sur les genres Symphonia, Carapa, Eschweilera, Simarouba et Jacaranda sur 90 individus, des fins
danalyses gntiques pour le laboratoire de lUMR
Ecofog.

Les communauts darbres

Les distances parcourir sur les pentes fortes ont


amen lquipe de lIRD rduire le nombre de relevs sur le plateau (4 ont t excuts) ainsi que sur la
face est (2 ont t excuts). La disposition en transect
est-ouest a t conserve ; le versant ouest tant plus
compltement chantillonn que le versant est.
Lextension du dispositif final est de 6 km.
Pour chaque zone altitudinale un couple de relevs a
t ralis ; il a t dcid, compte tenu de
limportance dans le paysage des talwegs et des milieux hydromorphes qui leur sont associs, de raliser
lun des relevs en secteur non hydromorphe, lautre
en secteur hydromorphe.
Ajustement du dispositif conscutif au test de faisabilit in situ :
Aprs avoir valu les temps de dplacement et les
temps dexcution dans les conditions inhabituelles
(forte dclivit ; 3 personnes ralisant le relev au lieu
de 5 habituellement), lquipe de lIRD a dcid de
rduire de moiti environ le nombre de relevs mais
de garder un chantillonnage relativement lev en
doublant le nombre dindividus intercepts chaque
point dinventaire.
Un relev peut donc tre dfini comme un dispositif
en point-quadrat de 240 m de long, sur lequel 13
points dinventaire sont distants de 20 m entre eux. A
chacun de ces points dinventaire, 8 arbres de D130 >
10 cm sont retenus (les 2 plus proches dans chacun

12

des quadrants dfinis par laxe du relev et sa perpendiculaire), soit au total 13*8 = 104 arbres par relev.

Mise en place des relevs


Des tranches altitudinales de 100 m, dont une sur deux
est chantillonne, ont t dfinies daprs les courbes
de niveau obtenues grce aux donnes SRTM (qui
doivent tre corriges de la hauteur moyenne des
arbres car ce systme radar ne pntre pas la vgtation). Les relevs ont t positionns par paires raison dune paire par tranche altitudinale. Pour chacune
delles, lun des relevs est en situation topographique
convexe (croupe, plateau), lautre en situation topographique concave (talweg, bas-fond).
Les cartes topographiques et le modle hydrologique
tablis par lONF ont t dune grande utilit pour la
slection des secteurs chantillonner. Boussole,
topofil et rubalise sont utiliss pour le positionnement
sur le terrain.

Excution du relev sur le terrain


Une fois ralise la slection des arbres intercepts par
le relev, chaque individu est mesur (D130), identifi
vue (examen de la base du tronc, du rhytidome et de
lcorce vivante ; examen des feuilles et ventuels
fruits ou fleurs aux jumelles 10*40), tagu (peinture
de marquage forestier), positionn (distance au point
dinventaire mesure par ultrasons grce un appareil
Vertex situ sur le point et un transpondeur plac
sur le tronc). Lorsque lidentification vue nest pas
consensuelle entre les 2 botanistes du groupe ou que
lespce est considre comme inconnue, peu connue,
rare ou difficilement identifiable vue, un chantillon
(rameau feuill, avec fleur et/ou fruits lorsque cela est
possible) est prlev laide soit dun chenilloir
(perche de 10 m), soit dun fusil (calibre 12). A
chaque point, larbre dominant dans un rayon de 10 m,
cest--dire formant la canope, est mesur (D130 et
hauteur) et identifi et/ou chantillonn comme les
autres. La mesure de la hauteur est ralise laide de
lappareil Vertex en mode ultrason, procdure 2 points
(distance + angles de vise de la base et du sommet de
la couronne).

Echantillonnage et traitement des herbiers


Trois types de collection ont t raliss : les chantillons dherbier prennes (dits herbiers) qui seront dposs dans les Herbiers internationaux ; les collections
de travail destines rester au laboratoire (dites rfrences) et enfin les collections pour tudes gnomiques (phylognie molculaire et barcoding). Les
deux premiers types sont des portions de rameaux
feuills, fertiles (fleurs / fruits) si cela est possible ; le
troisime est constitu dune fraction de feuillage
jeune (ou de cambium) dshydrate au silicagel dans
un sachet hermtique.
Les vrais herbiers sont constitus de 4 6 (1-8) rpliquas qui seront dposs en priorit lHerbier de
Guyane et dans celui o travaille un spcialiste de la

famille botanique laquelle lchantillon peut tre


rattach. Afin dviter de saturer les lieux de collection, mais aussi parce que les spcialistes ne prtent
que peu dattention au matriel strile, seuls les chantillons fertiles et les chantillons striles despces
inconnues ou peu documentes font lobjet dun herbier. Les autres seront conservs dans la collection de
travail ou seront dtruits aprs un examen minutieux
permettant leur identification botanique. Les collectes
font lobjet dun examen attentif qui permet de vrifier/corriger lidentification de terrain, associer les
chantillons au sein dun mme morphotaxon lorsque
lespce nest pas connue, relever des particularits
morpho-anatomiques utiles pour lidentification.
Seules les collectes mises en herbier font lobjet dune
description dtaille. De nombreux clichs sont raliss pour documenter les rcoltes et faciliter leur tude
ultrieure, et galement pour documenter les espces.
Les chantillons pour la gnomique sont rfrencs
par un herbier ou par une collection de travail.
Environ 43% des arbres tudis lors des relevs ont
t chantillonns, soit un total de 454 arbres (environ
65% au fusil). Ces chantillons ont permis la ralisation de 101 collections dherbier, 293 collections de
travail et 90 collections pour gnomique.
De plus, 85 collections dherbier ont t ralises en
dehors des relevs, soit proximit, soit sur les voies
(layons) dexploration ou en marge de celles-ci. Elles
reprsentent pour lessentiel des arbres peu connus ou
dont lidentification pose problme, mais aussi des
arbustes, lianes, hmi-piphytes et herbaces.
Dautre part, et titre indicatif, un recensement vue
des espces darbres non interceptes par les relevs,
ni collectes pour herbier, a t ralis chaque fois que
possible afin de complter la liste des espces arborescentes du site. Ce complment na pas fait lobjet dun
protocole particulier.

Faisabilit
Le protocole de relev sest avr ralisable par 3
personnes (dont 2 botanistes). En moyenne un relev
(13 points sur 240 m interceptant 104 arbres et les
arbres dominants) ncessite 2 jours de travail (traitement des chantillons inclus).

Etendue
du
dispositif
dinformation recueillie

et

quantit

Dix relevs de 104 arbres chacun ont t raliss selon


un axe est-ouest interceptant cinq niveaux altitudinaux
sur la face ouest (sommet compris) et deux sur la face
est (sommet compris).
Lamplitude du relev final est de 6 km : 4,5 sur le
versant ouest et 1,5 sur le versant est.
Au total, 1098 arbres (1040 directement intercepts +
58 dominants ajouts) ont t tudis au lieu des 1300
1400 prvus dans une configuration optimale. A titre
de comparaison, ltude des monts La Fume Sal
par Mori & Boom (1987), utilisant un protocole assez

13

proche, comportait 800 arbres pour 4 km linaires de


relevs point-quadrat.

Composition floristique en plantes suprieures et fougres


Calendrier : 26 fvrier au 03 avril 2010
Equipe
Tostain Olivier (ECOBIOS)
Lotard Guillaume (ECOBIOS)
Pelletier Vincent (ECOBIOS)
Michel Boudrie (expert indpendant)
Lquipe ECOBIOS sest fixe lobjectif de dresser un
inventaire aussi large que possible de diverses disciplines. Linventaire botanique a form llment principal de ces recherches : lobjectif tait de collecter le
maximum de matriel fertile sur la plus grande diversit dhabitats possibles, depuis le pimont de la face
ouest du massif jusquaux diffrents sommets et talwegs les creusant sur leurs pentes.
Les inventaires floristiques ont port sur les plantes
suprieures (Olivier Tostain, Guillaume Lotard, Vincent Pelletier) et les fougres (Michel Boudrie, Olivier
Tostain & Guillaume Lotard).
Lchantillonnage est quilibr entre les diffrents
milieux ou types biologiques (sous-bois, milieux ouverts, chablis, piphytes, arbres, etc.) avec toutefois un
dficit notoire dans la rcolte des grands arbres et
lianes de la canope. Les communauts darbres ont
t spcifiquement tudies, de faon trs complmentaire, par lIRD et lONF. Les grandes lianes demeurent le groupe le moins collect de la mission.
Avant le dpart de la mission, le bilan des rcoltes de
1980 a t effectu et la liste des spcimens et taxons
dj rcolts a t dresse. Cette premire liste a dj
permis de voir quelles espces navaient pas t collectes lpoque et qui pourraient tre prsentes sur
ce massif. Un protocole de rcoltes a donc t tabli.
Ainsi, la mission a consist :
effectuer le recensement des taxons prsents,
diffrentes altitudes et dans diffrents milieux, aussi
bien en piphytes, hmi-piphytes, quen terrestres ;
effectuer des prlvements en silicagel pour tudes
ADN spcifiques, avec rcoltes dun spcimen
dherbier tmoin.
Les spcimens ont t ensuite dtermins, tiquets,
monts et enregistrs dans la base de donnes Aublet2 de lHerbier CAY.

Les fougres
Pour les fougres en particulier, M. Boudrie, prsent
la mission Itoup 2010, a effectu des prlvements
des taxons nouveaux pour le secteur, selon les normes
des rcoltes permettant leur identification une fois
sches (collecte de la plante avec son rhizome, car le
rhizome ou ses cailles sont souvent un caractre
discriminant ; frondes matures, bien tales de faon
observer tous les caractres une fois sches), avec
suffisamment dexemplaires pour la distribution aux
diffrents herbiers.
La mission de 2010 a permis de rcolter 2,5 fois plus
de spcimens que lors de celle de 1980 qui tait une
expdition itinrante et de reconnaissance. Ceci a t
possible grce la prsence dun camp de base permanent tout le temps de la mission, de plusieurs fours
herbiers pour le schage des spcimens et de plusieurs rotations dhlicoptre au cours desquelles les
paquets de plantes dj sches ont t vacus sur
Cayenne.
Tous les spcimens de ptridophytes rcolts lors de
cette mission sont dposs lHerbier de Guyane
(CAY), Cayenne. Dans la mesure du possible et du
matriel disponible, un double a t expdi
lherbier du Musum National dHistoire Naturelle de
Paris (P), ainsi quaux diffrents herbiers participants
au programme Flora of the Guianas (B, BBS,
BRG, K, L, NY, US). Selon les familles, genres ou
espces des groupes en cours de rvision, les spcimens litigieux ont t envoys aux diffrents spcialistes concerns.
Les spcimens enregistrs dans la base de donnes
Aublet2 de lHerbier CAY servent divers objectifs
:
donnes complmentaires pour de nombreux
taxons sur les cartes de rpartition en Guyane (dans le
cadre de louvrage en cours sur les ptridophytes de
Guyane) ;
intgration des donnes (listes de spcimens) dans
les listes dexsiccatas des fascicules de la Flora of the
Guianas, avec intgration des taxons nouveaux au
sein des descriptions et cls de dtermination ;
prparation, le cas chant, de publications spcifiques dans le cas de la dcouverte de taxons nouveaux pour la science ;
tudes ADN et phylogntiques par certains spcialistes dans le cadre de la rvision taxonomique de
certains groupes.
Enfin, les localits des spcimens rcolts ont t
resitues dans le quadrillage cartographique en degrsminutes-secondes, de faon tre intgres dans la
base de donnes Aublet2 de lHerbier CAY.
Lobjectif de cette mission tait de dresser un inventaire le plus complet possible des ptridophytes du

14

massif du mont Itoup sommet Tabulaire, de retrouver les espces dj dcouvertes en 1980 et notamment les plus rares, et de complter la liste dj tablie.
Grce au rseau de layons ouvert par les quipes de
lONF et du PAG, plusieurs botanistes sont intervenus
soit successivement, soit simultanment. Au total, ce
sont 263 spcimens de ptridophytes qui ont t rcolts en 2010 et 2014, en complment des 105 rcolts
en 1980.
62% des rcoltes ont t ralises par M. Boudrie
(dont lobjectif tait essentiellement les ptridophytes), 28% par lquipe O. Tostain G. Lotard
V. Pelletier (dont la mission tait lensemble de la
flore) et 10% par S. Gonzalez (dont la mission tait
centre sur la caractrisation des habitats et sur les
plantes du sous-bois).

Les mammifres non-volants & les espces gibiers


Calendrier : 22 septembre au 01 octobre 2010
Equipe
Ccile Richard-Hansen (ONCFS)
Gatan Matoulin (PAG DTC)
Pierre Alunawale (PAG DTM)
Tapinkili Anaiman (PAG DTM)
Kamran Khazraie (PAG DTC)

Mthode dinventaire
Afin de pouvoir comparer les rsultats de la mission
Itoup 2010 avec les prcdents travaux mens ailleurs en Guyane, et parce quelle est bien adapte
linventaire de la faune en fort, la mthode des transects linaires a t utilise par les agents du PAG et
de lONCFS. Cette mthode est uniformment adopte
dans la plupart des tudes en fort amazonienne
(Peres, 1999 ; Peres & Dolman, 2000).
Le site a t mis en place lors de la mission du mois de
mars 2010 par les agents de la dlgation Centre du
PAG. Il est compos de 4 transects de 3 km de longueur chacun, partant du camp de base. Les pentes
abruptes ont parfois fait obstacle la ralisation de
trajets parfaitement rectilignes tout le long des transects.
Les layons sont parcourus par des observateurs entrans se dplaant une vitesse infrieure 1 km/h,
entre 7h 11h le matin et 15h 18h laprs midi, de
manire rpte jusqu cumuler plus de 100 km / site.

lespce. Dans quelques cas, des contacts uniquement


auditifs peuvent tre utiliss, ds lors quils permettent
une identification fiable (agoutis par exemple).
Cinq observateurs ont particip au comptage pendant
8 jours conscutifs parcourant au total 174.9 km. Cet
effort a permis dobtenir une diversit stabilise et
labondance de la plupart des espces.

Mthode danalyses
Labondance des espces contactes lors des prospections est dabord exprime en nombre dobservations
par dix kilomtres parcourus. Dans le cas des animaux
vivant en groupe, cette valeur est ensuite multiplie
par la taille moyenne des groupes estime sur le site
partir des rencontres pour lesquelles leffectif complet
du groupe a pu tre valu. Les distances perpendiculaires dobservation sont galement releves, permettant destimer la probabilit de dtection des espces,
et dans un second temps daborder des calculs de
densits, par la mthode de distance sampling.

Autres donnes
Afin de complter les donnes issues des relevs sur
transects, les observations provenant des autres
quipes ont t agrges dans ce rapport pour fournir
une liste la plus complte possible de la faune du massif dItoup.
Notons limportante contribution des ornithologues
(O. Claessens & A. Renaudier) qui ont saisi la totalit
de leurs observations de mammifres.

Avifaune
Calendrier : 01 au 10 octobre 2010
Equipe
Olivier Claessens (expert indpendant)
Alexandre Renaudier (GEPOG)

Matriel
Lquipement de base port en permanence par chacun des deux observateurs se composait de :
- jumelles,
- enregistreur numrique + micro directionnel professionnel (Sennheiser K6 ME66),
- iPod contenant une banque de sons de rfrence
(enregistrements personnels et issus de collections
prives, de CD ou du site internet xenocanto
www.xenocanto.org/),
- mini haut-parleur,
- carnet de notes.

Tous les animaux arboricoles et terrestres prsents sur


le site sont nots. Dans la majorit des cas, le contact
visuel est privilgi du fait des informations collectes
(nombre danimaux dans les groupes, composition du
groupe). Les vocalisations peuvent permettre de dtecter la prsence dun animal mais doivent tre suivies
dune observation directe pour dterminer prcisment

15

Mthodes de prospection
En labsence dobjectif danalyse quantitative et comparative, linventaire ornithologique dune zone ne
ncessite pas la mise en uvre dun protocole labor.
Lobjectif premier est de noter le maximum despces.
Pour cela, les seules contraintes sont de parcourir le
terrain de manire aussi complte que possible, de
visiter lensemble des habitats prsents, et ce aux
heures adaptes au rythme journalier dactivit des
diffrentes espces.
La prospection sest faite en utilisant les layons, plus
rarement en circulant hors layon. Except le jour
darrive et en de rares occasions par la suite, les deux
observateurs ont parcouru la zone sparment pour
une meilleure couverture du terrain. Les observations
ont dbut chaque jour avant laube (~ 05h) et se sont
poursuivies tout au long de la journe et jusqu la
nuit tombe, des observations incidentes pouvant avoir
lieu nimporte quel moment de la journe ou de la
nuit.
Chaque layon a t parcouru alternativement par les
deux observateurs, principalement entre 06h (07h) et
14h, parfois nouveau en fin daprs-midi, en marchant trs lentement et en sarrtant souvent pour
observer ou enregistrer les oiseaux rencontrs. La
rencontre dune ronde (rassemblement plurispcifique) donnait lieu une observation prolonge pour
tenter de voir le maximum despces.
Des sances fixes dobservation ont t effectues en
lisire de la DZ, seule ouverture proximit du camp
permettant lobservation de la canope et des oiseaux
en vol au-dessus de la fort. Ces sances ont eu lieu
principalement en fin daprs-midi, occasionnellement
en milieu de journe.
Enfin, des coutes nocturnes ont t ralises proximit du camp et de la DZ et sur les layons dans un
rayon de quelques centaines de mtres autour du
camp. Pour multiplier les secteurs dcoute nocturne,
les observateurs ont pass chacun une deux nuits
dans des camps individuels situs respectivement
700 m (layon D, altitude 610 m), 1.700 m (layon C,
altitude 380 m) et 3.000 m (layon B, altitude 720 m)
du camp de base. Lenregistrement des vocalisations a
t ralis de manire quasi systmatique, notamment
dans le cas despces rares, mconnues ou dont
lidentification mritait confirmation. Ces enregistrements constituent un outil indispensable lors de toute
tude et inventaire ornithologique en fort. Ils ont pour
but de confirmer si ncessaire et apporter la preuve de
lidentification, dattirer loiseau par la repasse de son
chant en vue de son observation visuelle ou de sa
capture, dalimenter la banque de sons de rfrence et
permettent parfois didentifier ou de dceler a posteriori des espces mconnues.
Plusieurs des enregistrements raliss au cours de
cette mission sont accessibles sur :
http://www.xenocanto.org/america/.

16

Les espces doiseaux dterminantes ZNIEFF, les


espces spcialistes des forts daltitude, ainsi que les
espces rares ou absentes de la liste des oiseaux de
Guyane mais espres sur la zone dtude, ont t
recherches de manire cible et systmatique lors des
prospections. La repasse de leur chant partir dune
banque de sons de rfrence a t effectue dans les
habitats jugs favorables afin de les faire se manifester
le cas chant.

Informations releves
Les observations ont t plus souvent auditives (78 %
des donnes) que visuelles. Chaque oiseau vu ou entendu tait not, de mme que le type de contact (oiseau vu ou entendu, type de vocalisation cri, chant,
alarme, couple ou groupe familial, rassemblement
plurispcifique), ventuellement le comportement
(parade, transport de nourriture, ), la localisation et
laltitude. Lidentification se faisait sur place, ventuellement avec recours immdiat la banque de sons
de rfrence pour confirmer si ncessaire
lidentification auditive. De mme, la repasse du chant
spcifique, en faisant ragir loiseau repr, permettait
au besoin de confirmer son identit.
Les observations ont t rparties selon 3 classes
daltitude :
fort de plaine : altitude infrieure 500 m ;
fort submontagnarde : altitude comprise entre 500
m et 750 m ;
fort sommitale : altitude suprieure 750 m.
Ces limites sont approximatives mais rpondent aux
diffrences de structure et de composition des peuplements forestiers associs chacun de ces tages
(Brunaux & Guitet, 2010 ; Sabatier & Molino, 2010).
La localisation prcise et laltitude des observations
les plus remarquables ont t releves grce aux distances indiques sur les balises jalonnant les layons,
ou par GPS.

Effort dobservation
La premire et la dernire journe, jours darrive et
de dpart sur la zone, nont t que partielles.
Leffort
dobservation
est
donc
de
18
jours*observateurs (8 journes pleines plus 2 demijournes)
et
dpasse
au
total
les
180
heures*observateurs si lon retient une dure thorique
minimale de 10 heures par jour.
Leffort a t peu prs quitablement rparti entre les
diffrents layons, avec un minimum de 27
heures*observateurs sur le layon B et un maximum de
48 heures observateurs sur le layon C, sur un total de
148 heures notes. Ces valeurs sont trs approximatives et lgrement fausses par les nuits passes sur
les layons B, D et F, car nous ntions bien sr alors
pas veills en permanence. Le temps pass aux alentours du camp de base et de la DZ na pas t comptabilis.

Les chiroptres
Calendrier : 18 mars au 03 avril 2010
Equipe
Marguerite Delaval (ONF)
Mal Dewynter (ONF)
Vincent Pelletier (ECOBIOS)
Nicolas Surugue (PAG SPNC)
Afin dvaluer linfluence du gradient altitudinal sur la
communaut de chiroptres, les captures ont t effectues trois altitudes diffrentes : 400 m, 600 m et
800 m, le long des layons C, A et F.

Mthodes de capture
Les captures de chauves-souris ont t ralises avec
des filets japonais en nylon de 12 m de long avec 4
poches horizontales et un maillage de 18 mm.
Les filets taient installs au cours de laprs-midi et
ouverts de la tombe de la nuit vers 18h00 jusquau
lendemain matin. 10 filets de 12 m taient installs
soit un linaire total de 120 m chaque station.
Chaque site (400 m, 600 m et 800 m) a fait lobjet de
4 nuits de captures. Afin de procder un inventaire le
plus complet possible, les choix des lieux de captures
ont t dfini afin dassurer une couverture la plus
large possible de la zone, en intgrant les diffrents
types de milieux rencontrs. Ainsi, les filets taient
dplacs dau moins 100 m entre chaque session de
captures.
La mission sest droule durant la saison des pluies
mais les captures effectues en Guyane, notamment
aux Nouragues, sur toute lanne, nont pas permis de
mettre en vidence de variations saisonnires notables
dans la composition du peuplement (Delaval, 2004).
Notons que lefficacit des filets est trs diffrente
selon la morphologie et le comportement des espces.
Ainsi, un biais en faveur de certaines espces a t
dmontr (Charles Dominique et al., 2001). La mthode utilise noffre donc pas la mme chance de
capture lensemble de la faune de chiroptres. Seules
les espces voluant faible hauteur peuvent tre
captures par les filets quvitent en partie les
chauves-souris insectivores qui volent plus haut et qui
sont dotes dun systme dcholocation plus efficace.
Les animaux capturs ont t identifis grce la cl
de dtermination de Charles Dominique et al. (2001)
complte par des publications spcialises plus rcentes.
Le poids, la longueur de lavant-bras, le sexe, la maturit (ossification des cartilages des articulations des
ailes) et ltat reproducteur des femelles ont t nots
pour chaque individu.

Effort et taux de captures


Labondance a t standardise par le calcul du taux
de captures : (nombre total de captures) / (effort de
capture), leffort de capture tant le nombre dheures
par le nombre de mtres de filet ayant servi
lchantillonnage.

Richesse spcifique
La richesse spcifique est le nombre despces prsentes dans un milieu donn. Une batterie doutils
statistiques est disponible pour estimer la richesse
spcifique : nous avons choisi dutiliser des courbes
daccumulation despces. Cette technique est utilise
dans lestimation de diffrents groupes en milieu tropical (Moreno & Halffter, 2000). Le principe
dutilisation de ces courbes repose sur laccumulation
progressive
despces
au
fil
de
leffort
dchantillonnage.
Cet effort est peru soit par le nombre cumul
dindividus
soit
par
celui
des
occasions
dchantillonnages (nuit piges, nuit filet). Le
nombre dindividus est la meilleure mesure de leffort
dchantillonnage quand la densit varie entre les sites
(Moreno & Halffter, 2001; Willott, 2001). Ainsi, sont
construites des courbes de rarfaction (ou courbes de
Mao Tau) correspondant 100 r-chantillonnages
alatoires raliss grce au logiciel estimateS* rendant
alatoire lordre daccumulation des espces au fil des
individus. Ceci permet donc de saffranchir de
lhtrognit de lchantillonnage (Colwell et al.,
2004).
Parvenir un inventaire exhaustif ncessiterait un
norme effort dchantillonnage sur du long terme ce
qui est quasi impossible. De ce fait, des estimateurs de
richesse spcifique existent en fonction du jeu de
donnes disponible.
Ainsi, Chao (1984) estime le nombre despces non
observes partir de celles observes 1 ou 2 fois en se
basant sur les donnes dabondance. Le logiciel estimateS permet de calculer cette estimatation.
*(http://viceroy.eeb.uconn.edu/estimates)

Les amphibiens
Calendrier : 18 mars au 03 avril 2010
Equipe
Mal Dewynter (ONF)
Lorsque lide dune mission pluridisciplinaire sur le
mont Itoup a t lance en 2009, lintrt dtudier la
communaut damphibiens a t suggr lquipe du
Parc amazonien de Guyane. Certains amphibiens sont
intimement lis aux grands massifs montagneux et il
tait prvisible de les retrouver sur le mont Itoup ; la
dcouverte de nouvelles espces ntant pas exclue.
En ayant lesprit que le mont Itoup tait susceptible
de sinscrire dans un rseau de placettes permanentes
pour le suivi des changements globaux, nous avons
propos un protocole de caractrisation des commu-

17

nauts damphibiens par un chantillonnage de quatre


stations altitudinales (200, 400, 600 et 800 m).
Il sest avr que la faune prsente 400 m tait tout
fait caractristique des forts de plaine, tandis que la
batrachofaune au-del de 500 m prsentait bien un
cortge singulier. Le protocole a donc t modifi in
situ : afin daugmenter leffort dchantillonnage sur
les stations 400, 600 et 800 m, ltude de la station
200 m a t annule.
Les secteurs prospects (sites des bivouacs), ont t
regroups autour de trois stations correspondant
des tages altitudinaux : la station 400 m (bivouacs
et prospections entre 350 et 400 m daltitude le long
du layon C) ; la station 600 m (bivouacs et prospections entre 570 et 630 m daltitude le long du layon A)
et la station 800 m (bivouacs et prospections entre
800 m et 830 m daltitude le long du layon F).

Toutes les espces captures ont t photographies


sur le terrain laide dun rflexe numrique Canon
EOS 40D quip dun objectif macro 100 mm.

Les inventaires batrachologiques se sont ports exclusivement sur le flanc ouest et le plateau du mont Itoup. La pente a t prospecte selon un gradient altitudinal (de 350 m 830 m) le long des layons C et A ; le
plateau, selon le layon F.
4 jours conscutifs ont t consacrs au plateau du
mont Itoup (station 800 m), tandis que le camp de
base (station 600 m) a fait lobjet de 6 jours de
prospections non continues. Quant la station
400_m, elle a t inventorie durant 5 jours conscutifs.

La mthode principale a t la pche la rotnone. Cet


ichtyotoxique reprsente la seule mthode exhaustive
de pche mais son effet se fait sentir sur plus dune
centaine de mtres en aval du lieu de dversement.
Les poissons ont t collects tout dabord sur un
secteur restreint pour les tudes cologiques effectues
par Sbastien Brosse, puis sur tout le tronon ayant
subi leffet de la rotnone, savoir une centaine de
mtres.
Afin de prospecter dautres microhabitats ou de combler de manire cible lchantillonnage pour des
tudes populationnelles, des pches lpervier (3 m
de diamtre et maille de 1 cm) et lpuisette (maille
de 4_mm) ont t galement ralises.

Les amphibiens ont t inventoris selon les mthodes


du VES (Visual Encounter Survey) et du AES (Acoustic Encounter Survey) sans standardisation, au cours
de prospections diurnes et nocturnes : tous les amphibiens dtects la vue ou au chant, quelque soit leur
distance lobservateur, sont pris en compte dans
linventaire. Bien que les mthodologies VES et AES
non standardises ne permettent pas danalyses quantitatives, elles demeurent bien plus pratiques et efficaces que le Standardized Visual Transect Sampling
(SVTS) et le Standardized Acoustic Transect Sampling (SATS) qui imposent de parcourir de manire
rcurrente des transects (environ 500 m de long) en ne
tenant compte que des individus prsents sur une
bande dun mtre de large.
Toutes les espces captures ont t photographies
sur le terrain laide dun rflexe numrique Canon
EOS 40D quip dun objectif macro 100 mm.

Les reptiles
Calendrier : 18 mars au 03 avril 2010
Equipe
Mal Dewynter (ONF)
Les Reptiles, groupe composite comprenant les
Serpents, Lzards, Tortues et Camans, ont t observs fortuitement au cours des dplacements lis
linventaire des amphibiens. Aucune mthodologie
particulire na t mise en place si ce nest une attention particulire porte aux lzards observs et la recherche en dbut de nuit de serpents nocturnes.

18

Les poissons
Calendrier : 01 au 10 octobre 2010
Equipe
Juan I. Montoya Burgos (DZBA, Universit de Genve)
Nicolas Surugue (PAG SPNC)
Sbastien Brosse (UPS, UMR Ecolab, CNRS Toulouse)
Alain Thomas (Laboratoire dhydrobiologie de lUPS,
Toulouse)

Mthodes de pche

Mesure des paramtres physico-chimiques et


dbits
Pour chaque station de pche, les paramtres physicochimiques suivants ont t prlevs laide dun appareil de mesure multiparamtres numrique (Multi
3430 de WTW) : temprature de leau, pH, conductivit, oxygne dissout. De plus, la turbidit a t mesure laide dun turbidimtre (TN100 de Eutech Instruments).
Le dbit hydrique a t estim en utilisant les mesures
de largeur, profondeur et vitesse du courant. La
moyenne de deux quatre mesures a t utilise.

Prlvement dchantillons de tissus et prservation des spcimens


Pour les tudes gntiques, un prlvement de morceau de nageoire a t effectu sur tous les individus
jusqu concurrence de vingt par espce et sur chaque
station. Le morceau de tissu a t tiquet et conserv
dans de lthanol 80%. Un numro correspondant a
t fix sur lindividu chantillonn, qui a t son
tour fix dans du formol 4% pour des tudes morphologiques ultrieures. Les spcimens fixs ont t
dposs au Musum National dHistoire Naturelle
(MNHN), Paris.

Analyses gntiques
LADN a t extrait des tissus avec le Kit PeqGold
Tissu DNA (kit de Peqlab). Les amplifications par
Polymerase Chain Reaction (PCR) ont t ralises
dans un volume de 50 l avec 0.3 units de Taq DNA
Polymerase de New England BioLabs. Le profil PCR
est le suivant : dnaturation initiale de 2 minutes
94C, puis 38 cycles avec dnaturation 94C pendant 30 secondes ; accrochage des amorces 53-55C
(selon le couple damorce) pendant 30 secondes, puis
longation 72C pendant 1.5 minute. Les PCR ont
t termines avec une longation finale de 5 minutes
72C. Pour ltude sur les Ancistrus, le gne nuclaire 1cAn25 a t amplifi avec les amorces
1cAN25D et 1cAN25RO (Montoya Burgos et al., in
prep). Pour lanalyse des genres Lithoxus et Harttiella,
le gne mitochondrial COXI a t amplifi avec les
amorces silCOID et silCOIR (Bahechar and Montoya
Burgos, in prep). Les squences ont t faites par la
compagnie Fasteris Genve. Les squences ont t
manuellement alignes avec le programme BioEdit*
de Tom Hall. Le meilleur modle dvolution des
squences a t dtermin avec le programme ModelTest (Posada and Crandall, 1998). Les reconstructions
phylogntiques ont t infres avec le programme
Treefinder de Gangolf Jobb**. Pour lanalyse du
genre Harttiella, ce mme programme a t utilis
pour calculer la matrice de distance gntique.
Pour le genre Harttiella, uniquement la rgion correspondant au standard du Barcode of Life section FishBOL a t analyse (570 bp). Le calcul de la matrice
de distance gntique entre les reprsentants de diffrentes populations et espces a t effectu avec le
modle K2P, comme standardis dans FishBOL.
*www.mbio.ncsu.edu/bioedit/bioedit.html
**www.treefrinder.de

Lentomofaune
Calendrier : 08 mars au 02 avril 2010
Equipe 1 (du 08 au 18 mars 2010)
Denis Blanchet (SEAG),
Pierre-Henri Dalens (SEAG),
Eddy Poirier (SEAG)
Equipe 2 (du 18 mars au 02 avril 2010)
Serge Fernandez (SEAG),
Eddy Poirier (SEAG),
Julien Touroult (SEAG)

Les placettes ont t disposes en vitant la prsence


de bois mort frais, connu pour attirer de nombreux
insectes xylophages. Les placettes de 400 et 600 m
correspondent un sous-bois assez sombre, avec peu
de sous-tage. La placette de 800 m est typique du
milieu rencontr sur le sommet : un sous-bois plus
clair d une canope clairseme, la prsence dune
strate arbustive relativement dense compose dune
abondante rubiace (Rudgea bremekampiana, Lotard,
com.pers.).

Dispositif utilis
De nombreuses techniques ont t utilises :
Pige interception vitr (vitreplan),
Pige malaise,
Pige Polytrap,
Piges appts ferments (bouteilles et piges
Charaxinae/Satyrinae),
Pige lumineux,
Pige en toile agrippant (piges coprophages avec
latrines en toile),
Extracteur de litire (Berlze),
Ramassage de bois mort (8 caisses de 15 kg),
Battage,
Recherche vue et capture au filet,
Recherche de larves et fouille darbres creux.
Les analyses statistiques ont t effectues essentiellement sur la base des grandes rcoltes des piges
vitres plan.
Lensemble du dispositif a t install de la faon
suivante :
Sur chaque placette :
3 vitres de 2m, 3 Polytrap, 2 Malaise
2 zones de litire de 40 cm par placette passes au
Berlze ;
Sur la DZ :
5 vitres, 12 piges appts, 1 Polytrap et 50m de
cryld ;
Sur le chemin de liaison :
12 piges Charaxes et 4 piges appts.
Afin dchantillonner notamment les lpidoptres
nocturnes, 24 nuits de pigeage lumineux ont t effectues dont 22 nuits sur la DZ et 2 nuits 800 m.

Positionnement des placettes


Afin de pouvoir comparer leffet de laltitude sur les
communauts dinsectes, trois placettes situes en
sous-bois relativement homogne ont t disposes
une altitude prcise :
- 400 m (N 010349 / W 530624),
- 600 m (N 030120 / W 530541)
- 800 m (N 030119 / W 530503), cette dernire placette tant situe sur la zone sommitale tabulaire du mont Itoup.

19

Synthse des rsultats


Les rapports remis par les diffrents intervenants sont
particulirement riches en informations. Lobjet de
cette synthse nest pas de paraphraser ces rapports,
mais de restituer les principaux rsultats, de les analyser et les mettre en perspective.

Caractrisation pdologique
Les sols dItoup se classent majoritairement parmi les
ferralsols. Ils sont argileux sur tout le profil, bien
structurs, trs homognes, profonds et bien drains.
Ils peuvent cependant montrer des tendances plinthiques du fait de la prsence dhorizons trs chargs
en nodules ferrugineux (cuirasses rsiduelles) moins
de 1 m de profondeur, notamment sur les replats.
Localement, lpaisseur de sol peut tre rduite et la
cuirasse affleurante du fait de lrosion. On est alors
en prsence de plinthosols (cuirasse moins d1 m de
profondeur) ou de leptosols (25 premiers cm), plus
abondants sur la partie sommitale.
Comparativement aux sols gnralement rencontrs en
Guyane, ceux dItoup sont lgrement moins acides
et particulirement riches en carbone et matire organique (C > 3%, MO > 5%). La concentration en matire organique est pour partie lie la forte teneur en
argile qui facilite ladsorption, mais est peut-tre aussi
lie une plus lente cintique de dcomposition : la
temprature du sol, plus basse du faite de laltitude et
du msoclimat local trs nuageux, ralentirait la minralisation des matires organiques ce qui augmenterait
le stockage du carbone dans le sol.
Ces sols sont aussi particulirement riches en bases
changeables (1.45 et 3.17 me/100g) do une capacit dchange cationique (CEC) bien suprieure la
moyenne observe habituellement en Guyane
(>14_me/100g vs 8 9 en moyenne). Les taux de
saturation peuvent aussi en consquence tre assez
levs (>20% sur un des relevs vs 10% en moyenne)
Ces sols (classs dans le groupe 2 Fig. 4) sont donc,
sur la base de ces critres, assez proches de ceux rencontrs sur les autres massifs montagneux du nord ou
du sud de la Guyane (Nouragues, mont St-Michel,
Toponowini et Kourouae = groupe 8) mais ils exhibent cependant une couleur un peu plus jauntre
(jaune brun jauntre) signe dune humidit latente
plus forte, certainement due un ralentissement du
drainage qui favorise lhydratation du fer sous forme
doxyhydroxyde (goethite)
Les rsultats danalyse en laboratoire rapprochent ces
types de sols aux fosses ouvertes sur le site de la montagne Plomb (MP1H, I et J Desprez, np.) de type
geric ferralsol et petroplinthic ferralsol, confirmant le
diagnostic sur les critres externes.Les chantillons

20

provenant de la fosse et transmis en leur temps


lINRA (E. Dambrine) nont malheureusement jamais
t analyss et ne nous ont pas t retourn. Une description complte et de nouveaux prlvements pourront tre raliss sur la fosse rafrachie lors des prochaines missions afin de complter le rseau de fosses
de rfrence.

Les communauts darbres


Le point de vue de lONF
Les 10 jours passs sur site ont permis dapprhender
la totalit de la diversit prsente aux diffrents tages
daltitude, mais ne donnent quune vision partielle des
versants est et sud plus loigns du camp de base.

Diversit floristique
Avec 160 essences forestires rencontres sur prs de
30 ha (157 si on ne considre que les layons IKA, soit
les 24 ha habituels), le site se situe en position haute
en terme de richesse spcifique ( surface quivalente on rencontre en moyenne 120 essences pour les
sites les moins riches et rarement plus de 160 pour les
sites les plus diversifis).
Le site dItoup fait donc preuve dune alpha-diversit
exceptionnelle aussi bien en termes despces darbres
que de plantes du sous-bois (cf. Composition floristique des sous-bois / Analyse quantitative).
Les inventaires forestiers bien que taxonomiquement
peu prcis, peuvent cependant aussi fournir des indices de diversit alpha moyennant les corrections
adquates (Guitet, en prep.). Ainsi pour les arbres de
canope (DBH >20cm) on estime lindice
dalphafisher entre 180 et 190 parmi les plus hauts
niveaux en Guyane (maximum mesur cette
chelle). Le mme indice calcul partir des relevs
botaniques effectus par D. Sabatier et JF. Molino
(DBH>10cm) indique une valeur de 187.
En rgle gnrale, comme le montre lanalyse des
relevs du projet Habitat, les montagnes guyanaises
(cest--dire les reliefs prsentant des dnivels suprieur 100 m et des pentes majoritairement suprieures 15%) font preuve dune alpha-diversit significativement plus forte que les autres reliefs, tant pour
les arbres que pour les plantes du sous-bois (Guitet,
non publi). Ce caractre est particulirement pouss
sur Itoup, toit de la Guyane. Plusieurs hypothses
peuvent expliquer cet effet midaltitude bulge qui prdit un pic de diversit aux moyennes altitudes (Sanchez et al., 2013) : diversification des niches d un
fort gradient altitudinal ; effet refuge sur un des massifs ayant t le moins affect par les diffrents changements climatiques passs ; variation des dynamiques de perturbations lis aux effets de reliefs (exposition aux vents, turbulences, abri).

Figure 4: classement des sols dItoup parmi la totalit des chantillons rcolts en Guyane sur le projet Habitats.
Le classement est effectu par Classification Ascendante Hirarchique (CAH)
aprs une Analyse en ComposantePrincipale (ACP) de 27 variables descriptives
(indices de couleur et texture des horizons infrieurs et suprieurs, charge en lments grossiers, profondeur).
Les sols dItoup sont indiqus par les branches rouges et se classent prfrentiellement dans le groupe 2.

Prlvements pdologiques.
La couleur trs homogne des profils marque
un drainage excellent.

21

Composition floristique des communauts

Altitudes suprieures

Les communauts darbres dItoup possdent les


caractristiques des formations typiques des hautsreliefs de Guyane : une absence dEperua falcata et
une faible abondance des Lecythidaceae remplaces
par les Burseraceae et Mimoideae. On y rencontre
cependant moins de Vochysiaceae et de Caesalpinioideae quattendu ce qui peut tre due laltitude exceptionnelle de ce relief.

Sur les 6 layons raliss, les 5 layons (A, B, D, F et H)


situs des altitudes suprieures 590 m ont la mme
famille dominante : celle des Mimosaceae avec un
pourcentage du peuplement total compris entre 13,2 et
19,2%. 80% de ces Mimosaceae sont des Inga spp.,
espces hliophiles par excellence. Parmi les 160
essences inventories ceux-ci dominent avec plus de
13% du nombre de tiges.

On observe une modification du cortge dominant


partir de 500 m qui sexprime par une diminution
significative de labondance des Caesalpinioideae et
Burseraceae au profit des Urticaceae, des Mimosoideae, des Lauraceae et Meliaceae et donc par un changement du cortge spcifique. Le mme effet seuil se
fait aussi sentir dans le cortge des plantes du sousbois ce qui conforte ces observations.

Les Lauraceae sont galement trs prsents sur les 5


layons daltitude avec comme reprsentant principal
les cdres noirs (Ocotea sp.) suivis des cdres jaunes
(Rhodostemonodaphnea sp.) et des bamba apici (Licaria sp.). Sur le layon C o les proportions sont moins
importantes, les cdres noirs et jaunes ont des proportions quivalentes (1,4%).

Altitudes infrieures
La composition en famille du layon C, situ entre 270
m et 590 m daltitude, est tout fait diffrente de celle
des autres layons. Les Annonaceae (16%) dominent le
peuplement par la prsence trs importante dune
seule espce (Xylopia surinamensis). Cette espce
tait dj bien prsente sur le site de Piton Baron, situ
lextrme nord du massif des Emrillons.
Les Burseraceae (11%) arrivent en deuxime position,
alors quils narrivent au mieux quen 6 me position sur
le layon A et au del sur les autres layons. La faible
reprsentation des Burseraceae sur un site du sud
guyanais pose question. En effet, tous les inventaires
raliss jusqu prsent mettaient en vidence une
dominance des Burseraceae dans les forts du sud de
la Guyane. Leur bonne reprsentativit sur le layon C
confirme toutefois cette rgle, mais a priori pour des
altitudes suprieures 600 m ce trait particulier des
forts mridionales sestompe. Seuls des inventaires
complmentaires, sur des altitudes suprieures 600
m permettraient de confirmer ou dinfirmer ce fait.
Seules trois essences composent les Burseraceae
dItoup : par ordre dimportance, les salis (Tetragastris spp.) 65,1%, les moni (Protium spp.) 33,5% et
les gaan moni (Trattinnickia spp.) 1,4%. Si la composition des layons C et D suit ce classement, celle des
layons A, B, F et H se rpartie parts peu prs
gales entre les salis et les monis.
Les Chrysobalanaceae qui sont gnralement trs bien
reprsentes dans les sites du nord de la Guyane, souvent en 1re ou 2me position, narrivent ici quen 7me
place avec 4,7% des tiges (elles sont en 5me position
sur les sites de Toponowini et Piton Baron, qui sont
les sites les plus proches dItoup).

22

Les Sapotaceae sont assez bien rpartis sur lensemble


des layons avec une proportion lgrement plus importante sur le layon C. Les niamboka (Pouteria spp.)
reprsentent 65% des tiges de Sapotaceae suivis des
mamantin (Micropholis spp.) 19%, et des kimboto
(Pradosia spp.) 5%.
Les Lecythidaceae sont galement bien prsentes sur
lensemble avec une proportion toutefois plus faible
sur le layon D. Les mahos noirs (Eschweilera spp.)
dominent 52,7% des Lecythidaceae, suivis des mahos
rouges (Lecythis spp.) et des mahos cigares (Couratari
spp.) reprsentant respectivement 24,4% et 19,5% des
individus de cette famille.
Les Meliaceae sont la 4me famille en pourcentage du
nombre de tige avec 5,2% rpartis sur 3 essences,
savoir le diankomata (Guarea sp.) 84,7%, le carapa
(Carapa sp.) 12,2% et lacajou de Guyane (Cedrela
odorata) 3,1%. A noter, que sur la crte et le plateau
tabulaire (layon H et F) nest prsent que le diankomata.
Le fait le plus marquant dans cette composition concerne les Caesalpiniaceae, qui narrivent quen 10me
position sur le site alors quelles sont gnralement
dans le tierc de tte dans la plupart des relevs. Par
ailleurs, les Caesalpiniaceae les plus communes (anglique, wacapou, wapas, boco) sont absentes et remplaces par des espces moins frquentes habituellement : mongui oudou (Elisabetha princeps), gangui
oudou (Tachigali spp.), bougou bougou (Swartzia
spp.), adougoue (Swartzia spp.) et des courbarils (Hymenaea courbaril) en nombre et taille importants sur
le layon C.

Les palmiers
Le site dItoup se caractrise par une densit en
palmier trs faible. Parmi les grands palmiers
stipes ne sont prsents, et quen faible effectif, le
comou (Oenocarpus bacaba) accompagns de
awara mon pre (Socratea exorrhiza) surtout sur
les layons A, B et D. Quelques pinots (Euterpe
oleracea) sont prsents dans les zones de bas
fonds, mais les zones marcageuses nayant pas
une extension trs importante ceux-ci ne sont pas
nombreux. Enfin, les Astrocaryum et le patawa
sont quasi-absents.

volis : on est vritablement en prsence dune fort


deux tages prsentant quelques mergents trs disperss et une canope beaucoup plus basse et peu
dense.
L encore, le layon C se dmarque des autres transects:
- La canope y est en moyenne beaucoup plus haute
(37 m contre 29 m pour lensemble du site) ;
- Le sous-bois est beaucoup plus clair que sur les
autres layons avec un indice de 1,47 sur 3 contre des
valeurs allant de 1,93 2,77 sur les autres layons ;
- Les parts des gros bois (de plus de 55 cm) et surtout des trs gros bois (de plus de 90 cm) sont beaucoup plus importantes sur ce layon.
De fait, le site dItoup montre la fois une extrme
variabilit en termes de structure de peuplement : des
peuplements trs riches et dautres trs pauvres en
volume de bois, mais aussi des traits caractristiques
trs prononcs comme labsence de palmiers et la
grande perturbation de la canope.

Composition en famille de la communaut darbres


du mont Itoup

Structure des vgtations forestires


Le peuplement global prsente une densit assez forte
avec une moyenne de 194 tiges/ha sur lensemble des
layons (162 231 tiges/ha : le layon C prsentant la
densit la plus leve et les layons F et H les moins
leves). La surface terrire est trs variable en fonction des layons. Moyenne sur les layons A et B
(23_m/ha), elle devient trs faible sur les layons F et
H (17 m/ha), mais plus leve sur le layon D
(26_m/ha) et surtout sur le layon C qui atteint les 33
m/ha un des plus forts scores rencontrs jusqu
prsent sur les sites du programme Habitats.
Laspect le plus caractristique du peuplement rencontr est cependant sa grande ouverture de canope (indice global de 2,36 sur une chelle de 0 3 contre
1,85 en moyenne) et la trs faible densit moyenne de
palmiers dans le sous-bois (16 48 palmiers/ha contre
285 en moyenne habituelle).
De faon gnrale le pourcentage demprise des chablis est assez fort, reprsentant de 3 4% de la surface
parcourue mais les chablis sont souvent de petite taille
(moins de 200 m en moyenne si lon carte un chablis
exceptionnel dun hectare sur le layon C). La dynamique de renouvellement parat plutt lie une mortalit sur pied quaux chablis darbres vivants, et
louverture de la canope est autant due la faible
densit de gros qu la prsence des petits chablis et

Une comparaison avec les autres sites Habitats


dcrits marque cette grande typicit, de mme ordre
que celle des habitats sur sables blancs par exemple.
Si lon analyse les donnes en saffranchissant des
seuils daltitude proposs par Hoff partir desquels
les types dhabitats sont historiquement dtermins, il
apparat quil existe bien un tage submontagnard dont
la limite se situe partir de 500 m daltitude.
A cette altitude, on note la fois une modification
profonde de la composition du peuplement (disparition des Annonaceae et forte rduction des Burseraceae vs une augmentation de la part des Mimosaceae,
Cecropiaceae et Lauraceae) et un changement dans la
population de palmiers (apparition de Socratea exhoriza et forte rduction de la densit de petits palmiers).
Cest galement entre 400 et 500 m daltitude que lon
assiste une chute de la surface terrire, principalement due une disparition des trs gros arbres qui
peuvent tre prsents a et l entre 500 et 600 m
daltitude mais dans des proportions bien moindres.
Entre ce seuil (500 m) et les plus hautes altitudes,
aucune autre rupture nest rellement dcelable si ce
nest un appauvrissement du peuplement plus de
800_m daltitude, sans changement notable de composition au niveau des familles. Les mmes conclusions
peuvent tre tires de lanalyse au niveau des essences.
A ce stade de lanalyse et sur la base des donnes
dinventaires forestiers, on ne distingue donc que deux
grands habitats forestiers :
- une fort de basse altitude < 500 m ;
- une fort daltitude > 500 m dont le caractre
montagnard nest cependant pas trs marqu en termes
forestiers.

23

Lopposition entre dune part, une fort monumentale


irrgulire trs gros arbres domine par les Burseraceae, Sapotaceae et Xylopia surinamensis situe sur le
versant ouest entre 200 et 500 m daltitude et dautre
part, une fort basse daltitude pauvre en trs gros
arbres et trs ouverte, compose essentiellement de
Mimosaceae et Lauraceae, est franche. Cette dichotomie semble correspondre aux types de vgtation
reconnus par Valry Gond (2007) partir danalyse
dimages satellites SPOT (capteur VEGETATION),
aux effets de calage prs.
Dans son interprtation, Gond dtermine une fort
canope irrgulire compose de gros bois mergents
(type 20) situ prfrentiellement sur les versants
ouest et des forts canope plus claire et plus ouverte
(type 19 et 21). Suivant cette interprtation, les diffrents types de forts ne seraient pas lis uniquement
un tagement altitudinal mais aussi des effets
dexposition.
En focalisant sur les seules forts daltitude, on peut
aussi noter diffrents facis lis la position topographique :
- les forts sur versant sont plus denses et prsentent une canope relativement haute (suprieure
30_m en moyenne) ;
- les forts sur plateau ont une canope basse (entre
20 et 30 m seulement) et une surface terrire notablement plus faible, ce sont des forts claires ;
- les forts sur crte et haut de versant forment un
facis intermdiaire canope basse mais plus ferme
du fait dune densit de tiges plus forte notamment
dans les bois moyens ;
- les forts de talweg encaiss et peu hydromorphe,
except sur le plateau sommital, paraissent peu diffrentes des peuplements voisins mais mritent cepen-

Relations entre score des ordinations par Analyse Non-Symtrique des


Correspondances (ANSC) applique aux relevs forestiers dtaills
(taxons) sur les sites de montagne (Nouragues, St Michel, Toponiwini,
Piton Baron, Itoup, montagne Tortue, montagne de Kaw). Les
courbes dajustement suivent des fonctions polynomiales dordre 2.

24

dant dtre individualises pour la diversit du sousbois qui leur est frquemment associe.

En rsum
Les analyses effectues dans le cadre du programme
Habitats ont permis de confirmer les observations
initiales suivantes.
Le mont Itoup se caractrise par :
un type de fort propre aux montagnes guyanaises ;
un tage submontagnard partir de 500 m ;
une trs grande alpha-diversit des communauts
darbres et du sous-bois ;
une couverture ferralsols dominant, contrairement aux acrisols annoncs par la carte du WRB.
Les forts dItoup constituent de ce fait des formations originales tant par leur richesse que par leur
typicit lie au caractre submontagnard.
Sources
- Brunaux O. & Guitet S. (ONF), 2010. Compterendu mission Itoup. 17 p.
- Guitet S., 2013. Complments au rapport de mission Itoup . 5p.

Estimation de la diversit alpha par lindice de Fisher partir des


inventaires forestiers corrigs des incertitudes taxonomiques (Guitet
in prep.). Le site Itoup not ITOU ( droite en rouge) a un trs fort
indice estim entre 180 et 190, significativement diffrent de tous les
autres sites (test de Wilcoxon p<0.01).

Les communauts darbres


Le point de vue de lIRD
Diversit floristique
Lensemble des observations (relevs quantitatifs et
collectes vue) a permis le recensement denviron
330 espces arborescentes dont environ 280 interceptes par les 1.040 arbres des relevs. Ce qui constitue
un niveau relativement bas de richesse en espces
pour la Guyane compte tenu du dispositif clat mis
en place sur des gradients cologiques assez importants (daphique et altitudinal). A titre de comparaison, ltude de Mori & Boom (1987) Sal (distant de
68 km du mont Itoup) avait recens 269 espces pour
800 arbres le long dun gradient cologique faible et
pour un relev plus compact. Dune manire gnrale,
cette relative faiblesse de la richesse-diversit
saccorde parfaitement avec le contexte floristique et
les communauts vgtales du Sud-Guyane (Sabatier
et al., 2006).
Toutefois, en aucun cas linventaire floristique du
mont Itoup ne doit tre tenu pour complet.
Il semble que la situation non hydromorphe du plateau
sommital possde la plus forte diversit locale. Ceci
pourrait tre mis en relation avec la dynamique du
couvert et la forte prsence despces hliophiles,
mais aussi la prsence despces plus spcifiquement
associes lenvironnement submontagnard telles que
les nombreuses Myrtaceae enregistres dans les relevs 5 et 6. Il semble y avoir une augmentation des
phnomnes de dominance lorsque laltitude diminue
sur le versant ouest mais cela reste confirmer.

Composition floristique des communauts


La plus forte dominance locale semble tre celle de
Xylopia surinamensis, un arbre de strate infrieure,
trs frquent en situation bien draine de la zone altitudinale 200-300 m (relev 7), prsent galement dans
la zone 400-500 m (relev 3).
Sur le versant est dans zone altitudinale 600-700 m,
Elizabetha princeps atteint galement de fortes densits (relevs 9 et 10).
On notera galement basse altitude et en canope
cette fois, les fortes densits de Tetragastris altissima,
Carapa guianensis, Chimarrhis cf. microcarpa, Chrysophyllum lucentifolium et dans la zone altitudinale
400-500 m, Chrysophyllum lucentifolium, Minquartia
guianensis et plus occasionnellement Virola kwatae et
Qualea rosea.
Ds la zone altitudinale 600-700 m, il semble que la
dominance dun petit nombre despces soit moindre,
lexception notable dune espce non encore connue
de Guyane (Ruptiliocarpon cf. caracolito) appartenant
une famille galement non encore rpertorie de
Guyane (Lepidobotryaceae).

Sur le versant ouest, les grands arbres de la canope et


les mergeants atteignent aisment des hauteurs de
60_m et peuvent mme dpasser 65 m ; ce sont des
Martiodendron
parviflorum
(LeguminosaeCaesalpinioideae), Chrysophyllum lucentifolium (Sapotaceae), Bagassa guianensis, Ficus insipida (Moraceae) et Virola kwatae (Myristicaceae) classiques des
forts canope haute comme Sal ou dans quelques
secteurs des Nouragues.
Lun de ces grands mergents est une espce jusquici
non rpertorie de Guyane, vraisemblablement du
genre Zinowiewia (Celastraceae). On retrouve plusieurs de ces mergents sur le versant est, notamment
cf. zinowiewia qui y est relativement abondant, mais
ils dpassent rarement 50 m de hauteur.
En zone sommitale les mergents peuvent dpasser
40_m de hauteur. Ce sont souvent des Parkia nitida
(Leguminosae-Mimosoideae) mais aussi des Sterculia
spp. (Sterculiaceae). La composition floristique doit
galement tre examine du point de vue des espces
absentes, notamment celles qui, de par leurs abondances marquent habituellement les communauts
vgtales du Sud-Guyane (Sabatier et al., 2006). De ce
point de vue, la faible abondance et la faible diversit
des palmiers (Arecaceae) est remarquable. Labsence
totale dAstrocaryum sciophilum est une caractristique rapprochant le site Itoup des sites tudis
louest dans la pnplaine et du site tudi au nord
dans le massif des Emerillons, et le distinguant du site
submontagnard tudi dans les Tumuc-Humac (Borne
1). Sont galement remarquables labsence totale de
lApocynaceae Geissospermum argenteum, trs frquente dans les sites du Sud-Guyane basse altitude,
ou, au niveau familial, des Humiriaceae, ainsi que la
faible abondance de certains taxons tels que les Tachigali, gnralement frquents dans les sites du SudGuyane.

Structure des vgtations forestires


Une analyse prliminaire du couvert forestier, par
tldtection, a t mene avant la mission de terrain
afin de mieux apprhender son htrognit spatiale.
Les sources dinformation taient dune part, une
extraction centre sur le mont Itoup de la classification ralise dans le cadre du projet CAREFOR (Sabatier et al., 2006) partir de la compilation sur un an
des images quotidiennement acquises par le satellite
Spot 4 Vgtation (anne 2000 ; pixel de 1x1 km), et
dautre part, une scne du satellite Landsat Thematic
Mapper (anne 2000 ; pixel de 30x30 m). Les deux
documents permettent de dceler un contraste entre les
versants et une individualisation du plateau sommital,
en se rfrent aux interprtations de Gond et al. (2011)
On pouvait sattendre :
- Versant ouest : une fort haute canope irrgulire forme par de grands mergents.
- Plateau sommital : une fort bien structure
canope rgulire.
- Versant est : une fort canope irrgulire et
enlianements.

25

Les observations visuelles valident ces attentes sur les


versants, mais infirment compltement lexistence
dune fort bien structure sur le plateau. Parmi les
sources potentielles de mauvaise interprtation, nous
avons not labondance des piphylles (algues, bryophytes, lichens) sur toutes les frondaisons de la fort
sommitale. Celle-ci est de nature fortement modifier
la radiomtrie dans le sens dune vgtation
dapparence peu dynamique.
La fort sommitale est donc trs ouverte (nombreux
chablis de tous ges) et comporte une importante fraction darbres appartenant des espces hliophiles
typiques, frquentes basse altitude dans les milieux
perturbs (Aparisthmium cordatum, Miconia spp.,
Isertia coccinea, Palicourea guianensis, Inga thibaudiana et Inga spp., Tapirira spp. etc.).
Nous pensons que cette abondance des hliophiles est
galement favorise par la persistance des brouillards
matinaux qui accroissent fortement le rayonnement
lumineux diffus.

Composition floristique en plantes


Analyse quantitative prliminaire
Sophie Gonzalez (IRD)
On dnombre 123 espces de sous-bois sur les forts
de terre ferme (156 avec zones humides) hors piphytes
et
fougres.
Corrige
des
biais
dchantillonnage, lestimation de la richesse locale
slve 255 espces pour 1086 individus, ce qui
place Itoup la deuxime place des sites inventoris
(aprs les monts de la Kourouae proches de Rgina).
On observe un changement du cortge spcifique des
plantes du sous-bois vers 500 m ce qui conforte les
observations au niveau du peuplement des arbres.

Analyse qualitative
quipe ECOBIOS
Les collectes de 2010 ont permis de rassembler un
total de prs de mille chantillons, concernant 732
taxons (donne actualise le 15 octobre 2014). La liste
complte des plantes compile par lquipe
dECOBIOS (missions de 1980 et de 2010), hors
donnes de lIRD, slve 861 espces, dont une
proportion importante provient de la savane-roche
situe 6 km louest du camp.
Un grand nombre dorchides et autres piphytes
avaient t conserves vivantes afin de les maintenir
en culture sur le littoral et pouvoir ainsi observer la
floraison des espces trouves ltat strile. Certaines espces demeurent encore indtermines.
Lanalyse prliminaire des taxons rcolts met en
vidence une forte proportion despces de trs grand
intrt patrimonial.

Les fougres
Michel Boudrie
ce jour, 368 spcimens ont t rcolts sur
lensemble du massif du mont Itoup / sommet Tabulaire (missions 1980, 2010, 2014). 151 taxons de ptridophytes ont t identifis formellement sur
lensemble du massif du sommet Tabulaire, correspondant 44% de la ptridoflore guyanaise, faisant de
ce secteur lun des plus riches de Guyane.
Outre le cortge des espces dites banales ou frquentes en Guyane depuis les basses altitudes jusquaux plus hauts sommets, plusieurs espces rares et
mme exceptionnelles ont t dcouvertes et ont mis
en vidence la grande richesse floristique de la zone
du sommet Tabulaire.
Tout dabord, un petit groupe despces caractrise les
hauts sommets et les forts submontagnardes, audessus de 500 m daltitude. Citons : Blechnum occidentale L., Cyathea lasiosora (Kuhn) Domin, Cyathea
marginalis (Klotzsch) Domin, Danaea ypori Christenh., Diplazium expansum Willd., Diplazium gracilescens (Mett.) C. Chr., Elaphoglossum cremersii
Mickel, Moranopteris taenifolia (Jenman) R.Y. Hirai
& Prado, Mycopteris taxifolia (L.) Sundue,
Polytaenium
jenmanii
(Benedict)
Benedict,
Serpocaulon caceresii (Sodiro) A.R. Sm., Terpsichore
staheliana (Posth.) A.R. Sm., Trichomanes polypodioides L.

Relations entre score des ordinations par Analyse Non-Symtrique


des Correspondances (ANSC) applique aux relevs des plantes en
sous-bois sur les sites de montagne (Nouragues, St Michel, Toponiwini, Piton Baron, Itoup, montagne Tortue, montagne de Kaw).
Les courbes dajustement suivent des fonctions polynomiales
dordre 2.

26

Quatre espces, exceptionnellement rares, nont t


dcouvertes en Guyane quau sommet Tabulaire et
conservent ce statut encore actuellement. Il sagit de
Diplazium radicans (Sw.) Desv., Diplazium striatum
(L.) C. Presl, Elaphoglossum praetermissum Mickel et
Hymenasplenium repandulum (Kunze) L. Regalado &
Prada.

Les mammifres non-volants & les espces gibiers


Les 174.9 km linaires parcourus ont permis de noter
262 contacts avec des groupes ou des individus appartenant une vingtaine despces cibles. Le nombre
total des individus observs slve environ 647. Le
dispositif dtude complet de 4 layons prsente une
forte htrognit du point de vue de lhabitat, en
particulier de laltitude, mais surtout des conditions de
visibilit. Les mesures de distances dobservation
montrent en effet que les conditions dobservations sur
le layon C sont vraiment exceptionnelles, non seulement par rapport aux 3 autres layons mais galement
relativement tous les autres sites chantillonns en
Guyane. Ces conditions risquent donc de fortement
biaiser la reprsentativit de ce layon dans lindice
dabondance, qui est bas sur une dtectabilit relativement homogne. Par ailleurs, ce layon est situ
entre des altitudes de 300 et 600 m, alors que les trois
autres chantillonnent les altitudes suprieures
600_m.
Il a donc t choisi de prsenter ici les indices
dabondance de grande faune sur les layons A, B, et D
seulement (chantillonnage cumul de 128 km), qui
reprsentent mieux le milieu daltitude original de ce
site. Le nombre total dobservations, incluant celles
ralises sur le layon C est indiqu pour information.
Par ailleurs, 74 observations supplmentaires de
mammifres ont t ralises hors protocole par
lensemble des participants aux diverses missions, et
permettent dajouter 7 espces de mammifres
linventaire qualitatif : le saki satan Chiropotes satanas, caractristique de ces basses latitudes et observ
3 reprises, deux espces dcureuil (Sciurus aestuans
et Sciurillus pusillus), locelot Leopardus pardalis, le
grand fourmilier Myrmecophaga tridactyla, le coati
roux Nasua nasua et le tapir Tapirus terrestris.
La prise en compte des observations ralises sur le
layon C augmenterait particulirement labondance
des acouchis et agoutis, petits rongeurs de sous-bois,
peut tre plus prsents aux basses altitudes mais trs
certainement beaucoup plus facilement dtects dans
ce milieu au sous-bois particulirement dgag,
comme lattestent des distances dobservation trs
importantes
Les autres espces dont labondance est notablement
plus faible lorsque lon considre seulement les trois
layons daltitude sont les atles, ainsi que les capucins
blancs et les hurleurs dans une moindre mesure. Contrairement aux petites espces de sous-bois, les distances dobservation des groupes datles ne sont pas
diffrentes entre les deux zones, et le nombre

dobservations reflte donc une abondance rellement


plus forte. Ce rsultat est intressant souligner car
une forte abondance datles est normalement caractristique des zones dhabitat de type montagneux (Guitet et al., 2015, Richard-Hansen et al., accept pour
pub.). Sur ce site du mont Itoup cependant, 80% des
observations ont t ralises entre 300 et 600 m
daltitude. Il est donc possible, au vu de ces rsultats
que lhabitat devienne moins favorable pour cette
espce au-del dune certaine limite altitudinale.

Comparaison de la densit avec dautres sites


Les abondances des principales espces sont compares ci-dessus avec celles releves dans les autres
zones non chasses, chantillonnes de la mme manire dans le Parc amazonien dans le cadre du programme Habitat. La zone dItoup (reprsente en
rouge sur les graphiques) prsente donc comparativement une abondance particulirement importante de
biches rouges (Mazama americana), et trs faible de
cariacous (Mazama nemorivaga). Parmi les primates,
ce sont les capucins bruns qui dominent (Cebus apella), et leurs proches cousins les capucins blancs (Cebus olivaceus) sont galement bien prsents. En ce qui
concerne les oiseaux, les agamis (Psophia crepitans)
sont fortement reprsents, et les marails (Penelope
marail) particulirement abondants. Enfin, mme sur
les zones les plus hautes, les petits rongeurs sont assez
abondants.
Du point de vue de la diversit, lestimation des paramtres de richesse, des indices de Shannon ou de
Simpson montre un profil caractristique des zones de
paysage dits de montagne, avec des valeurs relativement plus faibles (respectivement 19.7, 13.9 et 11.5)
que dans dautres types de paysage forestiers guyanais
(maximums estims 31.3, 19 et 16.3 avec le mme
protocole, Richard- Hansen et al., accept pour pub.).
Le mont Itoup est la zone la plus haute parmi les 37
zones chantillonnes en Guyane selon ce protocole.
Si son profil faunistique correspond globalement
celui des 9 autres sites situs sur des reliefs marqus,
avec des altitudes et/ou des pentes importantes,
quelques caractristiques sont relever, comme la
diminution marque de la prsence des atles au-del
de 600 m. Dautres zones de fortes altitudes seraient
chantillonner pour confirmer si cette altitude reprsente vraiment un seuil dhabitat pour cette espce. La
caractrisation complte de la faune dans la zone intermdiaire du pimont (300-600 m) serait galement
trs pertinente en comparaison, un seul layon ne suffisant pas ici dcrire cet environnement.

27

Onguls

Rongeurs

Primates

Carnivores
Reptile

Oiseaux

Espce
Mazama americana
Mazama nemorivaga
Mazama sp.
Pecari tajacu
Myoprocta acouchi
Dasyprocta leporina
Ateles paniscus
Alouatta macconnelli
Cebus apella
Cebus olivaceus
Saguinus midas
Eira barbara
Chelonoidis denticulata
Crax alector
Penelope marail
Psophia crepitans
Tinamidae sp.
Tinamus major
Crypturellus sp.
Odontophorus gujanensis

Nombre dobservations
layons A/B/C/D
layons A/B/D
18
13
5
1
6
5
6
4
26
11
34
17
34
7
6
2
23
17
17
9
5
4
4
1
3
3
7
6
3
2
36
25
2
1
7
5
8
4
12
8

Indice d'abondance (IKA)


Layons A/B/D
1.02
0.08
0.39
0.31
0.86
1.33
0.55
0.16
1.33
0.70
0.31
0.08
0.23
0.47
0.16
1.95
0.08
0.39
0.31
0.63

Nombre dobservations et indice kilomtrique dabondance des principales espces observes.


IKA = nombre dobservations par 10 kilomtres de transect

Comparaison avec dautres sites du Parc amazonien de Guyane

28

Lavifaune
Richesse spcifique
Au total, 1470 donnes et plus de 200 enregistrements
audio ont t collects.
189 espces doiseaux ont t contactes au cours de
la mission doctobre 2010. En incluant les donnes
obtenues par lquipe ECOBIOS (O. Tostain, V. Pelletier & G. Lotard) au cours de la mission de mars
2010 et qui nous ont t transmises, ce sont au total
235 espces doiseaux qui ont t rpertories sur le
mont Itoup.
46 espces contactes par ECOBIOS en mars nont
pas t retrouves, tandis que 24 espces nouvelles ont
t observes en octobre.
Plusieurs facteurs peuvent expliquer ces diffrences:
une pression dobservation diffrente : dans un milieu aussi riche que la fort amazonienne et avec des
espces aussi difficiles dtecter (Terborgh et al.,
1990), le nombre despces recenses est directement
proportionnel leffort dobservation. Avec 3 observateurs prsents sur le terrain pendant 2 5 semaines
chacun, la pression dobservation dECOBIOS a t
plus de 3 fois suprieure la ntre mme si
lornithologie ntait pas son objectif prioritaire ;
des diffrences dans les sites et habitats prospects :
la prospection par ECOBIOS a concern une surface
beaucoup plus vaste que celle tudie par nous-mmes
au cours de la mission doctobre. Il en dcoule la prise
en compte dhabitats supplmentaires (savaneroches) et la rencontre despces infodes ces
habitats, ou despces ayant une rpartition irrgulire
(comme cest le cas pour beaucoup doiseaux forestiers).

Structure des communauts doiseaux


Rpartition altitudinale
Le camp et la plus grande partie des layons se trouvant
au-dessus de 500 m daltitude, on pouvait sattendre
ce que la majorit des observations concernent ltage
submontagnard.
Les 1470 observations se rpartissent en :
- 14% dans la fort de plaine (alt. <500 m)
- 62% dans la fort submontagnarde de pente (alt.
>500 m et <750 m)
- 24% dans la fort sommitale (alt. >750 m)
Parmi les 189 espces recenses,
- 91 (48%) ont t notes dans la fort de plaine
- 162 (86%) ont t notes dans la fort submontagnarde de pente
- 96 (51%) ont t notes dans la fort sommitale.
Ces rsultats sont conformes aux prvisions, avec un
cart trs significatif entre la fort submontagnarde de
pente et les deux autres tages. La richesse en appa-

rence plus faible de la fort de plaine ne reflte vraisemblablement que le niveau plus faible de leffort
dobservation, compar la fort submontagnarde. En
revanche, bien que leffort dobservation aux diffrents tages nait pas t mesur, il a t sensiblement
plus important dans la fort sommitale que dans la
fort de plaine. De ce fait, la faiblesse du nombre
despces et du nombre dobservations dans la fort
sommitale traduit probablement une ralit cologique: lavifaune du sommet serait donc sensiblement
moins riche (en nombre despces) et moins abondante (en nombre dindividus) que celle des tages
infrieurs, ce que vient corroborer limpression ressentie sur le terrain.
68 espces soit 35% du total nont t contactes que
dans un seul tage altitudinal :
- 13 espces (7%) nont t contactes que dans la
fort de plaine
- 44 espces (23%) nont t contactes que dans la
fort submontagnarde de pente
- 11 espces (6%) nont t contactes que dans la
fort sommitale.
Ces rsultats sont difficiles interprter compte tenu
du caractre alatoire des observations : des espces
ont pu chapper linventaire dans lun ou lautre de
ces habitats alors quelles sy trouvaient. La liste consquente despces vues uniquement ltage intermdiaire tmoigne de ce biais, alors que la plupart ne
sont a priori pas infodes cet habitat, lui-mme peu
distinctif. Au contraire, le manque de caractre trs
marqu de la fort submontagnarde sur le mont Itoup
permet de nombreuses espces de plaine ou de la
fort sommitale dempiter sur cet tage intermdiaire.
Il parat donc plus pertinent de traiter les espces au
cas par cas.
Parmi les espces vues uniquement en haut de pente
ou sur le plateau, soit au-dessus de 700 m, il faut distinguer celles rellement lies laltitude, de celles
trouves l la faveur dhabitats particuliers et dont la
restriction cet tage est donc plus conjoncturelle. On
peut citer :
Espces lies laltitude :
- Colaptes rubiginosus (Picidae) : frquent sur tous
les reliefs partir de 500-600 m daltitude, commun
au mont Itoup.
- Colibri delphinae (Trochilidae) : 3 chanteurs rpartis en deux points du layon B, 720 et 780 m
daltitude. Espce trs rare en Guyane.
- Contopus albogularis (Tyrannidae) : plutt li au
relief qu laltitude sensu stricto (Ingels et al., 2008),
il est apparemment commun sur le mont Itoup, trouv
sur 4 sites entre 750 et 800 m daltitude.
- Oxyruncus cristatus (Oxyruncidae) : commun sur
les reliefs daltitude suprieure 500 m, il est parfois
mais rarement vu plus bas (observ ici 380 m
daltitude).
- Phyllomyias griseiceps (Tyrannidae) : 2 oiseaux
contacts plusieurs reprises sur le layon A vers 750

29

m daltitude (~A900), la limite donc entre la fort


submontagnarde de pente et la fort sommitale. Espce trs rare en Guyane.
- Procnias albus (Cotingidae) : au moins 5 chanteurs rpartis sur le plateau et sur les pentes.
- Piranga flava haemalea (Cardinalidae), signal par
G. Lotard. Un seul individu observ (femelle ou
juvnile). Espce trs rare en Guyane et uniquement
connue des hauts reliefs.

Les chiroptres

Espces lies des habitats particuliers :

De manire gnrale, les taux de capture sont peu


levs en fort primaire par rapport aux milieux plus
ouverts ou altrs par lhomme. Ici les taux de captures sont faibles (0,011 ind/m/h). Ils sont infrieurs
la moyenne pour la fort primaire en Guyane franaise
(0,0245 ind/m/h, calcul sur 10 inventaires similaires,
Cockle-Btian & Delaval, 2009).

Plusieurs espces, sans tre lies laltitude, sont


prsentes en haut de pente et sur le plateau la faveur
des cambrouzes et de leurs lisires localises ici audessus de 700 m daltitude :
- Cercomacra tyrannina (Thamnophilidae).
- Myrmeciza atrothorax (Thamnophilidae) localis
en bordure la mare du layon F.
- Taraba major (Thamnophilidae).
- Thamnophilus melanothorax
(Thamnophilidae).
- Cyclarhis gujanensis (Vireonidae).
Quelques-unes sont lies la fort claire et arbustive
du sommet :
- Thamnophilus punctatus
(Thamnophilidae).
- Leptotila verreauxi (Columbidae) note par ECOBIOS.
Dautres enfin, habituellement cantonnes aux flats,
trouvent dans la fort sommitale et parfois sur les
pentes un substitut leur habitat grce lhumidit
lie laltitude :
- Cyphorhinus arada (Troglodytidae).
- Myrmothera campanisona (Grallariidae).
Espces vues uniquement en plaine qui sont manifestement absentes au-dessus de 500 m :
- Corythopis torquatus (Tyrannidae).
- Patagioenas speciosa (Columbidae).
- Phoenicircus carnifex (Cotingidae).
- Tyranneutes virescens (Pipridae).
- Laniocera hypopyrra (Tityridae) note par ECOBIOS.Phaeothlypis rivularis (Parulidae) note par
ECOBIOS.Dans le mme ordre dide bien quils
soient prsents dans la fort submontagnarde de pente,
les deux ttmas, Formicarius colma et F. analis
(Formicariidae), nont pas t vus au dessus de 600 m
daltitude. De mme, Hemitriccus zosterops et Tolmomyias assimilis (Tyrannidae) sont principalement
prsents en fort de plaine et se rarfient notoirement
avec laltitude.

30

191 chauves-souris ont t captures sur le mont Itoup rparties en 33 espces, 28 genres et 8 familles.
Le nombre despces recenses par rapport aux
nombres dindividus capturs est comparable
dautres tudes ralises en Guyane, au Suriname ou
au Brsil.

La diversit est leve (H = 3 sur lensemble des sites)


ainsi que lquitabilit (environ Eq = 0,9 sur
lensemble) indiquant que le peuplement de chiroptres est diversifi et quilibr.
Les Phyllostominae dominent le peuplement avec
36% des captures suivis des Stenodermatinae (34%),
des Carolliinae (16%), des Glossophaginae (10%) et
enfin des autres familles qui reprsentent 4% des captures. De mme, les Phyllostominae sont le groupe
taxonomique le mieux reprsent en nombre despces
(14 espces) ; les Stenodermatinae sont reprsents
par 8 espces.

Richesse spcifique
33 espces de chauves-souris ont donc t captures.
La courbe de rarfaction permet destimer si le milieu
a t ou non suffisamment chantillonne. Aprs 191
captures la courbe est toujours ascendante, le plateau
nest pas atteint. Ainsi, leffort dchantillonnage idal
permettant dapprocher lasymptote horizontale correspondant au nombre total despce estim sur la
zone nest pas atteint.
Mao Tau calcul aussi lintervalle de confiance (95%)
qui reprsente les limites infrieures et suprieures de
la richesse observe. Cet intervalle de confiance indique quavec notre effort de capture on contacterait
dans 95% des cas entre 28 et 38 espces.
Lestimateur Chao1 value la richesse spcifique 41
espces, mais avec un intervalle de confiance (95%)
dont la limite suprieure est gale 65 espces. La
valeur haute de lintervalle de confiance de
lestimateur Chao1 est probablement plus proche de la
ralit et sous-estime encore trs certainement le
nombre despce total. En effet, daprs la littrature
pour les sites dont leffort de capture t important
nous pouvons avoir 86 espces pouvant vivre en sympatrie sur le site de Paracou (Simmons & Voss, 1998)
et 76 espces aux Nouragues (Delaval, 2004).

Structure des communauts


Une communaut peut tre caractrise par les espces
abondantes qui la composent. Comme les communauts notropicales prsentent une trs faible proportion
de telles espces, ces dernires peuvent tre utilises
comme indicatrices de divers milieux (Tokeshi, 1999 ;
Delaval, 2004).
Si on regarde la composition du peuplement site par
site, 400 m ce sont Artibeus planirostris avec 16,4%
des captures (frugivore de canope) et Rhinophylla
pumilio avec 15,1% des captures (frugivore de sousbois) qui dominent le peuplement.
A 600 m, le peuplement est domin par Tonatia saurophila avec 12,1% des captures (insectivore glaneuse) suivie de deux frugivores de canope, Artibeus
planirostris et Artibeus_obscurus et une nectarivore
Lonchophylla thomasi reprsentant chacun 10,6% des
captures.
A 800 m, le peuplement est domin par un frugivore
de canope Artibeus planirostris et une frugivore de
sous-bois Rhinophylla pumilio avec 15,4% des captures chacune.
Sur lensemble des captures 5 espces reprsentent
50% des individus (Artibeus planirostris, Tonatia
saurophila, Artibeus_obscurus, Lophostoma silvicolum, Rhinophylla pumilio). Artibeus planirostris domine le peuplement avec 14,1% des captures.

Compltude de linventaire
Daprs lestimateur de Chao et les donnes de la
littrature, la compltude de linventaire des chiroptres serait infrieure 50%. Le nombre despces
prsentes sur un site ne peut sestimer quaprs un
grand nombre de captures. En effet, en fort primaire
tropicale un petit nombre despces communes est
contact rapidement mais un grand nombre despces
rares trs rares ne sont recenses quaprs un gros
effort dchantillonnage (Brosset et al., 1996).
Le peuplement du mont Itoup est caractristique dun
peuplement de fort intacte avec une grande diversit,
une communaut quilibre et de faibles taux de captures. Les Phyllostominae sont le groupe taxonomique
le mieux reprsent que ce soit en nombre dindividus,
quen nombre despces. Les Phyllostominae sont
considrs comme caractristiques des milieux forestiers non perturbs (Delaval, 2004 ; Clarke et
al.,2005). La plupart sont des espces sensibles aux
perturbations et indicatrices des milieux forestiers
intacts (Fenton et al., 1992).
En revanche, la guilde la mieux reprsente est celle
des frugivores de canope car Artibeus planirostris
(Stenodermatinae) domine le peuplement, sans doute
cause de la disponibilit de sa ressource.

Lonchorhina inusitata) suggre la prsence de cavits


rocheuses sur le mont Itoup.
Les grottes, mme de taille modeste, sont un atout du
fait de leur raret en Guyane. Les espces infodes
ce type de gte ont donc une rpartition htrogne et
localise. Elles sont plus vulnrables que les espces
gtant dans les arbres et le feuillage.
Les facteurs limitant ne sont pas les mmes pour
toutes les espces. Pour certaines, la disponibilit en
gtes sera limitante, pour dautres ce sera la nature des
ressources alimentaires. Tous ces facteurs entrent en
jeux, mais avec des degrs diffrents selon les espces.
Leffort de capture effectu ne permet pas de tirer de
conclusions par rapport une ventuelle rpartition le
long dun gradient daltitude. Dailleurs, le coefficient
de similitude entre les diffrents sites indique que les
peuplements sont trs proches (E400m-600 m = 0,76 ;
E400m-800m = 0,70 ; E600m-800m = 0,68).
Notons quavec la mthode de capture au filet il existe
un biais dchantillonnage en faveur des Phyllostomidae de sous-bois qui dominent ainsi trs largement
linventaire.
Toutes les chauves-souris de haut vol (Emballonuridae, Molossidae) ou les espces trs lgres au vol
papillonnant (Furipteridae, Thyropteridae) ne se font
que trs rarement capturer par cette technique.
La bioacoustique permet de complter linventaire en
faveur de ces espces. Ainsi, nous pourrions, par
exemple, effectuer des relevs acoustiques lors de
sances dcoute durant une heure aprs le crpuscule.
Les contacts acoustiques peuvent tre identifis instantanment avec un bat detector de type D1000
(Pettersson Elektronik), et pour les plus complexes ils
sont enregistrs et identifis ensuite par analyse auditive et informatique (logiciel BatSound, Pettersson
Elektronik). Ainsi, afin de mieux apprhender la composition et la structure du peuplement de chiroptres
du mont Itoup, il faudrait raliser une autre mission
associant la bioacoustique aux captures au filet. Enfin,
chaque espce a fait lobjet dun prlvement de patagium pour dventuelles analyses gntiques. Ce matriel pourrait servir pour des tudes de phylogographie des espces, de barcoding ou plus simplement
pour de la taxonomie sur certains complexes despces
(Platyrrhinus incarum/fusciventris par exemple).

La prsence despces troglophiles (Pteronotus gr.


parnellii, Lionycteris spurrelli, Anoura geoffroyi et

31

Les amphibiens
Le manque dexhaustivit est une caractristique gnrale des relevs de biodiversit. Parvenir, en fort
guyanaise, un inventaire complet des amphibiens
ncessite ainsi un effort de prospection long et coteux.
Toutefois, lanalyse des donnes rcoltes lors
dtudes prcdentes a mis en vidence que deux
sessions dinventaires complmentaires dune dizaine
de jours permettaient dobtenir un tat des lieux satisfaisant et une estimation fiable de la diversit des
communauts damphibiens Anoures. Le cas des ccilies (gymnophiones) est trait part car leurs murs
fouisseuses rendent les inventaires fastidieux.
Par ailleurs, relever le nombre exact dindividus de
chaque espce reprsente dans un chantillon savre
extrmement complexe (mles chanteurs nombreux et
isols, milliers dindividus dans certaines mares de
reproduction...).
Dans le cas dchantillons rpts dans le temps et
dans lespace, les donnes dincidence (prsence/absence) sont, en revanche, faciles collecter.
Selon Chao (2005), le terme chantillon peut
sappliquer de nombreuses situations pour peu que la
mthodologie soit relativement standardise : quadrat,
site, transect, priode fixe de temps... Dans notre cas,
un chantillon correspond une journe complte de
prospection (globalement de 05h 00 23h 00). Cela
ne signifie pas une prospection continue de 18h00,
mais la prise en compte de tous les indices de prsence
(observations directes, chants, pontes ou ttards...)
dans ce laps de temps. Les individus de ces chantillons sont les espces contactes. Les rsultats sont
alors prsents sous forme dune matrice dincidence
(1/0 prsence/absence) espce par chantillon.

Diversit globale : linventaire du mont Itoup


Les prospections ont permis de noter la prsence de 45
espces damphibiens dont 44 espces danoures et
une espce de gymnophione (amphibien apode appel
galement ccilie).
Les donnes concernant les amphibiens sont considres comme suffisante pour permettre une analyse
exploratoire des communauts des diffrentes stations
altitudinales.

Compltude de linventaire
Afin de saffranchir de la dimension chronologique de
la mission et de lhtrognit de lchantillonnage
due aux conditions climatiques inconstantes, une
courbe daccumulation de la richesse spcifique (appele galement courbe de rarfaction) a t calcule.
Cette fonction, calcule analytiquement, sappelle
encore la courbe Mao Tau (Colwell et al., 2004). Les
courbes Mao Tau ne sont pas des estimateurs de richesse au sens des estimateurs classiques Chao ou
ICE. En fait, Mao Tau calcule la richesse spcifique
dun sous-chantillonnage du jeu complet de donnes
(bas sur toutes les espces recenses sur la zone). Il
est alors possible de comparer les richesses de diff-

32

rents sites (mais galement celles calcules sur un


mme site lors de deux sessions dchantillonnage), en
comparant les courbes Mao Tau de diffrents inventaires effort dchantillonnage gal.
La courbe de rarfaction permet destimer si la zone
dtude a globalement t chantillonne de faon
convenable. On peut ainsi estimer quun secteur a t
chantillonn de faon acceptable si la croissance de
la courbe tend ralentir, cest--dire que le nombre
despces nouvelles diminue avec laugmentation du
nombre dchantillons. Leffort dchantillonnage
idal permettrait dapprocher lasymptote horizontale
(correspondant au nombre total despces prsentes
dans la zone).
Si lasymptote est atteinte pour plusieurs communauts (de diffrents sites tudis), il peut y avoir comparaison directe des richesses. Si laymptote nest pas
atteinte, les courbes Mao Tau permettent la comparaison des richesses en rduisant la taille des chantillons
(pour arriver une taille commune).
La courbe Mao Tau est figure avec son intervalle de
confiance (95%). Cette reprsentation permet
dillustrer quen 15 jours de prospection, entre 38 et
51 espces seraient inventories dans les conditions de
la mission davril 2010. Un effort dchantillonnage
complmentaire de 15 jours permettrait de recalculer
la courbe et de resserrer lintervalle de confiance autour dune courbe tendant lasymptote.
Notons loccurrence, dans le jeu de donnes,
duniques et de duplicates (des espces observes
quune seule fois pour les uniques lors dun seul
chantillonnage ou deux fois pour les duplicates)
Sur lensemble de ltude, dix espces danoures constituent des uniques et trois espces des duplicates.
Face ce constat, il est intressant de compenser le
biais inhrent un chantillonnage non exhaustif, en
faisant appel des estimateurs non-paramtriques.
Le logiciel estimateS (Colwell, 2009) permet de calculer facilement des estimateurs partir de la matrice
espce par chantillon. Diffrents estimateurs, bass
sur lincidence, ont t compars : Chao estime ainsi
le nombre despces non observes partir de celles
observes 1 ou 2 fois.
Lestimateur Chao 2 value cette richesse 55,5, mais
avec un intervalle de confiance stalant de 47 90
espces. Lestimateur ICE (Incidence Coverageestimator) value la richesse 51,5. Ces estimations (autour de 50 55 espces) rejoignent les richesses obtenues sur dautres sites (RN Trinit, notamment) la
faveur de deux missions complmentaires. Elles sousestiment toutefois la diversit du mont Itoup.
Lobservation de 44 espces danoures est un rsultat
trs correct au regard des missions (de dures quivalentes) menes dans le sud de la Guyane. Malgr des
conditions mtorologiques favorables linventaire
des amphibiens, tant les estimateurs de richesses que
lexprience dmontrent que linventaire est loin
dtre achev. Une dizaine despces pourraient venir
complter la liste la faveur dune seconde mission
dcale dans la saison, tandis quune autre dizaine
despces bien plus discrtes et difficiles contacter
viendraient probablement sajouter la faveur dune
mission adapte un objectif dinventaire exhaustif.
Lanalyse du gradient altitudinal, travers la rparti-

tion des espces observes, repose donc sur 80% voire


70% du peuplement rel.

Richesses spcifiques locales : les diversits


Les trois tages prospects (400 m, 600 m et 800 m),
malgr une pression dobservation htrogne, ont
livr des communauts danoures de richesses spcifiques tonnamment proches. Les richesses spcifiques observes 400 m et 600 m slvent, toutes
deux, 27 espces. Celle constate 800 m savre
lgrement suprieure avec 32 espces. Toutefois, la
prsence dune grande mare sur le plateau du mont
Itoup biaise quelque peu cette valeur. La mare sommitale prsente un cortge inattendu despces dont
certaines composantes sont tout fait surprenantes
dans cette rgion recule et loigne des grands axes
fluviaux.
Scinax boesemani et Dendropsophus aff. minutus sont
des espces plutt caractristiques des rgions ctires
tandis que Phyllomedusa tomopterna et Trachycephalus coriaceus, probablement uniformment rparties
en fort, ne se rencontrent dans les mares temporaires
qu la faveur des grosses averses. Bien que la prsence de ces quatre espces mrite dtre souligne,
elle apporte peu dinformations quant linfluence de
laltitude sur la communaut damphibiens. Ces espces exclues, la richesse spcifique utile
lanalyse slve 28 espces.
Trois communauts tages, trois diversits locales
quivalentes...
Du strict point de vue de la richesse spcifique, il ne
semble pas y avoir de gradient ni de diffrence imputable laltitude. Le nombre dchantillons (4 rptitions 800 m, 5 400 m et 6 600 m) demeure cependant trop faible pour calculer puis comparer les
courbes de rarfaction. En revanche, lanalyse de la
composition des communauts apporte des lments
forts intressants quant un tagement des espces.

Diversit et tagement altitudinal


La diversit bta est une mesure de la biodiversit qui
consiste comparer la composition de communauts
entre cosystmes ou le long de gradients environnementaux. Cela suppose de comparer le nombre de
taxons qui sont uniques chacun des cosystmes. De
lanalyse qui suit, nous avons exclu les quatre espces
de la mare temporaire, non significatives notre sens.
Lindice le plus couramment utilis est lindice de
similitude de Srensen. Trs simple calculer, lindice
varie de 0 lorsque les communauts nont aucune
espce en commun 1 (100%) lorsque les communauts sont identiques.
Les rsultats sont les suivants : (400-600) = 0,7 ;
_(600-800) = 0,77 ; (400-800) = 0,26
Chaque tage altitudinal partage donc les trois-quarts
de ses espces (70 et 77%) avec ltage le plus proche,
mais les deux tages loigns nont quun quart (26%)
de leurs espces en commun. Il y a donc bien un
changement progressif dans la communaut
damphibiens anoures le long du gradient altitudinal.

Des espces submontagnardes ?


Lvolution de la communaut damphibiens selon un
gradient altitudinal est flagrante. Les communauts
damphibiens 400 m et 800 m prsentent chacune
des espces originales tandis que la communaut intermdiaire, 600 m, partage ses espces avec lun ou
lautre des tages voisins.
16 espces sont communes aux trois tages, 12 espces sont communes deux tages et 16 sont limites
un seul tage. Les seize espces omniprsentes constituent une partie du bruit de fond de la majorit des
inventaires forestiers. Dans lordre dabondance, nous
trouvons donc : Adenomera andreae, Osteocephalus
oophagus, Adenomera heyeri, Otophryne pyburni,
Rhinella aff. castaneotica, Dendrobates tinctorius,
Pristimantis chiastonotus, Pristimantis zeuctotylus,
Leptodactylus pentadactylus, Rhaebo guttatus, Allobates femoralis, Ameerega hahneli, Anomaloglossus
aff. degranvillei, Pristimantis inguinalis, Pristimantis
sp. 3 et Leptodactylus knudseni.
Parmi les douze espces communes deux tages,
certaines, notamment prsentes 400 m et 600 m, sont
galement des espces rpartition large en Guyane :
il sagit de Leptodactylus stenodema, Allobates granti,
Leptodactylus mystaceus, Pristimantis marmoratus,
Dendropsophus sp. 1, Leptodactylus rhodomystax,
Osteocephalus taurinus, Atelopus flavescens (du
morphe spumarius barbotini) et dans une moindre
mesure Anomaloglossus aff. baeobatrachus et Allobates aff granti assez localises en Guyane. Anomaloglossus sp. 5 aff. degranvillei et Pristimantis espedeus
reprsentent les espces submontagnardes et sont
communes aux tages 600 m et 800 m.
Enfin, parmi les 16 espces dont la rpartition observe se limite un seul tage, 12 sont des espces
large rpartition : Anomaloglossus baeobatrachus,
Ranitomeya ventrimaculata, Hypsiboas dentei, Hyalinobatrachium cappelei, Scinax cf. cruentommus (sp2),
Chiasmocleis hudsoni, Leptodactylus gr. podicipinus,
Phyllomedusa bicolor, Phyllomedusa tomopterna,
Pristimantis gutturalis, Trachycephalus hadroceps,
Trachycephalus coriaceus. Pour deux autres espces,
cela reprsentent des donnes absolument singulires
car elles sont connues des forts ctires : Dendropsophus minutus et Scinax boesemani. Pour deux dernires espces enfin, elles mritent une attention particulire : Rhinella cf. martyi est un gros crapaud forestier dcrit rcemment du sud de la Guyane et Leptodactylus myersi est une grenouille imposante strictement infode aux savanes-roche. Nous reviendrons
par la suite sur ces cas particuliers et sur lapport de
telles donnes la connaissance des amphibiens de
Guyane.
Pour synthtiser, lensemble de la zone dtude prsente 39 espces large rpartition plus ou moins
communes toutes les stations forestires, 1 espce
caractristique de la zone sud de la Guyane (Rhinella
martyi), 1 espce typique des inselbergs (Leptodactylus myersi) lie la proximit de la savane-roche
Impossible, 2 espces dorigine ctire (Dendropsophus aff. minutus et Scinax boesemani) rpartition

33

discontinue dans le massif forestier et 2 espces que


lon peut qualifier de montagnardes (Anomaloglossus
sp. 5 aff. degranvillei, Pristimantis espedeus).
Sur le flanc prospect du mont Itoup, les espces
montagnardes, communes aux stations 600 m et
800_m, apparaissent vers 500 m daltitude. La limite
infrieure de rpartition de la petite grenouille Pristimantis espedeus, aisment identifiable son chant, se
situe autour de 500 m sur le layon C.
A linverse, certaines espces franchissent difficilement lisoplthe 500 m et se cantonnent aux basses
altitudes. Bien quil soit dlicat de se prononcer sur
labsence dune espce (la prsence dune espce est
une donne robuste tandis que son absence peut rsulter dun dfaut de prospection), il semble bien
quAllobates granti et Anomaloglossus baeobatrachus
natteignent pas le sommet et soient progressivement
remplacs par Allobates aff. granti et Anomaloglossus
aff. baeobatrachus.

Les reptiles
Les prospections ddies linventaire des amphibiens ont galement fourni une liste de 27 espces de
squamates (10 serpents et 17 lzards), une tortue et un
caman.
A ces donnes, il convient de rajouter les observations
des autres membres de lexpdition. Les identifications ont t fates daprs photographies aprs la
mission. Ainsi, deux espces de serpents supplmentaires sont documentes (Boa constrictor et Bothrops
atrox) par lquipe dECOBIOS et une espce de
lzard (Anolis ortonii), par lquipe du Parc amazonien de Guyane.
Ces observations portent donc le nombre de squamates
30 espces (12 serpents et 18 lzards).
Les donnes concernant les squamates, trop prliminaires, nont pas fait lobjet dune analyse spcifique
dans ce rapport. Lancien groupe des lzards est
bien reprsent, avec 18 espces, mais celui des serpents a t peine effleur.
Cest l, une des caractristiques des inventaires de
squamates en forts tropicales : la faible densit des
serpents ne permet pas dobtenir des donnes significatives sur le peuplement sans un effort de prospection
dmesur (plusieurs annes de recherche en continu
ou mise en place de dispositifs de pigeage techniquement lourds, a fortiori dans des endroits reculs).
Parmi ces 30 espces, lobservation de deux taxons
mrite dtre souligne. La capture de trois individus
du lzard Amapasaurus tetradactylus, un endmique
trs rare de lest du plateau des Guyanes vient enrichir
la liste des squamates de Guyane, tandis que
lobservation de llgant serpent Dipsas copei, offre
lune des rares localits guyanaises de cette espce
arboricole et malacophage.

34

Les poissons
La dtermination de paramtres pouvant expliquer les
variations de richesse spcifique entre localits est
importante dans ltude de la biodiversit et des communauts.
Lors de cette mission, 8 stations ont t prospectes :
elles montrent des variations de richesse spcifique
que nous pouvons considrer comme relle, cest-dire, sans un grand biais dchantillonnage tant donn la mthode de pche exhaustive que nous avons
employe et la taille rduite des cours deau tudis.
Il est possible de mener des analyses complexes, multivaries, pour comprendre les facteurs ayant un rle
explicatif dominant dans la comprhension des variations de richesse spcifique. De telles analyses ont t
conduites par Sbastien Brosse, de lUniversit de
Toulouse. Une autre approche est de slectionner un
paramtre qui puisse intgrer dautres variables explicatives importantes. Ainsi, seules les variations de
dbit peuvent expliquer une part considrable des
variations de richesse spcifique. Il est cependant utile
de souligner les biais potentiels sur la mesure de ce
paramtre, en particulier si lon effectue les mesures
juste aprs une forte pluie ou en des saisons diffrentes.
Les stations prospectes montrent une richesse spcifique trs faible en comparaison avec dautres cours
deau de dbit comparable (en saison sche). Par
exemple, la crique Aya, qui se situe dans la rserve
naturelles de la Trinit et fait partie du bassin de la
Mana, na pas un dbit bien suprieur aux stations 4 et
5, mais prsente une richesse spcifique dix fois suprieure (62 espces contre 6 pour la station 4).
Lexplication la plus probable rside dans le type de
cours deau. Par comparaison aux criques des stations
4 et 5, la crique Aya est plus varie en microhabitats,
avec une succession de secteurs profonds faible
courant, de rapides substrat rocheux, de radiers, et de
secteurs avec plantes aquatiques et bois. Ce type de
cours deau se trouve gnralement des altitudes
moins leves que les criques prospectes sur le mont
Itoup (le secteur tudi de la crique Aya se situe
une altitude denviron 110 m). Par contre, si lon
compare des criques possdant les mmes caractristiques et microhabitats que ceux des criques prospectes lors de cette mission, alors il devient visible que
la richesse spcifique de ces criques est tout fait
comparable. Mol et al. (2007) relvent 8 espces dans
les criques daltitude de la montagne Lely et 11 pour
la montagne Nassau, qui font partie du bassin du Maroni, au Suriname. En Guyane franaise, on note galement 3 espces dans les criques daltitude du mont
Lucifer (altitude 380 m ; bassin de la Mana) ; 5 espces dans la crique Cascade et 7 espces dans la
crique Kwack de la station CNRS des Nouragues
(altitude 210 m ; bassin de lApprouague) ; dans la
mme station, ont t inventories 4 espces dans la
crique scoulant en direction de la Comt, sur lautre
versant de lInselberg (altitude 290 m) ; dans la partie
amont de la crique de la montagne de Cacao, 4 espces (altitude 140 m ; bassin de la Comt) ont t

recenses. Il en rsulte donc que la richesse spcifique


des criques du mont Itoup semble tre dans la norme
des criques daltitude avec des microhabitats peu
varis.

Liste despces & abondances par station de


pche
La station 1 se situe sur la petite crique du camp de
base, sur le flanc ouest du mont Itoup. Elle scoule
en direction de la crique Waki, qui fait partie du bassin
du Maroni.
Les espces de poissons captures dans la station 1
sont :
- Lithoxus stocki (siluriformes, Loricariidae)
- Ituglanis nebulosus (siluriformes, Trichomicteridae) y est lespce dominante, reprsentant 95% de
tous les individus capturs.
La station 2 se trouve sur la seconde crique partir
du camp de base sur le layon D, flanc ouest du mont
Itoup. Elle coule en direction de la crique Waki (bassin du Maroni).
Les espces captures dans la station 2 sont :
- Lithoxus stocki (siluriformes, Loricariidae)
- Ituglanis nebulosus (siluriformes, Trichomicteridae) y est lespce dominante avec 73% des captures
- Rivulus geayi (cyprinodontiformes, Rivulidae)
La station 3 se trouve en aval de la confluence des
criques des stations 1 et 2, sur un secteur parallle et
au nord du layon C, sur le flanc ouest du mont Itoup.
Elle coule en direction de la crique Waki (bassin du
Maroni). Le dbit est plus important quaux stations 1
et 2.
Les espces captures dans la station 3 sont :
- Lithoxus stocki (siluriformes, Loricariidae)
- Ancistrus cf. leucostictus (siluriformes, Loricariidae)
- Ituglanis nebulosus (siluriformes, Trichomicteridae)
- Rivulus geayi (cyprinodontiformes, Rivulidae)
Avec 58% des captures, Ituglanis nebulosus est toujours lespce dominante bien que reprsentant une
moins grande proportion que dans les stations 1 et 2.
Labondance des autres espces est domine par Ancistrus cf. leucostictus puis Lithoxus stocki .
La station 4 se trouve sur une autre branche du
mme rseau de criques, proche de la station 3, toujours sur le flanc ouest du mont Itoup. Elle coule en
direction de la crique Waki (bassin du Maroni). Le
dbit est plus important quaux stations 1, 2 et 3 ; cest
le plus fort dbit de toutes les stations prospectes lors
de cette mission. Cest galement la station de plus
faible altitude.
- Lithoxus stocki (siluriformes, Loricariidae)
- Ancistrus cf. leucostictus (siluriformes, Loricariidae)
- Pseudancistrus brevispinis (siluriformes, Loricariidae)
- Ituglanis nebulosus (siluriformes, Trichomicteridae)
- Characidium zebra (sharaciformes, Characidae)
- Melanocharacidum blennoides (sharaciformes,
Characidae)

Avec six espces captures, la station 4 a la plus


grande richesse spcifique de toutes les stations prospectes lors de cette mission. De plus, un spcimen du
genre Bryconops (characiformes, Characidae) a t
observ mais non captur.
Quatre espces dominent en abondance : Ituglanis
nebulosus (27%), Ancistrus cf. leucostictus (21%),
Lithoxus stocki (19%) et Characidium zebra (17%).
Melanocharacidium blennoides na t captur qu
un exemplaire, lpuisette, hors du secteur tudi par
Sbastien Brosse et avant le passage de la rotnone.
La station 5 se trouve sur le rseau qui draine le flanc
sud-ouest du mont Itoup et qui se jette dans la crique
Petit Tamoury. Cette dernire contourne le mont Itoup par le sud et alimente ensuite la rivire Camopi,
faisant partie du bassin de lOyapock. Cette particularit fait que les ttes de la crique Petit Tamoury sont
gographiquement trs proches (quelques dizaines de
mtres) des ttes de criques du bassin du Maroni. De
plus, les dnivels sont peu marqus dans le secteur de
plaine. Cette rgion est donc un lieu privilgi pour
tudier dventuels changes dichtyofaune entre le
bassin du Maroni et le bassin de lOyapock. La station
5 prsente un dbit notoire.
- Lithoxus boujardi (siluriformes, Loricariidae)
- Ancistrus cf. leucostictus (siluriformes, Loricariidae)
- Ituglanis nebulosus (siluriformes, Trichomicteridae)
- Rivulus igneus (cyprinodontiformes, Rivulidae)
Labondance relative de ces quatre espces est assez
quilibre, entre 19% pour Lithoxus boujardi et 31%
pour Ituglanis nebulosus.
La station 6 est situe sur une petite crique faible
dbit qui fait partie du mme rseau que la crique de la
station 5 (flanc ouest du mont Itoup, bassin de
lOyapock).
- Rivulus igneus (cyprinodontiformes, Rivulidae)
Cette station possde la richesse spcifique la plus
faible.
La station 7 est situe sur une crique du flanc est du
mont Itoup, coulant dans la branche nord de la crique
Continent (qui change ensuite de nom et devient la
crique Sable), qui fait partie du bassin de lOyapock.
Le flanc est du mont Itoup semble recevoir plus de
prcipitations et/ou de brumes que le flanc ouest,
probablement en raison des vents dominants venant de
lest charg dhumidit. Cela expliquerait le dbit
important estim pour la station 7 (38.6 l/sec) une
altitude leve (625 m).
- Lithoxus boujardi (siluriformes, Loricariidae)
- Harttiella sp. (siluriformes, Loricariidae)
- Ituglanis nebulosus (siluriformes, Trichomicteridae)
- Rivulus igneus (cyprinodontiformes, Rivulidea)
Lespce la plus abondante est Harttiella sp., avec
51% de toutes les captures. Vient ensuite Ituglanis
nebulosus qui ne reprsente quun peu plus du quart
des captures.
La station 8 se situe galement sur le flanc est du
mont Itoup, coulant dans la branche sud de la crique
Continent (bassin de lOyapock). Le dbit la station

35

8 est aussi relativement important par rapport


laltitude leve de cette station (528 m).
- Lithoxus boujardi (siluriformes, Loricariidae)
- Harttiella sp. (siluriformes, Loricariidae)
- Ituglanis nebulosus (siluriformes, Trichomicteridae)
Lespce dominante est Harttiella sp. avec 61% des
captures, suivie par Ituglanis nebulosus reprsentant
29% des captures.

Relations entre dbit hydrique et richesse spcifique


Pour expliquer les variations de richesse spcifique
entre les stations prospectes, plusieurs variables peuvent intervenir comme des variables topographiques
(altitude, surface du bassin versant), daphiques (type
de sol), climatiques (prcipitations), de vgtation, le
type et le nombre de microhabitats, la largeur ou la
profondeur du cours deau ou encore les proprits
physico-chimique de leau.
Les paramtres physico-chimiques sont relativement
constants entre stations et ne peuvent donc pas expliquer les variations. Le seul paramtre montrant une
diffrence entre station est la turbidit. Cependant, les
valeurs sont dans une gamme de faible turbidit et la
valeur relativement plus leve de la station 4 correspond un pisode de pluie survenu la veille du prlvement.
Quant au facteur altitude, il ne montre pas de corrlation significative avec la richesse spcifique. De manire plus gnrale, la plupart des facteurs topographiques, daphiques, climatiques et de vgtation
peuvent tre intgrs dans un seul paramtre : le dbit.
Ici, les variations de dbits permettent dexpliquer
56% des variations de la richesse spcifique entre
stations.

Les insectes
Diversit globale : linventaire du mont Itoup
En dcembre 2012, 1901 espces ou morpho-espces
ont t identifies par un rseau de 41 taxonomistes,
parmi quelques 8350 spcimens collects et tris.
La contribution des diffrents dispositifs de captures
linventaire gnral est trs variable : lessentiel des
donnes proviennent du pige lumineux, sur la DZ,
qui a permis un chantillonnage efficace des lpidoptres nocturnes et de lefficacit des piges
dinterception placs sur la zone de coupe dans
lattraction des coloptres xylophages.

tude altitudinale
Malgr le manque de rptition et la faible dure de
lchantillonnage, les tendances suivantes peuvent tre
dgages :
les communauts chantillonnes 400 m et 600 m
sont assez proches tant en termes de diversit que de
faune ;
la communaut despces de 800 m daltitude se
dmarque des deux autres ;

36

labondance et la densit despces par pige sont


plus leves au sommet ;
rapporte un effectif constant, la diversit est par
contre plus faible 800 m daltitude, avec une rpartition moins quitable des espces ;
la diversit lie laltitude est un peu plus leve
que celle lie la variabilit au sein dune mme placette ;
800 m, la proportion despces rares et despces
exclusives dune altitude est sensiblement plus importante, ce qui tmoigne de lexistence dun cortge
despces particulier ;
les rponses varient selon les groupes taxonomiques.

Etat dinventaire de lentomofaune sur le mont Itoup (2010)

37

Les apports de la mission Itoup


la connaissance globale
Les donnes collectes lors de la mission Itoup de
2010 sinsrent dans un ensemble de programmes de
recherche ou de conservation initis parfois il y a prs
de 30 ans.
Mme si la vocation premire de la mission Itoup a
t la mise en vidence de leffet du gradient altitudinal sur la biocnose, lapport principal de la mission
est indniablement qualitatif.
Les listes taxonomiques rcoltes, bien quelles soient
encore incompltes, offrent un aperu robuste de la
biodiversit du massif. Ces donnes sont trs prcieuses car elles renseignent sur la prsence denviron
3400 espces dans une rgion de la Guyane largement
mconnue.
Ces donnes nont toutefois quune valeur relative :
elles prennent rellement tout leur sens lorsquelles
sont mises en perspectives avec les donnes issues
dautres programmes dinventaires ou de recherche :
programme ZNIEFF, Placettes forestires AMAP
(IRD), Programme HABITAT (ONF, ONCFS), Projet
DIADEMA (Labex CEBA), Etude PME (Petite
Masses deau / DEAL-HYDRECO) et inventaires
issus des autres espaces protgs de Guyane.
Enfin, il est important de considrer la mission de
2010 comme une contribution la caractrisationdun
tat initial, mais qui ne pose pas encore les bases protocoles en vu dun suivi long terme des communauts.

8 sites, situs dans le Parc amazonien de Guyane ont


fait lobjet dinventaires de la flore et de la faune (vertbrs) entre 2010 et 2012 : les Abattis Cottica, les
monts Atachi Bakka, les monts Belvdre de Sal, le
flat de la Waki, les monts Alikene, le Pic Coudreau du
Sud, la Borne 4 et la montagne Cacao de la Camopi.

Inventaires entomologiques (SEAG)


Inventaire de lentomofaune de Sal (2010)
Inventaire de lentomofaune du mont Saint-Marcel
(2014)

Placettes forestires AMAP (IRD)


Avant la mission Itoup de 2010, lIRD (AMAP) a
mis en place 18 placettes forestires dans le Parc amazonien de Guyane entre 1987 et 2007. La carte cicontre montre la localisation des sites inventoris par
lAMAP :
2 (1,06 ha + 0,4 ha) sur la Crique Cacao (Haute
Camopi) en 1987 ;
3 x 1ha aux monts dArawa en fvrier 2006 ;
3 x 1ha Borne 1 en octobre 2006 ;
3 x 1ha sur la Haute Wanapi en mars 2007
3 x 1ha Piton Baron (massif des Emerillons) en
octobre 2007
1 Trois Sauts (0,8 ha) en 1989
2 x 1ha au sud de la crique Grand Inini en 1990
1 ha Sal (plateau La Douane) en septembre 2001

Actualisation des ZNIEFF


Les missions sur le mont Itoup de 2010 compltent
efficacement le programme dinventaires faunistique
et floristique men dans le cadre de la modernisation
des ZNIEFF de Guyane.
Les efforts consquents ports sur les inventaires
floristique et entomologique, en particulier, propulsent
la rgion du mont Itoup parmi les sites les mieux
connus du Parc amazonien, voire de la Guyane.
A ce jour, tous groupes taxonomiques confondus,
3382 espces ont t dtermines (espces & morphoespces).

38

DIADEMA
A ce jour, les sites de la Crique Limonade Sal (en
2013), dItoup (en 2014) et de la Borne 1 (en 2015)
ont fait lobjet dune mission dinventaire pluridisciplinaire du programme DIADEMA.

Inventaire ZNIEFF en Guyane

39

Apports la biogographie
Le cas des Poissons
Analyses phylogntiques et biogographiques
Le massif du mont Itoup, orient nord-sud, forme
dans cette rgion la ligne de partage des eaux entre le
bassin du Maroni, louest, et le bassin de lOyapock,
lest. Ltude gntique des espces apparentes,
captures de part et dautre de la ligne de partage des
eaux, permet de tester lhypothse dchange trs
occasionnel dichtyofaune entre deux bassins. Ces
changes se produiraient par capture de rivire,
cest--dire quun affluent changerait de cours pour se
jeter dans lautre bassin cause, par exemple, de
changements topographiques. Ce phnomne, thoriquement possible, na pas encore t clairement illustr dans la rgion des Guyanes.
Pour tester lhypothse de capture de rivire , des
tudes gntiques sur plusieurs genres de poissons
sont en cours dans le laboratoire de J. Montoya.
Grce aux nombreux chantillonnages prcdents, il a
t possible de montrer que certains poissons capturs
sur le mont Itoup prsentent des signatures gntiques dchange dichtyofaune dans le pass via des
captures de rivires.

Le genre Ancistrus en Guyane


Dans les Guyanes, les espces du genre Ancistrus sont
encore mal comprises du point de vue morphologique
et gntique. La raison principale semble tre la prsence de nombreux hybrides interspcifiques. La seule
espce bien dfinie est A. temminckii, qui habite les
fleuves Maroni, Comewijn, Suriname, Saramaca et
Tabiti au Suriname. Le morphotype nomm A. cf.
leucostictus semble tre un proche parent de A. temminckii mais ne forme pas une ligne monophyltique.
Plusieurs lignes gntiques se distinguent. En ce qui
concerne les individus capturs sur le mont Itoup et
identifis comme A. cf. leucostictus, ceux provenant
des affluents du Maroni apparaissent dans larbre
phylogntique comme trs proches de A. temminckii.
Par contre, ceux provenant des affluents de lOyapock
sont placs deux endroits diffrents de larbre. Un
groupe branche la base de la ligne regroupant A.
temminckii et les A. cf. leucostictus qui lui sont
proches alors que lautre groupe est gntiquement
plus distant et se place avec dautres reprsentant de
A. cf. leucostictus capturs 1999 dans la bas fleuve
Oyapock. Les deux identits gntiques qui coexistent
dans les criques du mont Itoup affluentes de
lOyapock, dont lune est trs proche de lidentit
gntique trouve dans les criques du mont Itoup
affluentes du Maroni, rvlent un vnement
dchange dAncistrus entre bassins dans cette rgion.

40

Le genre Lithoxus dans les Guyanes


Les espces du genre Lithoxus sont particulirement
intressantes pour tudier lhypothse dchange
dichtyofaune entre bassins par capture de rivire car
elles sont trs rhophiles et sont gnralement prsentes trs haut dans les ttes de crique, proche de la
ligne de partage des eaux.
Lanalyse phylogntique du genre Lithoxus dans les
Guyanes montre clairement que lindividu analys
provenant des criques du mont Itoup appartenant au
systme du Maroni, et identifi comme Lithoxus stocki, appartient bien cette espce. Par contre, les individus capturs sur les criques du mont Itoup appartenant au bassin de lOyapock sont placs deux endroits de la phylognie. Un groupe se rapproche de
reprsentants de lespce L. boujardi, de la forme de
lOyapock ; le second groupe se place comme groupe
frre de lespce L. stocki. Ce positionnement reflte
le partage dun anctre commun rcent entre L. stocki
et cette deuxime ligne. Il est donc fortement probable quun change de Lithoxus aie eu lieu entre le
bassin de lOyapock et du Maroni, expliquant ainsi
lexistence de cet anctre commun rcent entre L.
stocki et sa ligne sur vivant actuellement dans les
criques du mont Itoup scoulant dans le bassin de
lOyapock.

Les originalits floristiques et


faunistiques du mont Itoup
Parmi les quelques 3400 espces inventories, le site
du mont Itoup a livr de nombreuses espces prsentant un fort intrt patrimonial : quelles soient endmiques strictes du massif ou localises aux rares forts
de brumes de Guyane, ces espces mritent toute notre
attention.
Lisolement de leur(s) population(s) les dsigne, dune
part, comme des sujets privilgis pour ltude de
limpact des changements climatiques au cours des
derniers millnaires (phylo-gographie) ; dautre part,
leurs exigences cologiques les rendent a priori trs
sensibles aux changements climatiques amorcs. Le
suivi de leurs populations face au rchauffement du
climat mriterait donc dtre inscrit comme une des
priorits de la stratgie scientifique du Parc amazonien
de Guyane.
Ce chapitre restitue les originalits floristiques et
faunistiques du mont Itoup fournis dans les rapports
des intervenants. A ce stade, un travail collgial
dexperts permettrait de dfinir plus prcisment les
espces enjeux et dextraire une liste despces candidates au statut despces indicatrices des changements climatiques.

Comme cela a t voqu en Conseil scientifique du


PAG, il ne sagit pas de dfinir des groupes taxonomiques indicateurs, mais bien de rvler, parmi les
espces cites plus bas, un nombre limit despces, a
dtection aise, dont les populations sont susceptibles
de ragir un rchauffement climatique.

La flore
Les rcoltes botaniques de lquipe dECOBIOS ont
dvoil 52 espces particulirement intressantes (hors
fougres, traites plus bas). Il sagit de taxons nouveaux pour la science, donc dans ltat actuel des
connaissances endmiques du massif dItoup ; de
taxons nouveaux pour la Guyane (souvent limits aux
pays voisins et des habitats trs spcifiques) ; de
taxons extrmement rares pralablement observs
uniquement sur le mont Itoup et de taxons localiss
dont trs peu de localits sont connues.

Taxons nouveaux pour la science


Parmi les 732 espces collectes par lquipe
dECOBIOS, treize taxons sont a priori nouveaux
pour la science.
- Dichorisandra sp. nov. (Commelinaceae) : espce
tout fait remarquable dont une belle population a t
dcouverte sur les lisires de la savane-roche Impossible Photos et collecte OT5772
- Quiina aff. cruegeriana (Ochnaceae) : Photos et
collecte OT5658.
- Rudgea sp. nov. ined. (Rubiaceae): Photos et collectes OT 5574/OT5654/OT5952. Connu uniquement
de Guyane. Description en cours.
- Disteganthus sp. nov. (Bromeliaceae) : Photos et
collecte OT5625.
- Neodillenia sp. nov. (Dilleniaceae) : Photos et
collecte OT 6000.
- Voyria sp. nov. (Gentianaceae) : Photos et collectes OT 5601/OT5828. Espce connue uniquement
de Guyane, mais rpandue.
- Bromelia fosteriana L.B. Sm. subsp. nov. (Bromeliaceae) : Photos et collecte OT5777. Deux pieds ont
t rapports de la mission et ont fleuri. Caractrisation en cours.

- Pilea aff. tabularis C.C. Berg : Donne intressante ; approfondir.

Taxons nouveaux pour la Guyane franaise


- Bomarea edulis (Tussac) Herb. (Alstroemeriaceae)
: Photos et collecte OT5769. Deuxime genre et deuxime espce, en Guyane, de cette famille. Uniquement des inselbergs du sud.
- Stenospermation spruceanum Schott (Araceae) :
Photos et collecte OT5575.
- Crocodeilanthe floribunda Poepp. & Endl. (Orchidaceae)
:
OT5315/OT5371/OT5381/OT5448/OT5903/OT5921/
OT5998.
- Trichopilia mutica (Lindl.) Rchb. f. & Wullschl.
(Orchidaceae) : Photos et collectes OT5847/OT5873.
- Utricularia alpina Jacq. (Lentibulariaceae) : Photos et collectes OT5616/OT5632.
- Cochliasanthus caracalla (L.) Verdc. (Leguminosae Papilionoideae) : Cette liane volubile, collecte sur
le relev 4 (collection Sabatier & Molino) fournie la
premire donne en Guyane de cette espce rcemment collecte au Suriname. On notera que les lianes
reprsentent certainement un ensemble despces
consquent pour le site dtude mais quelles seront in
fine trs peu reprsentes dans la liste floristique car
leur reprage dans la canope et leur collecte sont trs
difficiles raliser et demanderaient un protocole
spcifique.

Rarets extrmes endmiques du mont Itoup


- Dicliptera granvillei Wassh. (Acanthaceae) : Collecte OT5966.
- Sipanea ovalifolia Bremek. var. villosissima
Steyerm. (Rubiaceae) : Photos et collecte OT5587.
- Tragia tabulaemontana L.J. Gillespie (Euphorbiaceae) : Photos et collecte OT5659.

Connus de 2 ou 3 stations au monde


- Peperomia popayanensis Trel & Yunck. (Piperaceae) : Collecte OT5551. Connu uniquement du type
provenant de Colombie et dItoup !

- Miconia sp.1
OT5570/OT 5968.

(Melastomataceae)

Collecte

- Pilea tabularis C.C. Berg (Urticaceae) : Non collect

- Miconia
OT5598.

(Melastomataceae)

Collecte

- Cremersia patula Feuillet & Skog (Gesneriaceae) :


Photos et collecte OT5819B

sp.2

- Pouteria aff. venosa ssp. amazonica (Mart.) Baehni (Sapotaceae) : Photos et collecte OT5665.
- Lycianthes aff. pauciflora (Vahl) Bitter (Solanaceae) : Collecte OT5520.
- Solanum sp. A de Nee M. inMori et al. (2002)
(Solanaceae) : Photos et collectes OT5491/OT5569.

- Notopleura lateralis (Steyerm.) C. M. Taylor (Rubiaceae) : Collecte OT5590. Uniquement en Guyane,


abondant dans la rgion de Sal. Quelques rares stations connues.

Connu dune station en Guyane


- Mikania banisteriae DC. (Asteraceae) : Collecte
OT5483

41

- Macrocentrum vestitum Sandwith (Melastomataceae) : Non collect

- Notopleura microbracteata (Steyerm.) C.M. Taylor (Rubiaceae) : Photos et collecte OT5333.

- Ludwigia foliobracteolata (Munz) H. Hara (Onagraceae) : Collect en 1980. Non trouv en 2010.

- Notopleura salensis (Steyerm.) C.M. Taylor


(Rubiaceae) : Non collect.

Connu de 2 4 stations en Guyane

- Rudgea bremekampiana Steyerm. (Rubiaceae) :


Photos et collecte OT5398.

- Alstroemeria amazonica Ducke (Alstroemeriaceae) : Photos et collecte OT5721.

- Daphnopsis granvillei Barringer (Thymeleaceae) :


Photos et collecte OT5443.

- Aechmea nudicaulis (L.) Griseb. var. nudicaulis


(Bromeliaceae) : Photos et collectes OT5324/OT5681.

Les fougres

- Malaxis cf. excavata (Lindl.) Kuntze (Orchidaceae) : Photos et collecte OT5826.


- Rehia nervata (Swallen) Fijten (Poaceae) : Collecte OT5732.
- Aristolochia surinamensis Willd. (Aristolochiaceae) : Photos et collecte OT5737.
- Rytidostylis amazonica (C. Mart. ex Cogn.) Spruce
ex Kuntze (Cucurbitaceae) : Photos et collecte
OT5739.
- Actinostemon schomburgkii (Klotzsch) Hochr.
(Euphorbiaceae)
:
Photos
et
collectes
OT5733/OT5760
- Marcgravia magnibracteata Lanj. & Heerdt
(Marcgraviaceae) : Photos et collecte OT5987.
- cf. Dendrophthora warmingii (Eichler) Kuijt (Viscaceae) : Photos et collecte OT5192.

Endmiques de Guyane et des territoires contigus


- Anthurium lanjouwii A.M.E. Jonker & Jonker
(Araceae) : Photos et collectes OT5424/OT 5486.
- Chamaecostus curcumoides (Costaceae) : Photos
et collecte OT5485.
- Degranvillea dermaptera Determann (Orchidaceae) : Non collect
- Ichthyothere granvillei H. Rob. (Asteraceae) :
Photos et collecte OT5759.
- Ernestia granvillei Wurdack (Melastomataceae):
Photos et collecte OT5768.
- Guarea michelmoddei T.D. Penn. & S.A. Mori
(Meliaceae) : Photos.
- Ouratea salensis Sastre (Ochnaceae) : Photos et
collecte OT5498.
- Peperomia gracieana Grts (Piperaceae) : Photos
et collecte OT5770.
- Coussarea amapaensis Steyerm. (Rubiaceae) :
Photos et collecte OT5318.
- Coussarea spicata Delprete (Rubiaceae) : Photos
et collecte OT5394.

42

Parmi les 151 taxons de ptridophytes du massif du


sommet Tabulaire, 25 sont considrs comme remarquables pour diverses raisons :
Seule station connue de Guyane, ou mme des
Guyanes : Diplazium radicans, Diplazium striatum,
Elaphoglossum praetermissum, Hymenasplenium
repandulum, Phlegmariurus acerosus et Stenogrammitis limula.
Stations connues en Guyane en nombre trs rduit et
plantes infodes des habitats localiss : forts
nuages, de moyenne altitude, submontagnardes, plateaux latritiques de haute altitude, lisires de savanes
roches sur inselberg, au-dessus de 500 m.
Taxons identifis comme dterminants dans le
cadre de la rvision de la liste des espces patrimoniales de Guyane (2013).
En fonction des dterminations effectues ce jour
(spcimens ne posant a priori pas de problmes), 68
taxons se rvlent nouveaux pour le mont Itoup. On
constate que la liste tablie en 1980 est presque double, ce qui est dj un rsultat significatif. ct des
espces frquentes ou relativement banales en Guyane
qui avaient chapp nos prdcesseurs et qui ont
permis utilement de complter la liste, plusieurs
taxons remarquables (dont 8 espces dterminantes
selon la nouvelle liste de 2013) ont t dcouverts
parmi lesquels on peut citer :
- Phlegmariurus acerosus (Sw.) B. llg., nouveau pour la Guyane et les Guyanes ;
- Blechnum gracile Kaulf. var. pilosum Boudrie
& Cremers
- Doryopteris sagittifolia (Raddi) J. Sm.
- Elaphoglossum minutum (Pohl ex Fe) T.
Moore
- Elaphoglossum mitorrhizum Mickel
- Hemionitis rufa (L.) Sw.
- Lindsaea lancea (L.) Bedd. var. submontana
Boudrie & Cremers
- Polypodium flagellare H. Christ
- Stenogrammitis limula (H. Christ) Labiak
- Thelypteris pennata (Poir.) C.V. Morton
- Vittaria graminifolia Kaulf.

Enfin, parmi les spcimens encore en cours dtude, il


est fort probable quil existe au moins deux espces
nouvelles pour la science (un Elaphoglossum).

Les arbres
Au moins une dizaine despces darbres semblent
tre des nouveauts pour la flore de Guyane, ce qui est
remarquable compte tenu du nombre relativement
modeste despces recenses (330 espces).
Pratiquement tous les inventaires quantitatifs de Sabatier & Molino, au nord comme au sud de la Guyane
ont t loccasion de mettre en vidence de nouvelles
espces pour la flore de cette rgion. Il semble toutefois que les collectes ralises durant la mission Itoup
soient particulirement porteuses de nouveauts.
Lamplitude cologique couverte par les relevs pourrait expliquer cette particularit.
Plusieurs espces ne sont pour linstant identifies
quau genre ou la famille. Au moins une nest pas
formellement identifie la famille ; il sagit dun
arbre de strate infrieure, collect en fruits, relativement frquent (une dizaine dindividus vus) entre les
altitudes 400 et 700 m. Deux espces nouvelles pour
la flore de Guyane sont particulirement intressantes
mentionner car elles sont relativement abondantes
(plusieurs dizaines dindividus vus) et semblent avoir
des caractristiques cologiques marques.
- Croton sp. (Euphorbiaceae) : quatre individus
collects dans les relevs Ito2 (versant ouest), Ito5 et
Ito6 (plateau sommital) ont t rattachs ce nouveau
morphotaxon car ils ne correspondent aucun taxon
actuellement connu de Guyane. Il sagit pour lun
deux (Ito5B8, collection Sabatier & Molino 5695)
dun arbre de canope de grande dimension, atteignant
une trentaine de mtres de hauteur pour un tronc de
45_cm de diamtre. Les trois autres individus (dont
Ito2J5, Molino & Sabatier 2772) ont pu tre rattachs
ce premier aprs tude botanique. De par leur stade
de dveloppement et leur statut darbre sur-cim, ils
diffrent notablement par leur morphologie foliaire
(limbe non coriace et nettement plus grand) mais possdent les mmes caractristiques de nervation et
dindument cailleux. Ce Croton est donc prsent dans
la partie sommitale du mont Itoup partir de 650 m
daltitude ; il pourrait reprsenter une espce associe
aux forts daltitude.
- Daphnopsis sp. 1 (Thymelaeaceae) : il sagit dun
arbre de strate infrieure (hauteur maximale 25 m),
collect en fruits immatures, relativement frquent
(une dizaine dindividus vus) entre les altitudes 400 et
700 m sur chacun des versants ; non vu en zone sommitale. Le genre Daphnopsis comporte une cinquantaine despces notropicales. Il nest connu de
Guyane que par les dcouvertes assez rcentes (Barringer & Pruski, 2005) de deux arbrisseaux du sousbois, Daphnopsis granitica Pruski & Barringer et
Daphnopsis granvillei Barringer. Le premier semble

typique des inselbergs granitiques alors que le second


a t collect sur diffrents reliefs non granitiques
partir de 300 m daltitude, notamment en Guyane sur
la montagne Cacao (bassin de la Comt) et au mont
Galbao, et au Suriname au mont Nassau, un plateau
tabulaire bauxitique du nord-est. La prsence au mont
Itoup de D. granvillei est confirme par plusieurs
collectes lors de la prsente tude dont une sur le versant est (Molino & Sabatier 2774).
Un seul autre genre avec une espce, arbustive galement, Schoenobiblus daphnoides Mart. reprsente la
famille des Thymelaeaceae en Guyane. Daphnopsis
sp. 1 est donc la premire espce arborescente de ce
genre et de cette famille rpertorie de Guyane et des
pays limitrophes. On trouve diverses espces arborescentes de Daphnopsis en Amrique du Sud (Brsil,
Equateur, Prou, Vnzuela, Guyana), notamment
dans les rgions montagneuses ou de pimont, parfois
basse altitude, mais elles sont inconnues lest des
Guyanes (Suriname, Guyane, Amap).
Trois collectes fertiles avec fruits immatures (Sabatier
& Molino 5672, 5684 et 5697) ont permis
lidentification du genre grce lornementation de
lendocarpe, la placentation et la structure de
linflorescence. Lobservation de fruits possdant un
second carpelle atrophi et quelques fois de fruits
bicarpells nous a incits considrer que nous avions
bien l un reprsentant du genre Daphnopsis. En effet
lexistence dun second carpelle non fertile est discute par Nevling (1959). Il sagirait dun caractre
ancestral dans le genre. La morphologie foliaire et
celle des inflorescences et fruits nont pas permis de
rapprocher Daphnopsis sp. 1 dune espce actuellement connue. Il existe cependant des ressemblances
avec D. peruviensis (Domke) J.F. Macbr., une espce
du pimont andin. Par contre, D. americana subsp.
caribaea (Griseb.) Nevling, arbre de strate infrieure
prsent en Guyane vnzulienne relativement basse
altitude (400-500 m) diffre notamment par sa pilosit
(axes et face inf. des limbes pubrulents). Ltude
botanique complte de cette espce est donc ncessaire. Elle ne pourra cependant tre ralise quaprs
de nouvelles collectes qui permettraient de documenter les fleurs (vraisemblablement lespce est dioque
ce qui obligera rechercher des pieds males et femelles), organes essentiels pour le diagnostic botanique au sein de ce genre, de mme que pour le rattachement dfinitif de nos collectes au genre Daphnopsis. Il est probable que la floraison ait eu lieu peu de
temps avant nos collectes car de trs jeunes ovaires
(0,3 cm de diamtre) non lignifis ont t observs.
Daphnopsis sp. 1 est vraisemblablement une espce de
la fort daltitude o elle occupe la strate infrieure
des peuplements bien structurs ; elle na pas t trouve sur le plateau sommital, peut-tre en raison de sa
moindre frquence dans les forts ouvertes (perturbation lie au vent ?).
- Pouteria sp. 32 (Sapotaceae) : il sagit dun arbre
de canope ou mergent dont certains individus avoi-

43

sinent 60 m de haut. Lespce, documente par un


herbier avec fruits (Sabatier & Molino 5717), se caractrise par un ensemble assez net de caractres distinctifs. Deux populations ont t trouves au niveau des
relev ITO8 (versant ouest, alt 250 m) et ITO4 (versant ouest, alt 450 m). Ces deux relevs se trouvent en
situation de talweg humide et relativement encaisss.
Quelques individus ont t vus sur les pentes mais
aucun dans les relevs en situation de croupe.
Lespce pourrait-elle tre associe ces talwegs ? Ce
secteur du versant ouest porte de vastes zones forestires de type futaie canope haute ou trs haute
(nombreux mergents avoisinant 60 m de haut).
Lespce pourrait tre associe ce type forestier qui
est particulirement prsent sur le versant et le pimont ouest du mont Itoup. Du matriel floral est
ncessaire pour caractriser cette espce.
- Eugenia sp. 14 (Myrtaceae) : arbre de strate infrieure qui semble tre limit au plateau sommital (4
individus en Ito5 et Ito6 dont Molino & Sabatier
2822). Il na pas t observ fertile.
- Eugenia sp. 15 (Myrtaceae) : Arbre de strate infrieure rencontr deux reprises dans le relev Ito3
(versant ouest), lun des chantillons tant florifre
(Ito3I7, Molino & Sabatier 2753), lespce pourra tre
tudie par les spcialistes de cette famille.
- Eugenia sp. 16 (Myrtaceae) : petit arbre du sousbois, collect sur le versant ouest (Ito3B5, Molino &
Sabatier 2785).
- Eugenia sp. 22 (Myrtaceae) : arbre de strate infrieure collect strile sur le plateau sommital (Ito5A3,
Molino & Sabatier 2806).
- ND sp. 26 (Myrtaceae) : arbre de canope collect
strile sur le plateau sommital (Ito5C4, Molino &
Sabatier 2779)
- Quiina leptoclada Tul. (Ochnaceae) : identifi par
J. Schneider en 2012. Il sagit dun petit arbre frquent
de strate infrieure et de sous-bois, dpassant rarement
un D130 de 10 cm. Il a t rencontr entre 400 et
700_m daltitude.
- Ruptiliocarpon sp. 1 aff. caracolito (Lepidobotryaceae) : premire collecte pour la famille, le genre et
lespce en Guyane. Le genre Ruptiliocarpon, ainsi
que la seule espce qui le reprsente ce jour (Ruptiliocarpon caracolito Hammel & N.Zamora), a t
dcrit relativement rcemment (1993). Il a t rattach
la famille des Lepidobotryaceae, dont il est le seul
reprsentant connu en Amrique. Cette famille nest
reprsente que par un seul autre genre, en Afrique de
lOuest (Lepidobotrys). Hammel & Zamora (1993)
constatent que Ruptiliocarpon caracolito a une distribution gographique disperse et clate, en Amrique
Centrale sur la faade Pacifique (Costa Rica, Colombie) et pour le genre des collectes striles en Amazonie sensu lato (Prou, Suriname). Pour les collectes du
nord-est du Suriname (mont Nassau) et du Prou (r-

44

gion dIquitos), Hammel & Zamora (1993) sont rservs quand au rattachement lespce R. caracolito en
raison de diffrences morphologiques (non dcrites) et
suggrent lexistence dune autre espce alors que
dautres botanistes ont rattach ces spcimens
lespce connue (determinavit de Liesner par ex). De
nouveau spcimens ont t collects de louest amazonien : Colombie, Equateur, Prou, mais ce jour
aucun spcimen florifre na t collect pour la rgion amazonienne. Les chantillons rcolts au mont
Itoup (Molino & Sabatier 2846 ; Sabatier & Molino
5685, 5689, 5691, 5726 ; Tostain 5972) prsentent de
nombreuses ressemblances morphologiques avec la
diagnose de R. caracolito. Cependant on peut noter un
ensemble de caractres morphologiques qui pourraient
distinguer les spcimens du mont Itoup. Sur ce dernier, cet arbre a t trouv dans quatre localits. Sa
prsence a t rvle tout dabord sur le versant
ouest, lors du relev Ito2 dans un talweg formant des
poches de faible dclivit avec des sols ennoys
bordant de petits cours deau, puis dans la zone sommitale, lors du relev Ito5 dans un secteur fortement
hydromorphe (pourtour de la mare) o il est trs abondant. Par la suite, sa prsence a t releve galement
dans deux autres secteurs du plateau sommital : le
grand talweg nord-ouest ainsi quune zone de bas-fond
au nord-est du plateau parcourue par un petit cours
deau alimentant une cascade sur le flanc est. Il na
pas t enregistr ni vu sur le versant est. Cependant,
il est noter que les trois populations du plateau se
trouvent sur des axes de drainage alimentant le bassin
de lOyapock lest des monts Itoup, alors que la
population du relev Ito2 se trouve sur un coulement
alimentant le bassin de lInini louest. Du point de
vue daphique, les deux systmes sont spars par une
ligne de partage des eaux oriente nord-sud qui nest
interrompue qu trs basse altitude par des zones de
flat trs hydromorphes : au nord une douzaine de
kilomtres, entre le massif Itoup, monts tabulaires et
le massif des Emerillons, ainsi quau sud-ouest une
vingtaine de kilomtres.
Ruptiliocarpon sp. 1 forme de petites populations
disjointes, qui se trouvent toujours en situation
dennoiement temporaire, parfois avec prsence du
palmier Euterpe oleracea, typique des bas-fonds hydromorphes en Guyane, et semblent viter les situations o le cours deau devient torrentueux. Cette
caractristique cologique semble tre associe des
potentialits cophysiologiques telles que des racines
formant des arceaux ariens (sortes de pneumatophores genouills au rhytidome rouge vif portant de
nombreuses lenticelles) et une phnologie contretemps de la majorit des espces des forts guyanoamazoniennes, cest--dire avec une feuillaison juste
antrieure la grande saison des pluies et non juste
postrieure. Ainsi, alors que durant le mois de mars le
niveau de leau na cess de monter dans la mare
sommitale et les secteurs marcageux o lespce est
prsente, nous avons pu observer, pratiquement chez
tous les individus, de trs nombreuses jeunes pousses
feuilles striles, aux limbes en expansion vert clair

(non anthocyanique). Les photographies ariennes


confirment le caractre relativement exceptionnel de
cette phnologie lchelle de la canope. De nombreuses radicelles ariennes trs jeunes la base des
troncs ont galement t frquemment observes. Les
plantules de lespce sont abondantes dans les secteurs
ennoys par une lame deau de 10 15 cm.
Lobservation de deux fruits matures a montr que les
graines sont pourvues dun arille charnu, rougeorang, typique dun syndrome de dissmination ornithochore. Bien que les caractristiques morphologiques que nous avons pu examiner ne permettent pas
de distinguer nettement nos rcoltes de lespce R.
caracolito, les caractristiques cologiques nous incitent la prudence quand au rattachement de nos rcoltes cette espce, do la cration du morphotaxon
Ruptiliocarpon sp. 1. En effet, comme mentionn plus
haut, lespce R. caracolito nest formellement connue
que dAmrique Centrale et du Sud (Colombie), sur la
faade ouest du continent. Elle est mentionne comme
frquente au Costa Rica basse altitude (0-400 m) sur
les pentes aux sols bien drains de la rgion de Golfito
et de la pninsule dOsa (Hammel & Zamora), ce qui
contraste fortement avec nos observations du mont
Itoup. Pour les spcimens non formellement reconnus
par Hammel et Zamora comme appartenant lespce
R. caracolito, nous avons recherch des informations
sur les conditions cologiques. Le site de collecte au
Suriname se trouve dans les monts Nassau o des
forts se dveloppent sur des plateaux latritiques
relativement levs (Banki et al. 2003) ; une situation
o les mares et sols hydromorphes sont gnralement
frquents (obs. pers.). Cependant la prfrence cologique de lespce nest pas prcise par ces auteurs.
Les notes de terrain et/ou les images de plusieurs
chantillons du Prou, dEquateur et de Colombie ont
pu tre examines sur les sites du New York Botanical
Garden (Virtual Herbarium), du Field Museum of
Natural History et de lHerbario Amaznico Colombiano. La collection T. B. Croat 18606 (Prou, Loreto,
7 km southwest of Iquitos) ainsi que Vasquez et Jaramillo 4812 (Prou, Loreto, Requena) sont respectivement notes Swampy forest et bosque inundable
alors que les spcimens Gentry et al. 29268 (Prou,
Maynas, rio Tamshiyacu) et Guevara 600 (Equateur,
Parc National SumacoNapo Galeras) sont nots respectivement non inondated forest on lateritic soil et
tierra firme. Au mont Itoup, la rpartition spatiale
des individus a pu tre documente plus compltement
grce aux photos ariennes prises par O. Tostain lors
dun survol en cours de mission faisant apparatre les
populations de Ruptiliocarpon en vert clair dans les
zones basses et les talwegs du plateau. Un second
survol de prise de vues a pu tre programm le jour du
dpart et nous a permis de dcouvrir que la population
la plus importante se situe dans la zone de source du
cours deau situ au nord-est du plateau sommital, qui
alimente une crique du versant est. Ceci suggre que
labsence de lespce constate dans le relev sur ce
versant ne serait pas due une limitation par la dispersion mais plus probablement par les conditions cologiques moins favorables de ce versant, notamment des

cours deau plus torrentueux. Deux individus fertiles


seulement ont pu tre trouvs sur plusieurs dizaines
dindividus examins et nous ont fourni les critres
didentification. Lun dans le talweg sud-ouest de la
zone sommitale (collection Sabatier & Molino 5726) a
permis de documenter les inflorescences jeunes et le
mode dtablissement des rameaux fertiles avec une
disposition des inflorescences en apparence oppose
aux feuilles (et non axillaire de celles-ci). Lautre, un
individu fructifre, a t dcouvert par O. Tostain en
bordure de la mare (collections Tostain OT5972; Molino & Sabatier 2846). Compte tenu de lincertitude
taxinomique, il y aurait donc un grand intrt collecter du matriel floral de cette espce.
- Terminalia sp. 1 (Combretaceae) : arbre de canope dont 3 individus ont t vus sur le versant ouest
vers 750 m et le plateau sommital. Lindividu ITO1K4
(Sabatier & Molino 5682) tait en fruit. Daprs des
observations de fruits similaires, effectues basse
altitude ailleurs en Guyane, lespce pourrait ne pas
tre infode aux reliefs les plus prononcs de la rgion. Du matriel floral est ncessaire pour caractriser cette espce.
- Zinowiewia aymardii Steyerm. (Celastraceae) :
premire collecte pour le genre et lespce en Guyane.
Le genre Zinowiewia compte moins dune vingtaine
despces connues, distribues en Amrique Centrale
et du Sud (du sud Mexique lEquateur). Les Zinowiewia sont souvent des arbres de la fort nuages et
se rencontrent entre 250 m et 3500 m daltitude.
Lespce Zinowiewia australis Lundell se rapproche
des spcimens du mont Itoup par sa stature de grand
arbre de canope atteignant 40 m de haut en Equateur,
les inflorescences sub-sessiles et le tronc canalicul
(Jorgensen & Ulloa 1994) mais la description faite par
ses auteurs pour les collectes dEquateur diffre de
notre matriel par la nervation primaire imprime au
lieu de saillante. Cependant, dans la description originale de lespce, Lundell (1938) note une nervure
primaire en relief face suprieure la base du limbe. Il
note galement le nom vernaculaire utilis au Venezuela (canalete) qui se rapporte laspect du tronc.
Cuatrecasas (1962) note pour cette espce quen raison de la forte variabilit de la morphologie foliaire,
elle est considrer comme une forme grande
feuilles de lespce Z. integerrima Turcz.. Une autre
espce, Z. aymardii Steyerm., dcrite et recense de
Guyane vnzulienne (Etats de Bolivar et Delta
Amauro) se rapproche fortement des spcimens collects. Daprs Steyermark (1988), elle est troitement
apparente Z. australis dont elle ne diffre que par
les graines plus courtes, les samares plus troites, les
inflorescences aux axes plus longs et aux fleurs plus
nombreuses, les bases foliaires moins longuement
dcurrentes, un ensemble de caractres correspondant
bien notre matriel. En Guyane vnzulienne, cette
espce se rencontre entre 300 et 1000 m daltitude.
Les caractres distinctifs donns par Steyermark permettent donc didentifier les spcimens du mont Itoup comme Z. aymardii. Dans ltat actuel de nos con-

45

naissances, cette espce serait endmique des Guyanes


et aurait donc une distribution disjointe entre lest et
louest des Guyanes. Cet arbre a t trouv pour la
premire fois dans le relev Ito2 et proximit du
camp (Sabatier & Molino 5692) ltat strile. Par la
suite, lespce a pu tre identifie vue sur le terrain
grce aux caractristiques du tronc et du feuillage. Elle
semble prsente partir de 400 m daltitude et jusquau sommet sur les deux versants. Le relev 9 (versant est) intercepte plusieurs gros sujets. Il semble que
lespce vite les zones trop mouilleuses des talwegs
et bas-fonds et quelle soit moins frquente sur le
plateau sommital ; peut tre en raison de la situation
trs venteuse ? Plusieurs des individus observs dpassent 50 m de hauteur et sont des mergents, le plus
grand mesur dans les relevs atteint 48 m. Un individu fertile a t dcouvert proximit du relev Ito3
environ 400 m daltitude sur le versant ouest et un
second en aval du relev Ito1. Compte tenu des observations faites au Vnzuela il pourrait quasiment
sagir l de laltitude infrieure de sa distribution.
Aucune observation de lespce na t faite plus
basse altitude. Quelques autres individus fertiles ont
t vus alors que la majorit des individus observs
(environ 25) taient striles. La collecte de matriel
fertile hors des relevs (Sabatier & Molino 5701 ;
Tostain 5631) a permis didentifier la famille des
Celastraceae daprs les caractristiques florales, et le
genre Zinowiewia par la prsence de fruits en samare.
Les Zinowiewia sont connus pour tre des espces
frquentes dans les secteurs de forts nuages dans
louest du continent sud amricain. Indniablement,
cette espce semble tre un bon marqueur du biome
forestier de montagne.
- Caryodendron amazonicum Ducke (Euphorbiaceae) : une population assez importante de cette espce a t trouve dans la zone altitudinale 600-700 m
au niveau du camp et de la DZ. Un seul individu fertile (fruits) a t vu sur plusieurs dizaines dindividus
prsents (collection Sabatier & Molino). Notre collecte documente une quatrime station de Guyane
pour cette espce prcdemment rcolte mont tabulaire de la Trinit, aux montagnes Tortues et sur la
montagne de Kaw. Le cas de cette espce est reprsentatif de plusieurs autres espces peu documentes
(Abarema sp. 1, Bauhinia eilertsii Pulle, etc.).

Les oiseaux
Parmi les 235 espces doiseaux recenses sur le mont
Itoup, se distinguent 30 espces dterminantes
ZNIEFF, 27 espces endmiques du biome Amazonia North and Tepuis (ANT),dont 5 endmiques du
plateau des Guyanes et 21 espces protges (Arrts
de 1986).
Le statut despce dterminante, qui combine un ensemble de critres (raret, endmisme, sensibilit,
menace sur les habitats spcifiques) est de ce fait
significatif du caractre patrimonial de ces espces.
Cest donc le cas de 13,6% des espces recenses
Itoup. Cette proportion despces dterminantes dans
le peuplement doiseaux est comparable celle trouve dans dautres stations de fort primaire guyanaises
: dans la RN de la Trinit, elle tait de 10% sur le
sommet Tabulaire, 12,7% sur la zone Amara et 15,3%
sur la zone Aya (daprs Claessens & Renaudier,
2009). Linfluence de leffort dobservation sur le taux
despces dterminantes recenses est manifeste et
simple expliquer, ces espces tant parmi les plus
rares et les plus difficiles contacter.
Le biome Amazonia North and Tepuis (ANT) dfini
par Birdlife International (Devenish et al., 2009)
stend entre lOrnoque, lAmazone et le Rio Negro.
Les espces qui y sont restreintes, au nombre de 125,
sont reprsentatives de cette rgion biogographique :
39 dentre elles sont prsentes en Guyane, qui possde
donc pour celles-l une responsabilit particulire en
matire de conservation.
Parmi ces espces remarquables, il convient den citer
trois qui sont connues en Guyane de moins de cinq
localits. Leur raret tient leur association aux forts
daltitude, leur situation en limite daire de rpartition, sans doute aussi au niveau des prospections dans
lintrieur de la Guyane et une connaissance seulement rcente de leurs vocalisations permettant de les
dtecter.
- Colibri delphinae (Trochilidae)
Quatrime mention pour la Guyane, connu seulement
de la montagne Cottica, des monts Atachi Bakka et du
mont Tabulaire de la RN de la Trinit (Renaudier et
al., 2010).
- Phyllomyias griseiceps (Tyrannidae)
2me mention pour la Guyane, connu seulement de
Papachton (Renaudier & CHG, 2010) altitude
moyenne.
- Euchrepomis callinota (Thamnophilidae)
Distribution parse entre lAmrique Centrale, le nord
des Andes et les Guyanes. 3 ou 4 mles, les 9, 10 et 19
mars (G. Lotard, O. Tostain). Il a fallu se rendre sur
les pentes du second plus haut sommet de la Guyane
pour recueillir cette 2me donne dpartementale, aprs
celle au mont Galbao en janvier 2005 (Brucy & Kim,
2009). Ces nouvelles observations ont t ralises
entre 600 et 700 m daltitude. Les tentatives pour

46

reprer cette espce sur dautres massifs sont pour


linstant restes vaines ; la similitude de son chant
avec celui du Grisin croupion roux Euchrepomis
spodioptila, plus commun, et les difficults observer
cet oiseau de canope ne facilitent pas la tche.
Source : Les oiseaux rares en Guyane 2010 et 2011.
Rapport du Comit dHomologation de Guyane. Mai
2014.

Les amphibiens
Parmi les 44 espces danoures dont la prsence est
documente sur le mont Itoup, la grande majorit
constitue le bruit de fond des communauts
damphibiens de milieux forestiers de Guyane.
Quelques singularits ont t voques dans les rsultats (espces daffinit ctire, lies la prsence de la
savane-roche Impossible ou daffinit biogographique mridionale) mais deux espces savrent
particulirement dignes dintrt car elles reprsentent, dune part, des taxons endmiques ou subendmiques de Guyane, et dautre part, des orobiontes lies aux forts daltitude.
- Pristimantis espedeus (Fouquet, Martinez, Courtois, Dewynter, Pineau, Gaucher, Blanc, Marty &
Kok, 2013)
Dcrite en 2013, Pristimantis espedeus est une espce
uniquement documente de Guyane. Avec cette nouvelle localit, neuf populations sont prsent connues
: montagne Balenfois, massif de la Trinit, mont Lucifer, mont Itoup, montagne Cottica, monts Atachi
Bakka, monts Belvdre, pic Coudreau du Nord et
montagne Grande Tortue. Lespce na cependant pas
t dtecte dans des massifs a priori favorables
comme le pic Matcho, le mont Galbao et le massif du
Mitaraka. Toutes les populations documentes paraissent totalement isoles les unes des autres par une
limite altitudinale infrieure de rpartition (environ
200 m daltitude minimum).
Lespce, arboricole, se trouve uniquement dans des
forts daltitude comprise entre 200 et 830 m sur des
massifs daltitude suprieure 400 m. La distribution
remarquable de cette nouvelle espce suggre un endmisme de lest du plateau des Guyanes (Fouquet et
al. 2013). Sur le flanc ouest du mont Itoup, lespce
apparat vers 500 m daltitude.
- Anomaloglossus sp. 5 aff. degranvillei
Les travaux de Fouquet et al. (2012) en Guyane ont
mis en vidence la prsence de deux espces cryptiques dAnomaloglossus du groupe degranvillei. Ces
deux espces paraissent plutt planitiaire tandis que
Anomaloglossus degranvillei prsente une distribution
limite semble t-il aux grands massifs montagneux.

com.pers. 2014). Lendmisme strict au massif des


merillons nest donc pas exclure.
Les eaux vives des talwegs encaisss du mont Itoup
partir de 600 m daltitude constituent le biotope de
prdilection dAnomaloglossus sp. 5 aff. degranvillei.
Les espces infodes aux forts submontagnardes, un
milieu peu reprsent (en termes de superficie) en
Guyane, sont potentiellement vulnrables : les changements climatiques annoncs pourraient induire des
modifications du microclimat caractristique des forts nuages et menacer, court terme, ces espces
endmiques de Guyane. La qualit des spcimens
rcolts est trop mdiocre et la quantit de spcimens
insuffisante pour dcrire lespce. Limportant enjeu
que reprsente ce nouveau taxon incite organiser une
mission complmentaire notamment ddie son
tude en vue dune description scientifique.

Les poissons
10 espces de poissons ont t collectes sur la totalit
des stations au cours de la mission doctobre 2010.
Cette diversit est extrmement faible au regard des
inventaires de mme efforts mens ailleurs en Guyane.
Certaines espces sont, dans ltat actuel des connaissances, lies un seul bassin versant, dautres prsentent une rpartition assez large en Guyane. La principale originalit taxonomique de la mission est la
dcouverte dune espce du genre Harttiella, candidate au statut de nouvelle espce.

Les insectes
La faune observe sur le mont Itoup correspond
99% au fonds de faune commun toute la Guyane,
caractristique de cette relative homognit (forte
diversit alpha et faible diversit beta entre sites) des
forts tropicales de basse altitude (Novotny et al.,
2007).
Nous avons cependant russi mettre en vidence
quelques espces jamais observes dans les forts du
proche intrieur de la Guyane ni mme vers Sal,
endmiques possibles dun sommet ou plus vraisemblablement dun ensemble de reliefs du plateau des
Guyanes.
Ces espces sont des taxa rares dans la communaut
mais un chantillonnage plus pouss et plus cibl sur
le sommet (le camp de base plac 570 m na pas
facilit la prospection du sommet lors de cette expdition) permettrait peut-tre de trouver dautres espces
de ce type.

Identifie initialement sur le terrain comme Anomaloglossus degranvillei, une espce dcrite de Guyane par
Lescure (1975) du mont Atachi Bakka, le spcimen
collect Itoup sest avr un taxon inconnu mis en
vidence par des analyses gntiques (Fouquet,

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Taxons rares ou nouveaux pour la science

Orthoptera Tettigoniidae

Phasmatoptera

Les espces Eurymetopa obesa et Dectinomima sagittata (Tettigoniidae, Conocephalinae) sont nouvellement signales en Guyane.

- Prisopus sp. 2 (Phasmatoptera Prisopodidae)


Mle. Le seul spcimen connu de cette espce trs
probablement nouvelle pour la science.
- Phanocloidea sp. 1 (Phasmatoptera Diapheromeridae)
Mle. Une nouvelle espce du genre Phanocloidea. Le
seul spcimen connu jusquici.
Hemiptera Reduviidae
- Chryxus tomentosus, Chryxinae : sous-famille trs
peu reprsente en collection et gnralement par
quelques individus ;
- Macrocephalus incisus, Phymatinae : unique
exemplaire pour linstant captur en Guyane ;
- Tribelocodia ashei, Tribelocephalinae : unique
reprsentant de cette sous-famille en notropical . 2
spcimens capturs en ce lieu ; description rcente
(Weirauch, 2010) ;
- Eidmannia matogrossensis, Peiratinae : encore une
espce rare reprsente ici par 4 exemplaires ;
- Microlestria plebeja, Reduviinae : connue du
Brsil, premires captures en Guyane et uniquement
en cette localit.
Lepidoptera Riodinidae
Une nouvelle espce pour le dpartement a t dcouverte au sommet du mont Itoup (altitude 830 mtres).
Il sagit de Mesosemia messeis (Hew.1860). Lespce
est connue seulement du haut Amazone : Rio Putumayo (Brsil), Pebas (Prou). Plusieurs sous-espces,
M.m. amona Hewitson, 1876, M.m. juncta Stichel,
1910 (Rv. G. Lamas & C. Callaghan, 2004) sont des
htes des forts daltitude de Bolivie et du Prou. Elle
nest pas connue des zones basses de tout louest amazonien. Cest aux abords de la mare sommitale que le
premier mle a t rencontr. Il arrive vers 13h 30 et
se poste sur un arbuste ensoleill 1,50m du sol. Les
quatre autres mles ont t trouvs les jours suivants
sur le mme site. La femelle na pas t observe.
Une nouvelle sous-espce de Mesosemia messeis
(Lepidoptera Riodinidae) est donc en cours de description (Gallard & Fernandez, in litteris).

48

Plusieurs autres espces de Tettigoniidae sont galement en cours de description.


Coleoptera
10 nouvelles espces de coloptres ont t dcrites
daprs des spcimens collects lors de la Mission
Itoup 2010 :
- Buprestidae
Agrilus longelineatus
Agrilus figuratus
- Carabidae
Mizotrechus dalensi
Mizotrechus grossus
- Cerambycidae
Agloaschema vinolenta
- Cicindelidae
Ctenostoma (Myrmecilla) dalensi
- Curculionidae
Macrocopturus flavoguttatus
Lechriops mephisto
- Elateridae
Achrestus itoupei
- Lampyridae
Magnoculus brulei

Rendus scientifiques
BRULE S., 2011. Etat des connaissances sur les Buprestes de Guyane (Coleoptera, Buprestoidea). ACOREPFrance Coloptres de Guyane Tome III, p.
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Neotropics, Mizotrechus Bates 1872, a generic synopsis with descriptions of new species from Central
America and northern South America (Coleoptera,
Carabidae, Perigonini). ZooKeys 145: 79128 (2011).

CURLETTI G. & BRULE S., 2011. Agrilus, Agriloides et Autarcontes de Guyane. Collection Ex Natura, Vol.2. 81pp.

HERRMANN A. & HAVA J., 2011. Contribution to


knowledge of the genus Cryptorhopalum GurinMneville, 1838 (Coleoptera: Dermestidae: Megatomini) from French Guiana. Studies and Reports Taxonomical Series 7 (12): 147152.

CASSOLA F. 2011. tudes sur les Cicindles.


CLXXXVIII. Les Cicindles de Guyane franaise,
avec description de deux nouvelles espces de Ctenostoma Klug, 1821 (Coleoptera, Cicindelidae). ACOREPFrance Coloptres de Guyane Tome III, p. 818

PONCHEL Y., 2010. Prsence dAmblyodus taurus


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X CHASSAIN J., 2010. Les Anchastus LeConte, 1853
de Guyane (Coleoptera, Elateridae, Physorhininae). Le
Coloptriste, 2010, 13 (1) : 4353
CHASSAIN J. 2010. Note concernant les espces
guyanaises du genre Achrestus Candze, 1869 et description dun Achrestus nouveau de Guyane (Coleoptera Elateridae Dricrepidiinae). Le Coloptriste, 13
(3) : 174177.
CHASSAIN J. & TOUROULT J., 2011. Les Eucnmides de Guyane (Coleoptera, Eucnmeidae). ACOREPFrance Coloptres de Guyane Tome III. p 7888

RHEINHEIMER J., 2010. Les Hylobiini de Guyane


(Coleoptera, Curculionidae). ACOREPFrance Coloptres de Guyane Tome I, p. 5972
RHEINHEIMER J., 2011 Les Conoderinae de Guyane
(Coleoptera, Curculionidae). ACOREPFrance Coloptres de Guyane Tome III, p.6588
SOULA M., 2010. Les Rutelinae : prsentation des
tribus et genres de Guyane (Coleoptera, Scarabaeidae). ACOREPFrance Coloptres de Guyane Tome
II, p. 5061
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disparition de Gymnetis flaveola ? (Coleoptera, Cetoniidae). ACOREPFrance Coloptres de Guyane
Tome I, p. 88

CONSTANTIN R., 2010. Les genres de Cantharidae,


Lampyridae, Lycidae et Telegeusidae de Guyane
franaise (Coleoptera, Elateroidea). ACOREPFrance
Coloptres de Guyane Tome II, p. 3244

TOUROULT J., DALENS P.H., POIRIER E. &


BRULE S., 2011. Rponse des communauts de Coloptres un faible gradient altitudinal : tude exploratoire sur le mont Itoup (Guyane). ACOREPFrance
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CONSTANTIN R., 2011. Contribution ltude du


genre Magnoculus MacDermott, 1964 (Coleoptera,
Lampyridae) avec description de cinq espces nouvelles de Guyane. ACOREPFrance Coloptres de
Guyane Tome III, p.52 59

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BRULE S., 2011. Influence dune troue sur la diversit des Coloptres : tude de cas sur le mont Itoup
(Guyane). ACOREPFrance Coloptres de Guyane
Tome III, p.37

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J., 2010. Rvision des Compsocerini Thomson, 1864
de Guyane (Coleoptera, Cerambycidae, Cerambycinae). Les Cahiers Magellanes NS, 2 : 79111.

TRONQUET M. & DEGALLIER N., 2010. Peplomicrus uyttenboogaarti (Bernhauer, 1928), espce nouvelle pour la Guyane franaise (Coleoptera, Staphylinidae, Micropeplinae). ACOREPFrance Coloptres
de Guyane Tome II, p. 31

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TOUROULT J., DALENS P.H. & POIRIER E. 2010.
Coleoptera Histeridae de Guyane franaise. VI. Mise a
jour du catalogue et contribution a la connaissance des
Hololeptini. ACOREPFrance Coloptres de Guyane
Tome II, p. 6275
DEGALLIER N., LEIVAS F. & MOURA D., 2011.
Histerid beetles of French Guiana. V. Revision of the
genus Ebonius Lewis (Coleoptera, Histeridae, Omalodini). Zootaxa 2824: 44 52 (2011).

49

Perspectives :
Le point de vue des participants
Le point de vue des forestiers
Les relevs et observations raliss lors de la mission
Itoup de 2010 ont permis non seulement de contribuer documenter la flore de Guyane et particulirement celle des biomes submontagnards, peu tudie en
ce qui concerne le compartiment arborescent, mais
galement dapporter des lments de rponse diverses hypothses cologiques et biogographiques
visant expliquer la rpartition des espces et des
communauts vgtales lchelle du paysage (cologie) et aux chelles de la Guyane et du bouclier des
Guyanes (biogographie).

Hypothses cologiques
Selon Sabatier D. et Molino JF., les relevs effectus
lors de la mission Itoup constituent la premire tentative, en Guyane, de mesurer leffet du gradient altitudinal sur la composition floristique des communauts
darbres.
Notons cependant les travaux de Delnatte C. sur la
composition floristique des communauts vgtales du
sous-bois des massifs montagneux.
Lapproche floristique a t double dune approche
daphique et une attention particulire a t porte
limpact de la dynamique sylvigntique (turnover
forestier par les chablis et le renouvellement) en utilisant comme indicateur la prsence des espces hliophiles connues.
Une telle grille aurait ncessit des rptitions dans
lchantillonnage quil tait impossible de raliser
avec les moyens et le temps impartis. Les rsultats de
2010 sont donc prliminaires.
Les premiers rsultats semblent montrer que le facteur
cologique dominant est certainement la dynamique
sylvigntique qui suivrait un fort gradient dintensit
(faible turn-over en bas de versant ouest et trs fort
turn-over en zone sommitale, turn-over lev avec
enlianements sur le versant est) en relation avec diffrents facteurs environnementaux tels que pentes, profondeur et stabilit des sols, exposition aux vents
dominants et aux rafales lors des orages (effet de
foehn perceptible).
Leffet du drainage est perceptible quelle que soit
laltitude. Leffet altitudinal jouerait un rle de filtrage
cologique sur la composition globale du peuplement
en limitant certaines espces lorsque laltitude augmente tout en crant des conditions environnementales
propices au maintien discret dlments floristiques
typiquement submontagnards. Les cas du Ruptiliocarpon, espce qui semble compltement infode aux
sols hydromorphes, trs restreints, entre 600 et 800 m
daltitude et du Zinowiewia, espce des sols bien drai-

50

ns entre 400 et 800 m daltitude, formant un domaine


relativement tendu, pourraient tre des cas dcole
pour comprendre les conditions de maintien des espces dans une situation de type insulaire avec forte
pression dinvasion. Lanciennet de ces populations
ou leur arrive rcente pourraient tre testes par des
mthodes de gnomique.
On notera de ce point de vue que le cortge des espces typiques des sols hydromorphes de bas-fond est
apparemment trs limit. Deux espces typiques sont
mentionner : Euterpe oleracea dont les populations
sont de faible effectif et atteignent la zone sommitale ;
Eperua rubiginosa dont les populations sont galement de faible effectif et nont t trouves quentre
200 et 700 m daltitude sur le versant ouest. Lespce
Symphonia globulifera gnralement trs abondante
en bas-fond est absente, seule Symphonia sp. 1 semble
prsente (individus observs toujours dpourvus de
pneumatophores).

Hypothses biogographiques
A lchelle rgionale, il est mentionn un fort contraste nord-sud des communauts darbres forestiers
en Guyane et une parent entre les peuplements du
mont Itoup et ceux de la pnplaine du sud de la
Guyane.
Deux grandes hypothses, non compltement exclusives, permettent dexpliquer cette macro-structuration
floristique :
- Dune part la rpercussion des bouleversements
climatiques du quaternaire, dont certains (vnements
secs) seraient survenus jusqu lholocne (derniers
10.000 ans), poque qui correspond galement
linstallation de populations humaines.
- Dautre part limpact de la structuration gographique actuelle des conditions climatiques qui se superpose des particularits gomorphologiques (pnplaine dominance granitique avec affleurements
rocheux).
Dans le premier cas, le couvert forestier aurait pu
laisser place des formations vgtales non forestires
ou aurait vu sa diversit floristique rode en raison
dimportants stress environnementaux. Les populations humaines pourraient avoir frein lvolution des
paysages vgtaux en maintenant un couvert ouvert.
Dans le second cas les conditions environnementales
actuelles du sud seraient un filtre cologique suffisant
pour limiter lexpansion de nombreuses espces forestires prsentes au nord.
Pour Ruptiliocarpon et Zinowiwia, tout se passe
comme si le filtrage cologique d laltitude permettait ces deux espces de ne pas subir la comptition
des nombreuses espces cologiquement comparables
prsentes plus basse altitude. Seraient-elles des reliques de peuplements forestiers anciens ? La question
pourrait avoir une rponse par ltude des structures
gnomiques des populations de ces espces. Un l-

ment de rponse cette question de lexistence


dlments relictuels est fourni par la reconnaissance
de longue date dun ensemble de taxons auxquels ces
deux espces pourraient tre rattaches, et dont la liste
ne cesse de crotre, dont la distribution marque une
disjonction forte entre louest du continent et lest
guyano-amazonien (rgion de lOyapock notamment).

Conclusion et perspectives
Les communauts darbres du massif du mont Itoup
semblent avoir connu de fortes contraintes cologiques au cours du temps, ce qui expliquerait la relative faiblesse de leur richesse-diversit floristique.
Il serait particulirement instructif, pour comprendre
la gense des structures biogographiques rgionales,
de les comparer aux communauts darbres prsentes
dans un massif montagneux du centre de la Guyane,
au cur de laire gographique dont la flore est la plus
diversifie de Guyane (Mori et al. 2002). Le massif
des monts de lInini serait certainement le meilleur
site car, except son orientation gnrale est-ouest, il a
des caractristiques environnementales assez proches
de celles du mont Itoup. Il sagirait de vrifier si,
dans un contexte floristique riche, rsultant certainement de conditions environnementales stables sur de
trs longues priodes, les particularismes lis au gradient altitudinal sont renforcs ou estomps.
Hypothses alternatives : forte diffrenciation des
niches dans une communaut ancienne ; forte rosion
de la diversit avec faible diffrenciation des niches
cologiques dans la communaut plus jeune du mont
Itoup / ou a contrario faible diffrenciation des niches
dans la communaut ancienne conservatisme sous
forme de reliques de peuplements anciens dans la
communaut jeune ?

Le point de vue dun ptridologue


Les missions botaniques sur le massif du mont Itoup /
sommet Tabulaire ont permis de rcolter un total de
366 spcimens de ptridophytes (105 en 1980 et 261
en 2010). A ce jour, la richesse observe des fougres
du massif slve 144 taxons, ce qui correspond
43% du nombre total de taxons de ptridophytes connus en Guyane : ce nombre de taxons place le massif
du mont Itoup comme lun des plus riches de
Guyane.
La mission de 2010 a donc t un succs sur le plan
des rcoltes ptridologiques et a permis de mieux
dfinir les milieux et leurs espces caractristiques. Il
reste cependant beaucoup de secteurs explorer sur ce
vaste massif dont lintrt botanique et biogographique nest plus prouver.
Plusieurs points mriteraient dtre prciss :
- Sur le versant ouest du mont Itoup, la diversit
des ptridophytes augmente au-dessus de laltitude
500 m, pour atteindre son paroxysme dans la tranche

700-830 m. La diversit du plateau est un peu plus


faible que les zones de talwegs. Il serait intressant de
comparer quelles altitudes augmente cette diversit
dans dautres massifs. (cf thse Delnatte).
- Dans les massifs de Lucifer et du Dkou-Dkou,
dont les altitudes maximales sont respectivement de
545 et 565 m, la diversit spcifique maximale dbute
ds 350 m daltitude. Existe-t-il un effet de la grande
altitude du massif dItoup combin aux prcipitations
qui dcalerait cette limite vers le haut ? En est-il de
mme sur le versant est dItoup qui a t sousprospect ?
- Enfin, de faon gnrale, les taxons caractristiques de la fort submontagnarde sont trs localiss et
leur dcouverte est fortuite et parfois difficile, alors
quon aurait pu croire que, une telle altitude et dans
de tels milieux, ils auraient pu tre plus abondants.
Citons les cas de Blechnum occidentale, de Blechnum
gracile var. pilosum, de Cyathea lasiosora, Cyathea
marginalis, Danaea moritziana, Diplazium radicans,
Elaphoglossum cremersii, Huperzia acerosa, Polypodium flagellare, etc. Cette raret relative est-elle due
aux prospections encore limites ?

Le point de vue des ornithologues


Les principales dcouvertes ornithologiques effectues
sur le mont Itoup concernent respectivement les
seconde et quatrime donnes guyanaises pour deux
espces trs rares infodes aux reliefs : Phyllomyias
griseiceps (Tyrannidae) et Colibri delphinae (Trochilidae). Notons galement lobservation en mars par
ECOBIOS de Terenura callinota (Thamnophilidae),
seconde mention de lespce pour la Guyane.
En dpit dhabitats forestiers remarquables et exempts
de toute perturbation anthropique et en dpit du gradient altitudinal qui laissait esprer dautres dcouvertes, lavifaune du mont Itoup sest rvle dune
richesse relativement modeste caractrise par
labsence ou la raret inhabituelle de nombreuses
espces, notamment lies laltitude.
La saison est sans aucun doute en grande partie responsable de cette situation. La brivet de la mission a
accentu ce rsultat, la rencontre doiseaux discrets ou
moins abondants localement cette priode de lanne
tant dautant plus alatoire.
Les observations collectes au cours de cette mission
nen demeurent pas moins intressantes et essentielles
pour amliorer notre connaissance du statut et de la
rpartition doiseaux plus ou moins rares au sein du
massif forestier guyanais. Toute opportunit
dinventaire dans des rgions aussi recules et gnralement inaccessibles du centre ou du sud de la Guyane
est ce titre inestimable.
Il serait dommage que ltude de lavifaune du mont
Itoup en reste l, alors que le site bnficie dune
remarquable prparation du terrain (DZ, layons, situa-

51

tion du camp de base). Pour autant, les reliefs ne


doivent pas tre considrs comme les seuls sites
dignes dintrt du point de vue de la biodiversit : les
zones de basse altitude et les forts alluviales du grand
sud sont elles aussi susceptibles dabriter des espces
rares et remarquables, voire mconnues et mritent
ce titre la mme attention (inventaires ZNIEFF et
PAG mens sur la plaine de la Waki notamment).

Le point de vue des chiroptrologues


Leffort de capture dploy lors de la mission Itoup
2010 a t insuffisant pour mettre en vidence leffet
du gradient altitudinal sur les communauts de chiroptres.
Les techniques mises en uvre (filets japonais) et
leffort de pigeage ont permis de dresser un inventaire global prliminaire (environ 50% des espces
potentiellement prsentes captures), mais sont in fine
largement insuffisantes pour tudier leffet de
laltitude sur les communauts. En outre, comme cela
a t voqu, les captures au filet dans le sous-bois
sont efficaces pour linventaire des phyllostomids
(80% des espces de Guyane) mais elles demeurent
inadaptes pour linventaire des autres familles de
chauves-souris dont les captures sont anecdotiques.
Leffort de recherche fourni cette dernire dcennie
dans ltude acoustique des chiroptres a permis de
constituer une base de donnes de cris des espces
notropicales. Le logiciel Sonochiro fournis une
classification des sons de chiroptres de Guyane : il
permet de traiter de trs grandes quantits de fichiers
audio tout en apportant des lments didentification.
Ainsi, une mission complmentaire dinventaire associant captures au filet et enregistrement automatique
des cris des chiroptres permettrait dune part de complter linventaire et dautre part de fournir une analyse plus complte de la structure des communauts de
chauves-souris.

Le point de vue dun herptologue


Cette premire mission dinventaire herptologique a
permis didentifier la prsence de 44 espces
danoures. Lanalyse des donnes et notre connaissance empirique permettent destimer que cette valeur
reprsente entre 70 et 80% du peuplement rel. Il
resterait donc entre 10 et 15 espces danoures dcouvrir sur le mont Itoup.
Quant linventaire des squamates, il demeure largement prliminaire. Lancien groupe des lzards est
bien reprsent, avec 18 espces, mais celui des serpent a t peine effleur. Cest l lune des caractristiques des inventaires de squamates en forts tropicales : la faible densit des serpents ne permet pas
dobtenir des donnes significatives sur le peuplement
sans un effort de prospection dmesur (plusieurs
annes de recherche en continu ou mise en place de
dispositifs de pigeage techniquement lourds, a fortiori dans des endroits reculs).

52

Des espces indicatrices ?


Il existe bien un petit groupe damphibiens, facilement
dtectables au chant, dont les populations sont susceptibles de ragir des changements progressifs du microclimat du mont Itoup. Le maintien dune petite
communaut dite submontagnarde au-dessus de
500_m daltitude, offre donc de bons indicateurs biologiques pour le suivi de limpact des changements
climatiques.

Etudes taxonomiques et phylogographie


La taxonomie des amphibiens de Guyane est loin
dtre grave dans le marbre. Il suffit de regarder le
nombre despces guyanaises non nommes par la
Science pour se rendre compte quil est encore prmatur de rpondre prcisment la simple question :
combien y-a-til despces damphibiens en Guyane ?
Cette dernire dcennie, la contribution des mthodes
molculaires lidentification des amphibiens (
laide de marqueurs gntiques) a fait passer la liste
des amphibiens de Guyane dune centaine despces
135 taxons. Certaines espces, a priori morphologiquement identiques, montrent ainsi des patrimoines
gntiques trs divergents. Il est essentiel de connatre
prcisment le nombre despces et leur aire de rpartition si lon souhaite mettre en uvre un dveloppement de la Guyane compatible avec le maintien de la
biodiversit. Dans ce but, plusieurs spcimens des
espces nouvelles trouves Itoup ont t prlevs et
conservs en alcool. Avec laccord du Parc amazonien
de Guyane, ils ont t transmis Antoine Fouquet
(CNRS Guyane) pour tre dcrits (tant morphologiquement que gntiquement).
Par ailleurs, lutilisation de marqueurs molculaires
plus variables (microsatellites), partir des mmes
chantillons, peut permettre de reconstituer lhistoire
des populations des amphibiens sur le plateau des
Guyanes. Cette discipline, la phylogographie molculaire, peut ainsi apporter des donnes sur les centres de
dispersion des espces, sur les dates disolement des
populations (espces submontagnardes, espces
dinselbergs...), et ainsi permettre de reconstituer
lvolution de la vgtation et du climat au cours des
derniers millnaires. En dcrivant ces mcanismes de
colonisations et de retraits (dans des biotopes relictuels comme les forts submontagnardes), cela devient
galement un outil prdictif des ractions des populations aux changements globaux.
Tous ces constats militent pour la poursuite des efforts
de recherche sur les amphibiens dans les sites isols
du Parc amazonien de Guyane. Une mission complmentaire sur le mont Itoup, une priode diffrente,
permettra sans aucun doute daccroitre la liste des
amphibiens du sommet de la Guyane et pourquoi pas
dinitier un programme scientifique de suivi des densits des espces phares du sommet.
Ces questions mritent dtre soumises au Conseil
scientifique du Parc amazonien de Guyane afin

dintgrer un programme de recherche long terme


sur leffet des changements globaux.

Le point de vue dun ichthyologue


La diversit spcifique des criques daltitude du mont
Itoup est globalement faible pour des petits cours
deau en milieu notropical mais nanmoins conforme
aux situations rencontrs dans dautres milieux directement comparables. Une part importante des variations de richesse spcifique entre stations peut tre
explique uniquement par les variations de dbits. En
effet, ce paramtre intgre des nombreuses autres
variables (topographiques, daphiques, climatiques,
environnementales) pouvant avoir une influence sur la
diversit spcifique. Il est noter que lestimation de
ce paramtre est simple et ne ncessite pas
dinstruments sophistiqus.
Au cours de cette mission, les conditions idales
taient runies pour tudier la rpartition de Harttiella
: une mthode de pche exhaustive a t employe ;
les diffrentes criques montagnardes tudies avaient
toutes un facies lotiques plus ou moins marqus, seul
habitat connu des Harttiella. Les seules variables
majeures potentielles taient laltitude, la qualit physico-chimique de leau, limportance du cours deau et
le bassin.
Il est prsent important deffectuer ce mme type de
travail de terrain sur les autres massifs localiss sur le
territoire du Parc national.

Utilisation de la rotnone
La plupart des espces peuvent rcuprer aprs une
exposition la rotnone si elles sont places rapidement dans de leau fraiche (sans rotnone). Seules les
espces les plus sensibles au manque doxygne rcuprent mal. Il faudrait donc disposer des seaux deau
fraiche tout au long du tronon dimpact de la rotnone, pas uniquement sur le secteur dintrt qui peut
tre bien plus court ! Dautre part, pour limiter
ltendue de leffet de la rotnone, il est recommand
de positionner le secteur de pche juste en amont
dune confluence de sorte diluer fortement la rotnone en aval du secteur dintrt.

Rendus scientifiques
BROSSE, S., MONTOYA-BURGOS, J. I., GRENOUILLET, G., & SURUGUE, N. (2013, January).
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Itoupe mountain streams (French Guiana). In Annales
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diversity, evolution, and distribution. Cybium, 36(1),
115161.

Le point de vue des entomologistes


Linventaire gnral a apport des rsultats trs satisfaisants, principalement dus la prsence de la DZ qui
a permis un chantillonnage efficace des Lpidoptres
nocturnes au pige lumineux et lattraction de nombreux coloptres xylophages pris dans les piges
dinterception placs sur la zone de coupe.
La qualit de linventaire gnral aurait t encore
largement amliore par la ralisation de ltude lors
de la saison sche, beaucoup plus propice pour de
nombreux groupes dinsectes.
Idalement, pour obtenir les meilleurs rsultats, une
tude de ce type devrait tre ralise en 2 parties : 15
jours en saison des pluies et 15 jours en saison sche
(centres sur les nouvelles lunes).
Ceci permettrait galement daffiner les tudes statistiques : recrutement des groupes abondants dans les
deux saisons, optimisation des pigeages lumineux
(ces derniers pouvant tre utiliss dans une approche
altitudinale, par exemple par ltude des Geometridae)
avec leur recentrage sur les phases lunaires propices.
De plus, certains groupes prometteurs nont pas t
tests (comme ragissant laltitude), comme les
Satyrinae (Lepidoptera, Nymphalidae). Le protocole
utiliser pourrait aussi permettre des les chantillonner
par le biais des piges charaxes distribus selon les
gradients.

Propositions pour un protocole ultrieur :


- Espacement des piges pour viter leffet site (par
exemple placer un pige tous les 50 m sur une courbe
de niveau) ;
- Supprimer les Polytrap ;
- Multiplier les piges interception vitrs (pose de
vitres plus petites) ;
- Remplacer les piges Malaise par des piges
SLAM ;
- Ajouter des piges charaxes (pour chantillonnage des Satyrinae) ;
- Mettre 2 piges lumineux en parallles 2 altitudes distinctes (pour chantillonnage des Geometridae).

53

Bibliographie
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sommets tabulaires de Guyane, bas sur ltude des
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JARVIS, A., H.I. REUTER, A. NELSON, E. GUEVARA, 2008, Holefilled SRTM for the globe Version
4, available from the CGIARCSI SRTM 90m Database (http://srtm.csi.cgiar.org)

55

Michel Boudrie

Arrive en hlicoptre vers le mont Itoup


dans laxe du plateau

Marin Talbot

Vue de la partie sommitale tabulaire du mont Itoup

56

Marin Talbot

Drop zone du mont Itoup

Roger Le Guen

Camp de base

57

Marin Talbot

Prises de mesures

Marin Talbot

Table de travail au camp de base

58

Exemples de facis forestiers prsents sur le mont Itoup DR


a) Futaie canope haute du pimont ouest
b) Aspect de la fort nuages avec nombreuses bryophytes, piphytes et piphylles
c) Troue Heliconia psittacorum, fort sommitale
d) Abondance des lianes dans certains secteurs du versant est.

59

Flore : Quelques taxons floristiques nouveaux pour la science Olivier Tostain

60

Dalle rocheuse Blechnum gracile var. pilosum, Selaginella radiata, Cremersia platula

Frondes de Doryopteris sagittifolia

Phlegmariurus acerosus, premire rcolte des


Guyanes

Hymenasplenium repandulum, seul localit connue


du plateau des Guyanes

Ptridophytes : Taxons remarquables pour le secteur


Michel Boudrie
Lindsaea lancea var. submontana

61

Marin
DR Talbot

Travail didentification aprs les rcoltes de terrain

Marin Talbot

Mise en place des herbiers pour les collections et identifications ultrieures

62

Nicolas Surugue

Identification de lespce et prise de photos

Nicolas Surugue

63

Nicolas Surugue

Nicolas Surugue

Prise de mesures dun chiroptre

64

Anoura geoffroyi, espce dterminante ZNIEFF

Vampyrodes caraccioli, espce peu commune

Lonchorhina inusitata, espce dterminante ZNIEFF

Ametrida centurio, espce peu commune

Lophostoma schulzi, espce dterminante ZNIEFF

Pteronotus parnellii, espce dterminante ZNIEFF

Thyroptera discifera, 4me observation pour la Guyane. Cette espce possde des ventouses
Chiroptres : quelques taxons peu communs en Guyane Mal Dewynter

65

Nicolas Surugue

Observation de Bothrops bilineatus, in situ

Mal Dewynter

Rhinella sp., nouvelle espce en Guyane

Mal Dewynter

Exemple de polychromatisme chez Dendrobates tinctorius

66

Mal Dewynter

Amapasaurus tetradactylus, un des vertbrs les plus rares au monde avec seulement 5 observations connues

Nicolas Surugue

Platemys platycephala, une des rares tortues continentales protges en Guyane

67

Nicolas Surugue

Pigeage des poissons dans la crique

Nicolas Surugue

Tri et identification des individus collects

68

Nicolas Surugue

Tri et identification des individus collects

Quelques poissons du mont Itoup : Sbastien Brosse

A) Ituglanis nebulosus
B) Rivulus geayi
C) Rivulus igneus
D) Harttiella sp.
E) Lithoxius boujardi
69

Nicolas Surugue

Marin Talbot

Techniques de pigeage lumineux pour les insectes

Marin Talbot

Marin Talbot

Pigeage et tri des insectes au filet

70

Marin Talbot

Observation sur le terrain des individus rcolts

Marin Talbot

Tri et identification au camp de base des espces rcoltes

71

Nicolas Surugue

Nicolas Surugue

Une des quipes ayant particip la mission Itoup 2010

72

Caractristiques du peuplement forestier mission Itoup


O. Brunaux1, S. Guitet1
1

Office National des Forts de Guyane

Rsum
Ce compte-rendu na pour but que de faire un bref tat des lieux suite la mission ralise en mars 2010 et de
faire ressortir les aspects les plus caractristiques des formations rencontres. Une analyse plus approfondie
par type dhabitat et gomorphologie sera ralise dans le cadre du projet habitat .

Mots cls
Parc amazonien de Guyane, mont Itoup, flore, ONF,

Prsentation gnrale du site


Le site dItoup est situ au sud du massif montagneux
des merillons en cur de Parc (DZ : UTM 267026334416). Il fait partie de la zone biogographique D
de "la chane Inini-Camopi ou Synclinorium du sud" ;
rgion naturelle D3 dite Rgion centre et est du
massif Tabulaire et de Camopi (comme le site de
Toponowini) et de la sous rgion naturelle D3d dite
"des monts Apitiri et du massifs des Emerillons
(sommet Tabulaire)". Le camp, est bas 585 m
daltitude sur le versant ouest du mont Tabulaire. Le
niveau de base (altitude des grosses criques environnantes) se situe 200 m daltitude. Quatre layons de
3_km (A, B, C et D) ont t mis en place et serviront
de base pour les IKA. Deux autres layons de 1 et
1,4_km (H et F) ont t ouverts afin de relier le plateau Tabulaire au sommet dItoup et faciliter les
prospections naturalistes (voir carte ci-dessous). Les
layons A et C traversent le massif douest en est depuis le piedmont ouest jusquau mi-versant est en
traversant le sommet Tabulaire. Le layon B parcourt la
crte sud en passant par le sommet Itoup, point culminant de la Guyane. Le layon D monte progressivement vers le nord du massif pour suivre la ligne de
crte jusqu un col sparant le sommet Tabulaire sud
du sommet Tabulaire nord.

On note une pente de 16% en moyenne atteignant


localement 65 70% principalement en haut de versant, le profil des versants tant lgrement concave.
Le site se trouve exclusivement sur des gabbros (roche
intrusive basique grains de taille moyenne) ce qui a
pu tre vrifi sur de nombreux affleurements et talwegs. Cette roche dure mais peu siliceuse est
lorigine de sols gnralement profonds, dominante
argileuse, bien drains mais avec une charge en cailloux souvent assez forte. Ces sols brun-rouge sont
apparemment trs sains et chimiquement riches mais
prsentent des contraintes physiques lenracinement
notamment dans les situations de plateau ou de replats
qui marquent des niveaux de roches plus dures, rsistantes lrosion et limitant la pntration des racines
lorsquelles forment des blocs mal fracturs.

Tableau 1 : principales caractristiques topographiques des layons dcrits.

73

Carte 1 : positionnement des layons dtude.

Description des habitats


Travaux raliss
La mission habitats qui s'est droule du 8 au 18 mars
2010 s'est organise de la faon suivante :
- Les agents du Parc amazonien Gatan Mathoulin,
Antonio Lopes et Emerick Auffret, ont principalement
contribus louverture des layons ;
- Linventaire forestier a t effectu par lagent
prospecteur Atidong Nano de lONF et lagent du Parc
amazonien Franois Bagadi ; les prises de donnes ont
t effectues sur workabout par Jean-Pierre Simonnet, agent ONF ;
- Olivier Brunaux, technicien amnagiste et Stphane Guitet, ingnieur de recherche ont raliss les
descriptions dhabitats, relevs topographiques et
sondages pdologiques ;
- Sophie Gonzales de lherbier de Cayenne a ralis
les relevs botaniques des plantes de sous-bois.
Un total de 144 placettes de +/- 0,2 ha ont t dcrites
sans incidents notables. Pas moins de 34 sondages
pdologiques ont t effectus.

74

Les prlvements ont t tous conservs et feront


lobjet dune reprise de description aprs schage. Une
fosse de 2 m de profondeur a t ouverte au dbut du
layon C sur une croupe du versant afin deffectuer des
prlvements analysables en laboratoire (notamment
analyse du C13 permettant de dtecter danciennes
phases de savanisation).
Une ou deux placettes (5 x 5 m chacune) de descriptions botaniques du sous-bois ont t effectues
chaque sondages pdologiques et des prospections
complmentaires ont t ralises lavancement le
long des layons.
Enfin, des prlvements de cambium ont t effectus
sur les genres Symphonia, Carapa, Eschweilera, Simarouba et Jacaranda sur 90 individus, des fins
danalyse gntique.
Les 10 jours passs sur site ont permis dapprhender
la totalit de la diversit prsente aux diffrents tages
daltitude mais ne donnent quune vision partielle des
versants est et sud plus loigns du camp de base.

Carte 2 : carte de localisation des prlvements de sol et dimplantation des layons.

Caractristiques du peuplement forestier


Composition du peuplement.
Les principales familles prsentes sur le site d'Itoup
sont les Mimosaceae (13,53%), les Sapotaceae
(8,62%), les Lauraceae (8,6%) et les Lecythidaceae
(7,03%). Sur les 6 layons raliss, les 5 layons (A, B,
D, F et H) situs sur des altitudes suprieurs 590 m
ont la mme famille dominante : celle des Mimosaceae avec un pourcentage du peuplement total compris
entre 13,2 et 19,2%. 80% de ces Mimosaceae sont des
oueko, aussi nomms pois sucrs (Inga spp.) espces
hliophiles par excellence. Parmi les 160 essences
inventories ceux-ci dominent avec plus de 13% du
nombre de tiges (Figure 2). Les Lecythidaceae sont
galement bien prsentes sur l'ensemble avec une
proportion toutefois plus faible sur le layon D. Les
mahos noirs (Eschweilera spp.) dominent - 52,7% des
Lecythidaceae - suivis des mahos rouges (Lecythis
spp.) et des mahos cigares (Couratari spp.) reprsentant respectivement 24,4% et 19,5% des individus de
cette famille. Les Meliaceae sont la 4me famille en
pourcentage du nombre de tige avec 5,2% rpartis sur
3 essences, savoir le diankomata (Guarea sp.)
84,7%, le carapa (Carapa sp.) 12,2% et l'acajou de
Guyane (Cedrela odorata) 3,1%. A noter, que sur la

crte et le plateau tabulaire (layon H et F) n'est prsent


que le diankomata.
Les Lauraceae sont galement trs prsents sur les 5
layons d'altitude avec comme reprsentant principal
les cdres noirs (Ocotea sp.) suivis des cdres jaunes
(Rhodostemonodaphnea sp.) et des bamba apici (Licaria sp.). Sur le layon C o les proportions sont moins
importantes les cdres noirs et jaunes ont des proportions quivalentes (1,4%). Les Sapotaceae sont assez
bien rpartis sur l'ensemble des layons avec une proportion lgrement plus importante sur le layon C. Les
niamboka (Pouteria spp.) reprsentent 65% des tiges
de Sapotaceae suivis des mamantin (Micropholis spp.)
19%, et des kimboto (Pradosia spp.) 5%.
Le fait le plus marquant dans cette composition concerne les Caesalpiniaceae, qui n'arrivent qu'en 10me
position sur le site alors qu'elles sont gnralement
dans le tierc de tte dans la plupart des relevs. Par
ailleurs, les Caesalpiniaceae les plus communes (anglique, wacapou, wapas, boco) sont absentes et remplaces par des espces moins frquentes habituellement : mongui oudou (Elisabetha princeps), gangui
oudou (Tachigali spp.), bougou bougou (Swartzia
spp.), adougoue (Swartzia spp.) et des courbaril (Hymenaea courbaril) en nombre et taille importants sur
le layon C. La composition en famille du layon C,
situ entre 590 m et 270 m daltitude, est tout fait
diffrente de celle des autres layons. En effet, ce sont
les Annonaceae (16%) qui

75

Figure 2 : Composition des layons en familles.

Figure 3 : composition des layons en essence

76

Figure 4 : Comparaison des compositions des diffrents sites habitats au niveau famille par une analyse multivarie (carr orange :
sites montagne - triangle carmin : hauts plateaux - rond kaki : plateaux

dominent le peuplement par la prsence trs importante d'une seule espce Xylopia surinamensis. Cette
espce tait dj bien prsente sur le site de Piton
Baron, situ l'extrme nord du massif des Emrillons. Les Burseraceae (11%) arrivent en deuxime
position, alors qu'ils n'arrivent au mieux qu'en 6me
position sur le layon A et au del sur les autres layons.
La faible reprsentation des Burseraceae sur un site du
sud guyanais pose question. En effet, tous les inventaires raliss jusqu' prsent mettaient en vidence
une dominance des Burseraceae dans les forts du sud
de la Guyane. Leur bonne reprsentativit sur le layon
C confirme toutefois cette rgle, mais a priori pour des
altitudes suprieures 600 m, ce trait particulier des
forts mridionales sestompe. Seuls des inventaires
complmentaires, sur des altitudes suprieures 600
m permettraient de confirmer ou d'infirmer ce fait.
Seulement trois essences composent les Burseraceae
d'Itoup : par ordre d'importance, les salis (Tetragastris spp.) 65,1%, les moni (Protium spp.) 33,5% et
les gaan moni (Trattinnickia spp.) 1,4%. Si la composition des layons C et D suit ce classement, celle des
layons A, B, F et H se rpartit part peu prs gale
entre les salis et les monis. Les Chrysobalanaceae qui
sont gnralement trs bien reprsentes dans les sites
du nord guyanais, souvent en 1re ou deuxime position, n'arrivent ici qu'en 7me place avec 4,7% des tiges

(elles sont en 5me position sur les sites de Toponowini


et Piton Baron, qui sont les sites les plus proches
d'Itoup). Concernant les Arecaceae, le site d'Itoup se
caractrise par une densit en palmier trs faible. Parmi les grands palmiers stipes ne sont prsents, et
qu'en faible effectif, les comou (Oenocarpus bacaba)
ne sont prsents qu'en faible effectif accompagns des
awara mon pre (Socratea exorrhiza) surtout sur les
layons A, B et D. Quelques pinots (Euterpe oleracea)
sont prsents dans les zones de bas fonds, mais les
zones marcageuses n'ayant pas une extension trs
importante ceux-ci ne sont peu nombreux. Enfin, les
Astrocaryum et le patawa sont quasi-absents. Cette
composition trs atypique reflte la conjugaison de
deux influences :
- Le caractre mridional est marqu par la forte
prsence des Mimosaceae sur lensemble des layons et
des Burseraceae sur le layon de plus faible altitude.
Ces deux familles sont particulirement importantes
dans tout le sud de la Guyane comme lont dmontr
Sabatier et al. prcdemment.
- Le caractre montagneux se retrouve dans la prsence dune proportion importante de Sapotaceae
associe aux Lecythidaceae ce trait de caractre, est
mis en vidence par ltude Habitat et se retrouve
sur de nombreux sites de hauts reliefs.

77

Structure du peuplement
Le peuplement global prsente une densit assez forte
avec une moyenne de 194 tiges/ha sur l'ensemble des
layons (162 231 tiges/ha : le layon C prsentant la
densit la plus leve et les layons F et H les moins
leves). La surface terrire est trs variable en fonction des layons. Moyenne sur les layons A et B (23
m/ha), elle devient trs faible sur les layons F et H
(17 m/ha), mais plus leve sur le layon D (26_m/ha)
et surtout sur le layon C qui atteint les 33_m/ha un
des plus forts scores rencontrs jusqu prsent sur les
sites Habitats . Laspect le plus caractristique du
peuplement rencontr est cependant sa grande ouverture de canope (indice global de 2,36 sur une chelle
de 0 3 contre 1,85 en moyenne) et la trs faible densit moyenne de palmiers dans le sous-bois (16 48
palmiers/ha contre 285 en moyenne habituelle). De
faon gnrale le pourcentage demprise des chablis
est assez fort, reprsentant de 3 4% de la surface
parcourue mais les chablis sont souvent de petite taille
(moins de 200 m2 en moyenne si lon carte un chablis
exceptionnel dun hectare sur le layon C). La dynamique de renouvellement parat plutt lie une mortalit sur pied quaux chablis darbres vivants, et
louverture de la canope est autant due la faible
densit de gros qu la prsence des petits chablis et
volis : on est vritablement en prsence dune fort
deux tages prsentant quelques mergents trs disperss et une canope beaucoup plus basse et peu
dense. L encore, le layon C se dmarque cependant
des autres :

Figure 5 : structure des peuplements par layon

Figure 6: Paramtres de structure (densit et surface terrire)


compare avec les autres layons habitats - noter le layon C qui
montre une surface remarquablement importante

- La canope y est en moyenne beaucoup plus haute


(37 m contre 29 m pour lensemble du site) ;
- Le sous-bois est contrario beaucoup plus clair que
sur les autres layons avec un indice de 1,47 sur 3
contre des valeurs allant de 1,93 2,77 sur les autres
layons ;
- Les parts des gros bois (de plus de 55cm) et surtout
des trs gros bois (de plus de 90 cm) sont beaucoup
plus importantes sur ce layon.
De fait, le site d'Itoup montre la fois une extrme
variabilit en termes de structure de peuplement - des
peuplements trs riches et d'autres trs pauvres en
volume de bois - mais aussi des traits caractristiques
trs prononcs comme l'absence de palmiers et la
grande perturbation de la canope. Une comparaison
avec les autres sites habitats dcrits marque cette
grande typicit, de mme ordre que celle des habitats
sur sables blancs par exemple.

Figure 7 et 8 : Aspects de la canope et densit de palmiers compars avec les autres layons habitats. Le site dItoup est remarquable
par la quasi-absence de palmiers et sa canope basse et ouverte (
lexception du layon C)

78

Diversit des habitats


Avec 160 essences forestires rencontres sur prs de
30 ha (157 si on ne considre que les layons IKA soit
les 24 ha habituel), le site se situe en position haute en
terme de richesse spcifique ( surface quivalente
on rencontre en moyenne 120 essences pour les sites
les moins riches et rarement plus de 160 pour les sites
les plus diversifis).

Typologie de Hoff :
Situ sur une des zones les plus leves de Guyane,
plusieurs habitats originaux taient potentiellement
attendus sur sites, selon la typologie de Hoff (2001):
- les forts montagnardes mousses (49.51) > 700m
;
- les forts sub-montagnardes nuages (46.55) de
mme aspect mais des altitudes de 500 700 m ;
- les forts denses de moyenne altitude (46.51) >
500m ;
- les forts basses de moyenne altitude sur cuirasse
(46.53) ;
- les forts de talwegs de moyenne altitude (46.54);
- ventuellement quelques forts marcageuses
daltitude (4a232).
Les formations nont cependant pas montr la typicit
attendue :
- La fort montagnarde (49.51) est marque par
quelques fougres arborescentes mais celles-ci restent
peu abondantes et les mousses, bien que prsentent sur
les branches et troncs, ne forment pas les masses attendues ;
- La fort sub-montagnarde (46.55) est quant elle
encore moins marque par ces critres, les peuplements restant relativement denses jusqu plus de 600
m et sapparentant plutt au type 46.51 (forts denses
daltitude) ; A premire vue, les limites des 700 m et
des 500m sont peu marques sur le site dItoup. Tout
se passe comme si linfluence mridionale remontait
les tages montagnard et sub-montagnard au del des
seuils dcrits dans des rgions plus arroses et plus
septentrionales (mont Galbao par exemple). La caractristique principale de ces formations daltitude consiste en limportante ouverture de la canope les
gros bois sont pars et le sous-bois envahi par les
espces hliophiles dans les cas extrmes on trouve
mme des forts basses de petits bois ;
- Les hauts de versants et zones sommitales (plateau
et crte) sont frquemment occups par des cambrouses (3E) dont les gramines stendent dans les
sous-bois voisins (11 placettes concernes).
- Les forts de talwegs (46.54) de moyenne altitude
sont marques a et l par quelques fougres arborescentes mais restent extrmement troites et peu types.
- On rencontre a et l quelques forts assez basses
et envahies par des lianes en quantit assez importante
mais aucun facis de fort basse sur cuirasse typique
na t dcrit.

Cest la fort de versant, classe abusivement dans le


type 46.41112 (fort haute de terre ferme sur schistes
paramaca, dolrites et gabbros) qui apparat comme la
plus tonnante : elle est extrmement riche en gros
bois de maho cigare (Couratari spp.) et de samaati
(Aspidosperma spp.) dj rencontrs en nombre sur le
site Piton Baron (nord du massif) et prsente un sousbois domin par le Xylopia surinamensis, les Burseraceae et les Inga spp. (ouekos). La biomasse parat
importante et semble bien ragir lapparente fertilit
des sols du versant. De nombreux trs gros bois
dessences habituellement disperses ont t rencontrs : bagasse, courbaril, satin ruban, ficus, inkassa
et mamantin. A noter, le caractre hliophile des trois
premires essences cites.
Un parcours hors layon aux abords du layon C nous a
par ailleurs permis dobserver une bagasse de prs de
100 cm de diamtre avec des traces danciennes saignes ralises lpoque de la rcolte de la gomme
de balata. Cette bagasse situ plus de 500 m
daltitude plusieurs kilomtres de la partie navigable
de la crique Verdun, montre toute la tnacit dont
pouvait faire preuve les rcoltants. Les milieux humides sont peu nombreux except sur le plateau sommital o plusieurs talwegs larges et hydromorphes
sont prsents. Une mare de faible taille est mme
dveloppe dans une petite dpression et une petite
pinotire de trs faible surface a aussi t croise. Les
micro-habitats rocheux (falaises, rochers sous fort,
abris sous-roches et autres cavits) ne sont gure reprsents.

Nouvelle dfinition d'habitats :


Si lon analyse les donnes en saffranchissant des
seuils daltitude proposs par Hoff partir desquels
les types dhabitats sont dtermins, il apparat quil
existe bien un premier niveau dtagement dont la
limite se situerait prfrentiellement entre 400 m et
500 m daltitude. A ce niveau on note la fois une
modification profonde de la composition du peuplement (disparition des Annonaceae et forte rduction
des Burseraceae vs une augmentation de la part des
Mimosaceae, Cecropiaceae et Lauraceae) et un changement dans la population de palmier (apparition
dawara monp et forte rduction de la densit de
petits palmiers). Cest aussi entre 400 et 500 m
daltitude que lon assiste une chute de la surface
terrire principalement due une disparition des trs
gros bois qui peuvent tre prsents a et l entre 500 et
600 m d'altitude mais dans des proportions bien
moindre. Par contre entre ce premier seuil et les plus
hautes altitudes aucune autre rupture nest rellement
dcelable en premire analyse si ce nest un appauvrissement du peuplement plus de 800_m daltitude
sans changement notable de composition au niveau
famille. Les mmes conclusions peuvent tre tires de
lanalyse au niveau des essences. A ce stade de l'analyse et sur la base des seules donnes d'inventaires

79

forestiers, on ne distingue donc que deux grands habitats forestiers :


- une fort de basse altitude < 500 m ;
- une fort d'altitude > 500 m dont le caractre montagnard n'est cependant pas trs marqu en termes
forestiers.
On observe franchement une opposition entre d'une
part une fort monumentale irrgulire trs gros bois
domine par les Burseraceae, Sapotaceae et le Xylopia
surinamensis situe sur le versant ouest entre 500 et
200 m daltitude et d'autre part, une fort basse
daltitude pauvre en trs gros bois et trs ouverte,
compose essentiellement de Mimosaceae et Lauraceae. Cette dichotomie semble correspondre aux types
de vgtation reconnus par Valry Gond partir
danalyse dimages satellites SPOT (capteur VEGETATION), aux effets de calage prs. Dans son interprtation, Gond dtermine une fort canope irrgulire compose de gros bois mergents (type 20) situ
prfrentiellement sur les versants ouest et des forts
canope plus claire et plus ouverte (type 19 et 21).
Suivant cette interprtation, les diffrents types de
forts ne seraient pas lis uniquement un tagement
altitudinal mais aussi des effets dexposition. En
focalisant sur les seules forts daltitude, on peut aussi
noter diffrents facis lis la position topographique
:
- les forts sur versant sont plus denses et prsentent
une canope relativement haute (suprieure 30 m en
moyenne) ;
- les forts sur plateau ont une canope basse (entre
20 et 30 m seulement) et une surface terrire notablement plus faible ce sont des forts claires ;
- les forts sur crtes et haut de versant forment un
facis intermdiaire canope basse mais plus ferme

80

du fait dune densit de tiges plus forte notamment


dans les bois moyens ;
- les forts des talwegs encaisss et peu hydromorphes, except sur le plateau sommital, paraissent
peu diffrents des peuplements voisins mais mritent
cependant dtre individualiss pour la diversit du
sous-bois qui leur est frquemment associ.

Conclusions
Le site dItoup est remarquable sur plusieurs points :
- forte diversit en essence forestire puisque plus
de 160 essences y sont rpertories ;
- une composition forestire originale, du fait de la
dominance des Mimosaceae mais aussi par labsence
ou la grande discrtion de nombreuses espces habituellement structurantes notamment dans les Cesalpiniaceae ou les Chrysobalanaceae ;
- des habitats contrasts que lon peut rpertorier en
5 grands types de fort de terre ferme :
- fort haute (>30m) de basse altitude (< 500 m)
riche en trs gros bois sur versant bien drains domine par les Burseraceae et Xylopia surinamensis ;
- fort haute daltitude (>500 m) domine par les
Mimosaceae et les Lecythidaceae sur versants ;
- fort basse (20-30 m) daltitude domine par les
Mimosaceae et les Lauraceae
- facis de fort claire sur plateau
- facis de fort dense sur crte et haut de versant ( Guarea spp.)
- fort des talwegs sur pente
Les cambrouses relativement nombreuses sur le site et
qui mriteraient une cartographie spcifique par tldtection.

Figure 9 : Evolution de la composition des peuplements de palmiers en fonction de l'altitude.

Figure 10 : Evolution de la composition des peuplements d'arbres en fonction de l'altitude.

81

Figure 11 : Evolution de la surface terrire des peuplements d'arbres en fonction de l'altitude

Figure 12 : extrait de la carte de vgtation de V. Gond (2007)

82

Figure 13 et 14 : variation de la hauteur de canope et de la surface terrire en altitude en fonction de la topographie

Figure 15 : carte simplifie et incomplte des principaux habitats forestiers sur le site Itoup

83

Flore et vgtation du massif du


mont Itoup
Caractrisation des communauts vgtales arborescentes
Daniel Sabatier1, Jean-Franois Molino1, Michel Tarcy1, Marie-Franoise Prvost2
1

IRD-UMR AMAP
Herbier de Guyane

Rsum
Linventaire floristique du mont Itoup a permis de contribuer la documentation de la flore de Guyane, particulirement pauvre pour les biomes sub-montagnards. Il a permis aussi de dresser diffrentes hypothses cologiques et biogographiques visant explique la rpartition des espces et la composition des communauts
vgtales lchelle du mont Itoup mais aussi du bouclier des Guyanes.

Mots cls
Inventaire, flore composition floristique, mont Itoup, Parc amazonien, Herbier de Guyane

Introduction
La vgtation forestire qui couvre le territoire guyanais plus de 90% est htrogne diffrentes
chelles spatiales. A lchelle locale, cette htrognit correspond dune part laffinit des espces
pour des conditions environnementales particulires
(effet de niche vis--vis de ldaphisme et/ou du microclimat, incluant les effets de la dynamique forestire) et dautre part a un confinement des espces
expliqu, en ltat actuel des connaissances, par une
limitation de leur capacit de dispersion (Vincent et
al., 2011). Autrement dit, la probabilit de collecter
ces espces dpend dune part des milieux prospects
et dautre part de la densit des prospections. Cette
htrognit se traduit par une plus ou moins grande
diversit bta1 entre localits voisines. A lchelle de
la Guyane, on distingue deux grands ensembles (Fig.
1), lun au nord dune ligne Camopi Sal - monts
Atachi Bakka, lautre au sud. Ces deux grands ensembles diffrent tant par leur composition floristique
(Sabatier & Prvost, 1989, Engel et al., 2008) et leurs
diversits alpha2, que par leurs structures de vgtation. Ces dernires sont perues par exemple par tldtection, au travers des signatures spectrales (Gond et
al., 2011). Le mont Itoup se situe lgrement au sud
de la ligne de contraste nord-sud. Ce contraste rgional sinscrit lui mme dans une htrognit du cou-

vert forestier lchelle continentale (ter Steege et al.,


2000, 2003, 2006) qui fait apparatre la Guyane
comme une rgion qui contraste assez fortement avec
ses voisines par une diversit alpha plus leve.
Bien que des hypothses soient avances (Stropp et
al., 2009), ces contrastes ne sont pas compltement
expliqus. A lchelle continentale, parmi les hypothses les plus crdibles, figure celle des rpercussions
de lhistoire climatique du quaternaire (Hooghiemstra
& van der Hammen, 1998) et la relation aux conditions environnementales actuelles (Sombroek, 2000).
A lchelle locale, une influence anthropique peut
sajouter ces sources dhtrognit (thme abord
par le projet Couac 3).
Le climat du Quaternaire comporta des pisodes plus
secs et plus frais que le climat actuel, particulirement
la priode du dernier maximum glaciaire (-18 000
ans BP). Les conditions climatiques de ces priodes,
plus sches et de 4,5 5 plus fraiches
quactuellement (Anhuf, 2006) ntaient pas favorables la persistance dun couvert forestier aussi
tendu et continu quactuellement (van der Hammen
& Hooghiemstra, 2000). En Guyane, Granville (1982),
Tardy (1998), Duputi et al. (2009), Freycon (2010)
apportent des arguments de validation et prcisent la
localisation et lextension possible des zones refuges
ou des aires non forestires. Le nord de la Guyane
serait rest forestier au cours de cette priode. On

1 La diversit bta quantifie les changements de composition en espce lorsque la distance croit ou lorsque les contrastes environnementaux augmentent.
2 La diversit alpha quantifie le mlange local des espces constituant une communaut. En Guyane, ce mlange local atteint de 120
210 espces darbres lhectare (observations de lquipe AMAP).
3 Impact des occupations amrindiennes anciennes sur les proprits des sols et la diversit des forts de la frange ctire guyanaise
84(Progamme Amazonie, Phase 2).

attend donc quil y ait eu persistance daires forestires tendues, fragmentation du couvert forestier en
priphrie de ces aires avec persistance prs des axes
de drainage et sur les reliefs plus arross, dispersion
basse altitude despces montagnardes exigeant un
climat frais.
Lvolution vers les conditions climatiques actuelles,
bien quinterrompue diverses reprises durant
lHolocne -derniers 10 000 ans- (Ledru, 2001) a d
favoriser la dispersion des espces partir des aires
demeures forestires. Lhypothse dune perception
de lempreinte des distributions anciennes des forts
dans la distribution actuelle des espces endmiques
est la base de la thorie des refuges forestiers amazoniens du Quaternaire. Dveloppe d'aprs la rpartition gographique des espces d'oiseaux, batraciens,
reptiles, papillons et de plusieurs familles de plantes
(Haffer, 1969, Simpson & Haffer, 1978, Prance,
1982), cette thorie suppose que la diffusion dun
nombre significatif de taxa ait t suffisamment faible
pour que leur distribution gographique actuelle reflte celle des poques anciennes au cours desquelles
ils se sont diffrencis par spciation allopatrique. La
validation de cette thorie tant base sur ltude des
distributions spatiales des taxa supposs avoir conserv cette empreinte, divers auteurs dont Nelson et al.
(1990) ont fait remarquer que les donnes dinventaire
des espces (dans ce cas les collectes dchantillons
dHerbier) sont biaises du fait dun surchantillonnage des aires les plus accessibles. Cependant, des analyses plus prcises qui modlisent et
compensent ce biais de lchantillonnage confirment
lexistence de patrons gographiques interprtables en
termes de refuges (Raedig et al., 2010).
Simultanment, parmi les espces qui staient rpandues en Amazonie au cours du quaternaire, certaines
semblent avoir bnfici dun climat plus frais, telles
les Podocarpus (Gimnospermes) dont laire de rpartition tait beaucoup plus large et incluait des zones de
basse altitude au Quaternaire (Anhuf, 2006, Van der
Hammen & Hooghiemstra, 2000). De nos jours, de
telles espces qui ne supportent pas les tempratures
leves des basses altitudes (moyenne de 26 pour la
Guyane) pourraient avoir trouv refuge sur des reliefs
tels que le mont Itoup. On peut donc formuler
lhypothse de lexistence de refuges actuels. Une
hypothse similaire a t formule pour les refuges
xriques que constituent les inselbergs granitiques
(Duputi et al., 2009 ; Granville, 1982).

Figure 1 a : Localisation gographique : Topographie du nord-est


du bouclier des Guyanes (donnes SRTM) soulignant la situation
disolement des petits massifs de Guyane et de lest du Surinam. La
ligne discontinue marque approximativement la transition entre les
zones de vgtation forestire nord et sud en Guyane

Enfin, lorsque les conditions environnementales changent dans lespace dune tendue gographique, au
point quil y ait des zones isoles qui se singularisent
par un contraste fort avec lenvironnement qui les
entoure, on a une situation dinsularit. Les montagnes
sont au sens gnral des iles et la thorie de MacArthur & Wilson (1963, 1967) sur la dynamique des
communauts insulaires sapplique parfaitement dans
ce cas. La taille de ces entits et leur loignement des
autres entits ou dentits tendues (continentales) du
mme type, de mme que la distance cologique
avec lespace qui les spare seront alors des paramtres importants expliquant la composition et la
richesse spcifique des communauts qui les peuplent.
On peut formuler une hypothse dinsularit pour
expliquer les caractristiques des communauts vgtales actuelles du mont Itoup (Fig. 1a).

85

Matriel et mthodes
Site dtude
Le massif du mont Itoup (ci-aprs galement nomm
massif Tabulaire) est lun des reliefs les plus levs et
tendus de Guyane franaise. A lexception de
lescarpement des Tumuc-Humac qui marque la bordure dun plateau tendu, il est galement le massif le
plus mridional de Guyane (Fig. 1a). Le massif Tabulaire fait partie dun ensemble de reliefs isols, peu
tendus et peu levs qui forment, du nord-est du
Surinam (mont Nassau) au sud-est de la Guyane (massif Tabulaire), une sorte darchipel . Long
denviron 18 kilomtres et large denviron 7 Km, pour
une altitude dpassant trs lgrement 800 m, il est,
avec la montagne Bellevue de lInini situe au centreouest de la Guyane, lun des deux reliefs les plus prononcs de cet ensemble. A la diffrence de celle-ci,
qui est oriente est-ouest, son orientation gnrale est
nord-sud (Fig. 1b).

Figure 1 b : Topographie du massif Tabulaire

Questions :
i)
la flore du mont Itoup comporte-t-elle
des taxa non rencontrs ailleurs en
Guyane ?
ii)
sagit-il despces relictuelles danciens
refuges forestiers et confines l par leur
trop faible pouvoir de dispersion ?
iii)
sagit-il despces infodes au climat
plus frais de ce type de reliefs ?
iv)
quelle est leur capacit de dispersion ?
v)
sagit-il simplement despces confines
un petit nombre de sites montagnards
ou non par leur faible capacit de dispersion ?
Du point de vue de la problmatique de la connaissance globale de la diversit en Guyane, mentionnons
que plusieurs des reliefs levs de Guyane, dont le
mont Itoup, ont fait lobjet dexplorations botaniques4. Cependant, aucune ntait focalise sur la
connaissance des arbres et aucune na mis en uvre
une exploration systmatique de type relev.
Sagissant de la problmatique de la conservation de
la diversit, lexistence despces infodes aux conditions environnementales des petites montagnes isoles
de Guyane poserait la question de leur maintien dans
ces situations _insulaires si les changements annoncs (GIEC, 2007) du climat global devaient avoir
des rpercussions en Guyane.

La partie sommitale du massif Tabulaire stend sur


environ 13 x 2,5 Km au-del de 600 m daltitude.
Dans la moiti sud du massif, le mont Itoup culmine
prs de 820 m. Le pimont est fait dun tage collinen slevant 250 m. Lorganisation gnrale du
relief est relativement symtrique avec deux versants
majeurs, lun est et lautre ouest, respectivement au
vent et sous le vent des alizs dominants. La zone
sommitale sorganise en croupes et pseudo-plateaux
dans la moiti sud et en crtes et pics dans la moiti
nord (Fig. 1b).

Vgtations forestires tudies


Une analyse prliminaire du couvert forestier, par
tldtection, a t mene avant la mission de terrain
afin de mieux apprhender son htrognit spatiale.
Les sources dinformation taient dune part une extraction centre sur le mont Itoup dune classification
des paysages forestiers (Fig. 2) ralise dans le cadre
du projet CAREFOR (Gond et al., 2011) partir de la
compilation sur un an des images quotidiennement
acquises par le satellite Spot 4 Vgtation (anne 2000
; pixel de 1x1 km) et dautre part une scne du satellite
Landsat Thematic Mapper, anne 1990, pixel de
30x30 m (non reprsente). Les deux documents permettent de dceler un contraste entre les versants et
une individualisation du plateau sommital. En se rfrent aux interprtations de Gond et al. (loc. cit.), on
pouvait sattendre :
- Versant ouest : une fort haute canope irrgulire forme par de grands mergents ;
- Plateau sommital : une fort bien structure canope rgulire ;
- Versant est : une fort canope irrgulire et
enlianements.

4 On peut dfinir une exploration botanique comme la collecte, effectue en parcourant une localit, de toute plante perue comme remarquable ou trouve ltat fertile.

86

Les observations visuelles valident ces attentes sur les


versants, mais infirment compltement lexistence
dune fort bien structure sur le plateau. Parmi les
sources potentielles de mauvaise interprtation, nous
avons not labondance des piphylles (algues, bryophytes, lichens) sur toutes les frondaisons de la fort
sommitale, ainsi quune strate arbustive trs dense.
Celles-ci sont de nature fortement modifier la radiomtrie dans le sens dune vgtation dapparence
peu dynamique. Au contraire, la fort sommitale est
trs ouverte (nombreux chablis de tous ges) et comporte une importante fraction darbres appartenant
des espces hliophiles typiques (voir analyse des
relevs), frquentes basse altitude dans les milieux
perturbs (Aparisthmium cordatum, Miconia spp.,
Isertia coccinea, Palicourea guianensis, Inga thibaudiana et Inga spp., Tapirira spp. etc.).
Labondance des hliophiles est probablement favorise par la persistance des brouillards matinaux qui
accroissent fortement le rayonnement lumineux diffus.
Des photographies dambiance forestire et de vgtation ont t ralises (voir Planche 1).

Figure 2 : Classification des paysages forestiers dans la rgion du


massif Tabulaire, daprs une tude des donnes SPOT4Vgtation, anne 2000, dfinition 1 km (Gond et al. 2011).

Choix dun protocole de relev quantitatif


Le projet de caractrisation botanique pilot par le
Parc amazonien de Guyane (Nicolas Surugue) vise
acqurir simultanment une connaissance aussi complte que possible de la flore de ce site remarquable du
Parc amazonien de Guyane et une premire connaissance de lorganisation des communauts vgtales
occupant la partie sud du massif (mont Itoup). Il
sagira donc de formuler et dtayer des hypothses
quant aux dterminants cologiques et/ou historiques
de la flore observe plutt que de tirer des conclusions
dfinitives. On sintressera notamment aux relations
entre la rpartition des taxa et les principales variables
environnementales caractrisant le massif (altitude,
versant, pentes, sols ). Pour atteindre cet objectif,
des relevs quantitatifs de la vgtation complts par
des relevs qualitatifs documentant la flore sont ncessaires.
La prsente tude est relative au compartiment arborescent de la vgtation. Il sagit conventionnellement
des tiges autoportantes atteignant ou dpassant un
D130 (diamtre de la tige 130 cm de hauteur) de 10
cm. Ce standard international na pas de signification
biologique particulire puisquil nexiste aucune rupture dans le gradient de stature quatteignent les
plantes, mais il permet dune part la comparaison des
rsultats entre tudes et dautre part constitue un repre dans le tuilage entre protocoles visant dcrire
lensemble du couvert vgtal. Les palmiers dveloppant un stipe et ventuellement les fougres arborescentes font partie intgrante de ce compartiment arborescent. La prsence de lianes est gnralement quantifie (recensement des tiges de D130 > 10 cm) au titre
de la description de la structure du couvert.
Il existe un trs grand nombre de protocoles applicables au relev quantitatif de vgtation. Sans entrer
dans les dtails, il convient de retenir que ces protocoles se diffrencient essentiellement par la manire
plus ou moins compacte (a contrario diffuse)
dexplorer lespace caractriser et par la mthode de
rpartition dans lespace de leffort de collecte : systmatique, stratifi (segmentation a priori) en fonction
de paramtres environnementaux, stratifi en fonction
de structures apparentes de lobjet tudi, ou encore en
fonction des pr-requis dune mthode danalyse ).
Une segmentation a posteriori peut galement tre
mise en uvre grce lenregistrement de paramtres
environnementaux ou structuraux lors du relev.
Leffort global de relev vise au meilleur compromis
entre objectifs danalyse et contraintes de faisabilit
(accessibilit, crneau de temps ).
Les couverts vgtaux forestiers des rgions tropicales
humides, comme ceux du massif du mont Itoup, sont
gnralement caractriss dune part par une diversit
alpha leve (nombreuses espces, faible expression
des dominances au sein dun mme chantillon de la

87

communaut vgtale) et dautre part par une autocorrlation spatiale de la composition en espces.
Cette dernire sexprime toutes les chelles
dobservation, du fait de la structure mme des populations. En effet, ces populations sont trs souvent
organises en agrgats ou en vastes plaques, ce qui se
traduit par une diversit bta croissant rgulirement
avec la distance entre chantillons. De nombreux
facteurs concourent une telle organisation dans
lespace. La structure spatiale de lenvironnement et
des facteurs dterminant la prsence et la survie des
espces, lhistoire du couvert vgtal (phnomnes
climatiques, gophysiques, anthropiques etc.), la dynamique globale du couvert et celle propre chaque
espce. Il en rsulte que les relevs surfaciques compacts (parcelles carres) captent moins bien la diversit globale et la tendance gnrale en termes de composition que ne le font les relevs diffus ( lextrme
desquels on trouve le semis de points alatoire). Les
premiers sont plus mme de rvler la structure de
dominance locale (de laquelle dpend la diversit
alpha).
Dans le cadre dun projet de caractrisation dun ensemble gographique htrogne (fort gradient altitudinal ; diffrenciation en versants; htrognits
topographiques et daphiques ) et dans le but de
dgager les macrostructures de la communaut vgtale forestire, la mise en uvre dun protocole explorant au mieux lespace tudi simpose. Pour autant,
les contraintes daccessibilit, de mobilit et de temps
ne peuvent tre ngliges dans ce type
denvironnement : pentes abruptes, chablis de gros
arbres, enlianements, etc. limitent fortement les dplacements au sol et rendent non oprationnel un protocole bas sur des points de relevs alatoires. De ce
point de vue, la mthode la plus utilise en fort tropicale et qui propose un bon compromis entre exploration de lespace, accessibilit et temps dexcution est
celle dite du point-quadrat (Cottam & Curtis, 1956). Il
sagit de parcourir lespace en suivant un ensemble de
lignes le long desquelles le relev des arbres est effectu de manire systmatique (4n arbres tous les x
mtres ; voir dtail plus loin). Un tel protocole fut mis
en oeuvre en Guyane par notre collgue Scott Mori
(New-York Botanical Garden) pour la caractrisation
de la fort des monts La Fume prs de Sal (Mori &
Boom, 1987) et par nous mmes (Sabatier & Prvost
ined ; Sabatier et al., 2006) pour lanalyse de la diversit de plusieurs sites dont la piste de St Elie, montagne Plomb - Crique Plomb (nord-Guyane et de Yaou
et Dorlin (Centre-est Guyane). Dans ce protocole, le
relev est donc structur dans lespace. Nous avons
choisi que la structure du relev soit contrainte par la
structure spatiale des paramtres environnementaux
dont leffet sur la vgtation est explorer (altitude,
versant, pente). De plus nous avons adapt le dispositif de sorte quil complte les autres dispositifs de

88

caractrisation mis en uvre Itoup, notamment le


protocole dit Habitat ralis par lONF-Guyane,
lONC-Guyane et lHerbier de Guyane UMR
AMAP, qui sattache dcrire les variations de milieu et de couvert forestier et sintresse aux essences
arborescentes dominantes, labondance de la faune
et aux vgtaux qui caractrisent le sous-bois.

Protocole du point-quadrat appliqu


au relev de vgtation du mont Itoup
La chronologie des travaux est donne en Annexe I.
Le positionnement du camp de base sur le versant
ouest (Fig. 4) sest avr tre une dcision extrmement judicieuse compte tenu des conditions climatiques sur le plateau sommital, qui dune part auraient
pu compromettre laccessibilit par hlicoptre mais
aussi auraient rendu les conditions de travail sur le
matriel vgtal ramen au camp plus difficiles du fait
de la frquence des brouillards et dun vent destnord-est soutenu et permanent. Cependant, les distances parcourir sur les pentes fortes nous ont amen
rduire le nombre de relevs sur le plateau (2 ont t
excuts) ainsi que sur la face est (2 ont t excuts).
La disposition en transect est-ouest a t conserve ; le
versant ouest tant plus compltement chantillonn
que le versant est. Lextension du dispositif final est
de 6 km.
Comme prcis ci-dessus, le protocole du pointquadrat est un chantillonnage systmatique le long
dune ligne de relev. Le pas dchantillonnage en
fort est gnralement fix 20 m. Nous avons conserv la valeur de ce paramtre afin de pouvoir procder des comparaisons inter-sites. A chaque point (ou
relev lmentaire) on sintresse aux n arbres les plus
proches du point de relev dans chacun des 4 quadrants forms par laxe du relev et une perpendiculaire le coupant au point de relev. Classiquement n =
1. On enregistre la distance de larbre au point de
relev, la circonfrence du ft 130 cm de haut
(D130) ou plus haut sil y a des contreforts,
lidentification botanique (un chantillon botanique
pour identification au laboratoire est prlev lorsque
celle-ci est juge incertaine sur le terrain ; 30 60 %
des arbres sont chantillonns suivant les types de
forts. Ltiquetage des arbres na pas t envisag,
mais un marquage la peinture est effectu. Un ensemble de variables daide linterprtation est relev
: 1) la topographie locale (situation, pente), 2)
lexistence daffleurements (roche ; cuirasse) ou de
traces de colluvionnement, 3) le type de vgtation
forestire : hauteur (fort haute > 35 m, moyenne 2535 m, basse < 25 m), structure (ferme- rgulire,
ferme-irrgulire, chaotique, ouverte), densit des
arbres (faible, moyenne, forte), enlianement (nul,
faible, important, massif).

Figure 3 : Reprsentation schmatique de la slection des 8 individus dun point de relev dans une ligne Points-Quadrats

Aprs avoir valu les temps de dplacement et les


temps dexcution dans les conditions inhabituelles
(forte dclivit ; 3 personnes ralisant le relev au lieu
de 5 habituellement ; mesure des hauteurs), le choix
de limiter nos relevs aux deux versants a t complt par un chantillonnage sans rptition. Cependant,
afin dobtenir un chantillon relativement lev, le
nombre darbres enregistrs par quadrant t fix n
= 2, soit le double du nombre dindividus classiquement intercepts chaque point dinventaire. Un relev peut donc tre dfini comme un dispositif en
point-quadrat de 240 m de long, sur lequel 13 points
dinventaire sont distants de 20 m entre eux. A chacun
de ces points dinventaire 8 arbres de D130 > 10cm
(les 2 plus proches dans chacun des quadrants) sont
retenus (Fig. 3), soit au total 13 x 8 = 104 arbres par
relev.
Dans le cadre de lapplication du protocole Habitat , des voies dexploration, ou layons, ont t traces par lONF et le PAG afin de raliser des relevs
forestiers sur transect (Fig. 3). Lun des layons en
position sommitale (layon F) et deux parallles la
pente des versants est et ouest (layons A et C) ont t
utiliss pour la mise en place du dispositif point quadrat. Les versants, dun dnivel total denviron 600
m, ont t documents par tranches altitudinales
denviron 150 m. Pratiquement, des zones altitudinales de 100 m ont t identifies daprs le modle
numrique de terrain issu des donnes SRTM (Fig. 3)
et une de ces zones sur deux a t slectionne laide
dun GPS afin dy raliser les relevs dun niveau
altitudinal. Les relevs ont t disposs par paires
raison dune paire par tranche altitudinale, proximit
du layon dexploration (sauf pour le plateau sommital
o la situation en bordure de mare a t prfre afin
de documenter cette situation remarquable). Afin de
prendre en compte limportance du rseau hydrographique et des talwegs dans le paysage, chaque paire
comporte un relev en situation topographique convexe (croupe ou plateau bien drain) et lautre en
situation topographique concave (talweg parcouru par
un petit cours deau, bas-fond humide).
Les cartes topographiques et le modle hydrologique
tablis par lONF ont t dune grande utilit pour le

positionnement du dispositif et la slection des secteurs chantillonner.


Compte tenu des difficults de mise en uvre dans les
conditions dcrites plus haut, nous avons t contraints de limiter les relevs aux deux versants principaux et de ne pas effectuer de rptitions au sein dun
mme niveau altitudinal. Au total, 5 paires de relevs
ont pu tre mises en place (Fig. 3) soit un nombre total
dindividus intercepts par le dispositif de : 104 x 2 x
5 = 1040 arbres. Le positionnement des relevs sur les
versants E et O et en zone sommitale permet de documenter leffet de lexposition. Celle-ci peut avoir un
rle environnemental important du fait de limpact des
vents dominants sur la pluviomtrie, lhumidit de
lair ou son pouvoir desschant ainsi que sur la stabilit des arbres et donc le turn-over de ldifice forestier.
Cependant, afin de limiter ltude au cas des communauts darbres des forts bien structures, les lignes
de relev vitent les secteurs de fort de lianes (prsents notamment sur le versant est daprs les images
des survols effectus par lquipe AMAP en 2005 et
2006).
Une fois ralise la slection des arbres intercepts par
le relev, le diamtre du tronc de chaque individu est
mesur 1,3m du sol (D130), identifi vue par examen de la base du tronc, du rhytidome et de lcorce
vivante, des feuilles et ventuels fruits ou fleurs aux
jumelles, tagu (peinture de marquage forestier), positionn (distance au point dinventaire mesure par
ultrasons grce un appareil Vertex situ sur le
point et son transpondeur plac sur le tronc. Lorsque
lidentification vue nest pas consensuelle entre les 2
botanistes du groupe ou que lespce est considre
comme inconnue, peu connue, rare ou difficilement
identifiable vue, un chantillon (rameau feuill, avec
fleur et/ou fruits lorsque cela est possible) est prlev
laide soit dun chenilloir (perche de 10 m), soit
dun fusil (calibre 12). A chaque point, larbre dominant dans un rayon de 10 m, cest dire formant la
canope au dessus du point de relev, est mesur
(D130 et Hauteur) et identifi et/ou chantillonn
comme les autres. La mesure de la hauteur est ralise
laide de lappareil Vertex (voir plus haut) en mode
ultrason, procdure 2 points (distance + angles de
vise de la base du tronc et du sommet de la couronne).

89

Figure 4. Cartographie du dispositif dtude du mont Itoup. Fond de carte avec zonation altitudinale et drainage fourni par ONFGuyane. Les localits ont dfinies par M. Boudrie afin de localiser les collectes dherbier. Les relevs Ito1 Ito10, sauf Ito5, sont
disposs le long des layons A et C le relev Ito5 est situ sur le layon F.

Echantillonnage des individus et traitement des Herbiers


Trois types de collections ont t raliss :
i)
les chantillons dherbier prennes (dits
herbiers ) qui seront dposs dans des
Herbiers internationaux;
ii)
les collections de travail destines rester au laboratoire (dites rfrences );
et enfin
iii)
les collections pour tude gnomique
(phylognie molculaire et barcoding).
Les deux premiers types sont des portions de rameaux
feuills, fertiles (fleurs / fruits) si cela est possible ; le
troisime est constitu dune fraction de feuillage
jeune (ou de cambium) dshydrate au silicagel dans
un sachet hermtique. Les herbiers sont constitus de
4 6 (1-8) rplicats qui seront dposs en priorit
lHerbier IRD de Cayenne et dans celui o travaille un
spcialiste de la famille botanique laquelle
lchantillon peut tre rattach. Afin dviter de saturer les lieux de collection, mais aussi parce que les
spcialistes ne prtent quassez peu dattention au
matriel strile, seuls les chantillons fertiles et les
chantillons striles despces inconnues ou peu documentes sont transforms en herbier. Les autres
seront conservs dans la collection de travail ou seront
dtruits aprs un examen minutieux permettant leur
identification botanique. Seules les collectes mises en
herbier font lobjet dune description dtaille. De
nombreux clichs ont t raliss pour documenter les

90

rcoltes et faciliter leur tude ultrieure, et galement


pour documenter les espces.
Les chantillons pour la gnomique sont rfrencs
par un herbier ou par une collection de travail. Environ 43 % des arbres tudis lors des relevs ont t
chantillonns, soit un total de 454 arbres (environ 65
% laide dun fusil, les autres laide dun chenilloir sur perche tlescopique). Lchantillonnage a
permis la ralisation de 101 collections dherbier, 293
collections de travail et 90 collections pour tude
gnomique. De plus, 85 collections dherbier ont t
ralises en dehors des relevs, soit proximit, soit
sur les voies (layons) dexploration ou en marge de
celles-ci.
Les collections reprsentent pour lessentiel des arbres
peu connus ou dont lidentification pose problme,
mais aussi des arbustes, lianes, hmipiphytes et herbaces. Dautre part, et titre indicatif, un recensement vue des espces darbres non interceptes par
les relevs ni collectes pour herbier a t ralis
chaque fois que possible afin de complter la liste des
espces arborescentes du site (nots obs. en Annexe III). Ce complment na pas fait lobjet dun
protocole particulier.

Identifications botaniques
Lidentification in situ des collectes est considre
comme provisoire et doit tre confirme ou corrige
par une tude du matriel au laboratoire et/ou par
lexpertise de botanistes spcialistes des familles bo-

taniques, auxquels lune des parts collectes est adresse. Lensemble du processus est long et, bien quil
soit trs avanc, il ne peut tre considr comme
achev actuellement.
Les principaux outils pour raliser lidentification du
matriel botanique sont dune part la collection des
Herbiers dposs CAY et dautre part les flores
(Flora of the Guianas, Flora of the Venezualan
Guayana, Flora Neotropica notamment). Une premire
consultation de spcimens types a souvent t ralise
grce la visualisation des images de spcimens scanns, mises en ligne sur internet par de grands Herbiers
internationaux (NY, K, P ).
De nombreuses identifications font rfrence des
taxa non publis. Ils sont dfinis temporairement pour
les besoins de ltude de lensemble des taxa arborescents de Guyane par lquipe AMAP. Ce type de nomenclature utilise la notion de morphotaxon qui permet de distinguer et dassocier entre eux sous un
mme taxon un ensemble de spcimens aux caractristiques morphologiques remarquables qui permettent
en ltat des connaissances du moment de les distinguer des taxa connus ce jour (publis) ou parfois
simplement de ne pas les y rattacher du fait dun matriel collect incomplet ou de la variabilit dune espce non compltement cerne dans la littrature.
Chaque morphotaxon est donc destin tre remplac,
soit par un taxon nouvellement dcrit quil contribue
documenter, soit par un taxon dj dcrit mais le plus
souvent non encore collect dans la flore locale.

Bilan des relevs


Le protocole de relev sest avr ralisable par 3
personnes (dont 2 botanistes). En moyenne un relev
(13 points sur 240 m - interceptant 104 arbres et les
arbres dominants) ncessite 2 jours de travail de terrain (traitement des chantillons non inclus).

Etendue du dispositif et quantit


dinformation recueillie
Dix relevs de 104 arbres chacun ont t raliss sur
un axe est-ouest interceptant cinq niveaux altitudinaux
sur la face ouest (sommet y compris) et deux sur la
face est (sommet y compris). Lamplitude du relev
final est de 6 km, 4,5 sur le versant ouest et 1,5 sur le
versant est. Au total, 1098 arbres (1040 directement
intercepts + 58 dominants ajouts) ont t tudis au
lieu des 1300 1400 prvus dans le projet initial. A
titre de comparaison, ltude, dans le centre de la
Guyane, des monts La Fume Sal par Mori &
Boom (1987), utilisant un protocole assez proche,
comportait 800 arbres pour 4 km linaires de relev
point-quadrat.

des arbres dominant la canope chaque point


dinventaire (n = 13) ainsi que des diamtres de tronc
et distance au point de relev (qui informe sur la densit locale du peuplement), des 8 arbres de chacun des
13 points de relev (n = 104) peuvent tre analyss du
point de vue de leurs valeurs moyennes ou mdianes
et de leurs variabilits locales qui sont rsumes ici
par des graphes en boxplot.

Hauteur et diamtre des arbres dominants


La hauteur des arbres dominants apparat fortement
lie la situation topographique (Fig. 5a), avec
douest en est :
i) canope trs haute autour de 50 m et relativement
peu variable basse altitude (niveaux 200-300 m et
400-500 m) avec un effet talweg humide important
bien que non significatif (test de Tukey, p > 0,05) et
une distribution souvent asymtrique qui peut traduire
une organisation spatiale en patches de taille importante par rapport au relev ;
ii) diminution de la hauteur mdiane qui stablie
autour de 40 m moyenne altitude (niveau 600700_m), sans effet talweg humide apparent et avec
des distributions plus tales et nettement symtriques
qui peuvent traduire une variabilit plus forte et moins
organise dans lespace ;
iii) accentuation de cet abaissement de la canope en
zone sommitale (niveau 800 m) ;
iv) sur le versant est, une hauteur de canope comparable celle observe sur le versant ouest pour la
situation draine et une canope basse comme
pour le sommet en situation de talweg humide .
Seules les situations extrmes (basse altitude ouest
versus sommet et talweg est sont significativement
diffrentes (test de Tukey, p < 0,0001).
Le diamtre de tronc des arbres dominants montre un
patron globalement comparable (Fig. 5b) avec une
diminution des diamtres douest en est, mais plus
bruite que la distribution des hauteurs et sans effet
talweg significatif louest. Aucune distribution
nest significativement diffrente des autres (test de
Tukey, p > 0,05).

Variations des paramtres structuraux


Pour lensemble des dix relevs, les variations de
hauteur de la couronne et de diamtre de tronc (D130)

91

Distribution des diamtres de


lensemble des arbres des relevs
Ces distributions (Fig. 6a) ne diffrent pratiquement
que par les valeurs extrmes reprsentant les gros
arbres. Ces derniers apparaissent lgrement plus
frquents en bas de pente du versant ouest.

92

Densit des tiges


Il napparat pas de diffrences entre les distributions
des distances arbre-point dinventaire (Fig. 6b); les
densits de tiges ne sont donc pas significativement
diffrentes.
En conclusion, cest essentiellement la hauteur et donc
ltirement des relations hauteur-diamtre qui marque
la diffrence entre la structure forestire des relevs du
bas de versant ouest et les autres et inversement une
contraction de cette relation pour les relevs sommitaux et du talweg est. La situation abrite du versant
sous le vent (ouest) versus une forte exposition des
vents assez forts (versant est et sommet) semble suffisante
pour
expliquer
ce
contraste.

Figure 5. Distribution des paramtres structuraux des arbres dominant la canope dans les 10 relevs (Ito1 Ito10), n = 10
x 13 arbres ;
a) hauteur des couronnes ;
b) diamtre des troncs (D130).
Boxplot, du centre vers les extrmits : mdiane, i.c. mdiane, quartile, dcile, valeurs extrmes.

93

Figure 6. Distribution des paramtres structuraux de lensemble des arbres dans les 10 relevs (Ito1 Ito10), n = 1040 arbres (10 x 104);
a) diamtre des troncs (D130);
b) distance au point de relev (paramtre de densit).
Boxplot,

94

du

centre

vers

les

extrmits

mdiane,

i.c.

mdiane,

quartile,

dcile,

valeurs

extrmes.

Planche 1 : a) Futaie canope haute du pimont ouest ; b) Aspect de la fort nuages avec nombreuses bryophytes piphytes et
piphylles ; c) Troue Heliconia psittacorum, fort sommitale ; d) Abondance des lianes dans certains secteurs du versant est.

95

Richesse diversit floristique et ses


variations
Lensemble des observations (relevs quantitatifs et
collectes vue) ont permis le recensement denviron
334 espces arborescentes (voir Annexe III) dont
environ 322 interceptes par les 1098 arbres des relevs (1040 arbres des points quadrats + 58 arbres dominants ajouts) soit 300 espces pour les 1040 arbres
des points quadrats. Ces valeurs sont susceptibles
dvoluer lgrement avec ltude taxinomique de
certains taxa. A titre de comparaison, ltude de Mori
& Boom (1987) Sal, distant de 68_km du mont
Itoup, avait recens 269 espces pour 800 arbres le
long dun gradient altitudinal beaucoup plus faible,
mais incluant des contrastes daphiques et pour un
relev plus compact (4 km). Lindice alpha de Fisher
pour lensemble des relevs points quadrats du mont
Itoup atteint 141, ce qui constitue un niveau relativement lev de diversit des espces arborescentes
pour la Guyane, comparable au niveau 155,5 obtenu
pour le relev de Mori & Boom (1987) Sal (ter
Steege et al., 2000). Compte tenu du dispositif clat
mis en place au mont Itoup, sur des gradients cologiques assez importants (daphique et altitudinal),
cette valeur globale doit tre relativise et dtaille en
fonction des situations (milieu et type de vgtation).
Afin dclairer cet aspect, nous comparons les courbes
daccumulation des espces dans les dix transects
dItoup celles obtenues dans trois autres sites du
centre et du nord de la Guyane : Piste de St Elie et
Dorlin-Yaou (donnes IRDAMAP) ; Sal (donnes
Mori et Boom (1987), Mori com. pers). La comparaison est mene en ramenant les valeurs obtenues
Itoup celles dun dispositif point-quadrat classique
(n = 4) en calculant la moyenne des cumuls obtenus
pour les deux sries emboites dItoup (soit une srie
pour les numros dindividus pairs et une pour les
numros impairs). La mme opration est rpte en
concatnant les relevs par secteurs : secteur ouest-bas
(Ito3, 4, 7, 8) ; secteur ouest-haut plus Sommet (Ito1,
2, 5, 6) ; secteur est (Ito9, 10). A lchelle des relevs,
les courbes daccumulation informent sur la richesse
locale du mlange despces, pour 104 arbres. On
constate pour les dix transects une forte amplitude de
variation des niveaux atteints par ces courbes (Fig.
7a). Le milieu (croupe draine versus talweg humide)
nopre aucune sgrgation entre relevs du point de
vue du nombre despces rencontres. Cependant,
apparaissent nettement deux groupes de courbes qui
sparent les relevs en fonction de la zone altitudinale
o ils ont t raliss, lexception du relev Ito10.
Les relevs du plateau sommital (Ito5 & 6), du haut de
versant ouest (Ito1 & 2) ainsi que du haut de versant
est en situation draine (Ito9) sont remarquablement
diversifis, avec des niveaux daccumulation
despces comparables ceux obtenus dans le Centre
et le nord de la Guyane. Les indices alpha de Fisher
pour ces cinq relevs, de 13 18,5, stablissent entre
les valeurs 12 et 27,5 trouves pour les sites de com-

96

paraison. Au contraire, les relevs du bas de versant


ouest (altitude infrieure 500 m) ainsi que celui de
talweg en haut de versant est (Ito10), montrent des
cumuls despces nettement moindres et toujours trs
infrieurs aux bornes minima des relevs du Centre et
du nord (Fig. 7a) avec un indice alpha de Fisher
stablissant entre 8,5 et 10 puis 6 et 7,5 pour les niveaux altitudinaux 400-500 m et 200-300 m respectivement. Cette tendance une moindre diversit
semble donc saccentuer en direction du bas de versant ouest. A lchelle des secteurs, lchantillonnage
clat favorise lenregistrement dun niveau plus lev
de diversit. Nous comparons (Fig. 7b) les trois
courbes daccumulation obtenues Itoup (ouest Bas ;
ouest Haut - Sommet ; est Haut) avec celles des sites
du centre et du nord de la Guyane. Pour ces sites de
comparaison, piste de St Elie et Sal sont constitus
par un relev en continu alors que Dorlin rsulte de la
concatnation de plusieurs relevs distants. Les valeurs de ce dernier site sont donc plus mme dtre
compares celles obtenues Itoup. On remarque
(Fig. 7b), que les valeurs du secteur ouest Haut Sommet se situent dans la gamme des observations
faites Sal et piste de St.-Elie, tout comme celles
du site de comparaison de Dorlin. Les valeurs du secteur de pimont (ouest Bas) sont nettement infrieures
la gamme des valeurs obtenues dans les sites de
comparaison. Le secteur est Haut qui nest document
que par 2 relevs se situe en position intermdiaire
entre les deux autres secteurs dItoup. Malgr
lchantillonnage clat et un gradient cologique
assez important (dnivel et daphisme) le secteur
ouest Haut Sommet montre une richesse en espce
se situant dans les niveaux bas des sites de comparaison. Le secteur ouest Bas est lui nettement moins riche
en espce. On peut conclure que la richesse en espces
des communauts darbres du mont Itoup varie fortement en fonction des secteurs, ce qui confirme le
contraste mis en vidence lchelle des relevs. La
richesse en espces arborescentes est relativement
leve aux abords du sommet alors quelle est remarquablement basse aux abords du pimont ouest. Dune
manire gnrale, cette relative faiblesse de la richesse-diversit basse altitude du versant ouest
saccorde parfaitement avec le contexte floristique et
les communauts vgtales du sud-Guyane (Sabatier
et al., 2008). Un point de comparaison peut tre trouv
au Surinam o un inventaire quantitatif de 6 parcelles
isoles, de 1ha chacune, au sommet et pimont des
mont Nassau, a rpertori 336 espces pour 3 448
arbres inventoris (Banki et al., 2003). Cette fois la
flore du mont Itoup apparat plus riche, conformment au modle gnral tabli dans le cadre du rseau
Amazon Tree Diversity Network (ATDN) qui montre
que la Guyane est un relatif hot spot de diversit (ter
Steege et al., 2003 ; Stropp et al., 2009). Toutefois, en
aucun cas linventaire floristique du mont Itoup ne
doit tre tenu pour complet !

Figure 7. Courbes daccumulation des espces en fonction du nombre de points relevs ;


a) par sections de 13 points (240 m), les barres verticales donnent min et max observs pour trois sites du Centre et du nord (Sal ; Dorlin-Yaou ; Piste de St Elie) ;
b) par section de 1020 m ou quivalent aprs regroupement des donnes par secteur (Itoup).

97

Compositions floristiques locales et


leurs variations
Une premire approche des variations floristiques est
mene pour le niveau famille lchelle des secteurs
dfinis plus haut. Les 15 premires familles par rang
dabondances dcroissantes sont donnes pour
lensemble des relevs (Fig. 8a). Les abondances de
ces 15 familles et de toutes celles qui se situent dans
les 15 premires de chaque secteur sont utilises pour
ce comparatif par secteur (Fig. 8b) On constate que le
spectre global des abondances par familles rapproche
lensemble des relevs du mont Itoup des forts du
sud de la Guyane plutt que de celles du nord (Engel
et al. 2008), avec notamment dans les cinq premires
familles, la prsence des Meliaceae et Burseraceae.
Dautre part ces spectres varient fortement en fonction
des secteurs. Le pimont ouest (ouest Bas) est plus
proche encore des forts du sud alors que le secteur
Sommet et ouest Haut se caractrise par les Myrtaceae, une possible composante submontagnarde, et par
les Mimosaceae, certainement une composante hliophile et pionnire. La plus forte dominance locale
semble tre celle de Xylopia surinamensis, un arbre de
strate infrieure, trs frquent en situation bien draine
de la zone altitudinale 200-300 m (relev Ito7), prsent galement dans la zone 400-500 m (relev 3). Sur
le versant est dans la zone altitudinale 600-700 m,
Elizabetha princeps atteint galement de fortes densits (relevs 9 et 10). On notera galement basse
altitude et en canope cette fois, les fortes densits de
Tetragastris altissima, Carapa guianensis, Chimarrhis
microcarpa, Chrysophyllum lucentifolium et dans la
zone altitudinale 400-500 m Chrysophyllum lucentifolium, Minquartia guianensis et plus occasionnellement
Virola kwatae, Qualea rosea. Ds la zone altitudinale
600-700 m il semble que la dominance dun petit
nombre despces soit moindre, lexception notable
des relevs en talweg (Ito2) et en bas-fond du plateau
sommital (Ito5) o une espce non encore connue de
Guyane (Ruptiliocarpon sp. 1 aff. caracolito), appartenant une famille galement non encore rpertorie
de Guyane (Lepidobotryaceae), montre une distribution en plaque associe aux conditions daphiques des
sols hydromorphes. Sur le versant ouest, les grands
arbres de la canope et les mergents avoisinent aisment des hauteurs de 60 m et peuvent quelquefois
dpasser 65_m ; ce sont des Martiodendron parviflorum (Leguminosae-Caesalpinioideae), Chrysophyllum
lucentifolium (Sapotaceae), Bagassa guianensis, Ficus
insipida (Moraceae) et Virola kwatae (Myristicaceae)
classiques des forts canope haute comme Sal ou
dans quelques secteurs des Nouragues. Lun de ces

grands mergents est une espce jusquici non rpertorie de Guyane, du genre Zinowiewia (Celastraceae).
On retrouve plusieurs de ces mergents sur le versant
est, notamment Zinowiewia qui y est relativement
abondant, mais ils dpassent rarement 50_m de hauteur. En zone sommitale les mergents peuvent dpasser 40 m de hauteur. Ce sont souvent des Parkia nitida
(Leguminosae-Mimosoideae) mais aussi des Sterculia
spp. (Sterculiaceae). Un aspect trs intressant de la
composition floristique est de considrer le rle fonctionnel des espces. De ce point de vue, nous nous
sommes intresss au statut des espces par rapport
la dynamique de la vgtation aprs ouverture de la
canope, particulirement aux espces qui colonisent
les troues, appeles pionnires. Ce statut a t dtermin sur la base de la liste publie par Molino & Sabatier (2001), amende pour quelques espces telles
que Xylopia surinamensis qui doit tre considre
comme une espce de strate infrieure et Sapium paucinervium qui est une pionnire. Les individus
despces pionnires ont t comptabiliss pour
chaque relev (Table 1). On constate une proportion
de pionnires nettement plus leve sur le plateau
sommital (Ito5 et Ito6) avec une tendance ce que
cette valeur soit plus leve vers le sommet et sur le
versant est et faible vers le pimont.

Table 1. Pourcentage darbres despces pionnires dans les relevs.

98

Figure 8. Spectre des abondances par familles :


a) ensemble des relevs ;
b) par secteurs.
Aux quinze premires familles par rang dabondances globales dcroissantes (liste Fig. 8a) sont ajoutes celles galement classes dans ce
groupe pour chaque secteur (listes complmentaires Fig. 8b).

99

Analyse du tableau dabondances


des espces
A partir du tableau des abondances par relev a t
calcule une matrice de similarit suivant lindice de
Kulczynski5, dont la particularit est de travailler sur
les abondances des espces et non seulement sur les
prsence-absence comme le fait lindice de Srensen.
Cette analyse exploratoire a t poursuivie par une
NMDS6 (Non Metric Multidimensional Scaling).
Cette analyse (Fig. 9) montre sur laxe 1 une opposition de versant associe un effet distance et sur laxe
2 une opposition altitudinale. Cette dernire tant
moins prononce pour les situations draines que pour
les situations humides, pour lesquelles ce contraste se
double dune proximit entre le sommet et le versant
ouest. Deux ensembles de situations humides se distinguent donc ; elles correspondent la prsence (Ito2
& Ito5) ou labsence (autres relevs) du Ruptiliocarpon. A ce stade il est difficile daffirmer que leffet de
versant est d un contraste cologique, cependant le
contraste structural voqu plus haut pour la hauteur
de canope plaide en ce sens.
La composition floristique est galement examine du
point de vue des espces absentes, notamment celles
qui, de par leurs abondances marquent les communauts vgtales du sud- Guyane (Sabatier et al., 2008).
De ce point de vue, la faible abondance et la faible
diversit des palmiers (Arecaceae) est remarquable.
Labsence dAstrocaryum sciophilum est une caractristique rapprochant le site Itoup de sites tudis
louest et au nord (monts dArawa dans la pnplaine
du sud et massif des Emerillons situ 20_km au
nord, respectivement) et le distinguant nettement de
sites sub-montagnards du sud et du centre de la
Guyane (Tumuc-Humac Borne 1 et Sal,

respectivement) o ce palmier est localement trs


abondant en sous-bois. Sont galement remarquables
labsence totale de lApocynaceae Geissospermum
argenteum, trs frquente dans les sites du sudGuyane basse altitude, ou, au niveau familial, des
Humiriaceae, ainsi que la faible abondance de certains
taxons tels que les Tachigali, gnralement frquents
dans les sites du sud-Guyane o les individus morts
aprs fructification donnent une physionomie particulire la canope (voir fort aux arbres morts ,
Sabatier et al., 2008). Ce dernier point est confronter
aux observations apparemment contradictoires des
relevs de lONF dont lintrt est dtre plus tendus
et donc de pouvoir capter des variations lies aux
structures de population en agrgats et plaques.

Liste floristique des arbres du site


mont Itoup
Une liste floristique des arbres Angiospermes du mont
Itoup (Annexe III) a t compile partir de
lensemble des observations 2010 de lquipe
arbres et des donnes de la base Aublet2 (Herbier
IRD de Guyane, UMRAMAP) dans laquelle on ne
trouve pour ce site que les collectes ralises par J.-J.
de Granville et G. Cremers lors de leur prospection
botanique de 1980. Il conviendra donc dy ajouter les
taxa issus des collectes et observations des autres
quipes. Cette liste floristique des arbres fait passer le
nombre despces arborescentes connues du mont
Itoup de 38 environ 350 taxa, soit dun ordre de
grandeur de 1 10. Une vingtaine de taxa collects en
1980 nont pas t retrouvs en 2010 ou nont pas
encore t identifis au sein des collections de 2010.
Une annotation titre exploratoire de la liste floristique des arbres (Annexe III) indiquant la frquence
de rencontre des espces en Guyane a t ralise
comme suit :
- F, taxon frquent avec au moins une vingtaine de
collections l'Herbier de Guyane (CAY) et /ou au
moins une vingtaine de sites connus en Guyane (des
nuances seraient apporter car cette gamme de frquence reste large) ;
- AF, taxon assez frquent avec plus de 10 mais
moins de 20 collections CAY ou plus de 10 moins
de 20 sites connus en Guyane (un fort effet rgional
pouvant exister, des prcisions seraient galement
apporter). ;

Figure 9. Analyse par Non Metric Multidimensional scaling


(NMDS), aprs calcul de lindice de similarit de Kulczynski, du
tableau des abondances des espces par relev.
5
6

R version 2.13.0 2011 The R Foundation for Statistical Computing, library VEGAN.
R version 2.13.0 2011 The R Foundation for Statistical Computing, library ECODIST.

100

- AR, taxon assez rare avec moins de 10 collections


CAY ou moins de 10 sites connus en Guyane ;
- R, taxon rare avec moins de 5 collections CAY
ou moins de 5 sites connus en Guyane (un lien environnemental parfois fort serait prciser).
De plus divers taxa apparaissent pour la premire fois
dans les relevs et prospections botaniques de Guyane,
ils sont nots premire collecte . Il sagit le plus
souvent de morphotaxa et donc dune information
confirmer et souvent complter par ltude de nouveau matriel documentant mieux le taxon (matriel
floral gnralement manquant).
Cette annotation permet de voir que le site est remarquable par la prsence dun nombre important
despces rares (S = 21) ou assez rares (S = 26) ainsi
que par le nombre de taxa collects pour la premire
fois (S = 23).

Dcouvertes botaniques et espces remarquables


Au moins une vingtaine despces darbres semblent
tre des nouveauts pour la flore de Guyane, ce qui
serait remarquable compte tenu du nombre relativement modeste despces recenses (moins de 350). Il
faut toutefois rester prudent jusqu ce que le matriel
ait t compltement tudi. Ce qui pour de nombreuses espces ncessitera dattendre de nouvelles
collectes susceptibles de fournir du matriel floral.
Nous en donnons ci-aprs quelques exemples caractristiques. Plusieurs espces ne sont pour linstant identifies quau genre ou la famille par manque de matriel fertile.
Jusquici, tous les inventaires quantitatifs raliss par
notre quipe (pratiquement sans exception !), au nord
comme au sud de la Guyane ont t loccasion de
mettre en vidence de nouvelles espces pour la flore
de Guyane. Il semble toutefois que les collectes ralises durant la mission Itoup soient particulirement
porteuses de nouveauts. Lamplitude cologique
couverte par les relevs pourrait expliquer cette particularit ; mais voir galement Conclusions et discussion pour une possible spcificit du site.
Quatre espces nouvelles pour la flore de Guyane sont
particulirement intressantes mentionner car elles
sont relativement abondantes (parfois plusieurs dizaines dindividus vus) et semblent avoir des caractristiques cologiques marques et remarquables. Ces
espces font lobjet dune tude plus pousse que les
autres dans les commentaires par espces ainsi que
dune cartographie des populations observes ;
voir ci-dessous.

Nouvelles espces pour la flore de


Guyane
Les identifications donnes ici sont confirmer par les
spcialistes des familles botaniques concernes, auxquels un spcimen a t systmatiquement adress via
le rseau de lHerbier IRD de Guyane.
Cybianthus sp. 3 (Primulaceae (ex Myrsinaceae)) voir
Planche 2.
Quatre individus collects dans les relevs Ito2 (versant ouest), Ito5 et Ito6 (plateau sommital) ont t
rattachs ce nouveau morphotaxon car ils ne correspondent aucun taxon actuellement connu de Guyane.
Il sagit pour lun deux (Ito5- B8, collection Sabatier
& Molino 5695) dun arbre de canope de grande
dimension, atteignant une trentaine de m de hauteur
pour un tronc de 45 cm de diamtre ; ce qui est exceptionnel dans la famille des Myrsinaceae, si cette identification est confirme (incertitude lie au matriel
strile). En effet, les 12 espces de Cybianthus recenses ce jour de Guyane sont soit des arbres de petite
dimension et de strate infrieure, soit des arbrisseaux
du sous-bois. Les trois autres individus (dont Ito2-J5,
Molino & Sabatier 2772) ont pu tre rattachs ce
premier aprs tude botanique. De par leur stade de
dveloppement et leur statut darbre surcim, ils diffrent notablement par leur morphologie foliaire (limbe
non coriace et nettement plus grand) mais possdent
les mmes caractristiques de nervation et dindument
cailleux. Ce Cybianthus est donc prsent dans la
partie sommitale du mont Itoup partir de 650 m
daltitude ; il pourrait reprsenter une espce associe
aux forts daltitude.
Le genre Cybianthus compte prs de 170 espces avec
une rpartition notropicale (Agostini, 1980 ; Pipoly
& Ricketson, 2006). Nos investigations ne nous ont
pas permis de rattacher les spcimens une espce
connue, cependant du matriel fertile est indispensable
pour poursuivre ce travail.
Daphnopsis sp. 1 (Thymelaeaceae), voir Planche 2 et
Fig. 10.
Il sagit dun arbre de strate infrieure (hauteur maximale 25m), collect en fruits immatures, relativement
frquent (une dizaine dindividus vus) entre les altitudes 400 et 700 m sur chacun des versants ; non vu
en zone sommitale. Cette espce est notamment caractrise par une corce interne fibreuse mucilage
visqueux. Le genre Daphnopsis comporte une cinquantaine despces notropicales. Il nest connu de
Guyane que par des dcouvertes assez rcentes (Barringer & Pruski, 2005) de deux arbrisseaux du sousbois, Daphnopsis granitica Pruski & Barringer et
Daphnopsis granvillei Barringer. Le premier semble
typique des inselbergs granitiques alors que le second
a t collect sur diffrents reliefs non granitiques
partir de 300 m daltitude, notamment en Guyane
montagne Cacao (bassin de la Comt) et au mont
Galbao et au Surinam au mont Nassau, un plateau
tabulaire
bauxitique
du
nord-est.

101

Planche 2 : a) Cybianthus sp. 3, rameau ; b-d) Daphnopsis sp. 1, b : rameau, c : bases foliaires, d : fruits

102

La prsence au mont Itoup de D. granvillei est confirme par plusieurs collectes lors de la prsente tude
dont une sur le versant est (Molino & Sabatier 2774).
Un seul autre genre avec une espce, arbustive galement, (Schoenobiblus daphnoides Mart.) reprsente la
famille des Thymelaeaceae en Guyane. Daphnopsis
sp. 1 est donc la premire espce arborescente de ce
genre et de cette famille rpertorie de Guyane et des
pays limitrophes. On trouve diverses espces arborescentes de Daphnopsis en Amrique du Sud (Brsil,
Equateur, Prou, Vnzuela, Guyana), notamment
dans les rgions montagneuses ou de pimont, parfois
basse altitude, mais elles sont inconnues de lest des
Guyanes (Surinam, Guyane, Amap).
Trois collectes fertiles avec fruits immatures (Sabatier
et Molino 5672, 5684 et 5697) ont permis
lidentification du genre grce lornementation de
lendocarpe, la placentation et la structure de
linflorescence. Lobservation de fruits possdant un
second carpelle atrophi et quelques fois de fruits
bicarpells nous a incits considrer que nous avions
bien l un reprsentant du genre Daphnopsis. En effet
lexistence dun second carpelle non fertile est discute par Nevling (1959). Il sagirait dun caractre
ancestral dans le genre. La morphologie foliaire, notamment limbe glabre, oblancol acumin nervation
secondaire brochidodrome, ptiole allong base
genouille et celle des inflorescences et fruits nont
pas permis de rapprocher Daphnopsis sp. 1 dune
espce actuellement connue. Il existe cependant des
ressemblances avec D. peruviensis (Domke) J.F.
Macbr., une espce du pimont andin. Par contre, D.
americana subsp. caribaea (Griseb.) Nevling, arbre de
strate infrieure prsent en Guyane vnzulienne
relativement basse altitude (400-500 m) diffre notamment par sa pilosit (axes et face inf. des limbes
pubrulents). Ltude botanique complte de cette
espce est donc ncessaire. Elle ne pourra cependant
tre ralise quaprs de nouvelles collectes qui permettraient de documenter les fleurs (vraisemblablement lespce est dioque ce qui obligera rechercher
des pieds males et femelles), organes essentiels pour le
diagnostic botanique au sein de ce genre, de mme
que pour le rattachement dfinitif de nos collectes au
genre Daphnopsis. Il est probable que la floraison ait
eu lieu peu de temps avant nos collectes car de trs
jeunes ovaires (0,3 cm de diamtre) non lignifis ont
t observs. Daphnopsis sp. 1 est vraisemblablement
une espce de la fort daltitude o elle occupe la
strate infrieure des peuplements bien structurs ; elle
na pas t trouve sur le plateau sommital (Fig. 10 a),
peut-tre en raison de sa moindre frquence dans les
forts ouvertes (perturbation lie au vent) ?
-

Lauraceae

raceae sp. 18, Lauraceae sp. 19, Ocotea sp. 15, cf.
Endlicheria sp. (Lauraceae)
Lidentification au genre et fortiori lespce est
souvent dlicate chez les Lauraceae partir de matriel strile. Plusieurs espces de Lauraceae ont t
rcoltes dont certaines semblent peu ou pas connues ;
seule celle mentionne ici sous le nom de cf. Endlicheria sp. (collection Molino & Sabatier 2803) possde des caractres suffisamment tranchs, notamment
de grands limbes gaufrs base auricule, pour tre
identifie comme une espce non encore recense de
Guyane. De plus, sil elle appartient bien au genre
Endlicheria, cest trs probablement une espce nouvelle, car elle ne correspond aucune de celles dj
dcrites dans le genre.
Pouteria sp. 32 (Sapotaceae), voir Planche 3 et Fig 10.
Il sagit dun arbre de canope ou mergent dont certains individus avoisinent 60 m de haut. Lespce,
documente par un herbier avec fruits (Sabatier &
Molino 5717), se caractrise par un ensemble assez
net de caractres distinctifs : limbe trs lgrement
argent la face infrieure et des fruits une seule
graine de grande taille (3,3 x 2,7 cm). Fruit typiques
du syndrome de dissmination par les primates (couleur externe jaune, exocarpe indhiscent formant une
enveloppe de protection rsistante, graine enveloppe
dune pulpe sucre). Deux populations ont t trouves au niveau des relev Ito8 (versant ouest, alt 250
m) et Ito4 (versant ouest, alt 450 m). Ces deux relevs
se trouvent en situation de talweg humide et relativement encaisss. Quelques individus ont t vus sur les
pentes mais aucun dans les relevs en situation de
croupe. Lespce pourrait tre associe ces talwegs ?
Ce secteur du versant ouest porte de vastes zones
forestires de type futaie canope haute ou trs haute
(nombreux mergents avoisinant 60 m de haut).
Lespce pourrait tre associe ce type forestier qui
est particulirement prsent sur le versant et le pimont ouest du mont Itoup. Du matriel floral est
ncessaire pour caractriser cette espce.
-

Myrtaceae

La famille des Myrtaceae est avec les Lauraceae lune


des plus riches et complexes de la flore de Guyane
ainsi que des moins bien connues. Il faut sattendre
ce que de nombreuses espces soient dcrites dans le
futur. De nombreuses collectes de la mission Itoup
mars 2010 se sont avres tre des nouveauts pour la
flore de la Guyane, ce stade de notre analyse. Plusieurs, suffisamment types, ont donn lieu la cration dun morphotaxon. On remarquera que ces Myrtaceae ont souvent t collectes en zone sommitale
(voir galement plus loin espces remarquables).

La famille des Lauraceae est largement reprsente en


Guyane. Plusieurs collectes semblent reprsenter des
espces non encore recenses en Guyane : cf. Endlicheria sp. , Endlicheria sp. 3, Lauraceae sp. 17, Lau-

103

Eugenia sp. 14 est un arbre de strate infrieure qui


semble tre limit au plateau sommital (4 individus en
Ito5 et Ito6 dont Molino & Sabatier 2822). Il na pas
t observ fertile.
Eugenia sp. 15 est un arbre de strate infrieure rencontr deux reprises dans le relev Ito3 (versant ouest),
lun des chantillons tant florifre (Ito3-I7, Molino &
Sabatier 2753), lespce pourra tre tudie par les
spcialistes de cette famille.
Eugenia sp. 16 est un petit arbre du sous-bois, collect
sur le versant ouest (Ito3-B5, Molino & Sabatier
2785).
Eugenia sp. 22 est un arbre de strate infrieure collect strile sur le plateau sommital (Ito5-A3, Molino &
Sabatier 2806).
Myrtaceae sp. 26 est un arbre de canope collect
strile sur le plateau sommital (Ito5-C4, Molino &
Sabatier 2779)
Quiina cf. florida Tul. (Ochnaceae (ex Quiinaceae))
voir Planche 5.
Il sagit dun petit arbre frquent de strate infrieure et
de sous-bois, dpassant rarement un D130 de 10cm. Il
a t rencontr entre 400 et 700 m daltitude. Lespce
laquelle nous le rattachons est connue du Brsil,
Prou, Equateur et Vnzuela basse altitude (100200 m daprs Flora of the Venezuelan Guayana),
mais ntait pas rpertorie des Guyanes. Elle se distingue notamment par sa morphologie foliaire, les
stipules troites, la partie basale du pdicelle relativement allonge. Une comparaison de la microstructure
foliaire entre nos chantillons et des spcimens types
ou valids de Q. florida et Q. rhytidopus Tul. qui en
est proche na pu tre effectue et simpose pour valider notre identification.
Ruptiliocarpon sp. 1 aff. caracolito (Lepidobotryaceae) voir Planche 4 et Fig. 10.
Premire collecte pour la famille, le genre et lespce
en Guyane.
Le genre Ruptiliocarpon, ainsi que la seule espce qui
le reprsente ce jour (Ruptiliocarpon caracolito
Hammel & N. Zamora), a t dcrit relativement rcemment (1993). Il a t rattach la famille des Lepidobotryaceae, dont il est le seul reprsentant connu
en Amrique. Cette famille nest reprsente que par
un seul autre genre, en Afrique de louest (Lepidobotrys). Ruptiliocarpon caracolito prsente un bois lger
de bonne qualit et on note la prsence de composs
chimiques intressants dans lcorce (Hammel &
Zamora, 1993). Les auteurs, constatent pour cette
espce une distribution gographique disperse et
clate, en Amrique centrale sur la faade Pacifique
(Costa Rica, Colombie) et pour le genre des collectes
striles en Amazonie sensu lato (Prou, Surinam).
Pour ces collectes du nord-est du Surinam (mont Nassau) et du Prou (rgion dIquitos), Hammel & Zamo-

104

ra (1993) sont rservs quand au rattachement


lespce R. caracolito en raison de diffrences morphologiques (non dcrites) et suggrent lexistence
dune autre espce : ... but the observed variation
suggests that more than one species may be involved
alors que dautres botanistes ont rattach ces spcimens lespce connue (determinavit de Liesner par
ex). De nouveau spcimens ont t collects de louest
amazonien : Colombie, Equateur, Prou, mais ce
jour aucun spcimen florifre na t collect pour la
rgion amazonienne.
Les chantillons rcolts au mont Itoup (Molino &
Sabatier 2846 ; Sabatier & Molino 5685, 5689, 5691,
5726 ; Tostain 5972) prsentent de nombreuses ressemblances morphologiques avec la diagnose de R.
caracolito : feuilles unifolioles, limbe base obtuse,
ptiolule articul avec stipelle engainante rapidement
caduque, stipules trs rduites rapidement caduques,
inflorescence aux bractes cailleuses, fruit capsulaire
dhiscence par dchirure, 1 2 graines arilles.
Cependant on peut noter un ensemble de caractres
morphologiques qui pourraient distinguer les spcimens du mont Itoup :
- base du limbe arrondie lgrement corde ;
- limbe entirement glabre ;
- longueur du ptiole galant celle du ptiolule et
souvent plus courte (au lieu de ptiole jusqu 2 fois
plus long que le ptiolule) ;
- nervure primaire plus nettement saillante sur la face
adaxiale ;
- stipules deltodes et stipelle plus courte Au mont
Itoup, cet arbre a t trouv dans quatre localits
(Fig. 10). Sa prsence a t rvle tout dabord sur le
versant ouest, lors du relev Ito2 dans un talweg formant des poches de faible dclivit avec des sols
ennoys bordant de petits cours deau, puis dans la
zone sommitale, lors du relev Ito5 dans un secteur
fortement hydromorphe (pourtour de la mare) o il est
trs abondant. Par la suite, sa prsence a t releve
galement dans deux autres secteurs du plateau sommital : le grand talweg nord-ouest ainsi quune zone
de bas-fond au nord-est du plateau parcourue par un
petit cours deau alimentant une cascade sur le flanc
est. Il na pas t enregistr ni vu sur le versant est.
Cependant, il est noter que les trois populations du
plateau se trouvent sur des axes de drainage alimentant le bassin de lOyapock lest des monts Itoup,
alors que la population du relev Ito2 se trouve sur un
coulement alimentant le bassin de lInini louest.
Du point de vue daphique, les deux systmes sont
spars par une ligne de partage des eaux oriente
nord-sud qui nest interrompue qu trs basse altitude
par des zones de flat trs hydromorphes : au nord
une douzaine de kilomtres, entre le massif Itoupmonts Tabulaires et le massif des Emerillons, ainsi
quau sud-ouest une vingtaine de kilomtres.
Ruptiliocarpon sp. 1 forme de petites populations
disjointes, qui se trouvent toujours en situation
dennoiement temporaire, parfois avec prsence du
palmier Euterpe oleracea, typique des bas-fonds hy-

dromorphes en Guyane, et semblent viter les situations o le cours deau devient torrentueux. Cette
caractristique cologique semble tre associe des
potentialits co-physiologiques telles que des racines
formant des arceaux ariens (sortes de pneumatophores genouills au rhytidome rouge vif portant de
nombreuses lenticelles) et une phnologie contretemps de la majorit des espces des forts guyanoamazoniennes, cest dire avec une feuillaison juste
antrieure la grande saison des pluies et non juste
postrieure. Ainsi, alors que durant le mois de mars le
niveau de leau na cess de monter dans la mare
sommitale et les secteurs marcageux o lespce est
prsente, nous avons pu observer, pratiquement chez
tous les individus, de trs nombreuses jeunes pousses
feuilles striles, aux limbes en expansion vert clair
(non anthocyanique). Les photographies ariennes
confirment le caractre relativement exceptionnel de
cette phnologie lchelle de la canope (voir
Planche 5). De nombreuses radicelles ariennes trs
jeunes la base des troncs ont galement t frquemment observes. Les plantules de lespce sont
abondantes dans les secteurs ennoys par une lame
deau de 10 15 cm. Lobservation de deux fruits
matures a montr que les graines sont pourvues dun
arille charnu, rouge-orang, typique dun syndrome de
dissmination ornithochore.
Bien que les caractristiques morphologiques que
nous avons pu examiner ne permettent pas de distinguer nettement nos rcoltes de lespce R. caracolito,
les caractristiques cologiques nous incitent la
prudence quand au rattachement de nos rcoltes
cette espce, do la cration du morphotaxon Ruptiliocarpon sp. 1. En effet, comme mentionn plus haut,
lespce R. caracolito nest formellement connue que
dAmrique centrale et du sud (Colombie), sur la
faade ouest du continent. Elle est mentionne comme
frquente au Costa Rica basse altitude (0-400 m) sur
les pentes aux sols bien drains de la rgion de Golfito
et de la pninsule dOsa (Hammel & Zamora), ce qui
contraste fortement avec nos observations du mont
Itoup (voir ci-aprs). Pour les spcimens non formellement reconnus par Hammel et Zamora comme appartenant lespce R. caracolito, nous avons recherch des informations sur les conditions cologiques.
Le site de collecte au Surinam se trouve dans les
monts Nassau o des forts se dveloppent sur des
plateaux latritiques relativement levs (Banki et al.,
2003) ; une situation o les mares et sols hydromorphes sont gnralement frquents (obs. pers.).
Cependant la prfrence cologique de lespce nest
pas prcise par ces auteurs. Les notes de terrain et/ou
les images de plusieurs chantillons du Prou,
dEquateur et de Colombie ont pu tre examines sur
les sites du New York Botanical Garden (Virtual Herbarium), du Field Museum of Natural History et de
lHerbario Amaznico Colombiano. La collection T.
B. Croat 18606 (Prou, Loreto, 7 km southwest of
Iquitos) ainsi que Vasquez et Jaramillo 4812 (Prou,
Loreto, Requena) sont respectivement notes

Swampy forest et bosque inundable alors que les


spcimens Gentry et al. 29268 (Prou, Maynas, rio
Tamshiyacu) et Guevara 600 (Equateur, Parc National
Sumaco-Napo- Galeras) sont nots respectivement
non inondated forest on lateritic soil et tierra
firme.
Au mont Itoup, la rpartition spatiale des individus a
pu tre documente plus compltement grce aux
photos ariennes prises par O. Tostain lors dun survol
en cours de mission faisant apparatre les populations
de Ruptiliocarpon en vert clair dans les zones basses
et les talwegs du plateau. Un second survol de prise de
vues a pu tre programm le jour du dpart et nous a
permis de dcouvrir que la population la plus importante se situe dans la zone de source du cours deau
situ au nord-est du plateau sommital, qui alimente
une crique du versant est. Ceci suggre que labsence
de lespce constate dans le relev sur ce versant ne
serait pas due une limitation par la dispersion mais
plus probablement par les conditions cologiques
moins favorables de ce versant, notamment des cours
deau plus torrentueux ? Deux individus fertiles seulement ont pu tre trouvs sur plusieurs dizaines
dindividus examins et nous ont fourni les critres
didentification. Lun dans le talweg sud-ouest de la
zone sommitale (collection Sabatier & Molino 5726) a
permis de documenter les inflorescences jeunes et le
mode dtablissement des rameaux fertiles avec une
disposition des inflorescences en apparence oppose
aux feuilles (et non axillaire de celles-ci). Lautre, un
individu fructifre, a t dcouvert par O. Tostain en
bordure de la mare (collections Tostain OT-5972;
Molino & Sabatier 2846).
Compte tenu de lincertitude taxinomique, il y aurait
donc un grand intrt collecter du matriel floral de
cette espce.
Terminalia sp. 1 (Combretaceae) Arbre de canope
dont 3 individus ont t vus sur le versant ouest vers
750m et le plateau sommital. Lindividu Ito1-K4 (Sabatier & Molino 5682) tait en fruit. Daprs des observations de fruits similaires (ailes trs dveloppes,
pas darte sur lakne), effectues basse altitude
ailleurs en Guyane, lespce pourrait ne pas tre infode aux reliefs les plus prononcs de la rgion.
Du matriel floral est ncessaire pour caractriser cette
espce.
Zinowiewia aymardii Steyerm. (Celastraceae), voir
Planche 4 et Fig. 10.
Premire collecte pour le genre et lespce en Guyane.
Le genre Zinowiewia compte moins dune vingtaine
despces connues, distribues en Amrique centrale
et du sud (du sud Mexique lEquateur). Les Zinowiewia sont souvent des arbres de la fort nuages et
se rencontrent entre 250 m et 3500 m daltitude.
Z. australis Lundell se rapproche des spcimens du
mont Itoup par sa stature de grand arbre de canope
atteignant 40 m de haut en Equateur, les inflorescences subsessiles et le tronc canalicul (Jorgensen &
Ulloa, 1994) mais la description faite par ses auteurs

105

pour les collectes dEquateur diffre de notre matriel


par la nervation primaire imprime au lieu de saillante.
Cependant, dans la description originale de lespce,
Lundell (1938) note une nervure primaire en relief
face suprieure la base du limbe. Il note galement le
nom vernaculaire utilis au Venezuela (canalete) qui
se rapporte laspect du tronc. Cuatrecasas (1962)
note pour cette espce quen raison de la forte variabilit de la morphologie foliaire, elle est considrer
comme une forme grande feuilles de lespce Z.
integerrima Turcz.. Une autre espce, Z. aymardii
Steyerm., dcrite et recense de Guyane vnzulienne (Etats de Bolivar et Delta Amauro) se rapproche fortement des spcimens collects. Daprs
Steyermark (1988), elle est troitement apparente Z.
australis dont elle ne diffre que par les graines plus
courtes, les samares plus troites, les inflorescences
aux axes plus longs et aux fleurs plus nombreuses, les
bases foliaires moins longuement dcurrentes, un
ensemble de caractres correspondant bien notre
matriel. En Guyane vnzulienne, cette espce se
rencontre entre 300 et 1000 m daltitude.
Les caractres distinctifs donns par Steyermark permettent donc didentifier les spcimens du mont Itoup comme Z. aymardii. Dans ltat actuel de nos connaissances, cette espce serait endmique des Guyanes
et aurait donc une distribution disjointe entre lest et
louest des Guyanes.
Cet arbre a t trouv pour la premire fois dans le
relev Ito2 et proximit du camp (Sabatier & Molino
5692) ltat strile. Par la suite, lespce a pu tre
identifie vue sur le terrain grce aux caractristiques du tronc et du feuillage. Elle semble prsente
partir de 400 m daltitude et jusquau sommet sur les
deux versants (Fig. 10). Le relev 9 (versant est) intercepte plusieurs gros sujets. Il semble que lespce
vite les zones trop mouilleuses des talwegs et basfonds et quelle soit moins frquente sur le plateau
sommital ; peut tre en raison de la situation trs venteuse ? Plusieurs des individus observs dpassent 50
m de hauteur et sont des mergents, le plus grand
mesur dans les relevs atteint 48m. Un individu fertile a t dcouvert proximit du relev Ito3 environ 400 m daltitude sur le versant ouest et un second
en aval du relev Ito1. Compte tenu des observations
faites
au

106

Vnzuela il pourrait quasiment sagir l de laltitude


infrieure de sa distribution. Aucune observation de
lespce na t faite plus basse altitude. Quelques
autres individus fertiles ont t vus alors que la majorit des individus observs (environ 25) taient striles. La collecte de matriel fertile hors des relevs
(Sabatier & Molino 5701 ; Tostain 5631) a permis
didentifier la famille des Celastraceae daprs les
caractristiques florales, et le genre Zinowiewia par la
prsence de fruits en samare. Les Zinowiewia sont
connus pour tre des espces frquentes dans les secteurs de forts nuages dans louest du continent sud
amricain. Indniablement, cette espce semble tre
un bon marqueur du biome forestier de montagne.

Planche 3 : a-b) cf Endlicheria sp. , a : rameau, b : base du limbe auricule ; c-e) Pouteria sp. 32, c : arbre mergent, d : rameau, e : face
infrieure des limbes.

107

Planche 4 : a-c) Ruptiliocarpon sp. 1, a : base du tronc, b : rameau avec jeunes inflorescences, c : fruits ; d-f) Zinowiewia aymardii, a : base
du tronc, b : rameau fructifre, c : fruits. Echelle : 20 cm par graduation.

108

Figure 10. Carte des populations observes pour quatre des espces dcouvertes, dont labondance est dau moins une dizaine dindividus
observs : a) Daphnopsis sp. 1 ; b) Pouteria sp. 32 ; c) Ruptiliocarpon sp. 1 ; d) Zinowiewia aymardii.

109

Planche 5 : a) Aspect de la fort daltitude vue depuis une cambrouse, layon D 2000 m ; b) Agrgat de Ruptiliocarpon sp. 1, dont les frondaisons claires sont dues de jeunes pousses feuilles ; c) Abarema sp. 1, rameau fructifre ; d) Bauhinia eilertsii, rameau ; e) Caryodendron amazonicum , fruits et graines ; f) Garcinia macrophylla, fruits et graines ; g) Quiina cf. florida, rameau fructifre ; Vigna caracalla,
axe florifre.

110

Autres espces remarquables


Abarema sp. 1 (Leguminosae-Mimosoidae) est un
arbre de canope gousses contortes comme celles
dA. curvicarpa. Il est collect pour la deuxime fois
en Guyane; la premire fois basse altitude, CentreGuyane.
Caryodendron amazonicum Ducke (Euphorbiaceae)
voir Planche 5.
Une population assez importante de cette espce a t
trouve dans la zone altitudinale 600-700 m au niveau
du camp et de la DZ. Un seul individu fertile (fruits) a
t vu sur plusieurs dizaines dindividus prsents
(collection Sabatier & Molino 5680). Notre collecte
documente une quatrime station de Guyane pour
cette espce prcdemment rcolte mont Trinit,
mont Tortues et mont de Kaw. Le cas de cette espce
est reprsentatif de plusieurs autres espces peu documentes telles que Bauhinia eilertsii Pulle ou Garcinia macrophylla Mart., voir Planche 5.
Couepia elata Ducke (Chrysobalanaceae) est un arbre
de canope grosses diaspores, collect pour la troisime fois en Guyane; les deux premires fois basse
altitude, nord-Guyane.
Eugenia spruceana O. Berg (Myrtaceae) est une espce peu commune, trs peu rcolte en Guyane. Cest
un arbre de relativement grande taille collect sur le
plateau sommital (Ito6-B2, Molino & Sabatier 2818).
Oreopanax capitatus (Jacq.) Decne. & Planch. (Araliaceae) Cet arbre a t collect strile sur le plateau
sommital en marge du relev 6 (collection Sabatier &
Molino 5723). Un autre individu strile galement a
t vu sur le versant ouest dans le secteur rocheux dit
savane roche proximit du layon B. Ce sont des
arbres de dimension modeste (une vingtaine de mtres
de hauteur) tablis en canope. Initialement rattach
au genre Dendropanax, cet chantillon sest avr tre
un reprsentant arborescent autoportant dune espce
gnralement arborescente-hmi piphyte frquente en
Guyane. Ce statut est donc la caractristique remarquable des observations de lespce au mont Itoup,
mais il ne constitue pas un fait exceptionnel ; lespce
est en effet un lment de la flore arborescente submontagnarde aux Antilles par exemple.
Vigna caracalla (L.) Verdc. (LeguminosaePapilionoideae) voir Planche 5.
Cette espce nest pas une plante arborescente mais
une liane volubile. Elle a t collecte sur le relev 4
(collection Sabatier & Molino 5746). Il sagit semblet-il de la deuxime collecte en Guyane de cette espce
galement collecte au Suriname. La premire provenant du massif du Dkou-dkou dans le nord-ouest.
Cet exemple illustre les collectes botaniques despces
non arborescentes, ralises de manire opportuniste

dans le but de contribuer documenter au mieux la


flore du mont Itoup et la flore de Guyane.

Conclusions et discussion
Les relevs et observations raliss lors de la mission
Itoup nous permettent non seulement de contribuer
documenter la flore de Guyane et particulirement
celle des biomes sub-montagnards, peu tudie en ce
qui concerne le compartiment arborescent, mais galement dapporter des lments de rponse diverses
hypothses cologiques et biogographiques visant
expliquer la rpartition des espces et la composition
et diversit des communauts vgtales lchelle du
paysage et aux chelles de la Guyane et du bouclier
des Guyanes.

Hypothses cologiques
A notre connaissance, les relevs effectus lors de la
mission Itoup de mars 2010 constituent la premire
tentative, en Guyane, de mesurer leffet du gradient
altitudinal sur la composition floristique des communauts darbres. Nous lavons double dune approche
daphique et avons t attentifs dans les analyses
limpact de la dynamique sylvigntique (turnover
forestier par les chablis et renouvellement des arbres
de canope) en utilisant comme indicateur la prsence
des espces pionnires connues. Une telle grille
danalyse aurait ncessit des rptitions dans
lchantillonnage quil tait impossible de raliser
avec les moyens et le temps dont nous disposions. Nos
rsultats sont donc prliminaires.
Les premiers rsultats semblent montrer que le facteur
cologique dominant est certainement la dynamique
sylvigntique qui suivrait un fort gradient dintensit
: faible turnover en bas de versant ouest et trs fort
turnover en zone sommitale, turnover lev avec enlianements sur le versant est. Ce gradient est en relation avec diffrents facteurs environnementaux tels
que pentes, profondeur et stabilit des sols, et probablement surtout exposition aux vents dominants et aux
rafales lors des orages.
Le vent est trs certainement un facteur important ; un
effet de foehn est perceptible dune part sur les enregistrements satellitaires (Sabatier et al., 2008) et
dautre part sur le terrain avec du ct du versant sous
le vent vers 500 m daltitude, un vent prs du sol de
sens contraire au vent daltitude et semble-t-il une
atmosphre calme plus basse altitude (obs. pers.).
Les vents, forte dominante est en Guyane, influencent donc fortement le versant est et le sommet et
pourraient, par linstabilit du couvert forestier quils
induisent, tre lorigine de plusieurs caractristiques
de la vgtation de ces secteurs :
- structure forestire canope plus basse ; ouverture
prononce de la canope en zone sommitale ; enlianements plus frquents et plus tendus sur le versant
est que ct ouest (observations par survol antrieures
la prsente tude) ;

111

- composition en espce marque par une forte prsence des pionnires en zone sommitale et par un
possible effet de perturbation intermdiaire (Molino &
Sabatier, 2001) qui contribuerait promouvoir un
mlange riche en espces (diversit alpha leve).
Au contraire, le calme relatif du versant ouest basse
altitude pourrait expliquer lexistence dune fort
canope trs haute qui ncessite probablement une
plus grande stabilit des arbres ? Dans ce cas leffet de
perturbation intermdiaire jouerait en faveur dune
moindre diversit alpha de ces peuplements plus
stables. Notons que le facis forestier du pimont
ouest a une signature spectrale caractristique qui se
retrouve systmatiquement du ct ouest de tous les
reliefs de Guyane et du Surinam (Gond et al. 2011). Il
est fort probable que certaines espces, de canope
comme Chrysophyllum lucentifolium ou de strate
infrieure comme Xylopia surinamensis, soient typiques de ce type de fort. Leffet du drainage est
perceptible sur la structure de la vgtation quelle que
soit laltitude. Il nest cependant significatif et de sens
constant que pour la hauteur de canope dans les forts hautes du versant ouest. Dans cette situation, les
arbres dominants sont plus levs lorsquils se trouvent dans un talweg plutt que sur une croupe. Une
accentuation de leffet dabris au vent et une meilleure
alimentation hydrique pourraient jouer en ce sens. On
note que la composition en espces est globalement
sensible au drainage et quune espce remarquable
(Ruptiliocarpon sp. 1) apparait infode aux milieux
hydromorphes. On notera de ce point de vue que le
cortge des espces typiques des sols hydromorphes
de bas-fonds est apparemment trs limit. Deux espces typiques sont mentionner:
- Euterpe oleracea dont les populations sont de faible
effectif et atteignent la zone sommitale ;
- Eperua rubiginosa dont les populations sont galement de faible effectif et nont t trouves quentre
200 et 700 m daltitude sur le versant ouest. Lespce
Symphonia globulifera gnralement trs abondante
en bas-fond nous a sembl absente, seule Symphonia
sp. 1 son vicariant des sols drains semble prsente
(individus observs toujours dpourvus de pneumatophores). Leffet altitudinal est sensible sur la composition en espces et fort sur la diversit alpha, avec un
seuil sur le versant ouest qui se situe vers le niveau
500-600 m daltitude. La temprature et lhygromtrie
de lair qui voluent lorsque laltitude augmente pourraient jouer un rle de filtrage cologique sur la composition globale (diversit gamma du massif Tabulaire) en limitant certaines espces lorsque laltitude
augmente tout en crant des conditions environnementales propices au maintien discret dlments floristiques typiquement sub-montagnards. Le cas du Ruptiliocarpon, semble l encore caractristique. Cette
espce compltement infode aux sols hydromorphes
semble avoir une rpartition restreinte entre 600 et 800
m daltitude. A plus basse altitude, dautres espces
telles quEperua rubiginosa (arbre typique des ripisilves de Guyane, prsent jusqu 700 m daltitude

112

Itoup) pourraient concurrencer fortement Ruptiliocarpon. De mme, Daphnopsis sp. 1 et Zinowiewia


aymardii dont on a vu quelles appartiennent des
genres souvent prsents dans les flores submontagnardes ou montagnardes et les forts nuages,
pourraient bnficier des conditions environnementales du massif pour ne pas tre limines par des
espces occupant galement les basses altitudes. Ce
pourraient tre des espces prosprant en condition
dinsularit sur les sols bien drains entre 400 et 800
m daltitude, qui forment un domaine vital relativement tendu sur lensemble du massif Tabulaire. Ces
trois espces pourraient tre des cas dcole pour
comprendre les conditions de maintien des espces
dans une situation de type insulaire avec forte pression
dinvasion. Lanciennet de ces populations ou leur
arrive rcente, c'est--dire respectivement les hypothses i) de refuge actuel despces ayant occup dans
des priodes anciennes de plus vastes territoires ou ii)
de situation insulaire colonise de manire opportuniste, pourraient tre testes par des mthodes de gnomique.

Hypothses biogographiques
A lchelle rgionale, nous avons mentionn le fort
contraste entre les communauts nord et sud des
arbres forestiers de Guyane. Le massif Tabulaire
semble se situer au sud de la zone charnire entre ces
deux ensembles. Pour autant, nous nobservons une
parent forte entre les peuplements du sud (tudis par
ailleurs, Sabatier et al., 2008) et ceux dItoup que
pour les situations daltitude infrieure 500 m du
versant ouest, dont la faible diversit est caractristique. Plusieurs taxa trs typiques de la pnplaine du
sud nont pas t retrouvs (Geissospermum argenteum par ex.) ou natteignent pas labondance leve
qui les y caractrise (Tachigali par ex.).
Deux grandes hypothses, non compltement exclusives, permettent dexpliquer la macro-structuration
floristique de Guyane :
- Dune part la rpercussion des bouleversements
climatiques du quaternaire, dont certains (vnements
secs) seraient survenus jusqu lHolocne (derniers
10 000 ans), poque qui correspond galement
linstallation de populations humaines. Au nord, le
couvert forestier serait rest continu (Freycon et al.,
2010), alors quau sud il pourrait avoir rgress et
cd la place des vgtations non forestires ; cest
ce que suggre notamment la structure gnomique des
populations de manioc, espce typique de milieux non
forestiers (Duputi et al., 2009).
- Dautre part limpact de la structuration gographique actuelle des conditions climatiques qui se superpose des particularits gomorphologiques suggre lexistence de situations de stress cologique plus
frquentes dans le sud que dans le nord lors des annes de moindre pluviosit. La pnplaine du sud
dominante granitique avec affleurements rocheux
frquents (nombreux inselbergs) est galement la zone

la moins pluvieuse de Guyane, avec une pluviomtrie


annuelle moyenne infrieure 2500 mm. Cette conjonction a certainement jou galement au cours des
changements climatiques du Quaternaire.
Dans le premier cas les couverts forestiers du sud
auraient t limits aux ripisilves et aux reliefs les plus
marqus. Cela dbouche sur un scnario possible :
labaissement gnral de la temprature moyenne qui
semble avoir favoris en Amazonie lexpansion
basse altitude despces sub-montagnardes pourrait
avoir favoris celles despces telles que Daphnopsis,
Zinowiewia et Ruptiliocarpon. Ce dernier aurait prospr dans les ripisilves de basse altitude de lest des
Guyanes. La phnologie, contre temps de la grande
majorit des espces darbres guyano-amazoniens, que
nous avons observe pour Ruptiliocarpon pourrait tre
hrite dune adaptation des ripisilves de cours deau
sasschant en saison sche avec une reprise de la
vgtation en saison des pluies. Avec le retour de
conditions environnementales plus chaudes et plus
humides, les ripisilves pourraient avoir chang de
flore. La prsence de Ruptiliocarpon au mont Nassau,
autre ilt de larchipel des petites montagnes de
lest des Guyanes suggre quil aurait pu trouver refuge dans les ripisilves daltitudes o les espces ripicoles de basse altitude ne le concurrencent pas. Audel du facteur temprature, notons que les ripisilves
des petites montagnes peuvent tre affectes plus
profondment par les variations saisonnires de pluviosit que celles de plaine car elles ne bnficient ni
dun cours deau, ni dun stockage (nappe phratique
et bassin amont) importants. Un scnario analogue
pourrait tre envisag pour Daphnopsis et Zinowiewia,
mais pour les fragments forestiers associs aux reliefs
cette fois, avec leur extension au cours du Quaternaire
des fragments forestiers situs sur des reliefs beaucoup plus bas quItoup puis leur maintien sur les
reliefs les plus importants lors du rchauffement climatique post glaciaire. Cest lhypothse dun refuge
actuel. Celle-ci nexclut pas que dautres espces aient
en quelque sorte fait le chemin inverse (des fragments
forestiers des reliefs vers la fort continue de basse
altitude) qui est lhypothse des refuges forestiers du
Quaternaire ayant enrichi la fort actuelle.
Dans le second cas les conditions environnementales
actuelles du sud Guyane seraient un filtre cologique
suffisant pour limiter lexpansion des nombreuses
espces forestires prsentes au nord. Les forts du
sud verraient leur diversit floristique rgulirement
rode en raison dimportants stress environnementaux lors des pisodes climatiques secs qui accentueraient lexclusion comptitive des espces. Dans ce
cas, un environnement plus favorable du point de vue
climatique et daphique (sols profonds forte capacit
de rserves hydriques par exemple) sur les reliefs du
massif Tabulaire jouerait en faveur du maintien dun
plus grand nombre despces. Le turnover forestier
plus rapide en altitude irait galement dans le sens du
maintien des espces. Ce scnario expliquerait bien le
contraste que nous observons entre les valeurs de

diversit alpha du pimont et du sommet du mont


Itoup. Il conduit percevoir la zone haute (au dessus
de 500 m daltitude) du relief comme un espace insulaire qui capte des espces au hasard de leur dispersion
longue distance et qui permet celles-ci de se maintenir sur le long terme. Cest lhypothse dinsularit.

113

Perspectives
Une rponse ces questions pourra tre obtenue par
ltude des structures gnomiques des populations de
ces trois espces et probablement dautres dcouvrir
ou documenter. Bien que lexploration mene en
mars 2010 ait permis dengranger une quantit importante dinformations et de collections, la flore arborescente du mont Itoup et de lensemble du massif Tabulaire nest toujours que partiellement documente.
Nous avons dcel une vingtaine despces arborescentes nouvelles pour la flore de Guyane et potentiellement typiques de ce massif ou des reliefs de lest des
Guyanes. Il existe certainement dautres espces
dcouvrir pour ce site. A titre indicatif, lestimation du
pool despces de ce site, calcul par les mthodes de
Chao et du Jackniffe donnent une fourchette de 400
550 espces darbres.
Comme cela est gnralement le cas, trs rares sont les
taxa compltement documents par du matriel fertile
(fleurs et fruits), indispensable pour mener terme
lexploration botanique de cette flore. Complter ces
collectes pourrait tre un objectif important. Le comportement phnologique des espces remarquables et
particulirement de Ruptiliocarpon serait documenter, notamment en saison sche (dfeuillaison ?). Cela
ncessiterait des visites rgulires du site. Les communauts darbres du massif du mont Itoup semblent
avoir connu de fortes contraintes cologiques au cours
du temps, ce qui expliquerait la relative faiblesse de
leur richesse-diversit floristique basse altitude ;
moins que le type de fort quon y rencontre, une
futaie canope trs haute, ne soit systmatiquement
associ de faibles diversits alpha de part son fonctionnement cologique ? Il serait particulirement
instructif, pour comprendre la gense des structures
biogographiques rgionales, de comparer ces communauts darbres du mont Itoup celles prsentes
dans un massif montagneux du centre de la Guyane,
au cur de laire gographique dont la flore est la plus
diversifie de Guyane (Mori et al. 2002). Le massif de
la montagne Bellevue de lInini serait certainement le
meilleur site pour raliser cette comparaison. En effet,
lexception de son orientation gnrale est-ouest, il a
des caractristiques environnementales proches de
celles du massif Tabulaire. Il sagirait de vrifier les
points suivants sous lhypothse que ce massif de
lInini fut forestier de manire ininterrompue au Quaternaire :
i) Les espces remarquables qui semblent tre associes une altitude suprieure 500 m au mont Itoup
sont-elles prsentes sur un relief comparable mais
distant denviron 75 km ? Notamment par quelles
espces la niche ripisilve est-elle occupe sur ce
relief ?
ii) Dans un contexte floristique riche (Centre de la
Guyane), existe-t-il encore une augmentation forte de
diversit avec laltitude ? Les forts canope haute
de pimont ouest (prsentes au mont Inini daprs la

114

tldtection) sont-elles toujours faible diversit


alpha, mme en contexte globalement riche ? Plus
gnralement, ces niveaux de diversit sont-ils quivalents ceux mesurs Itoup ?
iii) Dans une communaut ancienne on peut sattendre
une forte diffrenciation des niches cologiques. Y
a-t-il donc au mont Inini un plus grand nombre
despces quau mont Itoup qui soient en apparence
infodes ce contexte environnemental submontagnard ? De mme, la fort de pimont qui semble
avoir subi une rosion de la diversit Itoup, comporte-t-elle au mont Inini plus despces adaptes
cette niche (y compris en sous-bois) ?
iv) Par comparaison globale des communauts, les
espces remarquables rencontres Itoup peuventelles tre considres comme un conservatisme sous
forme de reliques de peuplements anciens dans une
communaut jeune ?

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ANNEXE I
Chronologie de la mission de terrain
Priode : 7 mars 2 avril 2010
Dure du travail de terrain : 4 semaines
07/03 Dplacement de Cayenne Camopi (avion) ;
08/03 Dplacement de Camopi Itoup camp de base (hlicoptre) ;
Installation des campements individuels et du campement de travail ;
09/03 Prospection du versant ouest et du plateau sommital ; valuation des conditions de mise en oeuvre des
relevs ;
10/03 Test dexcution, relev Ito1 (versant ouest, tranche altitudinale 600-700 m) ; modification des procdures
en relation avec les temps daccs et temps dexcution ; choix dfinitif des emplacements de relev sur SIG ;
11/03 Excution des relevs Ito3 et Ito4 pro parte (versant ouest, tranche altitudinale 400-500 m) avec laide de
lquipe ONF et collecte des herbiers;
12/03 et 13/03 Finalisation des relevs Ito1 et Ito2 (versant ouest, tranche altitudinale 600-700 m) et collecte des
herbiers;
14/03 au 17/03 Excution des relevs Ito5 (avec laide de lquipe ONF) et Ito6 pro parte (sommet, tranche
altitudinale > 800 m) et collecte des herbiers;
18/03 Finalisation du traitement des chantillons dherbier (opration gnralement mene le soir mme des
collectes, au camp) ;
19/03 au 21/03 Installation dun campement secondaire 2700m sur le layon C (environ 3 Km du camp de base)
; excution des relevs Ito7 et Ito8 (versant ouest, tranche altitudinale 200-300 m) et collecte des herbiers;
22/03 et 23/03 Prospection botanique sur le layon C et sur le layon B ;
24/03 Finalisation du relev Ito6, chantillonnage complmentaire sur Ito5 (sommet, tranche altitudinale > 800
m) ;
27/03/ au 29/03 Installation dun campement secondaire 2350m sur le layon A (environ 2,5 Km du camp de
base) ; excution des relevs Ito9 et Ito10 (versant est, tranche altitudinale 600-700 m) et collecte des herbiers;
30/03 Fin de traitement des chantillons Ito9 et 10 et finalisation du relev Ito4 ;
31/03 Echantillonnage complmentaire sur Ito1 et 2 ; Prospection botanique sur le layon D ;
01/04 Prospection botanique sur le layon F (plateau sommital) ; dmontage des installations et conditionnement
des matriels et chantillons ;
02/04 Finalisation du dmontage des installations ; dplacement de Itoup camp de base vers Cayenne
Rochambeau (hlicoptre)

117

ANNEXE II
Matriel ncessaire
- GPS Garmin GPSMap 60CSx (donnant une prcision dcamtrique sous couvert forestier) ;
- topofil (en appoint) ;
- boussole et clinomtre ;
- mtre forestier ;
- rubalise ;
- marqueurs indlbiles ;
- bombe arosol peinture de marquage forestier ;
- tlmtre laser VERTEX (Haglf Vertex laser VL400);
- fiches, carnets et petit matriel de prise de note ;
- jumelles (Leica trinovid 10 x 42);
- fusil dchantillonnage cal. 12 et munitions la grenaille de fer ;
- griffes de tlphoniste ;
- chenilloirs longue perche tlescopique ;
- scateurs, machettes, couteaux ;
- sacs de collecte des chantillons botaniques ;
- presse herbier et papier de schage ;
- four herbier et recharges de gaz ;
- petits instruments dobservation et de dissection ;
- appareils photos numriques (Canon EOS 5D et 350) avec assortiment dobjectifs ;
- ordinateur de terrain (portable durci) ;
- bches, hamacs, sac dos et matriel de campement ;
- batteries rechargeables
- groupe lectrogne (ou panneaux solaires)

118

ANNEXE III
Liste floristique
La premire partie (Arbres) donne la liste des espces
arborescentes connues ce jour du mont Itoup (
lexclusion des collectes ralises par O. Tostain et G.
Lotard, quil conviendrait dajouter). Les parties
suivantes ne mentionnent que les collectes effectues
par le groupe de travail Arbres lors des travaux
aux mont Itoup. La nomenclature suit la Checklist of
the plants of the Guiana Shield (Funk et al. 2009)
http://botany.si.edu/bdg/plants.html Les familles sont
celles donnes par lAngiosperm Phylogeny Group
(APG)
http://www.mobot.org/MOBOT/research/APwe b/ ,
avec indication entre parenthses du rattachement
suivant la nomenclature de Cronquist. La colonne
Effectifs donne le nombre dobservations total
(relev plus herbiers hors relev). La colonne Frquence en Guyane indique la frquence de rencontre
des espces en Guyane comme suit : F, taxon frquent
avec au moins une vingtaine de collections l'Herbier
de
Guyane
(CAY)
et
/ou
au

moins une vingtaine de sites connus en Guyane (des


nuances seraient apporter car cette gamme de frquence reste large) ; AF, taxon assez frquent avec
plus de 10 mais moins de 20 collections CAY ou
plus de 10 moins de 20 sites connus en Guyane (un
fort effet rgional pouvant exister, des prcisions seraient galement apporter). ; AR, taxon assez rare
avec moins de 10 collections CAY ou moins de 10
sites connus en Guyane ; R, taxon rare avec moins de
5 collections CAY ou moins de 5 sites connus en
Guyane (un lien environnemental parfois fort serait
prciser). De plus divers taxa apparaissent pour la
premire fois dans les relevs et prospections botaniques de Guyane, ils sont nots premire collecte .
Il sagit le plus souvent de morphotaxa et donc dune
information confirmer et souvent complter par
ltude de nouveau matriel documentant mieux le
taxon (matriel floral gnralement manquant). La
colonne Statut Taxonomique permet de pointer les
taxons qui sont certainement des espces nouvelles
pour la science. Cette liste est actuellement en cours
dtablissement en synergie avec les rcoltes de Tostain & Lotard

119

120

121

122

123

124

125

Composition floristique des


sous-bois
Olivier Tostain1, Guillaume Lotard1
1

Ecobios

Au sein de la mission dtude du mont Itoup,


lquipe ECOBIOS avait pour vocation de dresser
un inventaire aussi large que possible de diverses
disciplines, et ce sur une gamme aussi diversifie des
diffrents habitats composant le massif. Linventaire
botanique forme llment principal de ces recherches,
car il est destin dcrire lvolution des peuplements,
voir des faunes, sur le gradient altitudinal qui stend
des terres basses de la plaine de la Waki louest
jusquau sommet

Lanalyse prliminaire des taxons rcolts met en


vidence une forte proportion despces de trs grand
intrt patrimonial :

Les inventaires ont port sur :


- les plantes suprieures et les fougres (Olivier Tostain, Guillaume Lotard, Vincent Pelletier) ;
- les fougres spcifiquement (Michel Boudrie et
Tostain & Lotard) ;
- les champignons (sur la base de clichs et de
quelques rcoltes) ;
- les oiseaux (Olivier Tostain et Guillaume Lotard);
- les mammifres diurnes (Olivier Tostain & al.) ;
- les reptiles et amphibiens (Vincent Pelletier au sein
du groupe chiros-herptho , et autres membres de
manire pisodique) ;
- les chiroptres (Vincent Pelletier au sein du groupe
chiros-herptho ) ;
- les poissons et crustacs dcapodes des torrents
daltitude (Olivier Tostain) ;
- les lombrics (Olivier Tostain) ;
- les gastropodes (Olivier Tostain).

Parmi elles 5 avaient semble-t-il dj t repres par


les autorits comptentes :

Lensemble de ces oprations sest droul du 26


fvrier au 03 avril 2010.
Lobjectif tait de collecter le maximum de matriel
fertile sur la plus grande diversit dhabitats possibles,
depuis le pimont de la face ouest du massif (savaneroche impossible et sentier de monte au camp de
base) jusquaux diffrents sommets et talwegs les
creusant sur leurs pentes.
Ces collectes ont permis de rassembler un total de prs
de mille chantillons, concernant un total vraisemblable de plus de 800 taxons.
En outre, nous avons conserv vivant un grand
nombre dorchides et autres piphytes afin de les
maintenir en culture sur le littoral et pouvoir ainsi
observer la floraison des espces trouves ltat
strile.

126

Taxons nouveaux pour la science :


Pas moins de 20 taxons parmi ceux rcolts en fvrier/mars 2010 sont nouveaux pour la science.

Taxons certainement nouveaux.

Dichorisandra sp. nov. (Commelinaceae) : espce tout


fait remarquable dont une belle population a t
dcouverte sur les lisires de la savane-roche Impossible - Photos et collecte OT-5772
Marlierea sp. nov. (Myrtaceae) amplexicaulis Holst
sp. nov. Photos et collecte OT-5330.
Quiina sp. nov. (Ochnaceae ex Quiinaceae) : Photos et
collecte OT-5658
Rudgea sp. nov. ined. (Rubiaceae): Zappi va lappeler
glomerulata Photos et collectes OT-5574/OT5654/OT-5952.
Disteganthus sp. nov. (Bromeliaceae) intermedius
Photos et collecte OT-5625.
Mais les espces suivantes semblent galement entirement nouvelles (certaines avaient nanmoins t
dj collectes) :
Neodillenia sp. nov. (Dilleniaceae) : Photos et collecte
OT-6000
Voyria sp. nov. (Gentianaceae) : Photos et collectes
OT-5601/OT-5828
Leandra sp. nov. (Melastomataceae) aff. agrestis
(Aubl.) Raddi Photos et collecte OT-5327
Coussarea sp. nov. 1 (Rubiaceae) : grands fruits
orange Collecte OT-5345
Coussarea sp. nov. 2 (Rubiaceae): petit fruits vert
olive Photos et collecte OT-5407
Les espces suivantes sont en cours dtude, mais elles
sont aussi trs probablement nouvelles.
Zinowiewia sp. (Celastraceae) : ce grand arbre au
tronc flut a dabord t dcouvert par Daniel Sabatier
et Jean-Franois Molino (voir plus haut la discussion
ce titre). Mais Vincent Pelletier la indpendamment
collect en jeune fruit non loin de notre campement
vers 600 m daltitude. Photos et collecte OT-5631.

Bromelia fosteriana L.B. Sm. subsp. nov. (Bromeliaceae) subsp. angustifolia Photos et collecte OT5777.
Pourrait reprsenter une espce nouvelle. Deux pieds
ont t rapports de la mission, et sont en culture. Une
floraison est attendue en 2012.
Calyptrocarya glomerulata (Brongn.) Urb. (Cyperaceae) var proliferans var. nov. Collecte OT-5566.
Croton aff. nuntians Croizat (Euphorbiaceae) : Photos
et collectes OT-5526/OT-5640.
Miconia sp.1 (Melastomataceae) furfuraceus Collecte OT-5570/OT-5968.
Miconia
sp.2
(Melastomataceae)
montismeridionalis Collecte OT-5598.
Pouteria aff. venosa ssp. amazonica (Mart.) Baehni
(Sapotaceae) : Photos et collecte OT-5665.
Lycianthes aff. pauciflora (Vahl) Bitter (Solanaceae) :
Collecte OT-5520.
Solanum sp.A de Mori et al. (Solanaceae) : Photos et
collectes OT-5491/OT-5569.
Pilea aff. tabularis C.C. Berg (Urticaceae) : Photos et
collecte OT-5740.

Taxons nouveaux pour la Guyane


franaise :
Huperzia acerosa (Sw.) Holub. (Lycopodiaceae) :
Photos et collecte OT-5973
Bomarea edulis (Tussac) Herb. (Alstroemeriaceae) :
Photos et collecte OT-5769
Stenospermation spruceanum Schott (Araceae) : Photos et collecte OT-5575
Pleurothallis floribunda Poepp. & Endl. (Orchidaceae) : OT-5315/OT-5371/OT-5381/OT-5448/OT5903/OT-5921/OT-5998
Trichopilia cf. mutica (Lindl.) Rchb. f. & Wullschl.
(Orchidaceae) : Photos et collectes OT- 5847/OT5873
Vigna caracalla (L.) Verdc. (Fabaceae) : Collecte OT5748 ???
Utricularia alpina Jacq. (Lentibulariaceae) : Photos et
collectes OT-5616/OT-5632.
Ruptiliocarpon cf. caracolito Hammel & N. Zamora
(Lepidobotryaceae) : Photos et collecte OT- 5972.
Voir discussion dveloppe par D. Sabatier et J.F.
Molino.
Solanum seaforthianum Andrews (Solanaceae) Photos
et collecte OT-5802

Raret extrme :
Connus dune seule station au monde (en fait, endmique du mont Itoup).
Dicliptera granvillei Wassh. (Acanthaceae) : Collecte
OT-5966
Sipanea ovalifolia Bremek. var. villosissima Steyerm.
(Rubiaceae) : Photos et collecte OT- 5587.
Tragia tabulaemontana L.J. Gillespie (Euphorbiaceae)
: Photos et collecte OT-5659.

Connus de 2 ou 3 stations au monde :


Peperomia popayanensis Trel & Yunck. (Piperaceae) :
Collecte OT-5551
Pilea tabularis C.C. Berg (Urticaceae) : Non collect
Cremersia platula Feuillet & Skog (Gesneriaceae) :
Photos et collecte OT-5819B
Notopleura lateralis (Steyerm.) C. M. Taylor
(Rubiaceae) : Collecte OT-5590

Connu dune seule station en Guyane


franaise:
Mikania banisteriae DC. (Asteraceae) : Collecte OT5483
Macrocentrum vestitum Sandwith (Melastomataceae) :
Non collect
Ludwigia foliobracteolata (Munz) H. Hara (Onagraceae) : Non collect

Connu de 2(-4) stations en Guyane


franaise:
Alstroemeria amazonica Ducke (Alstroemeriaceae) :
Photos et collecte OT-5721
Aechmea nudicaulis (L.) Griseb. var. nudicaulis
(Bromeliaceae) : Photos et collectes OT- 5324/OT5681
Malaxis cf. excavata (Lindl.) Kuntze (Orchidaceae) :
Photos et collecte OT-5826
Rehia nervata (Swallen) Fijten (Poaceae) : Collecte
OT-5732
Aristolochia surinamensis Willd. (Aristolochiaceae) :
Photos et collecte OT-5737
Rytidostylis amazonica (C. Mart. ex Cogn.) Spruce ex
Kuntze (Cucurbitaceae) : Photos et collecte OT-5739
Actinostemon schomburgkii (Klotzsch) Hochr.
(Euphorbiaceae) : Photos et collectes OT- 5733/OT5760
Marcgravia magnibracteata Lanj. & Heerdt
(Marcgraviaceae) : Photos et collecte OT-5987
cf. Dendrophthora warmingii (Eichler) Kuijt (Viscaceae) : Photos et collecte OT-5192

Taxons endmiques de la Guyane franaise et des territoires contigus :


Anthurium lanjouwii A.M.E. Jonker & Jonker
(Araceae) : Photos et collectes OT-5424/OT- 5486
Chamaecostus curcumoides (Costaceae) : Photos et
collecte OT-5485
Degranvillea dermaptera Determann (Orchidaceae) :
Non collect
Ichthyothere granvillei H. Rob. (Asteraceae) : Photos
et collecte OT-5759
Ernestia granvillei Wurdack (Melastomataceae) :
Photos et collecte OT-5768
Guarea michel-moddei T.D. Penn. & S.A. Mori (Meliaceae) : Photos
Ouratea salensis Sastre (Ochnaceae) : Photos et
collecte OT-5498

127

Peperomia gracieana Grts (Piperaceae) : Photos et


collecte OT-5770
Coussarea amapaensis Steyerm. (Rubiaceae) : Photos
et collecte OT-5318
Coussarea spicata Delprete (Rubiaceae) : Photos et
collecte OT-5394
Notopleura microbracteata (Steyerm.) C.M. Taylor
(Rubiaceae) : Photos et collecte OT-5333
Notopleura salensis (Steyerm.) C.M. Taylor (Rubiaceae) : Non collect
Rudgea bremekampiana Steyerm. (Rubiaceae) : Photos et collecte OT-5398
Daphnopsis granvillei Barringer (Thymeleaceae) :
Photos et collecte OT-5443

Autres espces remarquables :


(le plus souvent rares, caractristiques des forts submontagnardes ou des savanes-roches)
Asplenium repandulum Kunze (Aspleniaceae) : Non
collect
Blechnum gracile Kaulf. var. pilosum Boudrie &
Cremers (Blechnaceae) : Photos et collecte OT- 5821
Blechnum serrulatum Rich. (Blechnaceae) : Non collect
Cyathea lasiosora (Kuhn) Domin (Cyatheaceae) : Non
collect
Cyathea marginalis (Klotzsch) Domin (Cyatheaceae) :
Collectes OT-5493/OT-5649
Lindsaea lancea (L.) Bedd. var. submontana Boudrie
& Cremers (Lindsaeaceae) : Non collect
Adiantopsis radiata (L.) Fe (Pteridaceae) : Collectes
OT-5409/OT-5822
Doryopteris sagittifolia (Raddi) J. Sm. (Pteridaceae) :
Photos et collecte OT-5364
Hemionitis rufa (L.) Sw. (Pteridaceae) : Collecte OT5727
Anthurium hookeri Kunth (Araceae) : Photos et
collectes OT-5383/OT-5475/OT-5532
Bactris cuspidata Mart. (Arecaceae) : Non collect
Geonoma umbraculiformis Wess. Boer (Arecaceae) :
Photos et collecte OT-5401
Aechmea tocantina Baker (Bromeliaceae) : Non collect
Catopsis sessiliflora (Ruiz & Pav.) Mez (Bromeliaceae) : Collecte OT-5711
Guzmania altsonii L.B. Sm. (Bromeliaceae) : Collecte
OT-5447
Commelina obliqua Vahl (Commelinaceae) : Photos et
collecte OT-5562
Chamaecostus lanceolatus subsp. pulchriflorus (Costaceae) : Photos et collecte OT-5755
Stelestylis surinamensis Harling (Cyclanthaceae) :
Collecte OT-5637
Cyperus hoppiifolius Uittien (Cyperaceae) : Photos et
collecte OT-5797
Dioscorea dodecaneura Vell. (Dioscoreaceae) :
Collecte OT-5803
Hylaeanthe hexantha (Poepp. & Endl.) A.M.E. Jonker
& Jonker (Marantaceae) : Collecte OT- 5593
Maranta friedrichsthaliana Krn. (Marantaceae) :
Photos et collecte OT-5782

128

Mayaca longipes Mart. ex Seub. (Mayacaceae) : Photos et collecte OT-5559


Aspidogyne foliosa (Poepp. & Endl.) Garay (Orchidaceae) : Non collect
Liparis nervosa (Thunb.) Lindl. subsp. nervosa
(Orchidaceae) : Photos et collecte OT-5712
Apodanthes caseariae Poit. (Apodanthaceae) : Photos
Tanaecium cf. jaroba (Bignoniaceae) : Collecte OT5471
Cochlospermum orinocense (Kunth) Steud. (Bixaceae)
: Photos
Celtis iguanaea (Jacq.) Sarg. (Cannabaceae) : Non
collect
Vasconcellea microcarpa (Jacq.) A. DC. subsp. heterophylla (Poepp. & Endl.) V.M. Badillo (Caricaceae) :
Photos et collecte OT-5669
Clusia melchiori Gleason (Clusiaceae) : Photos et
collecte OT-5326
Dicranostyles guianensis Mennega (Convolvulaceae) :
Collectes OT-5143/OT-5623/OT-5961
Fevillea cordifolia L. (Cucurbitaceae) : Non collect
Gurania oxyphylla C. Jeffrey (Cucurbitaceae) : Photos
et collectes OT-5408/OT-5562
Caryodendron amazonicum (Euphorbiaceae) : Photos
et collectes OT-5299
Manihot esculenta Crantz subsp. flabellifolia (Pohl.)
Cif. (Euphorbiaceae) : Photos
Bauhinia eilertsii Pulle (Fabaceae) : Photos et collecte
OT-5773
Chamaecrista cf. glandulosa vel nictitans var glabrata
? (Fabaceae) : Photos et collecte OT-5741
Desmodium axillare (Sw.) DC. (Fabaceae) : Photos et
collecte OT-5689
Stryphnodendron pulcherrimum (Willd.) Hochr.
(Fabaceae) : Collecte OT-5195A
Sinningia
incarnata
(Aubl.)
D.L.
Denham
(Gesneriaceae) : Photos et collecte OT-5736
Psittacanthus grandifolius (Mart.) Mart. (Loranthaceae) : Photos et collecte OT-5502
Briquetia spicata (Kunth) Fryxell (Malvaceae) : Photos et collecte OT-5746
Aciotis rubricaulis (Schrank & Mart. ex DC.) Triana
(Melastomataceae) : Photos et collecte OT-5355
Disciphania lobata Eichler (Menispermaceae) :
Collectes OT-5492/OT-5530
Dilkea retusa Mast. (Passifloraceae) : Photos et collectes OT-5667/OT-5800
Passiflora plumosa Feuillet & Cremers (Passifloraceae) : Non collect
Peperomia emarginella (Sw. ex Wikstr.) C. DC. (Piperaceae) : Photos et collecte OT-5426
Peperomia haematolepis Trel. (Piperaceae) : Photos et
collectes OT-5240/OT-5702
Peperomia pellucida (Piperaceae) : Non collect
cf. Ampeloziziphus amazonicus Ducke (Rhamnaceae) :
Photos et collecte OT-5301
Cosmibuena grandiflora (Ruiz & Pav.) Rusby (Rubiaceae) : OT-5644/OT-5965
Notopleura guadalupensis (DC.) C.M. Taylor (Rubiaceae) : Photos et collecte OT-5465
Xylosma benthamii (Tul.) Triana & Planch.
(Salicaceae) : Collectes OT-5351/OT-5696

Brunfelsia martiana Plowman (Solanaceae) : Photos


et collecte OT-5638
Cestrum acuminatissimum Dunal (Solanaceae) : Non
collect
Cestrum microcalyx Francey (Solanaceae) : Non collect
Solanum morii S. Knapp (Solanaceae) : Photos et
collectes OT-5352/OT-5685
Pilea pubescens Liebm. (Urticaceae) : Photos et collecte OT-5359
Gloeospermum sphaerocarpum Triana & Planch.
(Violaceae) : Photos et collecte OT-5655

Dcouvertes ou bizarreries biogographiques :


Astrocaryum murumuru Mart. (Arecaceae) : Non
collect
Astrocaryum paramaca Mart. (Arecaceae) : Photos
Astrocaryum sciophilum (Miq.) Pulle (Arecaceae) :
Photos et collecte OT-5633
Eleocharis interstincta (Vahl) Roem. & Schult. (Cyperaceae) : Photos et collecte OT-5557
Renealmia alpinia (Rottb.) Maas (Zingiberaceae) :
Photos et collecte OT-5807
Pterocarpus rohrii Vahl (Fabaceae) : Collecte OT5701
Mayaca longipes Mart. ex Seub. (Mayacaceae) : Photos et collecte OT-5559

129

Les ptridophytes du mont Itoup


sommet Tabulaire
1

Michel Boudrie1
Spcialiste des ptridophytes des Guyanes, membre du CSRPN de Guyane,ex-Correspondant MNHN

Rsum
L'inventaire des ptridophytes du mont Itoup a permis la collecte de 368 spcimens appartenant 151 espces,
soit 44% de la ptridoflore guyanaise. Parmi elles, 8 taxons "dterminants" (liste CSRPN) ont t dcouverts sur
le massif.
La diversit des ptridophytes augmente au dessus de l'altitude des 500 m, jusqu' son paroxysme dans la
tranche 700-830 m (versant ouest).

Mots cls
Parc amazonien de Guyane, Mont Itoup, Ptridophytes, Fougre

Introduction

samment longue, le nombre total des taxons allait sans


nul doute se rvler considrable.

Le sommet Tabulaire, appel galement mont Itoup,


est situ dans la partie centrale de la moiti sud de la
Guyane, dans la zone cur du Parc amazonien de
Guyane. Culminant 830 m daltitude, il a t identifi, lors de la premire mission botanique de 1980,
comme un secteur remarquable pour sa richesse en
ptridophytes, notamment par lexistence de taxons
trs rares et certains seulement connus de ce massif
pour la Guyane. 30 ans plus tard, la mission de 2010 a
permis de complter cet inventaire et de dcouvrir de
nouveaux taxons, non seulement pour ce secteur, mais
aussi pour la Guyane.

Localisation Prsentation gographique Contexte gologique :

Une telle mission prvue au mont Itoup revtait donc


une importance capitale dans le cadre des travaux de
taxonomie, dcologie et de chorologie mens sur ce
groupe de plantes en Guyane par Georges Cremers et
moi-mme en tant que spcialistes des ptridophytes
de Guyane et du plateau des Guyanes et rdacteurs des
fascicules des ptridophytes de la Flora of the Guianas .
En effet, la ptridoflore guyanaise comporte, fin
octobre 2014, 341 taxons de ptridophytes (Boudrie,
2010a ; de Foucault et al., 2014). Lors de la mission
de 1980, 105 spcimens de ptridophytes avaient t
rcolts au sommet Tabulaire par Georges Cremers et
Jean-Jacques de Granville correspondant un total de
76 taxons. Nos prospections en Guyane nous ont montr que, pour des zones de fort de moyenne altitude
(jusqu 500 m environ), prs de 170 taxons ont pu
tre recenss (par exemple sur lensemble du secteur
de Paul-Isnard ; cf. Boudrie, 2003), et mme jusqu
prs de 140 taxons pour une zone de fort de basse
altitude Saint-Elie (Boudrie & Cremers, 2001). Il
tait donc vident que le secteur du sommet Tabulaire,
avec sa fort submontagnarde, tait sous-rcolt et
que, avec lexprience et une priode sur site suffi-

130

Le massif du mont Itoup est situ dans le centre de la


moiti sud de la Guyane, peu prs mi-chemin entre
Antcume Pata louest et Camopi lest, au sud du
massif des Emerillons et au sud sud-ouest des monts
Bakra. Il est constitu par une chane de collines
dorientation gnrale nord-sud et stendant sur environ 25 km. Alors que la majorit de ces sommets
possde une altitude maximale de 600 700 m, la
zone centrale de la chane sindividualise par la prsence dun imposant massif tabulaire dont laltitude
maximale est de 830 m. Cest donc le 2me massif le
plus haut de Guyane, aprs les monts Bellevue de
lInini. Ce plateau tabulaire, de forme trapzodale et
subhorizontal, est orient NE-SW et mesure 1300 x
500 m.
Le mont Itoup est recoup par de nombreuses
criques, rgime quelque peu torrentiel, celles du
versant ouest appartenant au bassin versant de la Waki
(bassin du Maroni), et celles des versants nord et est
appartenant aux bassins versants des affluents de la
Camopi (bassin de lOyapock). Dans la partie nord du
plateau tabulaire, une mare, non repre lors de la
mission de 1980, a t dcouverte.
Gologiquement, lensemble de la chane du mont
Itoup se situe sur un complexe de roches basiques du
Protrozoque (2,14 milliards dannes), correspondant principalement des gabbros. Le plateau tabulaire, ainsi que les quelques sommets voisins, est occup par un profil latritique peu pais et fortement
dmantel. Neuf chantillons de roches (gabbros et
facis latritiques) ont t rcolts par M. Boudrie et

envoys au BRGM pour tude (H. Thveniaut). Les


rsultats sont prsents ci-dessous :

Objectifs de la mission Protocoles de


rcoltes Valorisation des rsultats

Les chantillons ST-MB-02 (savane-roche Doryopteris sagittifolia), ST-MB-04 et ST-MB-08, prlevs


en subaffleurement sur les flancs du plateau, correspondent un gabbro grenu grains inframillimtriques millimtriques de feldspath plagioclase et de
pyroxne, avec quelques variations dans la quantit
des plagioclases qui font tendre lchantillon ST-MB04 vers, pratiquement, une pyroxnite.

Avant le dpart de la mission, le bilan des rcoltes de


1980 a t effectu et la liste des spcimens et taxons
dj rcolts a t dresse par une extraction de la
base de donnes Aublet2 de lherbier de Guyane
(CAY). Cette premire liste a dj permis de voir
quelles espces navaient pas t collectes lpoque
et qui pourraient tre prsentes sur ce massif.

Les chantillons ST-MB-01, 03 et 06 (facis latritiques des sommets) sont clairement des facis altrs
(lithoreliques) de gabbro dans un mode caverneux.
Ceci est surprenant car les gabbros saltrent gnralement plutt dans la masse. Une raison possible
cela serait lie la nature des minraux avec des plagioclases bien forms et des pyroxnes plutt en
matrice et pas ncessairement bien cristalliss (automorphes), auquel cas laltration privilgie le lessivage de ces pyroxnes et les plagioclases tardent
saltrer et restent sous forme dun squelette caverneux.
Les chantillons ST-MB-05 et 07, prlevs sur le
plateau ou juste en bordure, sont des facis fins ferruginiss dans la masse et non quartzeux. Ces lithoreliques pourraient correspondre des mtatuffs, ces
formations volcano-sdimentaires prcoces stant
retrouves, lors de la mise en place des plutons intrusifs basiques, incluses sous forme de lambeaux dans
les gabbros, mtamorphises et soumises une fusion
partielle.
Lchantillon ST-MB-09 est un quartz blanc filonien,
remplissage doxydes et hydroxydes de fer, lis
laltration. Ce type de filons peut tre observ de
faon ponctuelle dans les gabbros, notamment sur la
DZ du camp de base.
En conclusion, le sommet du plateau tabulaire ne
consiste pas en une vritable cuirasse latritique.
Celle-ci a exist jadis mais a t dmantele. Le profil
latritique est donc tronqu, puisque les facis ferruginiss du plateau correspondent loxydation, dans un
mode caverneux original, des gabbros sous-jacents.
Les observations montrent que cette zone doxydation
des gabbros est peu paisse (moins de 3 m).

Un protocole de rcoltes a donc t tabli. Ainsi, la


mission a consist :
- effectuer le recensement des taxons prsents, diffrentes altitudes et dans diffrents milieux, aussi bien
en piphytes, hmi-piphytes, quen terrestres ;
- effectuer des prlvements des taxons nouveaux pour
le secteur, selon les normes des rcoltes permettant
leur identification une fois sches (collecte de la
plante avec son rhizome, car le rhizome ou ses cailles
sont souvent un caractre discriminant ; frondes matures, si possible fertiles, bien tales de faon observer tous les caractres une fois sches), avec suffisamment dexemplaires pour la distribution aux diffrents herbiers.
- effectuer des prlvements en silica-gel pour tudes
ADN spcifiques (voir ci-dessous), avec rcoltes dun
spcimen dherbier tmoin.
Tous les spcimens de ptridophytes rcolts lors de
cette mission ont t dposs lherbier de Guyane
(CAY), Cayenne. Dans la mesure du possible et du
matriel disponible, un double a t envoy lherbier
du Musum National dHistoire Naturelle de Paris (P),
ainsi quaux diffrents herbiers participants au programme Flora of the Guianas (B, BBS, BRG, K,
L, NY, US) et certains autres (BM, et notamment UC)
pour discussions ventuelles avec Alan R. Smith,
spcialiste des ptridophytes notropicaux, sur les
spcimens litigieux. Selon les familles, genres ou
espces des groupes en cours de rvision, des spcimens ont t envoys aux diffrents spcialistes concerns : M.J.M. Christenhusz (BM), C. Kelloff (US),
J. Hickey (MU), M. Lehnert (STU), J. Mickel et R.C.
Moran (NY), J. Prado (SP), P. Schwartsburd (K et
SP), H. Tuomisto et S. Lehtonen (TUR), R.L.L. Viane
(GENT).
Les spcimens ont t dtermins, tiquets, monts et
enregistrs dans la base de donnes Aublet2 de
lherbier
CAY
(nouveau
site
web
:
http://publish.plantnet-project.org/project/caypub).
Ces spcimens servent divers objectifs :
- Donnes complmentaires pour de nombreux taxons
sur les cartes de rpartition en Guyane (dans le cadre
de louvrage en cours sur les ptridophytes de
Guyane) ;
- Intgration des donnes (listes de spcimens) dans
les listes dexsiccatas des fascicules de la Flora of
the Guianas , avec intgration des taxons nouveaux
au sein des descriptions et cls de dtermination ;

131

- Prparation, le cas chant, de publications spcifiques dans le cas de la dcouverte de taxons nouveaux pour la science ;
- Etudes ADN et phylogntiques par certains spcialistes dans le cadre de la rvision taxonomique de
certains groupes (H. Tuomisto, Universit de Turku,
Finlande, pour les Danaea ; M. Lehnert, Musum de
Stuttgart, Allemagne, pour les Cyatheaceae ; S. Lehtonen, Universit de Turku, Finlande, pour les Lindsaea).
Enfin, les localits des spcimens rcolts ont t
resitues dans le quadrillage cartographique en degrsminutes-secondes, de faon tre intgres dans la
base de donnes Aublet2 de lherbier CAY. Aprs
concertation des diffrents intervenants botanistes, un
total de 22 localits a t cr pour pouvoir saisir
toutes les rcoltes, de faon combiner les altitudes,
les secteurs gographiques et topographiques et les
versants. Par exemple, ces localits sont indiques
comme suit (voir carte ci-jointe) :
Mont Itoup - sommet Tabulaire - 1, Versant sudest, layon A, 600-700 m alt.
Mont Itoup - sommet Tabulaire - 18, Versant ouest,
nord layon C, 500-550 m alt.
Mont Itoup - sommet Tabulaire - 22, Savane-roche
Impossible, 6 km ouest d'Itoup .

Notes nomenclaturales :
Les noms des familles des ptridophytes (maintenant
nomms Fougres et Lycophytes ) et les noms de
genres utiliss dans le prsent rapport suivent la rcente classification propose par Smith et al. (2006),
Christenhusz et al. (2011), Rothfels et al. (2012) et les
nombreuses et rcentes publications (voir rfrences
bibliographiques) sur la rvision de plusieurs groupes
(Hymenophyllaceae, Cyatheaceae, Lindsaeaceae,
certaines Polypodiaceae, Grammitidaceae, etc.).
Ces rcents changements nont pas encore t tous
intgrs au rfrentiel taxonomique de la base de donnes Aublet2 de lherbier de Guyane, et les nouveaux
changements de noms nont pas encore t tous modifis sur les spcimens de lherbier CAY. Les synonymies seront indiques dans un fichier Excel des rcoltes communiqu au Parc amazonien de Guyane.
noter que, dans ce fichier Excel, et dans la prsente
finalisation de ce rapport, les noms ont t actualiss
selon les derniers changements taxonomiques.
Concernant les changements de noms dans les dterminations des spcimens, certains dentre eux correspondent de relles synonymies (par exemple lors
dun changement de genre comme pour Micropolypodium taenifolium, maintenant devenu Moranopteris

Mission Itoup 2010 Maillage des 22 localits de rcoltes botaniques pour saisie dans Aublet2 (CAY)
(NB : la localit 22 est hors carte)

132

taenifolia voir dessous), mais dautres correspondent


des erreurs anciennes de dtermination perptues
pendant des annes et maintenant corriges suite la
rvision du groupe ou du genre en question (par
exemple pour les spcimens de Guyane nomms jadis
Danaea moritziana et qui savrent maintenant correspondre une nouvelle espce, Danaea ypori cf.
Christenhusz, 2010).
Ainsi, par rapport notre rapport prliminaire de mission (Boudrie, 2010b), la publication rcente de diffrents travaux et articles cits en bibliographie a conduit plusieurs modifications taxonomiques qui concernent les taxons suivants :
- Elaphoglossum minutum (Pohl ex Fe) T. Moore
[syn. E. revolutum (Liebm.) T. Moore]
cf. : Vasco et al., 2013.
- Elaphoglossum rigidum (Aubl.) Urb. [syn. : E.
flaccidum (Fe) T. Moore]
cf. : Boudrie & Cremers, 2014.
- Hymenasplenium
repandulum
(Kunze)
L.
Regalado & Prada [syn. : Asplenium repandulum
Kunze]
cf. : Regalado Gabancho & Prada, 2011.
- Mickelia guianensis (Aubl.) R.C. Moran, Labiak &
Sundue [syn. : Lomagramma guianensis (Aubl.)
Ching]
- Mickelia nicotianifolia (Sw.) R.C. Moran, Labiak
& Sundue [syn. : Bolbitis nicotianifolia (Sw.) Alston]
cf. pour ces 2 taxons ci-dessus : Moran et al.,
2010.
- Moranopteris nana (Fe) R.Y. Hirai & Prado [syn.
: Micropolypodium nanum (Fe) A.R. Sm.]
- Moranopteris taenifolia (Jenman) R.Y. Hirai &
Prado [syn. : Micropolypodium taenifolium (Jenman)
A.R. Sm.]
cf. pour ces 2 taxons ci-dessus : Hirai et al., 2011.
- Mycopteris taxifolia (L.) Sundue [syn. : Terpsichore taxifolia (L.) A.R. Sm.]
cf. : Sundue, 2013.
- Phlegmariurus acerosus (Sw.) B.llg. [syn. :
Huperzia acerosa (Sw.) Holub]
- Phlegmariurus dichotomus (Jacq.) W.H. Wagner
[syn. : Huperzia dichotoma (Jacq.) Trevis.]
- Phlegmariurus taxifolius (Sw.) Lve & Lve [syn.
: Huperzia taxifolia (Sw.) Trevis.]
cf. pour ces 3 taxons ci-dessus : llgaard, 2012a,
2012b.
- Telmatoblechnum serrulatum (Rich.) Perrie, D.J.
Ohlsen & Brownsey [Blechnum serrulatum Rich.]
cf. : Perrie et al., 2014.
Par ailleurs, Trichomanes punctatum ssp. labiatum est
conserv pour linstant en Trichomanes bien quil
appartienne au genre Didymoglossum, la combinaison
de cette sous-espce en Didymoglossum ntant pas
encore tablie.

Rappel du bilan de la mission de


1980
La mission effectue par G. Cremers et J.-J. de Granville stait droule du 19 aot au 5 septembre 1980,
soit 18 jours. Lors de cette mission de dcouverte et de
reconnaissance de la flore gnrale (cf. de Granville,
1980), une partie du plateau tabulaire a t explore
(principalement partie sud-ouest), ainsi que certaines
criques et forts de pente des versants est et ouest du
sommet jusqu la cote 600. noter que les altitudes
indiques en 1980 ne correspondent pas exactement
celles que nous obtenons grce aux donnes gographiques actuelles de plus grande prcision. Par
exemple, laltitude du plateau tabulaire est indique
vers 750 m, alors quelle est actuellement tablie
830 m. De ce fait, les autres indications altitudinales
de 1980 sont prendre titre indicatif.
Un total de 105 spcimens de ptridophytes avait t
rcolt, correspondant 76 taxons. lpoque, plusieurs spcimens taient rests indtermins, ou dtermins seulement au genre. Depuis, la rvision des
spcimens de ptridophytes de lherbier CAY (M.
Boudrie en 2005-2006) a permis de dterminer
lensemble du matriel. De plus, une espce nouvelle
dElaphoglossum, ddie G. Cremers, a t dcrite
en 2008 dont lholotype est du sommet Tabulaire.
Les numros de rcoltes de ptridophytes de G. Cremers (71 spcimens) correspondent la squence
Cremers 6335 6525, ceux de J.-J. de Granville (34
spcimens) la squence Granville 3508 3732.
Outre le cortge des espces dites banales ou frquentes en Guyane depuis les basses altitudes jusquaux plus hauts sommets, plusieurs espces rares et
mme exceptionnelles ont t dcouvertes et ont immdiatement mis en vidence la grande richesse floristique de la zone du sommet Tabulaire.
Tout dabord, un petit groupe despces caractrise les
hauts sommets et les forts submontagnardes, audessus de 500 m daltitude. Citons :
Blechnum occidentale L.
Cyathea lasiosora (Kuhn) Domin
Cyathea marginalis (Klotzsch) Domin
Danaea ypori Christenh.
Diplazium expansum Willd.
Diplazium gracilescens (Mett.) C. Chr.
Elaphoglossum cremersii Mickel
Moranopteris taenifolia (Jenman) R.Y. Hirai & Prado
Mycopteris taxifolia (L.) Sundue
Polytaenium jenmanii (Benedict) Benedict
Serpocaulon caceresii (Sodiro) A.R. Sm.
Terpsichore staheliana (Posth.) A.R. Sm.
Trichomanes polypodioides L.
Puis, quatre espces, exceptionnellement rares, nont
t dcouvertes en Guyane quau sommet Tabulaire et
conservent ce statut encore actuellement. Il sagit de :
Diplazium radicans (Sw.) Desv.

133

Diplazium striatum (L.) C. Presl


Elaphoglossum praetermissum Mickel
Hymenasplenium repandulum (Kunze) L. Regalado &
Prada
Les informations et commentaires sur lcologie et la
distribution de chacun de ces taxons seront donnes
dans le chapitre relatif la mission de 2010.

Mission de 2010 (et complment


2014) :
Objectifs et statistiques
Lobjectif de cette mission tait de dresser un inventaire le plus complet possible des ptridophytes du
massif du mont Itoup sommet Tabulaire, de retrouver les espces dj dcouvertes en 1980 et notamment les plus rares, et de complter la liste dj tablie. Grce au rseau de layons ouvert par les quipes
de lONF et du PAG, plusieurs botanistes sont intervenus soit successivement, soit simultanment :
- du 26 fvrier au 2 avril 2020 (soit 36 jours) :
Olivier TOSTAIN (ECOBIOS)
Guillaume LOTARD (ECOBIOS ; rcoltes incluses
dans la squence Tostain).
- du 8 au 18 mars 2010 (soit 10 jours) :
Sophie GONZALEZ (IRD, Herbier de Guyane), avec
lquipe ONF Habitats (S. Guitet, O. Brunaux, J.P. Simonnet) et lquipe AMAP IRD (J.-F. Molino,
D. Sabatier, M. Tarcy).
- du 18 mars au 2 avril 2010 (soit 16 jours) :
Michel BOUDRIE (ptridologue indpendant, pris
sous ECOBIOS).
Vincent PELLETIER (ECOBIOS, ayant herboris
occasionnellement avec G. Lotard ; rcoltes incluses
dans la squence Tostain).
- Novembre 2014 :
Bertrand GOGUILLON (PAG), 2 spcimens rcolts
pour M. Boudrie.
Les 6 personnes dont les noms sont indiqus ci-dessus
en majuscules sont les seules avoir rcolt des spcimens de ptridophytes.
Au total, ce sont 263 spcimens de ptridophytes qui
ont t rcolts en 2010 et 2014 et qui se rpartissent
de la faon suivante :
- M. BOUDRIE : 165 spcimens, squence Boudrie
4309 4472, et 4615-4616 ;
- O. TOSTAIN : 73 spcimens, squence OT-5153
5975 ;
- S. GONZALEZ : 24 spcimens, squence Gonzalez
2068 2176.
62 % des rcoltes ont t ralises par M. Boudrie
(dont lobjectif tait essentiellement les ptridophytes), 28 % par lquipe O. Tostain G. Lotard
V. Pelletier (dont la mission tait lensemble de la
flore), et 10 % par S. Gonzalez (dont la mission tait
centre sur la caractrisation des habitats et sur les
plantes du sous-bois).

134

Au total (missions 1980 + 2010 + 2014), ce sont 368


spcimens qui ont t rcolts jusqu prsent sur
lensemble du massif du mont Itoup sommet Tabulaire.
La mission de 2010 a permis de rcolter 2,5 fois plus
de spcimens que lors de celle de 1980 qui tait une
expdition itinrante et de reconnaissance. Mais ceci a
t possible grce la prsence dun camp de base
permanent tout le temps de la mission, de plusieurs
fours herbiers pour le schage des spcimens, et de
plusieurs rotations hlico au cours desquelles les paquets de plantes dj sches ont t vacus sur
Cayenne.
noter que du 23 au 25 mars (rcoltes du 24 mars
2010), O. Tostain et G. Lotard ont fait une expdition
sur la savane roche de basse altitude (200 m), dite
savane roche Impossible , situe 6 km environ au
sud-ouest du plateau tabulaire dItoup. 11 spcimens
de ptridophytes ont t rcolts cette occasion et
sont inclus dans le total des 263 spcimens.
Droulement de la mission et sites explors (M. Boudrie) :
- 18 mars : Arrive depuis Sal en hlico, installation.
- 19 mars : Layon A, layon F sur le plateau jusqu
la 1re crique.
- 20 mars : Layon B jusqu la crique fougres
(versant est).
- 21 mars : Traitement des spcimens (enregistrement, schage).
- 22 mars : Layon B, petite savane roche et retour au
camp par les pentes ouest.
- 23 mars : Prospection aux abords du camp, traitement des spcimens.
- 24 mars : Criques recoupant le layon A, au-dessus
du camp, entre 650 et 700 m daltitude.
- 25 mars : Rcoltes de spcimens particuliers observs les jours prcdents le long des layons A, B et
environs.
- 26 mars : Traitement des spcimens (enregistrement, schage).
- 27 mars : Layon D, jusqu 1800 m.
- 28 mars : Layon D jusqu 1150 m, remonte et
descente de la dernire crique EW avant la grande
monte.
- 29 mars : Layon A, layon F jusqu lextrmit NE
du plateau, exploration de la grande cascade et de ses
abords.
- 30 mars : Remonte de la 1re crique coupant le
layon A, interrompue par les trombes deau.
- 31 mars : Descente jusque vers 400 m par la fort
et en longeant la crique situe au nord du layon C ;
remonte par le layon C.
- 1er avril : Layon A, layon F, plateau jusqu la
mare, exploration des abords de la mare. Traitement
des derniers spcimens, rangement.
- 2 avril : Rotation hlico, dpart sur Sal.

Bilan global des rcoltes


Taxons de la mission 1980 non retrouvs en
2010 :
Pratiquement tous les taxons observs et rcolts en
1980 ont t revus en 2010, avec un pourcentage de
russite de 95 %. En effet, sur les 76 de 1980, 73 ont
t revus.
Par contre, seuls 3 nont pas t revus:
- Blechnum occidentale L. (Blechnaceae) :
Espce trouve sur des rochers humides dans une fort
de pente des sommets nord o nous navons pas eu
loccasion daller en 2010. Il aurait t intressant de
retrouver la station et de faire des rcoltes complmentaires car B. occidentale est une espce trs rare
en Guyane et seulement trouve sur les sommets (Trinit, Dkou-Dkou, sommet Tabulaire, et massif des
Tumuc Humac). Nous lavons cherche en vain sur les
rochers humides des abords de la grande cascade de
lextrmit nord-est du plateau tabulaire.
- Elaphoglossum cremersii Mickel
(Dryopteridaceae):
Espce rcemment dcrite (Mickel, 2008) qui avait t
trouve le long dune des criques du versant nord ; il
est dautant plus regrettable de ne pas lavoir retrouve que lholotype est du sommet Tabulaire. Nous
aurions ainsi pu faire des rcoltes complmentaires de
ce rare taxon (sommet Tabulaire, monts Atachi Bakka,
monts Kotika) et lillustrer photographiquement, ce
qui na encore jamais t fait.
- Trichomanes ankersii C. Parker ex Hook. & Grev.
(Hymenophyllaceae) :
Le fait de ne pas avoir revu cette espce est, en fait, de
moindre dimportance car il sagit dune espce frquente en Guyane, mais loccasion de lui tomber dessus ne sest pas prsente.
Certains taxons, frquents en Guyane, ou bien suffisamment rcolts lpoque, en encore ne prsentant
pas de difficults de dtermination ou taxonomiques,
nont pas t rcolts nouveau, soit 19 taxons.

Taxons nouveaux pour le secteur :


En fonction des dterminations effectues ce jour
(spcimens ne posant a priori pas de problmes), 75
taxons se rvlent nouveaux pour le secteur prospect.
On constate que la liste tablie en 1980 est double, ce
qui est dj un rsultat significatif.

- soit nouveaux pour la Guyane (et dj connus ou


mme inconnus dans les autres pays du Bouclier
Guyanais) :

Taxons remarquables nouveaux pour la zone


tudie :
Ils sont actuellement au nombre de 8 (hormis les 2
espces nouvelles pour la Guyane cites au chapitre
suivant) :
- Blechnum gracile Kaulf. var. pilosum Boudrie &
Cremers (Blechnaceae):
Cette varit nouvelle a t dcrite en 2008 par M.
Boudrie et G. Cremers. Elle nest connue actuellement
quen Guyane franaise, au Surinam et dans louest du
Venezuela. En Guyane, les stations sont localises aux
massifs montagneux du centre (montagnes Bellevue
de lInini, Galbao, pic Matcho, savane roche Dachine) et de la moiti sud du pays (mont St-Marcel,
haut Marouini), souvent en fort de lisire
dinselbergs, entre 450 et 700 m daltitude, et de savanes roche (descendant jusqu 200 m daltitude), sur
des talus humides et des blocs granitiques. Une belle
population de cette varit rare a t dcouverte aux
abords de la grande cascade de lextrmit nord-est du
plateau tabulaire. La plante, en petits exemplaires
(frondes de 10 15 cm de long, mme fertiles), occupe une dalle rocheuse subverticale, humide et ombrage, sur laquelle poussait aussi la trs rare Gesneriaceae Cremersia platula. Un lieu entirement ddi
notre ami Georges Cremers. De plus beaux spcimens
du Blechnum, inaccessibles, sont galement prsents
sur des talus en hauteur, plus proches de la cascade.
Le dimorphisme foliaire, entre frondes striles et
frondes fertiles, est net, et caractristique de cette
varit.
- Doryopteris sagittifolia (Raddi) J. Sm. (Pteridaceae) :
Cette trs belle fougre au limbe sagitt est endmique
du Bouclier des Guyanes (Venezuela, 3 Guyanes et
Brsil). En Guyane, elle nest connue que de 4 localits, toutes situes proximit dinselbergs de la moiti
sud du pays (rgion de Sal, massif des Emerillons,
haut Marouini, massif des Tumuc Humac). Elle est
infode aux boulis rocheux, en lisire de savanes
roche et dinselbergs, et cest dans une situation similaire que nous lavons dcouverte sur les rebords occidentaux du massif, dans un chaos de blocs de gabbro
dcouvert.

Outre des espces frquentes ou relativement banales


en Guyane qui avaient chapp nos prdcesseurs et
qui ont permis utilement de complter la liste, plusieurs taxons remarquables ont t dcouverts. Ceuxci sont :
- soit nouveaux pour le massif du mont Itoup (extrmement rares et localiss en Guyane, dj dcouverts sur certains autres sommets) ;

135

- Elaphoglossum mitorrhizum Mickel


(Dryopteridaceae) :
Cet Elaphoglossum, caractris par un rhizome fin et
longuement rampant (seule espce dans ce cas, en
Guyane), est extrmement rare. Sa rpartition globale
comprend lAmrique centrale (Costa Rica, Panama)
et le Bouclier des Guyanes (Venezuela, 4 rcoltes
seulement au Guyana et une seule en Guyane franaise dans le massif de la Trinit). Toutes les rcoltes
des Guyanes se situent entre 500 et 1000 m daltitude.
La rcolte de la Trinit (Granville 6380bis, datant de
1984) est maintenant confirme par des rcoltes plus
rcentes en attente denregistrement dans la base Aublet2. La dcouverte de cet Elaphoglossum Itoup
reprsente donc la 2me localit de Guyane. Il est tonnant que cette espce nait pas t rcolte en 1980 car
il est frquent sur le plateau, ainsi que a et l dans la
fort de pente, o il peut constituer des manchons de
rhizomes entrelacs sur les troncs.
- Elaphoglossum minutum (Pohl ex Fe) T. Moore
(Dryopteridaceae) :
[syn. : Elaphoglossum revolutum (Liebm.) T.
Moore]
Ce petit Elaphoglossum reste rare en Guyane et mme
sur les 3 Guyanes (une seule rcolte au Guyana, alors
quil est connu dans toute lAmrique tropicale, depuis le sud du Mexique jusquen Bolivie) et passe
souvent inaperu. Jusqu prsent, il nest attest en
Guyane que par 5 rcoltes : une rcolte ancienne de
Leprieur, non localise ; 3 rcoltes rcentes de la zone
centrale et sud de la Guyane, situes entre 150 et
450_m daltitude (layon Roche Bateau Sal, mont
St-Marcel et monts Atachi Bakka), et une seule rcolte
de la moiti nord (rserve Trsor, dans la montagne de
Kaw). Sa prsence Itoup sinscrit donc dans laire
normale de sa rpartition, mais cest la premire fois
quil est rcolt si haute altitude (600 m).
- Hemionitis rufa (L.) Sw. (Pteridaceae) :
Fougre terrestre, au limbe vert clair et quelque peu
mou, aux axes poilus et aux sores longeant les nervures en ventail des pennes, H. rufa est une espce
large distribution notropicale, mais extrmement rare
en Guyane. Elle na fait lobjet que de 4 rcoltes,
toutes situes dans la moiti sud du pays (bassin du
Tampok et mont St-Marcel). La plante pousse soit sur
des lets de sauts, sur des affleurements granitiques en
fort de basse altitude, ou bien en fort basse ou lisire
de savane-roche. La station dcouverte, localise dans
des fourrs en lisire de la savane-roche situe 6 km
au sud-ouest du sommet dItoup, et 200 m
daltitude, constitue la 5me localit de Guyane et la
plus au nord.
- Lindsaea lancea (L.) Bedd. var. submontana
Boudrie & Cremers (Lindsaeaceae) :
Cette varit nouvelle a t dcrite en 2005 par M.
Boudrie et G. Cremers et est endmique des 3
Guyanes et navait jamais encore t photographie
sur le terrain. En Guyane, elle est localise certains
sommets entre 500 et 800 m daltitude (Trinit, monts

136

Bakra, Atachi Bakka), mais a t trouve aussi basse


altitude en basse Mana et, de ce fait, peut tre considre comme encore mconnue. Elle se reconnat la
grande taille de ses frondes et la forme caractristique des pennes. Itoup, en montant, les premires
plantes apparaissent dans les 50 m derniers mtres
avant datteindre les parties sommitales, mais les
belles populations se situent dans les forts de crte
des sommets satellites du plateau tabulaire (vers
750_m daltitude) dans des zones de fort claire non
broussailleuse et assez sche.
- Polypodium flagellare H. Christ (Polypodiaceae) :
Ce Polypode piphyte, au limbe presque diaphane, est
extrmement rare. Il nest connu quen Amrique
centrale (Costa Rica, Panama) et en Amrique du Sud,
seulement sur le plateau des Guyanes (Surinam,
Guyane). En Guyane, il na t dcouvert jusqu
prsent que trs ponctuellement dans la moiti nord
(montagne de Kaw) et sur quelques rares sommets du
centre (Galbao, monts Bellevue de lInini, monts Atachi Bakka). Nous ne lavons trouv quen un seul
endroit dune crique du versant ouest du mont Itoup,
vers 670 m daltitude, o il poussait sur un petit tronc
moussu surplombant la crique.
- Vittaria graminifolia Kaulf. (Pteridaceae) :
Cette petite fougre aux frondes filiformes de 5
10_cm de long a t identifie ultrieurement lors de
la rvision dtaille du matriel dherbier laiss en
attente. Par cette rvision, il sest avr que 4 spcimens de nos rcoltes (Boudrie 4367-4371-4377-4469)
correspondaient une espce encore non signale en
Guyane, Vittaria graminifolia Kaulf. Cette dcouverte
nous a incit rviser tout le matriel de lherbier
CAY identifi sous le nom de Vittaria lineata (L.) Sm.
qui lui ressemble, et nous avons pu ainsi mettre la
prsence de V. graminifolia en vidence pour des
rcoltes en provenance du massif Lucifer, du mont
Galbao et des monts Bellevue de lInini, donc toutes
de haute altitude, suprieure 450 m. Elle est galement prsente dans le massif des Tumuc Humac, ct
Brsil et Surinam. Cette espce est connue aux Antilles, et du sud du Mexique jusquen Bolivie.
Aprs rvision du matriel en attente de dtermination
ou de confirmation, signalons galement la prsence
nouvelle Itoup de certaines espces prsentant un
certain intrt par leur raret en Guyane mais non
remarquables car non infodes spcialement aux
forts daltitude (sauf Thelypteris pennata) :
- Adiantum multisorum A. Samp.
- Adiantum tetraphyllum Humb. & Bonpl. ex Willd.
- Hypolepis repens (L.) C. Presl
- Thelypteris pennata (Poir.) C.V. Morton
- Trichomanes cristatum Kaulf.
- Triplophyllum crassifolium Holttum

Taxons remarquables nouveaux pour la


Guyane :
Ils sont au nombre de deux, ce jour (juin
2015) :
-

Phlegmariurus acerosus (Sw.) B. llg. (Lycopodiaceae) :


Deux plantes (une grande et une petite) de ce Lycopode piphyte et pendant ont t trouves le dernier
jour de la mission par G. Lotard et V. Pelletier, lors
dune ultime excursion vers les sommets du nord
(spcimen OT-5973). De ce fait, il na malheureusement pas t possible de revenir sur le secteur en question pour approfondir les recherches. Ces plantes
poussaient sur de petites branches moussues dun
chablis dune zone de crte, vers 780 m daltitude, en
compagnie de Phlegmariurus dichotomus et P. taxifolius. La dtermination de ce Lycopode a t confirme
avec laide de B. llgaard, spcialiste mondial des
Lycopodiaceae et plus particulirement de celles des
Notropiques. Limportance primordiale de cette dcouverte majeure rside dans le fait que, non seulement cette espce est nouvelle pour la Guyane, mais
elle lest galement pour lensemble du Bouclier des
Guyanes. En effet, lespce ntait connue jusqu
prsent quen Amrique centrale (Guatemala, Costa
Rica, Panama), aux Antilles et en Amrique du Sud :
nord-ouest du Venezuela (tats dAragua, Falcn et
Tchira), Equateur, Bolivie, Brsil.
-

Stenogrammitis limula (H. Christ) Labiak


(Polypodiaceae) :
Cette petite fougre, appartenant lancienne famille
des Grammitidaceae, a t trouve en piphyte, sur
des grosses branches moussues, au sein du grand chablis du plateau tabulaire. Elle possde des frondes de
5-6 cm de longueur, limbe allong et trs troit,
penn (pennes courtes, triangulaires, un sore). Dans
ce groupe de Grammitid ferns , la prsence, notamment, de nervures simples, non fourchues, permet
de la rattacher ce nouveau genre dcrit rcemment
(Labiak, 2011). La dtermination a t confirme en
2015 par M. Sundue, spcialiste de ce groupe. Actuellement, cette espce nest connue quau Costa Rica, en
Equateur, au Venezuela et au Brsil. Ce genre Stenogrammitis est donc nouveau pour la Guyane et cette
espce S. limula est donc nouvelle pour les 3 Guyanes.
Les spcimens correspondants sont numrots Boudrie
4329 et 4615.

taxonomiques restent rsoudre, et notamment dans


les groupes de lancien Danaea elliptica et de ce
quon appelait auparavant D. nodosa dans les
Guyanes. Dans cette attente, il est prfrable de laisser
pour linstant les 4 spcimens sous le nom de Danaea sp. . Des spcimens en silica gel ont t envoys TUR dans le cadre de cette rvision. ce jour
(novembre 2014), ce problme reste en suspens.
- Dennstaedtia :
Les spcimens demandent une vrification dtaille,
en fonction de la rvision du genre effectue par Navarrete & llgaard (2000). En effet, certains spcimens rcolts pourraient peut-tre correspondre
Dennstaedtia dissecta. Il se pourrait aussi que les 2
espces, D. dissecta et D. obtusifolia, soient prsentes
Itoup.
- Diplazium :
Les spcimens attribus D. expansum et D. radicans
mritent une observation minutieuse. Lun des caractres porte sur la prsence ou non de poils microscopiques pars sur les axes (Cremers et al., 1993). Par
ailleurs, la diffrence morphologique globale entre
expansum et radicans sur le terrain, hormis le fait que
lextrmit de certaines frondes du radicans est bulbifre, ne parat pas vidente. Ne sagirait-il pas dune
seule et mme espce qui trouve alors en altitude des
conditions plus favorables son dveloppement ? Ce
problme na pas encore t abord.
- Elaphoglossum :
Un spcimen (OT-5153) reste confirmer compte
tenu des difficults de dtermination de certaines
espces (groupe cuspidatum laminarioides longicaudatum). Restent galement encore en cours dtude
(probablement espce nouvelle ?) les spcimens Boudrie 4335-4357-4401-4616, Gonzalez 2085, OT-5439,
correspondant un grand Elaphoglossum frquent et
piphyte sur de gros troncs darbres du plateau tabulaire, frondes longues de 30 50 cm, ptiole non
cailleux et limbe large, coriace et luisant. Il ne
correspond pas E. discolor comme nous lavions
suppos initialement.
- Pecluma :
Tous les spcimens de Pecluma, rangs pour linstant
sous le nom de P. pectinata, demandent un contrle
dtaill. La prsence, cette altitude, dautres espces
(P. pilosa, P. ptilodon) reste possible. Ce problme
na pas encore t abord.

Spcimens en cours dtude :


Un total de 12 spcimens, correspondant 4 genres,
reste actuellement en attente de confirmation de dtermination. Ils concernent les genres suivants :
- Danaea :
La rvision de ce genre, initie mais non termine par
M. Christenhusz (Christenhusz, 2006, 2010 ; Christenhusz & Tuomisto, 2006), est actuellement reprise
par H. Tuomisto (TUR). De nombreux problmes

137

Synthse des ptridophytes du


massif du sommet Tabulaire
Bilan des taxons et des familles
ce jour, ce sont donc 151 taxons de ptridophytes
qui ont t identifis formellement sur lensemble du
massif du sommet Tabulaire, correspondant 44 % de
la ptridoflore guyanaise. Dores et dj, on constate
que ce nombre de taxons inventoris jusqu prsent
sur ce massif dpasse celui de massifs dj reconnus
pour leur biodiversit comme les monts Atachi Bakka
avec 127 taxons (Cremers, 1991), les monts Bellevue
de lInini (124), les monts Kotika (112), le mont Galbao (123), ou, plus au nord, le massif de la Trinit
(133). Il est quivalent celui tabli pour lensemble
de la Rserve Naturelle des Nouragues (144). Seul, le
secteur de Paul-Isnard (Lucifer + Dkou-Dkou), avec
155 taxons, dpasse Itoup, mais ceci est d des
prospections cibles plus intensives.

Par contre, on notera le faible nombre despces rpertories pour les familles des Lindsaeaceae et des Selaginellaceae.
Nous dressons une synthse cologique et chorologique tout dabord par taxons, en ne dtaillant que les
taxons remarquables, puis par milieux et tranches
altitudinales.

Les taxons remarquables


Parmi les taxons de ptridophytes du massif du sommet Tabulaire, plusieurs, au nombre de 28, sont considrs comme remarquables pour diverses raisons :
- Seule station connue de Guyane (3 espces), ou
mme des 3 Guyanes (4 espces) ; ces taxons sont
indiqus en gras ;
- Stations connues en Guyane en nombre trs rduit et
plantes infodes des habitats localiss : forts
nuages, de moyenne altitude, submontagnarde, plateaux latritiques de haute altitude, lisires de savanes
roches sur inselberg, au-dessus de 500 m.
- Taxons identifis comme dterminants , au
nombre de 25, dans le cadre de la rvision (CSRPN,
2013) de lancienne liste des espces patrimoniales de
Guyane qui datait de 2000.
Ces taxons remarquables sont classs ci-dessous par
ordre alphabtique des familles, puis noms de genres,
selon la rcente classification des Fougres et Lycophytes (Christenhusz et al., 2011).
- Aspleniaceae
Hymenasplenium repandulum (Kunze) L. Regalado
& Prada

12

- Athyriaceae
Diplazium expansum Willd.
Diplazium gracilescens (Mett.) C. Chr.
Diplazium radicans (Sw.) Desv.
Diplazium striatum (L.) C. Presl

58

- Blechnaceae
Blechnum gracile Kaulf. var. pilosum Boudrie &
Cremers
Blechnum occidentale L.

Ce nombre de 151 taxons correspond donc 21 familles, dont le dtail est donn dans le tableau cidessus, et 58 genres.
Ce tableau montre la prdominance des Polypodiaceae
avec, notamment, lancienne famille des Grammitidaceae, incluse maintenant dans celle des Polypodiaceae,
et les ex-Grammitis bien reprsents Itoup, et avec
les espces assez nombreuses des genres Microgramma et Serpocaulon. Une famille trs bien reprsente
est celle des Athyriaceae, avec toutes les espces de
Diplazium de Guyane, prsentes Itoup. Les Dryopteridaceae sont galement nombreuses, avec plusieurs
Elaphoglossum, tous les Bolbitis et Polybotrya de
Guyane. Les Cyathea sont au nombre de 6 sur les 11
espces que possde la Guyane. Pour les Pteridaceae,
la prsence des 4 Polytaenium de Guyane, de 9 Adiantum, de lAdiantopsis, du Doryopteris et dun Hemionitis enrichit considrablement cette famille.

138

- Cyatheaceae
Cyathea lasiosora (Kuhn) Domin
Cyathea marginalis (Klotzsch) Domin
- Dryopteridaceae
Elaphoglossum cremersii Mickel
Elaphoglossum minutum (Pohl ex Fe) T. Moore
Elaphoglossum mitorrhizum Mickel
Elaphoglossum praetermissum Mickel
- Hymenophyllaceae
Trichomanes polypodioides L.
- Lindsaeaceae
Lindsaea lancea (L.) Bedd. var. submontana Boudrie
& Cremers

- Lycopodiaceae
Phlegmariurus acerosus (Sw.) B. llg.
- Marattiaceae
Danaea ypori Christenh.
- Polypodiaceae
Moranopteris taenifolia (Jenman) R.Y. Hirai & Prado
Mycopteris taxifolia (L.) Sundue [syn. : Terpsichore
taxifolia (L.) A.R. Sm.]
Polypodium flagellare H. Christ
Serpocaulon caceresii (Sodiro) A.R. Sm.
Stenogrammitis limula (H. Christ) Labiak
Terpsichore staheliana (Posth.) A.R. Sm.
- Pteridaceae
Doryopteris sagittifolia (Raddi) J. Sm.
Hemionitis rufa (L.) Sw.
Polytaenium jenmanii (Benedict) Benedict
Vittaria graminifolia Kaulf.
- Thelypteridaceae
Thelypteris pennata (Poir.) C.V. Morton
Des informations cologiques et chorologiques sur
quelques taxons remarquables qui nont pas t traits
dans la partie prcdente sont donnes ci-dessous.
- Hymenasplenium
repandulum
(Kunze)
L.
Regalado & Prada (Aspleniaceae) :
Cette Aspleniaceae, qui appartient au genre Hymenasplenium dont lun des principaux caractres est la
prsence dun rhizome rampant, a t trouve ds
1980 Itoup, sur les rochers humides des bords de
criques, vers 750 m daltitude. Nous lavons observe
plusieurs reprises dans ce biotope identique, le long
des criques du versant ouest, vers 680 m daltitude, a
et l et peu frquent, en gnral sur de petits blocs
humides et un peu moussus pratiquement dans le
cours de petits criquots. Cest la premire fois que des
photos des plantes de Guyane sont prises. Cette population isole est la seule des 3 Guyanes et du Bouclier
Guyanais. Les autres populations connues au monde
se situent dans les Andes dEquateur et du Prou (o
la plante est piphyte), constituant pour la Guyane une
aire disjointe tout fait singulire.
- Les fougres arborescentes, Cyathea lasiosora et
C. marginalis (Cyatheaceae) :
Nous reviendrons plus loin sur labondance des Cyatheaceae en gnral dans le massif dItoup. Mais
nous mettons laccent ici sur 2 espces, trs rares en
Guyane, et toujours infodes la fort submontagnarde nuages des hauts sommets.
- Cyathea lasiosora (Kuhn) Domin :
Cest la plus rare des 2 espces. Elle na t trouve
quen 3 localits (monts Atachi Bakka, monts Kotika
et sommet Tabulaire). Sa distribution globale couvre
le nord-ouest de lAmrique du Sud, de la Colombie
la Guyane, et vers le sud jusquen Bolivie. Comme la
plupart des Cyathea des Guyanes, elle possde un
caudex extrmement grle, de quelques centimtres de
diamtre, et de 2 3 m de haut. Le limbe des frondes
est finement dcoup. Lors de la mission de 2010,

nous ne lavons rencontre quen un seul endroit, en


fond de vallon dune des criques du versant ouest
(layon D), et en lisire dune petite clairire
Cordia nodosa, Leandra sp. et Adiantum terminatum,
630 m daltitude. Elle est donc trs rare sur le massif.
- Cyathea marginalis (Klotzsch) Domin :
Endmique du Bouclier des Guyanes (3 Guyanes et
Venezuela dans les tats dAmazonas et de Bolvar),
est galement trs rare. Les seules localits de Guyane
sont connues dans la zone centre-sud (monts Atachi
Bakka, monts Bellevue de lInini, monts Kotika et
sommet Tabulaire). Elle se reconnat son limbe
quelque peu coriace, luisant, 2 fois dcoup et aux
cailles blanchtres du ptiole. Les sores constituent
un liser marginal en bordure des pennes lobes. Cette
espce a t rencontre toujours en petites populations
a et l, mais toujours rares (sur le layon B notamment, 780 m daltitude), dans des zones de col, en
fort de terre ferme, non marcageuse et sans crique
proximit.
- Danaea ypori Christenh. (Marattiaceae) :
Cette espce est considre actuellement comme endmique de Guyane, ses stations tant limites seulement 3 massifs (Petites Montagnes Tortue, monts
Bellevue de lInini et sommet Tabulaire). Elle a t
confondue par le pass avec une autre espce, Danaea
moritziana C. Presl qui est connue dans le quart nordouest de lAmrique du Sud, le sud-est du Brsil, ainsi
quen Amrique centrale (Panama), ce qui a conduit
dcrire la plante de Guyane sous un autre nom (Christenhusz, 2010). Nous avons eu la chance de retrouver
une population de ce rare Danaea sur un talus argileux
subvertical, le long dune crique recoupant le layon D,
sur le versant ouest du mont Itoup, vers 650 m
daltitude.
- Diplazium gracilescens (Mett.) C. Chr. (Athyriaceae) :
Alors que cette espce avait t rcolte 2 reprises
en 1980 par G. Cremers, notamment sur le versant
ouest, et, bien que nous layons recherche activement
mais vainement, la plante a t rcolte par S. Gonzalez en un seul endroit (layon A, versant est, en bordure
dune crique vers 650 m daltitude). Ce Diplazium,
dont la distribution globale est limite au nord-ouest
de lAmrique du Sud (3 Guyanes, Colombie, Prou),
est trs rare en Guyane et infod aux forts submontagnardes du centre-sud (monts Atachi Bakka, monts
Bellevue de lInini, monts Kotika, sommet Tabulaire).
- Diplazium radicans (Sw.) Desv. (Athyriaceae) :
Ce Diplazium est extrmement rare. Il nest connu, en
Guyane, quau mont Itoup. Quant sa rpartition
globale, il ne semble connu que sur le plateau des
Guyanes (une rcolte au Surinam seulement sa prsence au Brsil reste confirmer). Nous lavons trouv 2 reprises, toujours avec Diplazium expansum,
une fois dans un bas-fond humide marcageux du
versant est ( crique Fougres ), vers 750 m
daltitude, une autre fois, sur les pentes sud des sommets nord (layon D), vers 780 m daltitude, sur une

139

zone de suintement, Alsophila cuspidata, et en lisire de cambrouse Ichnanthus. Cette espce se


caractrise par la prsence de bulbilles linsertion
des pennes de la moiti distale des frondes. La longueur (jusqu 2 m) et le poids des frondes fait que
leur extrmit se courbe vers le sol et permet aux
bulbilles de senraciner.
- Diplazium striatum (L.) C. Presl (Athyriaceae) :
Contrairement lespce prcdente, D. striatum
possde une distribution plus largement notropicale,
mais, pour les Guyanes, il nest connu quau Guyana
et en une seule station en Guyane. Il se caractrise par
des frondes pennes, pennes lobes ou assez profondment pinnatifides, et un port lgrement arborescent
(tronc de 15 20 cm). Nous lavons essentiellement
rencontr dans la partie suprieure du layon A juste
avant datteindre le plateau tabulaire, vers 780 m
daltitude, o il fait de belles populations en fort
claire, en lisire de cambrouses, avec Alsophila cuspidata, et les autres Diplazium (D. expansum et D.
grandifolium).
- Elaphoglossum praetermissum Mickel
(Dryopteridaceae) :
Cette espce, endmique du Bouclier des Guyanes
(Venezuela, Guyana, Guyane franaise, Brsil : rcolte de J.-J. de Granville de la haute Jari, Par, in
herb. CAY), nest connue de Guyane que du sommet
Tabulaire o elle avait dj t rcolte en 1980 par G.
Cremers. Il sagit dune espce difficile identifier et
dont la dtermination initiale des spcimens rcolts
en 2010 a t confirme par J.T. Mickel (NYBG). Elle
se caractrise par un rhizome courtement rampant
frondes assez nombreuses et rapproches, et un ptiole
parsem dcailles beige brun-clair avec des phyllopodes noirtres bien marqus.
- Polytaenium jenmanii (Benedict) Benedict
(Pteridaceae) :
Contrairement aux 3 autres espces de Polytaenium
(P. cajenense, P. feei, P. guayanense) qui sont toutes
piphytes, P. jenmannii est saxicole et pousse sur les
blocs humides et moussus des criques. Nous lavons
trouv dans la plupart des criques du versant ouest, audessus de 500 m daltitude, partir du moment o le
cours de la crique est occup par de gros blocs arrondis de gabbro. Endmique des 3 Guyanes, il a t
rcolt en Guyane dans les principaux massifs montagneux de la partie centre et sud du pays (Nouragues,
Sal, monts Bellevue de lInini, sommet Tabulaire,
monts Kotika, mont Belvdre, massif des Tumuc
Humac).
- Trichomanes polypodioides L.
(Hymenophyllaceae) :
Sur lensemble du massif au-dessus de 500 m
daltitude, nous navons trouve cette Hymenophyllaceae hmi-piphyte, au rhizome long, fin et grimpant,
que sur les caudex de Cyathea oblonga, et seulement
associe cette fougre arborescente, dans les basfonds humides ou le long des criques. Cette espce,
large distribution notropicale, est cependant rare en
Guyane et est localise (hormis une station excentre

140

basse altitude sur le bas-Approuague) aux forts submontagnardes des principaux massifs (sommet Tabulaire, monts Bellevue de lInini, monts Atachi Bakka,
Galbao, Trinit).

Distribution des taxons par milieux et


tranches altitudinales
Pour les diffrents milieux rencontrs lors de cette
mission, nous donnons ci-dessous un aperu des principales espces rencontres, pouvant caractriser
chaque milieu. Les milieux seront dclins par altitude
dcroissante. Les taxons remarquables sont indiqus
en gras.

Le plateau tabulaire et ses sous-milieux


(830 m daltitude) :
Alors que la fort de pente, avant larrive sur le plateau, ou mme les criques du versant ouest, avaient
montr une luxuriance particulirement prononce des
fougres, le plateau se rvle tre relativement pauvre
en espces terrestres, notamment pour certaines espces auxquelles on aurait pu sattendre dans un tel
milieu et une telle altitude. Par contre, la richesse en
piphytes est trs nette, mais la strate forestire infrieure nest pas particulirement moussue. Toutefois,
nous avons pu bnficier de la prsence dun grand
chablis, rcent, qui a t une mine fougres piphytes diverses. La diversit en espces terrestres
augmente, bien sr, lapproche de tout bas-fond
marcageux.
- Ptridophytes terrestres : Cyathea oblonga (a et l),
Cyclodium guianense, Triplophyllum hirsutum.
- Hmi-piphytes : Lomariopsis japurensis, L. prieuriana, Olfersia cervina, Polybotrya osmundacea, P.
caudata.
- Epiphytes basses : Anetium citrifolium, Asplenium
rutaceum (assez frquent la base des troncs, et en
trs beaux exemplaires), Elaphoglossum minutum, E.
mitorrhizum (frquent), E. rigidum, E. sp. (trs frquent), Hymenophyllum polyanthos, Microgramma
dictyophylla, Mycopteris taxifolia ( et l), Nephrolepis rivularis, Oleandra articulata, Polypodium
dulce, Polyphlebium diaphanum (trs abondant), Serpocaulon caceresii (frquent), Trichomanes crispum,
Vittaria graminifolia
- Epiphytes de haute canope : Lellingeria suspensa,
Moranopteris taenifolia, Mycopteris taxifolia,
Phlegmariurus dichotomus, P. taxifolius, Microgramma lycopodioides, Oleandra articulata, Stenogrammitis limula (nouveau pour les Guyanes), Trichomanes
cristatum
- Bas-fond marcageux de la 1re crique du layon F :
Cyclodium inerme (dans la pente du vallon), abondance de Cyathea oblonga aux troncs couverts de
Trichomanes polypodioides, Diplazium expansum

(abondant), Polybotrya osmundacea, Salpichlaena


volubilis, Serpocaulon caceresii, Thelypteris leprieurii.
-

La mare :

La dcouverte dune mare, sur le plateau, a t un


vnement capital de la mission de 2010. Cette mare,
trs certainement presqu sec en pleine saison sche,
occupe une superficie denviron 3000 m et est ceinture par une fort marcageuse en saison des pluies.
Elle constitue la source dune crique qui coule vers le
nord-ouest, puis le nord-est, sur le versant nord du
plateau tabulaire. Lexploration des abords de cette
mare a permis de dresser la liste des espces. On notera une assez grande richesse en piphytes, plus forte
que sur lensemble du plateau. Quelques espces terrestres, toutefois banales, ont t observes (Thelypteris leprieurii, Trichomanes pinnatum, Triplophyllum
hirsutum).
Parmi les principales piphytes, citons le classique
Nephrolepis rivularis, lomniprsent Serpocaulon
caceresii, plusieurs Elaphoglossum (E. mitorrhizum,
E. rigidum, E. sp.), Asplenium rutaceum, des Hymenophyllaceae (Polyphlebium diaphanum, le minuscule
Didymoglossum angustifrons, Hymenophyllum hirsutum). Quelques Cyathea (C. cyatheoides et, comme
toujours, C. oblonga) ont t notes. En hmipiphyte, Polybotrya osmundacea. Mais lintrt ptridologique de cette mare et de ses abords rside dans
la prsence dune population de Serpocaulon richardii (Polypodiaceae au limbe poilu) dont le rhizome
rampe longuement, presque mme le sol, sur la partie exonde des contreforts moussus des arbres de la
fort basse marcageuse entourant la mare, ct ouest.
Par ailleurs, une espce, banale en lisire des savanes
marcageuses de la zone ctire de Guyane, pousse ici
en une vaste population sur le bord de la mare : Telmatoblechnum serrulatum, dont la prsence si
haute altitude (830 m) est quelque peu singulire.
Toutefois, rappelons que cette espce existe aussi dans
certaines mares du plateau Lucifer, 545 m daltitude.

layon B, ainsi que sur le layon D, nous avons pu observer lapparition progressive ds 750 m de Lindsaea
lancea var. submontana, en belles populations sur les
crtes. Nous avons galement not, entre autres,
comme terrestres, la rare Cyatheaceae Cyathea marginalis, C. cyatheoides, Danaea geniculata, Selaginella producta, et les piphytes et hmi-piphytes Asplenium auritum, A. juglandifolium, A. rutaceum, Cochlidium serrulatum, Elaphoglossum glabellum, E. mitorrhizum, E. praetermissum, Lomariopsis prieuriana,
Moranopteris taenifolia, Phlegmariurus acerosus,
Polytaenium guayanense, P. cajenense, P. feei, Terpsichore staheliana, Vandenboschia radicans etc., sans
compter les accompagnatrices plus banales pour le
secteur (Bolbitis semipinnatifida, Didymoglossum
kapplerianum, Mycopteris taxifolia, Polybotrya caudata, Polyphlebium diaphanum, Polypodium dulce,
Salpichlaena volubilis, Serpocaulon caceresii, etc.).
Cest sur ces forts de crte qua t dcouvert le
Lycopode piphyte pendant, Phlegmariurus acerosus,
nouveau pour les Guyanes, associ Phlegmariurus
dichotomus et P. taxifolius.
-

Les ttes de criques et bas-fonds-marcageux :

Une tte de crique du versant est, vers 750 m


daltitude, particulirement marcageuse, a montr
une grande abondance des fougres. Nous y avons
not les espces terrestres suivantes : Bolbitis semipinnatifida, Cyathea oblonga, avec ses troncs
recouverts de Trichomanes polypodioides, Cyathea
spectabilis, Cyclodium meniscioides, de petites populations, sur lots sablonneux de bord de crique, de
Danaea leprieurii, de superbes exemplaires, bien
bulbifres, de Diplazium radicans, Selaginella producta, Thelypteris leprieurii, les hmi-piphytes Olfersia cervina, Polybotrya caudata, P. osmundacea, la
Blechnaceae grimpante Salpichlaena volubilis, et, en
piphyte, Asplenium serratum, Campyloneurum repens, Elaphoglossum rigidum, E. sp. Mais cette liste
est loin dtre exhaustive, car lexploration de ce secteur, plus en aval, mrite dtre poursuivie.

La fort de crte et bas-fonds marcageux


entre 700 et 830 m :
-

Fort de crte

Les forts de crte dune altitude lgrement infrieure


celle du grand plateau tabulaire, ainsi que la fort de
pente juste en-dessous, se sont rvles riches en fougres (dont certaines absentes, semble-t-il de ce grand
plateau). Par exemple, les dernires montes vers les
crtes sommitales, plus abruptes (entre 750 et 830 m),
traversent parfois une fort de pente en lisire de cambrouse qui est dune grande luxuriance en fougres.
Outre de superbes populations de fougres arborescentes (Alsophila cuspidata principalement), nous y
avons not Adiantum tetraphyllum, Didymoglossum
angustifrons, Diplazium expansum, D. grandifolium,
D. radicans, D. striatum, Polybotrya osmundacea,
Lindsaea lancea var. lancea, Sur les crtes du

141

La fort de pente et les criques du versant


ouest entre 500 et 700 m :
-

La fort de pente entre 500 et 700 m :

La fort de pente ne montre pas de richesse particulire en ptridophytes, dans le sens de receler des
taxons exceptionnels. On retrouve, en effet, des espces classiques la fois de la fort de basse altitude,
et quelques lments, principalement piphytes, de la
fort suprieure. Les zones plus riches en diversit
correspondent des suintements plus ou moins marcageux o lon peut rencontrer des espces de vallons
et de bords de criques.
Parmi les espces terrestres du sous-bois de pente,
nous avons not, selon les endroits, quelques rares
Adiantum (cajennense, leprieurii, et occasionnellement adiantoides, paraense, et obliquum), les trs
abondants Cyclodium inerme et surtout Cyclodium
guianense, Bolbitis semipinnatifida, Metaxya rostrata
(pas trs frquent), Thelypteris abrupta, Triplophyllum
hirsutum, Lindsaea lancea var. lancea, L. quadrangularis ssp. antillensis, Trichomanes pinnatum, Ont t
rencontrs, a et l, de faon occasionnelle, dans des
zones plus humides, Ctenitis refulgens, Cyathea cyatheoides, C. oblonga, Didymochlaena truncatula (assez rare), Diplazium grandifolium, D. cristatum, T.
nephrodioides, Pteris altissima, P. pungens, Tectaria
trifoliata, Thelypteris gemmulifera signaler la
prsence dHypolepis repens (layon A) implant sur
un gros tronc terre dans une zone de chablis ancien
(le dveloppement de cette fougre cet endroit a sans
doute t favoris par louverture lie au chablis).
Les piphytes basses comprennent Campyloneurum
repens (trs frquent), Didymoglossum kapplerianum,
D. krausii, Elaphoglossum luridum (rare), Pecluma
pectinata, Polytaenium feei, P. guayanense, Serpocaulon caceresii, Trichomanes pedicellatum
Epiphytes de haute canope, observes sur des chablis
: Asplenium auritum, Elaphoglossum glabellum, E.
herminieri, Microgramma percussa, Niphidium crassifolium, Serpocaulon triseriale
Hmi-piphytes : Lomariopsis japurensis, L. prieuriana, Mickelia guianensis, Polybotrya caudata.
-

Les criques entre 500 et 700 m

Lexploration de diverses criques du versant ouest a


montr que chaque vallon a sa particularit, en ce sens
que, selon les criques, certaines espces peuvent tre
absentes ou prsentes. Mais il est sr que la prospection dtaille de chacun des vallons, de laval vers
500_m daltitude jusqu la tte de crique permettrait
de retrouver lensemble des taxons indiqus dans la
plupart des criques du versant ouest. Il faut remarquer,
comme le soulignait dj J.-J. de Granville en 1980, la
forte prsence, et mme abondance, des fougres
arborescentes (notamment Cyathea oblonga) dans ces
milieux dans lesquels le ptridologue ne se lasse pas
dvoluer noter galement labondance des diff-

142

rentes espces de Bolbitis et de Mickelia, du Cyclodium guianense et du Polyphlebium diaphanum (qui,


par contre, est peu frquent et en populations isoles
en fort de basse altitude) et la raret des Tectaria et
espces varies de Thelypteris. Les taxons remarquables sont indiqus en gras.
Espces terrestres des abords des criques et des pentes
proches : Adiantum paraense, Bolbitis semipinnatifida, B. serratifolia, Alsophila cuspidata, Cyathea
oblonga et son Trichomanes polypodioides, Cyclodium meniscioides, C. guianense, Danaea lepreurii,
D. ypori, D. simplicifolia, Dennstaedtia obtusifolia,
Lindsaea divaricata, L. quadrangularis ssp. antillensis, Tectaria incisa, T. trifoliata, Thelypteris abrupta,
T. gemmulifera, T. leprieurii, Trichomanes diversifrons, Trichomanes pinnatum
Espces saxicoles, sur blocs moussus : Asplenium
abscissum, Didymoglossum angustifrons, D. membranaceum, Dracoglossum sinuatum, Hymenasplenium
repandulum, Mickelia nicotianifolia, Polyphlebium
diaphanum, Polytaenium jenmanii, Polypodium
dulce, Polybotrya fractiserialis, Vandenboschia radicans
Espces piphytes et hmi-piphytes des abords de la
crique : Campyloneurum repens, Elaphoglossum
praetermissum, E. raywaense, E. rigidum, Lomariopsis japurensis, Microgramma reptans, M. tecta, Olfersia cervina, Polybotrya caudata, Polytaenium feei,
Polypodium flagellare, Trichomanes punctatum
ssp.labiatum

Les autres milieux particuliers entre 500 et


830 m daltitude :
-

La grande cascade du nord-est :

Cette cascade, situe au nord-est du plateau tabulaire,


a t repre par O. Tostain lors dun survol de la zone
en dbut de mission. Il a donc t dcid de sy rendre
grce laccs rendu possible par louverture du layon
F. Lexploration des abords de cette cascade, a rvl
la prsence dune ptridoflore dun grand intrt. Dans
la fort basse du rebord nord-est du plateau, nous
avons notamment observ Lindsaea lancea var. falcata et de belles populations de Danaea geniculata dans
les pentes. Mais il faut surtout mentionner la dcouverte du rare Blechnum gracile var. pilosum sur une
dalle rocheuse subverticale et humide, avec Selaginella radiata et surtout la trs rare Gesneriaceae Cremersia platula, ainsi que, sur des talus ombrags, dans la
descente menant la cascade. la base des falaises,
nous avons pu observer de trs belles populations
dAdiantopsis radiata, mais, malheureusement, aucun
Blechnum occidentale, ni dans les falaises, ni dans les
rochers prs de la cascade, comme nous avions pens
esprer le trouver. Dans les blocs rocheux, en aval de
la cascade, ont t notes Asplenium abscissum, A.
rutaceum, Bolbitis serratifolia, Didymoglossum kapplerianum, Mickelia nicotianifolia, Polypodium dulce,
Trichomanes pinnatum, Vandenboschia radicans

La petite savane roche de louest

Au cours de la semaine prcdant le 18 mars, O. Tostain et G. Lotard avaient pu reprer certains secteurs
ou milieux particuliers riches en fougres que nous
avons revisits ensemble par la suite. Nous sommes
donc revenus sur une zone trs particulire, situe sur
le versant ouest, dans la pente, quelques centaines de
mtres louest du layon B (alt. 750 m). Il sagit dun
chaos de blocs de gabbro, plus ou moins dcouvert,
occup par une vgtation assimile celle dune
lisire de savane roche, sur une superficie denviron
2500 m. Lintrt ptridologique de cette zone rside
dans la prsence dune trs belle population de Doryopteris sagittifolia, associe 2 Selaginella terrestres, S. sulcata dans des zones de fourrs et S. flagellata sur les rochers et talus ombrags. La fort du
versant est, bordant cette zone ouverte, est abondamment moussue, mais les piphytes restent toutefois peu
nombreuses (Asplenium rutaceum, Microgramma
reptans, M. tecta, Pecluma pectinata, Polypodium
dulce, Serpocaulon caceresii).

Les cambrouses

Certaines pentes du versant sud du plateau tabulaire et


des sommets plus au nord sont occupes par de vastes
cambrouses bambous (Ichnanthus breviscrobs). Lors
de la traverse de deux dentre elles (respectivement
vers 650 et 750 m daltitude), nous avons observ des
populations parses dHypolepis repens (Dennstaedtiaceae aux grandes frondes triangulaires, aux axes
pineux). Les rcoltes en Guyane dHypolepis restent
toujours rares et occasionnelles. On peut rencontrer
ces plantes aussi bien basse altitude que sur les plus
hauts sommets. Ce genre a fait lobjet dune rvision
rcente pour les Guyanes (Schwartsburd et al., 2012).
Les lisires des cambrouses sont aussi un lieu de prdilection pour la grande fougre arborescente Alsophila cuspidata qui forme de beaux peuplements dans la
fort claire de lisire, avec des individus de 5 6 m de
hauteur. La vision de ces grandes fougres arborescentes, mergeant de la vgtation, dans les brumes
matinales, est toujours un extraordinaire spectacle.

La fort de pente entre 200 et 500 m :


-

Les clairires Cordia nodosa

Nous avons observ ce milieu particulier a et l dans


la fort de pente du versant ouest, mais sur des endroits peu pentus. Ces clairires Cordia nodosa
sont, en fait, des zones, denviron 30 m de diamtre,
constitues de petits arbres (Cordia nodosa essentiellement), de 10-15 m de haut, clairsems, aux troncs
moussus et recouverts de nombreuses piphytes. Le
sol de ces zones est entirement recouvert dune espce de Melastomataceae, du genre Leandra, actuellement indtermine, mlange certaines fougres
terrestres comme Adiantum terminatum ou Adiantopsis radiata. Cest galement en lisire dune de ces
clairires, non loin dune crique, que nous avons trouv un petit peuplement de Cyathea lasiosora. Les
fougres piphytes sont curieusement concentres sur
les troncs moussus de ces zones qui constituent des
claircies dans le sous-bois et leur permettent de retrouver un milieu sensiblement identique celui de la
haute canope. Il sagit, pour certaines, despces de
fougres peu frquentes sur lensemble du massif
dItoup ou rares en gnral (Asplenium auritum,
Asplenium salicifolium, Campyloneurum phyllitidis,
Cochlidium furcatum, Didymoglossum krausii, Elaphoglossum laminarioides, E. mitorrhizum, Hymenophyllum decurrens, H. hirsutum, H. polyanthos, Lellingeria suspensa, Moranopteris taenifolia, Microgramma reptans, Pecluma pectinata, Polytaenium
feei, Terpsichore staheliana, Vittaria graminifolia).

Le sous-bois

Bien que la plupart de nos trajets se soient situs audessus de 500 m daltitude, nous avons fait une reconnaissance jusqu 400 m daltitude. Par ailleurs,
quelques spcimens de ptridophytes ont t rcolts
par G. Lotard et O. Tostain le long du layon menant
la savane roche situe 6 km au sud-ouest dItoup.
Leur lourd et volumineux chargement ne leur a pas
permis de faire des rcoltes plus dtailles. Cependant,
une espce de la fort de basse altitude a t rcolte
(Thelypteris poiteana, qui semble absente au-dessus
de 400 m). La traverse de la grande futaie claire,
entre 500 et 400 m daltitude est trs pauvre en fougres et, de surcrot, banales (Cyclodium inerme,
Adiantum leprieurii et Triplophyllum crassifolium).
- Les criques et bas-fonds marcageux entre 200 et
500 m
La diversit augmente autour des criques et nous
avons eu loccasion dobserver des espces de la fort
de basse altitude qui semblent absentes (ou trs rares)
au-dessus de 500 m daltitude (Danaea nigrescens,
Thelypteris glandulosa). Vers 400 m, le long de ces
criques, on retrouve la fois des lments classiques
de la fort de basse altitude (Adiantum cajennense, A.
obliquum, Dracoglossum sinuatum, Lindsaea quadrangularis ssp. antillensis, Pteris pungens, Tectaria
trifoliata, Thelypteris abrupta, T. macrophylla, et
dj quelques espces des niveaux suprieurs (Polytaenium jenmanii, Bolbitis serratifolia, par exemple).
Par endroits, en pleine fort, des zones de suintements
quelque peu marcageux permettent le dveloppement
de belles populations de Thelypteris gemmulifera,
associ Thelypteris abrupta et Ctenitis refulgens.

143

La savane roche 6 km au sud-ouest dItoup


(200 m daltitude) :

Guyane. Ce nombre de taxons place le massif du mont


Itoup comme lun des plus riches de Guyane.

Au cours dune expdition de reconnaissance de


courte dure (une journe sur place, le 24 mars), G.
Lotard et O. Tostain ont pu explorer une savane
roche, appele savane roche Impossible , situe
200 m daltitude, 6 km environ au sud-ouest du
sommet dItoup, repre lors de la mission
dapproche de fin fvrier. Plusieurs espces de ptridophytes absentes aux altitudes suprieures ont t
observes, mais sont associes cet habitat particulier
comme Asplenium hostmannii et les piphytes Pleopeltis polypodioides var. burchellii et Serpocaulon
attenuatum. Pour les fougres, la dcouverte primordiale est celle dune superbe population de la trs rare
Pteridaceae Hemionitis rufa, poussant dans les fourrs
de lisire de la savane roche. Citons galement la
prsence de Microgramma persicariifolia et de Selaginella sulcata. Pour le Pleopeltis, espce principalement prsente sur la bande ctire, mais galement
dans lintrieur, sur certains massifs montagneux
(Dkou-Dkou, Galbao, monts Kotika), il semble
sagir de la rcolte la plus au sud de Guyane.

Au cours de cette mission de 2010, deux espces de


ptridophytes, nouvelles pour les 3 Guyanes (Phlegmariurus acerosus et Stenogrammitis limula), ont t
dcouvertes. Une 3me est en cours dtude.

Taxons manquants :
Au terme de cette tude et de ces quelques semaines
passes arpenter divers milieux, diverses altitudes
du massif, il nous a paru tonnant de ne pas rencontrer
certaines espces souvent observes dans les autres
massifs de cette moiti sud de la Guyane (ou plus au
nord), dans les mmes milieux, et sensiblement aux
mme altitudes. Citons, par exemple, Adiantum macrophyllum, Cyathea boryana, C. surinamensis, Hecistopteris pumila, Hemidictyum marginatum, Lastreopsis effusa, Lindsaea guianensis, L. pallida, Lygodium volubile, Oleandra pilosa, Pecluma plumula,
Pleopeltis astrolepis, P. desvauxii, Thelypteris biolleyi, T. holodictya, T. tristis, Stigmatopteris rotundata,
plus despces de Selaginella
Il aurait t tout fait possible galement de tomber
sur des espces exceptionnelles comme Lonchitis
hirsuta (prsent Atachi Bakka, Cottica et dans le
Dkou-Dkou), ou Enterosora campbellii (Atachi
Bakka)
Mais le massif du mont Itoup est vaste et les prospections dj effectues encore limites. Beaucoup de
milieux intressants (criques du versant est, notamment) restent donc encore explorer.

Conclusions
Les missions botaniques sur le massif du mont Itoup
sommet Tabulaire ont permis de rcolter un total de
368 spcimens de ptridophytes (105 en 1980, et 263
en 2010-2014). Alors que 76 taxons avaient dj t
inventoris en 1980, ce sont 75 taxons qui ont t
ajouts en 2010, pour atteindre un total, ce jour, de
151 taxons, ce qui correspond 44 % du nombre total
de taxons de ptridophytes connus ce jour en

144

De plus, 8 taxons, inscrits la nouvelle liste des espces dterminantes de Guyane (CSRPN, 2013),
ont t dcouverts et sont nouveaux pour le massif du
mont Itoup.
Sur les 151 taxons actuellement recenss, 28 sont
considrs comme remarquables pour leur raret,
et 25 appartiennent la nouvelle liste des espces
dterminantes de Guyane.
La prsente mission de 2010 a donc t un succs sur
le plan des rcoltes ptridologiques et a permis de
mieux dfinir les milieux et leurs espces caractristiques. Mais il reste bien sr beaucoup de secteurs
explorer sur ce vaste massif dont lintrt botanique et
biogographique nest plus prouver.
Plusieurs points mriteront dtre prciss : Nous
avons constat que la relle diversit des ptridophytes
augmente au-dessus de laltitude 500, jusqu atteindre son paroxysme dans la tranche 700-830 m, tout
au moins sur le versant ouest. Il serait intressant de
comparer quelles altitudes dbute cette diversit sur
dautres massifs. Existe-t-il un effet de la grande altitude de ce massif combin aux prcipitations qui dcalerait cette limite vers le haut ? En effet, sur les massifs de Lucifer et du Dkou-Dkou, dont les altitudes
maximales sont respectivement de 545 et 565 m, la
diversit spcifique maximale dbute ds 350 m
daltitude. Mais en est-il de mme sur le versant est
dItoup ? Nous navons pas assez dobservations sur
cet autre versant pour comparer.
Enfin, nous avons constat que, dans lensemble, les
taxons caractristiques de la fort submontagnarde,
sont trs localiss et leur dcouverte est fortuite et
parfois difficile, alors quon aurait pu croire que, une
telle altitude et dans de tels milieux, ils auraient pu
tre plus prsents. Citons les cas de Blechnum occidentale, de Blechnum gracile var. pilosum, de Cyathea lasiosora, Cyathea marginalis, Danaea ypori,
Diplazium radicans, Elaphoglossum cremersii,
Phlegmariurus acerosus, Polypodium flagellare,
Cette raret relative nest-elle due quaux prospections
encore limites ?
Autant de pistes creuser pour les missions futures

Remerciements
Je tiens exprimer mes trs sincres remerciements
MM. Olivier TOSTAIN (ECOBIOS, Cayenne) qui a
bien voulu mintgrer sur le plan administratif au sein
de son quipe ECOBIOS, Nicolas SURUGUE (PAG,
Rmire-Montjoly) qui a accept que je puisse participer, en dernire minute, la mission, Mmes Sophie
GONZALEZ et Vronique GURIN (Herbier CAY,
Cayenne) pour les extractions de la base Aublet2 et les
scans des spcimens de lherbier CAY, M. Pierre
JOUBERT (ONF, Cayenne) pour la ralisation des
cartes du massif en degrs-minutes, et, enfin, aux
quipes de lOffice National des Forts et du Parc
amazonien de Guyane pour lorganisation gnrale.

Mes remerciements vont galement aux diffrents


spcialistes qui ont confirm les dterminations de
certains spcimens critiques, et notamment Carol
KELLOFF (Smithsonian Institute, Washington, USA),
John T. MICKEL (New York Botanical Garden, USA)
pour les Elaphoglossum, Benjamin LLGAARD
(Aarhus, Danemark) pour les Lycopodiaceae, Jefferson PRADO (So Paulo, Brsil) pour les Adiantum,
Peter SCHWARTSBURD (So Paulo, Brsil) pour les
Hypolepis, Michael SUNDUE (University of Vermont, Burlington, USA), Hanna TUOMISTO et Samuli LEHTONEN (Turku, Finlande) pour les Danaea
et Lindsaea, sans oublier Georges CREMERS (ex
IRD-MNHN, Paris) et Alan R. SMITH (University of
Berkeley, USA) pour de nombreuses discussions.
Toute notre gratitude va enfin M. Herv THEVENIAUT (BRGM, Orlans), qui a bien voulu procder
ltude des spcimens de roches rcolts Itoup.

145

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146

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147

Inventaire ornithologique du mont


Itoup
Olivier Claessens1, Alexandre Renaudier2
1

Bureau dtude priv 2 Groupement dEtude pour la Protection des Oiseaux de Guyane

Rsum
Linventaire ornithologique du mont Itoup effectu en 2010 a permis de recenser 189 espces d'oiseaux dont
quelques espces rares et 22 espces dterminantes ZNIEFF, 24 espces endmiques du biome "Amazonia North
and Tepuis", dont 3 endmiques du plateau des Guyanes ainsi que 12 espces protges. L'avifaune du sommet
est sensiblement moins riche (en nombre d'espces) et moins abondante (en nombre d'individus) que celle des
tages infrieurs.

Mots cls
Parc amazonien de Guyane, mont Itoup, Avifaune, inventaire ornithologique, GEPOG

Introduction
L'avifaune de la moiti sud de la Guyane est encore
trs mal connue. Rares sont les ornithologues avoir
eu le privilge d'accder dans cette rgion recule et
rglemente (notamment missions Dorst / MHHN, O.
Tostain, J.-M. Thiollay cf Thiollay 2002 par
exemple). Les rares missions scientifiques, telles que
les tudes prliminaires pour la cration d'un parc
national, ont eu le plus souvent pour objectifs des
inselbergs ou des criques importantes. L'avifaune du
mont Itoup n'avait jusqu' prsent jamais t tudie.
Le site le plus proche ayant donn lieu des inventaires ornithologiques est le massif Emerillon, tudi
par J.-M. Thiollay mais seuls les rapaces diurnes ont
fait l'objet d'une liste spcifique publie (Thiollay
1989). Les connaissances et les moyens d'identification
taient alors loin d'galer ceux d'aujourd'hui et certaines de ces observations doivent aujourd'hui tre
considres avec prudence.
Cette mission d'inventaire ornithologique du mont
Itoup entre dans le cadre du programme scientifique
du Parc amazonien de Guyane. Elle fait suite celle
d'ECOBIOS (Olivier Tostain, Guillaume Lotard,
Vincent Pelletier) en mars 2010, qui, bien que l'ornithologie ne ft pas son objectif prioritaire, a produit
une premire liste d'oiseaux observs (donnes provisoires non publies). Elle s'est droule du 1er au 10
octobre 2010 et vient clore une srie d'tudes pluridisciplinaires effectues entre fvrier et octobre 2010 sur
le mont Itoup.
Avec 50 personnes impliques, dont 30 scientifiques,
ce premier volet d'tudes sur l'cologie du mont Itoup
constitue la plus importante mission scientifique pluridisciplinaire jamais organise en Guyane.

148

Site dtude
Localisation
Atteignant 830 m d'altitude, le mont Itoup (sommet
Tabulaire) (0301'08" N, 5304'58") constitue le deuxime point culminant de la Guyane, aprs le massif
Bellevue de l'Inini (850 m). Il se situe dans la moiti
sud du dpartement, au sein de la chane IniniCamopi, environ 20 km au sud du massif des Emerillons, en zone cur du Parc amazonien de Guyane.
La DZ (0301'24,6" N, 5305'46,0" O) et le camp de
base sont situs sur le flanc ouest du mont Itoup,
l'altitude de 570 m.
Dfinie par la longueur maximale des layons tracs
pour les IKA de comptage de la grande faune, la zone
d'tude s'tend dans un rayon de 3 km autour de la DZ
et du camp de base, une altitude comprise ente 300
et 820 m. La prospection ayant t mene essentiellement partir des layons, la surface couverte peut tre
estime environ 7 km (Figure 1).

Figure 1 : Situation de la zone dtude (en jaune)

149

Habitats
Les habitats et les peuplements forestiers du mont
Itoup ont t dcrits par Brunaux & Guitet 2010 et
Sabatier & Molino 2010. Si les oiseaux sont gnralement peu sensibles la composition floristique (bien
que certains genres ou familles de plantes peuvent
fournir une alimentation privilgie par certains oiseaux), leur rpartition est davantage influence par la
structure de la vgtation (densit, taille des arbres,
diversit des strates), par l'hydromorphie (oiseaux
associs aux flats et aux bas-fonds) et le rseau hydrographique (oiseaux piscivores), enfin par le relief et
l'altitude. La structure de la vgtation est elle-mme
lie aux autres facteurs.
Par son amplitude altitudinale, sa position flanc de
montagne et l'envergure des layons, la zone d'tude
englobe une grande diversit d'habitats forestiers. Sur
le plan altitudinal, on peut distinguer trois tages de
vgtation. Leurs limites sont approximatives mais
rpondent des diffrences perceptibles de structure et
de composition des peuplements forestiers associs
chacun de ces tages (Brunaux & Guitet 2010, Sabatier
& Molino 2010) :
- fort de plaine : altitude infrieure 500 m. Elle
est caractrise par une canope haute, la prsence de
gros arbres, un sous-bois plutt clair. La pente est
faible. Malgr la prsence de petites criques on ne
trouve pas de fort alluviale (flat) proprement parler
sur la portion de zone tudie (ce qui ne signifie pas
qu'elle soit totalement absente de la rgion). Il s'agit
d'une fort haute de terre ferme.

- fort sub-montagnarde : altitude comprise entre


500 m et 750 m. Elle est caractrise ici par la hauteur
de la canope, un sous-bois souvent dense (sauf en
quelques rares points), la prsence de nombreux chablis. La pente est moyenne forte, s'accentuant notamment sur les layons B et D partir de 650 m d'altitude avant d'atteindre le plateau du sommet. Des cambrouzes de faible surface occupent la partie suprieure
de la pente. La DZ (alt. 570 m) et le camp de base (alt.
585 m) se situent dans cet tage de fort "submontagnarde".
- fort sommitale : altitude suprieure 750 m. Elle
est caractrise par une canope basse et ouverte, un
sous-bois arbustif dense et souvent humide, la frquence des arbres morts sur pied, l'abondance de
mousses et d'piphytes permise par l'humidit persistante. Outre ces paramtres de structure, l'apparition
de plantes caractristiques telles que les fougres
arborescentes Cyathea spp. (Cyatheaceae), la bromliace Vriesea splendens et l'arbuste du sous-bois
Rudgea bremekampiana (Rubiaceae), marquent la
transition entre la fort sub-montagnarde des pentes et
la fort sommitale ; c'est ce qui nous amne placer la
limite vers 750 m d'altitude alors que le plateau se
situe plutt 800 m. On y retrouve quelques cambrouses ainsi qu'une mare temporaire (layon F) occupe par une formation herbace ouverte.
Compar d'autres reliefs en Guyane, on remarque
que la fort dite "sub-montagnarde", dfinie par son
altitude, est peu type ici par rapport la fort de
plaine, tandis que la fort sommitale possde des caractres habituellement associs la fort sub-

Figure 2 : Layons prospects et rpartition selon ltage altitudinal

150

montagnarde. Ainsi, la fort sommitale du mont Itoup 800 m d'altitude ne diffre pas fondamentalement
d'une fort sub-montagnarde rencontre 600 m dans
des stations plus septentrionales (massif Lucifer, mont
Tabulaire de la RN de la Trinit par exemple) : l'altitude est manifestement compense par un gradient
ngatif nord-est / sud-ouest d'humidit atmosphrique
et de pluviomtrie, li l'loignement de la cte et
l'influence dcroissante des alizs. La position du
camp sur le flanc ouest du massif peut contribuer
accentuer la perception de ce phnomne.
Seul le layon C est partiellement concern par la fort
de plaine, les autres tant entirement situs plus de
570 m d'altitude. Les layons F et H dans leur intgralit, le layon B dans sa plus grande partie et les layons
A et D plus partiellement, parcourent la fort sommitale des crtes et du plateau (Figure 2).

Mthodes
Matriel
L'quipement de base port en permanence par chacun
des deux observateurs se composait de :
- jumelles,
- enregistreur numrique + micro directionnel professionnel (Sennheiser K6- ME66),
- iPod contenant une banque de sons de rfrence
(enregistrements personnels et issus de collections
prives, de CD ou du site internet xeno-canto www.xeno-canto.org/),
- mini haut-parleur,
- carnet de notes.

Mthodes de prospection
En l'absence d'objectif d'analyse quantitative et comparative, l'inventaire ornithologique d'une zone ne
ncessite pas la mise en uvre d'un protocole labor.
L'objectif premier est de noter le maximum d'espces.
Pour cela, les seules contraintes sont de parcourir le
terrain de manire aussi complte que possible, de
visiter l'ensemble des habitats prsents, et ce aux
heures adaptes au rythme journalier d'activit des
diffrentes espces.
La prospection s'est faite en utilisant les layons existants (Figure 2), plus rarement en circulant hors layon.
Except le jour d'arrive et en de rares occasions par la
suite, les deux observateurs ont parcouru la zone sparment pour une meilleure couverture du terrain. Les
observations ont dbut chaque jour avant l'aube
(~05h) et se sont poursuivies tout au long de la journe et jusqu' la nuit tombe, des observations incidentes pouvant avoir lieu n'importe quel moment de
la journe ou de la nuit.
Chaque layon a t parcouru alternativement par les
deux observateurs, principalement entre 06h (07h) et
14h, parfois nouveau en fin d'aprs-midi, en marchant trs lentement et en s'arrtant souvent pour ob-

server ou enregistrer les oiseaux rencontrs. La rencontre d'une ronde (rassemblement plurispcifique)
donnait lieu une observation prolonge pour tenter
de voir le maximum d'espces.
Des sances fixes d'observation ont t effectues en
lisire de la DZ, seule ouverture proximit du camp
permettant l'observation de la canope et des oiseaux
en vol au-dessus de la fort. Ces sances ont eu lieu
principalement en fin d'aprs-midi, occasionnellement
en milieu de journe. Enfin, des coutes nocturnes ont
t ralises proximit du camp et de la DZ et sur les
layons dans un rayon de quelques centaines de m
autour du camp. Pour multiplier les secteurs d'coute
nocturne, les observateurs ont pass chacun une
deux nuits dans des camps individuels situs respectivement 700 m (layon D, altitude 610 m), 1700 m
(layon C, altitude 380 m) et 3000 m (layon B, altitude
720 m) du camp de base.
L'enregistrement des vocalisations a t ralis de
manire quasi systmatique, notamment dans le cas
d'espces rares, mconnues ou dont l'identification
mritait confirmation. Ces enregistrements constituent
un outil indispensable lors de toute tude et inventaire
ornithologique en fort. Ils ont pour but de confirmer
si ncessaire et apporter la preuve de l'identification,
d'attirer l'oiseau par la repasse de son chant en vue de
son observation visuelle ou de sa capture, d'alimenter
la banque de sons de rfrence et permettent parfois
d'identifier ou de dceler a posteriori des espces mconnues. Plusieurs des enregistrements raliss au
cours de cette mission sont accessibles sur :
http://www.xenocanto.org/america/.
Les espces d'oiseaux dterminantes ZNIEFF, les
espces spcialistes des forts d'altitude, ainsi que les
espces rares ou absentes de la liste des oiseaux de
Guyane mais espres sur la zone d'tude, ont t
recherches de manire cible et systmatique lors des
prospections. La repasse de leur chant partir d'une
banque de sons de rfrence a t effectue dans les
habitats jugs favorables afin de les faire se manifester
le cas chant.

Informations releves
Les observations ont t plus souvent auditives (78%
des donnes) que visuelles. Chaque oiseau vu ou entendu tait not, de mme que le type de contact (oiseau vu ou entendu, type de vocalisation - cri, chant,
alarme -, couple ou groupe familial, rassemblement
plurispcifique), ventuellement le comportement
(parade, transport de nourriture), la localisation et
l'altitude. L'identification se faisait sur place, ventuellement avec recours immdiat la banque de sons de
rfrence pour confirmer si ncessaire l'identification
auditive. De mme, la repasse du chant spcifique, en
faisant ragir l'oiseau repr, permettait au besoin de
confirmer son identit.

151

Les observations ont t rparties selon 3 classes d'altitude :


- fort de plaine : altitude infrieure 500 m ;
- fort sub-montagnarde : altitude comprise entre
500 m et 750 m ;
- fort sommitale : altitude suprieure 750 m.
Ces limites sont approximatives mais rpondent aux
diffrences de structure et de composition des peuplements forestiers associs chacun de ces tages
(Brunaux & Guitet 2010. Sabatier & Molino 2010).
La localisation prcise et l'altitude des observations
les plus remarquables ont t releves grce aux distances indiques sur les balises jalonnant les layons,
ou par GPS.

L'effort a t peu prs quitablement rparti entre les


diffrents layons, avec un minimum de 27
heures*observateurs sur le layon B et un maximum de
48 heures*observateurs sur le layon C, sur un total de
148 heures notes Figure 3). Ces valeurs sont trs
approximatives et lgrement fausses par les nuits
passes sur les layons B, D et F, car nous n'tions bien
sr alors pas veills en permanence. Le temps pass
aux alentours du camp de base et de la DZ n'a pas t
comptabilis et n'apparat pas dans ce diagramme.

Mthodes non appliques


En revanche, plusieurs volets mthodologiques prvus
pour cette mission n'ont pas pu tre mis en uvre,
faute de temps ou d'opportunit :
- Captures : visant complter l'inventaire visuel et
acoustique par des oiseaux capturs incidemment,
cette technique longue mettre en place ncessite un
gros dploiement de moyens et mobilise une personne
plein temps pendant toute la dure de l'opration. Ne
pouvant concerner que des oiseaux circulant en sousbois, elle est particulirement peu efficace si ce n'est
dans le cas de captures cibles, destines confirmer
en main l'identit d'oiseaux rares (nouvelle espce
pour la Guyane par exemple) ou difficiles identifier,
reprs pralablement. Le cas ne s'tant pas prsent,
cette technique a t dlaisse au profit des observations et coutes, beaucoup plus productives.
- Ascension en canope : cette technique tant trs
consommatrice de temps pour un rsultat alatoire, il a
t jug prfrable d'y renoncer et de privilgier la
prospection au sol compte tenu de la courte dure de
la mission.
- Transects ou points d'coute : il s'agissait de tester
et d'initier sur le mont Itoup une mthode d'chantillonnages quantitatifs standardiss, destine tre
tendue aux autres sites tudis en vue d'analyses
quantitatives comparatives. Les rsultats de ces tests
devaient tre utiliss dans un article mthodologique
en prparation (Claessens & Renaudier). Cet objectif
n'a pas t rempli faute de temps ; il aurait ncessit
au moins 4 journes supplmentaires, moins d'empiter sur l'objectif prioritaire de la mission, savoir
l'inventaire des espces prsentes.

Effort d'observation
La premire et la dernire journe, jours d'arrive et de
dpart sur la zone, n'ont t que partielles. L'effort
d'observation est donc de 18 jours*observateurs (8
journes pleines plus 2 demi-journes) et dpasse au
total les 180 heures*observateurs si l'on retient une
dure thorique minimale de 10 heures par jour.

152

Figure 3 : Rpartition de leffort dobservation entre les layons

Rsultats
Richesse
Au total, 1470 donnes et plus de 200 enregistrements
audio ont t collects. 189 espces d'oiseaux ont t
contactes au cours de la mission. Les donnes incertaines ou non identifies au niveau spcifique ne sont
pas prises en compte. Les deux observateurs ont contact respectivement 165 et 161 espces, soit 85 87%
chacun. Toutefois, l'mulation produite par le travail
en quipe et le bnfice tir des changes d'informations au cours de la mission ne doivent pas tre ngligs : un observateur seul aurait certainement t moins
efficace.
En incluant les donnes obtenues par l'quipe ECOBIOS (O. Tostain, V. Pelletier & G. Lotard) au cours
de la mission de mars 2010 et qui nous ont t transmises et dont certaines doivent encore tre confirmes,
ce sont au total 235 espces d'oiseaux qui ont t rpertories sur le mont Itoup. 46 espces contactes
par ECOBIOS en mars n'ont pas t retrouves, tandis
que 24 espces nouvelles ont t observes en octobre
(Tableau 1).
Plusieurs facteurs peuvent expliquer ces diffrences :
- une pression d'observation diffrente : dans un
milieu aussi riche que la fort amazonienne et avec
des espces aussi difficiles dtecter (Terborgh et al.
1990), le nombre d'espces recenses est directement
proportionnel l'effort d'observation. Avec 3 observateurs prsents sur le terrain pendant 2 5 semaines

chacun, la pression d'observation d'ECOBIOS a t


plus de 3 fois suprieure la ntre mme si l'ornithologie n'tait pas son objectif prioritaire ; des diffrences dans les sites et habitats prospects : la prospection par ECOBIOS a concern une surface beaucoup plus vaste que celle tudie par nous-mmes au
cours de la mission d'octobre. Il en dcoule la prise en
compte d'habitats supplmentaires (savanes- roches)
et la rencontre d'espces infodes ces habitats, ou
d'espces ayant une rpartition irrgulire (comme
c'est le cas pour beaucoup d'oiseaux forestiers) ;
- un effet saison sur la rpartition des oiseaux :
beaucoup d'oiseaux frugivores, et en particulier ceux
lis l'altitude, effectuent des dplacements saisonniers dont l'amplitude est mal cerne, pour rpondre
aux variations des ressources alimentaires (Terborgh
1986). La saison sche tant une saison de relative
pnurie alimentaire (pauvre en fruits et en insectes,
Leigh et al. 1983), on peut penser que les espces
- concernes taient, sinon absente, du moins, moins
abondantes et de ce fait de rencontre plus alatoire
qu'en saison des pluies ;
- un effet saison sur le comportement et la dtectabilit des oiseaux : mme s'ils sont prsents, l'activit
vocale des oiseaux, lie leur cycle de reproduction,
n'est pas gale toute l'anne, et certains oiseaux deviennent extrmement difficiles contacter s'ils ne
chantent pas. La saison sche marque d'une manire
gnrale un creux dans l'activit reproductrice et vocale pour de nombreuses espces d'oiseaux en
Guyane.
La courbe de progression de l'inventaire (Figure 4)
montre un dbut de ralentissement aprs 4 journes
mais la pente reste prononce mme l'issue de la
mission : la pente de la courbe l'asymptote, mesure
par le nombre d'espces vues une seule fois (a = 47)
divis par le nombre de jours d'tude (Ferry 1976),
indique une marge de progression importante en dpit
d'un ralentissement sensible. Ainsi une journe supplmentaire d'inventaire apporterait encore en
moyenne plus de 4 espces nouvelles (a/n = 4,7). Bien
que rduite quelques heures seulement, la dernire
journe de prsence sur la zone a permis l'observation
de 2 espces qui n'avaient pas t contactes auparavant.
On remarque enfin (Figure 4) que sur les huit journes
pleines, le nombre d'espces contactes journellement
a t en moyenne de 90, variant peu except au cours
d'un petit flchissement juste aprs la mi-mission. Ce
flchissement temporaire d'efficacit s'est traduit par
un ralentissement semblable de la courbe de progression de l'inventaire.
Le programme COMDYN SpecRich2 (Hines 1996)
estime la richesse totale pour la zone prospecte 264
+/- 23 espces ; l'inventaire ralis atteindrait donc
environ 72 % du peuplement, ou 81 % en tenant
compte des espces mentionnes par ECOBIOS. Rappelons toutefois l'imprcision de l'estimation, qui est
trs dpendante du nombre de donnes obtenues pour
chaque espce et qui par ailleurs a t calcule sans

intgrer les donnes d'ECOBIOS : ces dernires conduiraient une estimation plus leve, donc une
proportion moindre d'espces inventories.

Tableau 1 : Espces contactes seulement durant lune des deux


missions

Figure 4 : Evolution du nombre despces contactes au cours de la


mission

153

Tableau 2 : Comparaison de la richesse de diffrents sites selon leffort dobservation

La comparaison avec d'autres stations de fort primaire en Guyane est rendue difficile par les diffrences importantes d'effort (dure) de prospection,
d'habitats et de surface prise en compte (Tableau 2).
Ainsi dans la RN de la Trinit, l'ensemble {Aya +
mont Tabulaire + roche Bnitier}, qui pourrait se
rapprocher le mieux par ses habitats et la surface considre de la zone d'tude du mont Itoup, a fourni
235 espces observes l'issue d'une seule mission
(33 jours*observateurs) ; la zone Aya seule a fourni
l'issue de deux missions (effort 54 jours*observateurs)
242 espces observes, pour une richesse totale estime 276 espces (Claessens & Renaudier 2009). Sur
un autre site d'altitude, le massif Lucifer, 160 espces
ont t observes en 2006 avec un effort de 26
jours*observateurs ; et 194 espces l'issue de deux
missions avec un effort total de 62 jours*observateurs
et pour une richesse totale estime 231 espces
(Claessens & Pineau 2007). La proportion d'espces
observes augmente avec l'effort, et plus particulirement lorsque cet effort a t rparti sur deux missions.
Il n'y a pas de raisons a priori pour que l'avifaune du
mont Itoup soit moins riche que celle de la zone Aya
et du mont Tabulaire de la RN de la Trinit. Elle
semble en revanche sensiblement plus riche que celle
du massif Lucifer, la qualit et la diversit des habitats
s'ajoutant l'exprience des observateurs pour expliquer ces diffrences.

Rpartition altitudinale
Le camp et la plus grande partie des layons se trouvant
au-dessus de 500 m d'altitude, on pouvait s'attendre
ce que la majorit des observations concernent l'tage
sub-montagnard. Les 1470 observations se rpartissent
en :
- 14 % dans la fort de plaine (alt. <500 m);
- 62 % dans la fort sub-montagnarde de pente (alt.
>500 m et <750 m);
- 24 % dans la fort sommitale (alt. >750 m).
Sur les 189 espces recenses,
- 91 (48 %) ont t notes dans la fort de plaine;
- 162 (86 %) ont t notes dans la fort submontagnarde de pente;
- 96 (51 %) ont t notes dans la fort sommitale.

154

Ces rsultats sont conformes aux prvisions, avec un


cart trs significatif entre la fort sub-montagnarde de
pente et les deux autres tages. La richesse en apparence plus faible de la fort de plaine ne reflte vraisemblablement que le niveau plus faible de l'effort
d'observation, compar la fort sub-montagnarde. En
revanche, bien que l'effort d'observation aux diffrents
tages n'ait pas t mesur, il a t sensiblement plus
important dans la fort sommitale que dans la fort de
plaine. De ce fait, la faiblesse du nombre d'espces et
du nombre d'observations dans la fort sommitale
traduit probablement une ralit cologique : l'avifaune du sommet serait donc sensiblement moins riche
(en nombre d'espces) et moins abondante (en nombre
d'individus) que celle des tages infrieurs, ce que
vient corroborer l'impression ressentie sur le terrain.
68 espces soit 35 % du total n'ont t contactes que
dans un seul tage altitudinal :
- 13 espces (7 %) n'ont t contactes que dans la
fort de plaine ;
- 44 espces (23 %) n'ont t contactes que dans la
fort sub-montagnarde de pente ;
- 11 espces (6 %) n'ont t contactes que dans la
fort sommitale.
Ces rsultats sont difficiles interprter compte tenu
du caractre alatoire des observations : des espces
ont pu chapper l'inventaire dans l'un ou l'autre de
ces habitats alors qu'elles s'y trouvaient. La liste consquente d'espces vues uniquement l'tage intermdiaire tmoigne de ce biais, alors que la plupart ne
sont a priori pas infodes cet habitat, lui-mme peu
distinctif. Au contraire, le manque de caractre trs
marqu de la fort sub-montagnarde sur le mont Itoup permet de nombreuses espces de plaine ou de la
fort sommitale d'empiter sur cet tage intermdiaire.
Il parat donc plus pertinent de traiter les espces au
cas par cas.
Parmi les espces vues uniquement en plaine, on peut
en citer au moins 4 qui sont manifestement absentes
au-dessus de 500 m :
Corythopis torquatus (Tyrannidae)
Patagioenas speciosa (Columbidae)
Phoenicircus carnifex (Cotingidae)
Tyranneutes virescens (Pipridae)

A celles-l s'ajoutent Laniocera hypopyrra (Tityridae)


et Phaeothlypis rivularis (Parulidae) notes par ECOBIOS.
Dans le mme ordre d'ide bien qu'ils soient prsents
dans la fort sub-montagnarde de pente, les deux ttmas Formicarius colma et F. analis (Formicariidae)
n'ont pas t vus au dessus de 600 m d'altitude. De
mme, Hemitriccus zosterops et Tolmomyias assimilis
(Tyrannidae) sont principalement prsents en fort de
plaine et se rarfient notoirement avec l'altitude.
Parmi les espces vues uniquement en haut de pente
ou sur le plateau, soit au-dessus de 700 m, il faut distinguer celles rellement lies l'altitude, de celles
trouves l la faveur d'habitats particuliers et dont la
restriction cet tage est donc plus conjoncturelle. On
peut citer :
-

Espces lies l'altitude :


Colaptes rubiginosus (Picidae) : frquent sur
tous les reliefs partir de 500-600 m d'altitude, commun Itoup.
Colibri delphinae (Trochilidae) : 3 chanteurs
rpartis en deux points du layon B, 720 et
780 m d'altitude. Espce trs rare en Guyane
(voir plus bas).
Contopus albogularis (Tyrannidae) : plutt
li au relief qu' l'altitude sensu stricto (Ingels et al. 2008), il est apparemment commun
sur le mont Itoup, trouv sur 4 sites entre
750 et 800 m d'altitude.
Oxyruncus cristatus (Oxyruncidae) : commun sur les reliefs d'altitude suprieure 500
m, il est parfois mais rarement vu plus bas
(observ ici 380 m d'altitude).
Phyllomyias griseiceps (Tyrannidae) : 2 oiseaux contacts plusieurs reprises sur le
layon A vers 750 m d'altitude (~A900), la
limite donc entre la fort sub-montagnarde de
pente et la fort sommitale. Espce trs rare
en Guyane (voir plus bas).
Procnias albus (Cotingidae) : au moins 5
chanteurs rpartis sur le plateau et sur les
pentes.
auxquelles il convient d'ajouter Piranga flava haemalea (Cardinalidae), signal par ECOBIOS.

- Espces lies des habitats particuliers :


Plusieurs espces, sans tre lies l'altitude, sont prsentes en haut de pente et sur le plateau la faveur des
cambrouzes et de leurs lisires localises ici au-dessus
de 700 m d'altitude :

Cercomacra tyrannina (Thamnophilidae)


Myrmeciza atrothorax (Thamnophilidae) (localis en bordure la mare du layon F)
Taraba major (Thamnophilidae)
Thamnophilus melanothorax
(Thamnophilidae)
Cyclarhis gujanensis (Vireonidae)

Quelques-unes sont lies la fort claire et arbustive


du sommet :
Thamnophilus punctatus
(Thamnophilidae)
ainsi que Leptotila verreauxi (Columbidae)
note par ECOBIOS.
D'autres enfin, habituellement cantonnes aux flats,
trouvent dans la fort sommitale et parfois sur les
pentes un substitut leur habitat grce l'humidit
lie l'altitude :
Cyphorhinus arada (Troglodytidae)
Myrmothera campanisona (Grallariidae)

Espces remarquables
Sur les 189 espces d'oiseaux recenses au cours de
la mission, on relve (Tableau 3) :
- 22 espces dterminantes ZNIEFF.
- 24 espces endmiques du biome "Amazonia
North and Tepuis", parmi lesquelles 3 endmiques du
plateau des Guyanes.
- 12 espces protges (arrt du 15 mai 1986, Hansen & Richard-Hansen 2001) : il s'agit principalement
de rapaces diurnes (Accipitridae) ou nocturnes (Strigidae), ainsi que d'un hron (Ardeidae), d'un urubu
(Cathartidae) et d'un ara (Psittacidae).
Le biome "Amazonia North and Tepuis" (ANT) dfini
par Birdlife International (Devenish et al. 2009)
s'tend entre l'Ornoque, l'Amazone et le Rio Negro.
Les espces qui sont restreintes, au nombre de 125,
sont reprsentatives de cette rgion biogographique ;
39 d'entre elles sont prsentes en Guyane, qui possde
donc pour celles-l une responsabilit particulire en
matire de conservation.
La liste globale des oiseaux du mont Itoup (incluant
les donnes d'ECOBIOS) renferme 30 espces dterminantes ZNIEFF, 27 espces endmiques du biome
ANT dont 5 endmiques du plateau des Guyanes et 21
espces protges. Le statut d'espce dterminante, qui
combine un ensemble de critres (raret, endmisme,
sensibilit, menace sur les habitats spcifiques) est
de ce fait significatif du caractre patrimonial de ces
espces. C'est donc le cas de 11,6 13,6 % des espces recenses Itoup. Cette proportion d'espces
dterminantes dans le peuplement d'oiseaux est comparable celle trouve dans d'autres stations de fort
primaire guyanaises : dans la RN de la Trinit, elle
tait de 9,9 % sur le sommet Tabulaire, 12,7 % sur la
zone Amara, et 15,3 % sur la zone Aya (d'aprs
Claessens & Renaudier 2009). L'influence de l'effort
d'observation sur le taux d'espces dterminantes
recenses est manifeste et simple expliquer, ces
espces tant parmi les plus rares et les plus difficiles
contacter.

155

Tableau 3 : Statut rglementaire et endmisme des espces doiseaux rpertoris sur le mont Itoup
(les espces entre parenthses ont t notes par ECOBIOS uniquement)

Parmi ces espces remarquables, il convient d'en citer


deux qui sont connues en Guyane de moins de cinq
localits. Leur raret tient leur association aux forts
d'altitude, leur situation en limite d'aire de rpartition, sans doute aussi au niveau des prospections dans
l'intrieur de la Guyane et une connaissance seulement rcente de leurs vocalisations permettant de les
dtecter.
- Colibri delphinae (Trochilidae) : 4me mention
pour la Guyane, connu seulement de la montagne
Kotika, des monts Atachi Bakka et du mont Tabulaire
de la RN de la Trinit (Renaudier et al. 2010).
- Phyllomyias griseiceps (Tyrannidae) : 2me mention pour la Guyane, connu seulement de Papachton
(Renaudier & CHG 2010).
D'autres bien que moins exceptionnelles restent rares
en Guyane :
- Sclerurus mexicanus (Furnariidae) : connue de
moins de 10 localits en Guyane. Les observations
actuelles ne permettent pas de comprendre les raisons
de cette raret.
- Philydor ruficaudatum (Furnariidae) : observ
rcemment dans seulement 2 localits (mont Tabulaire
de la RN de la Trinit et Sal ; Renaudier & CHG
2010 et indit).

156

Particularits du peuplement d'oiseaux


A l'issue d'une mission aussi courte et ponctuelle, les
remarques sur la composition du peuplement doivent
tre considres avec prudence. Elles ne sont que le
produit des observations ralises et ne refltent pas
forcment la situation relle et permanente des espces.
Certaines espces ont sembl singulirement rares
voire absentes, cette situation inhabituelle pouvant tre
cause par la saison et/ou par l'altitude.
- Effet de la saison
La raret des perroquets (Psittacidae) et plus particulirement l'absence totale des amazones Amazona
spp. durant notre mission tait manifeste. Ces oiseaux
effectuent des dplacements saisonniers encore mal
connus en rponse aux fluctuations des ressources, la
saison sche entranant leur dsertion de zones dpourvues de fructifications. Plusieurs espces avaient
t observes en mars par ECOBIOS.
La raret d'Oxyruncus cristatus (Oxyruncidae)
durant notre mission est probablement lie la saison,
cet effet saison pouvant agir sur la rpartition de l'espce (comme pour les perroquets) ou seulement sur
son activit vocale et sa dtectabilit (comme pour les

Cotingidae auxquels il est apparent).


Les pigeons terrestres que sont Geotrygon montana, Leptotila verreauxi et L. rufaxilla (Columbidae)
taient de mme particulirement discrets, voire absents en ce qui concerne les deux premiers, signals en
mars par ECOBIOS. Des variations saisonnires
d'abondance pour Geotrygon montana, avec des
maxima en saison des pluies trahissant des mouvements migratoires d'ampleur inconnue, ont t rapportes au Brsil (Stouffer & Bierregaard 1993).
D'une manire gnrale, la saison sche est peu
propice aux chants, comme on a pu le constater avec
des espces pourtant bien prsentes telles que les tinamous (Tinamidae) Myrmeciza ferruginea, Percnostola rufifrons (Thamnophilidae), Turdus albicollis
(Turdidae), dont la reproduction dmarre avec l'arrive de la saison des pluies. La scheresse qui prvalait
avant et tout au long de la mission n'a fait qu'accentuer
ce phnomne.
A l'oppos, Selenidera culik (Ramphastidae) et
Capito niger (Capitonidae) se distinguaient par leur
activit vocale et de parade. L'altitude n'tait peut-tre
pas trangre leur abondance locale.

avec les deux espces leaders de ces rondes Thamnomanes caesius et T. ardesiacus (Thamnophilidae) ni
avec l'un de leurs membres constants Hylophilus
ochraceiceps (Vireonidae).
A l'inverse, on peut noter la bonne reprsentation
d'espces gnralement peu communes et ingalement
rparties au sein du massif forestier, comme Automolus rubiginosus (Furnariidae) et Microcerculus bambla
(Troglodytidae).
Enfin, les bonnes densits de Crax alector (Cracidae) et Psophia crepitans (Psophiidae), espces gibiers souvent rarfies ailleurs en Guyane, ne sont que
le reflet de l'absence de chasse sur le mont Itoup.

- Effet de l'altitude ou des habitats


L'absence d'Automolus infuscatus et d'A. ochrolaemus (Furnariidae) mrite d'tre confirme. Hormis
l'altitude, rien ne semble pouvoir l'expliquer. Automolus infuscatus a t signal en plaine par ECOBIOS.
Automolus ochrolaemus est quant lui moins rgulier
en fort primaire mais nanmoins trouv dans la plupart des stations tudies (O. Claessens, obs. pers.),
plutt prs des lisires.
Il en va de mme de Galbula dea (Galbulidae),
tonnamment absent de nos relevs.
L'absence totale et certaine d' Herpsilochmus sticturus (Thamnophilidae) est remarquable, alors qu'il est
gnralement omniprsent dans les rondes de canope
et aussi frquent que son congnre H. stictocephalus.
A Itoup, seul ce dernier est prsent, ce qui peut tre
d l'altitude.
Les rondes plurispcifiques d'insectivores du sousbois ont sembl peu frquentes et comporter moins
d'oiseaux qu'habituellement. La composition et l'organisation sociale de ces rassemblements plurispcifiques sont trs constantes en fort primaire guyanaise
; leurs territoires sont jointifs et leur densit est directement lie la densit et la complexit des strates
de vgtation (Jullien & Thiollay 1998). La fort
sommitale, plus claire et moins haute que la fort de
plaine ou de pente, est manifestement moins propice
une densit optimale de ces rondes ; de plus certaines
espces membres constants ou occasionnels de ces
rassemblements et qui contribuent leur cohsion
et/ou leur ampleur peuvent tre absentes ou rarfies
du fait de l'altitude. Il est donc vraisemblable que les
rondes du sous-bois soient effectivement moins abondantes et moins structures sur le plateau du mont
Itoup que dans des zones de plus basse altitude. Aucun contact n'a d'ailleurs eu lieu en fort sommitale

157

Conclusions

Remerciements

Avec l'tude des peuplements animaux et vgtaux du


mont Itoup, le Parc amazonien de Guyane dbute son
programme scientifique par l'un des sites les plus
emblmatiques et prometteurs de son territoire. L'un
des sommets les plus hauts de Guyane, dpassant les
800 m d'altitude, ne pouvait en effet que recler des
trsors en matire de biodiversit. Le premier inventaire de l'avifaune ralis sur ce site a rpondu partiellement ces attentes.
Cette mission a permis d'obtenir respectivement les
seconde et quatrime donnes guyanaises pour deux
espces trs rares infodes aux reliefs : Phyllomyias
griseiceps (Tyrannidae) et Colibri delphinae (Trochilidae). Une autre, Terenura callinota (Thamnophilidae) avait t observe par ECOBIOS en mars, fournissant sa seconde mention pour la Guyane. Ces observations constituent les principales dcouvertes
ornithologiques effectues sur le mont Itoup.
En dpit d'habitats forestiers remarquables et exempts
de toute perturbation anthropique, et en dpit de l'altitude qui laissait esprer d'autres surprises du mme
type, l'avifaune du mont Itoup a toutefois rvl au
cours de cette tude une richesse relativement modeste
et a t marque par l'absence ou la raret inhabituelle
de nombreuses espces, notamment celles lies l'altitude. La saison est sans aucun doute en grande partie
responsable de cette situation. La brivet de la mission a accentu ce rsultat, la rencontre d'oiseaux
discrets ou moins abondants localement cette priode de l'anne tant d'autant plus alatoire.
Les observations collectes au cours de cette mission
n'en demeurent pas moins intressantes et essentielles
pour amliorer notre connaissance du statut et de la
rpartition d'oiseaux plus ou moins rares au sein du
massif forestier guyanais. Toute opportunit d'inventaire dans des rgions aussi recules et gnralement
inaccessibles du centre ou du sud de la Guyane est
ce titre inestimable. Il serait dommage que l'tude de
l'avifaune du mont Itoup en reste l, alors que le site
bnficie d'une remarquable prparation du terrain
(DZ, layons, situation du camp de base). Pour autant, les reliefs ne doivent pas tre considrs comme
les seuls sites dignes d'intrt du point de vue de la
biodiversit : les zones de basse altitude et les forts
alluviales du grand sud sont elles aussi susceptibles
d'abriter des espces rares et remarquables voire mconnues et mritent ce titre la mme attention.

Nous remercions Guillaume Lotard et Vincent Pelletier (ECOBIOS) pour nous avoir transmis la liste d'oiseaux observs pendant leur mission de mars 2010, et
Tanguy Deville pour avoir gnreusement mis notre
disposition ses photos d'oiseaux pour illustrer ce rapport. Les noms de plantes ont t fournis par Guillaume Lotard.
Nous sommes particulirement reconnaissants aux
techniciens du Parc amazonien de Guyane pour la
qualit des layons et du balisage qui a grandement
facilit le travail de terrain.

158

Rfrences
BRUNAUX O. & GUITET S. 2010. Compte-rendu de
mission Itoup. Office National des Forts. Rapport,
17 p.
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CLAESSENS O. & RENAUDIER A. 2009. Rserve
naturelle de la Trinit : tude de lavifaune, mont
Tabulaire du 6 au 13 octobre 2009, zone Aya du 13 au
26 octobre 2009. Office National des Forts. Rapport,
41 p.

REMSEN J.V. JR., ET AL. 2010. A classification of


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http://www.museum.lsu.edu/~Remsen/SACCBaseline.
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RENAUDIER A. & Comit d'Homologation de
Guyane. 2010. Rare birds in French Guiana in 2005
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RENAUDIER A., CLAESSENS O & Comit d'Homologation de Guyane. 2010. Les oiseaux rares en
Guyane en 2008 et 2009. Rapport du Comit d'homologation de Guyane.
http://pagesperso-orange.fr/gepog/CHG/.

Comit d'homologation de Guyane 2010. Liste des


oiseaux de Guyane - version mars 2010.
http://pagesperso-orange.fr/gepog/CHG/.

SABATIER D. & MOLINO J.-F. 2010. Caractrisation des communauts vgtales arborescentes, dans
le cadre de ltude des vgtations du massif du mont
Itoup (Parc amazonien de Guyane). Compte rendu de
mission (7 mars 2 avril 2010). Rapport, 11 p.

DEVENISH C., DIAZ FERNADEZ D.F., CLAY


R.P., DAVIDSON I. & YEPEZ ZABALA I (Eds)
2009. Important Bird Areas Americas - Priority sites
for biodiversity conservation. Quito, Ecuador: BirdLife International. BirdLife Conservation Series 16.

STOUFFER P. & BIERREGAARD R.O., JR. 1993.


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FERRY C. 1976. Un test facile pour savoir si la richesse mesure d'un peuplement se rapproche de sa
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TERBORGH J. 1986. Keystone plant resources in the


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http://www.mbrpwrc.usgs.gov/software/specrich2.htm
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The ecology of a tropical forest. Seasonal rhythms and
longterm changes. Oxford Univ. Press, Oxford.

159

ANNEXE
Liste commente des espces d'oiseaux rencontres sur le mont Itoup
Cette liste reprend l'ensemble des espces notes au cours de la mission d'octobre 2010 et celles signales titre
provisoire par ECOBIOS suite sa mission de mars 2010.
Celles notes seulement par ECOBIOS sont entre parenthses. Les espces les plus remarquables sont en gras.
La taxonomie et la squence suivent celles adoptes par le Comit d'homologation de Guyane (2010), en conformit avec le South American Classification Commitee (Remsen et al. 2010). Le nombre entre parenthses qui
suit le nom d'espce indique le nombre de jours (sur un total de 10 jours) o cette espce a t contacte.

160

161

162

163

164

165

166

Les peuplements de chiroptres du


mont Itoup
Marguerite Delaval1
1

Office National des Forts de Guyane

Rsum
L'inventaire des chiroptres du mont Itoup a permis l'identification de 33 espces formant un peuplement caractristique des forts intactes de par la grande diversit, l'quilibre des communauts et le faible taux de captures. Le prsent protocole ne permet pas de tirer de conclusions sur un ventuel gradient de rpartition par
rapport l'altitude. Les captures ayant t faites au filet, les espces de haut vol et espces trs lgres ne sont
que peu captures, crant un biais dans les prsents rsultats. Pour une meilleure reprsentation de la structure
du peuplement des chiroptres sur le mont Itoup, un autre protocole est envisag.

Mots cls
Parc amazonien de Guyane, mont Itoup, chiroptres, ONF

Introduction
Le Parc amazonien de Guyane a organis une mission
pluridisciplinaire sur le mont Itoup ayant pour but
dinventorier la biodiversit dans cette rgion de cur
de parc encore mal connue. Ceci, dans un objectif de
connaissance pure, mais aussi, dtat des lieux dans
une dmarche long terme dtude des changements
globaux.
De plus, les protocoles ont t labors afin de mettre
en vidence un ventuel effet gradient daltitude sur
les communauts vgtales et animales. Parmi la
faune, les chiroptres ont t tudis durant la mission
qui sest droule du 18 mars au 3 avril 2010.

Chauves-souris de la Guyane et de sa
rgion
Les forts tropicales et tout particulirement celles
dAmrique du Sud constituent les cosystmes qui
abritent le plus grand nombre de chauves-souris. En
Guyane, elles sont reprsentes par un trs grand
nombre despces (102 espces) soit un peu plus dun
mammifre sur deux.
La plus diversifie des familles est celle des Phyllostomidae (qui est une famille endmique aux notropiques). Leur diversit est reflte notamment par
leurs rgimes alimentaires, leurs systmes sociaux, la
slection des gites et leur stratgie de reproduction.
Les chauves-souris sont adaptes des biotopes particuliers du fait de leurs spcialisations anatomiques et
comportementales, elles ont aussi des rgimes alimentaires troitement spcialiss.
Par la richesse spcifique et labondance numrique de
ses populations, le peuplement de chauves-souris
participe largement au fonctionnement et la com-

plexit des cosystmes. Cest ainsi que certaines


chauves-souris assurent la pollinisation de nombreuses
espces vgtales et que dautres dissminent les
graines. Plus de la moiti des espces pionnires sont
disperses par les chiroptres. Les chauves-souris
participent ainsi largement la rgnration forestire
et au maintien de lquilibre forestier. Elles ont donc
un impact direct sur la dynamique et la structure de la
fort.
En Guyane, 102 espces appartenant 53 genres et 9
familles ont t recenses (liste des mammifres valide par le CSRPN en 2009) mais on estime leur
nombre 110 (Charles-Dominique et al. 2001). Cette
liste est en constante volution, de nouvelles espces
sont rgulirement rapportes (rcemment Diclidurus
ingens) tandis que dautres sont limines par mise en
synonymie (comme Micronycteris homezi avec M.
minuta, Ochoa & Sanchez, 2005) ou simplement
changent de nom (plusieurs espces du genre Tonatia
ont ainsi t rcemment renommes Lophostoma, Lee
et al. 2002). A lchelle rgionale, Lim et al. (2005)
comptabilisent 149 espces de chauves-souris sur le
plateau des Guyanes, un chiffre proche des 138 espces recenses au Brsil par Aguiar & Taddei (1995).
Quelques inventaires trs pousss ont montrs que
plus de 70 espces peuvent vivre en sympatrie en
Guyane (Simmons & Voss 1998, Delaval 2004). Le
nombre despces recenses sur un site dpend de
leffort de capture (bien que le taux de capture peut
tre trs variable dun site lautre sans explications
apparentes) du nombre dindividus capturs (Tableau
1) et des caractristiques du site lui-mme (localisation biogographique, la prsence de gites souterrains,
les types de vgtation...). La chiroptrofaune commence tre de mieux en mieux tudie en Guyane et
dans les pays voisins. Le Tableau 1 dresse un tat des
lieux des tudes ralises en fort primaire.

167

culmine quelques 830 m ce qui en fait le second plus haut sommet de Guyane aprs Bellevue de lInini.
Nous avons choisi deffectuer les captures sur le
layon C correspondant au versant ouest du mont
Itoup (figure 2). Afin de montrer lventuel
influence dun gradient daltitude sur la communaut de chiroptres, nous avons captur 3
altitudes diffrentes correspondant 400 m,
600_m et 800 m ( plus o moins 30 m prs).
Daprs les tudes Habitats sur site de
lquipe de lONF et de lIRD (cf. rapports) le
layon C est caractris par une trs faible densit
voire labsence de palmiers, la canope est en
moyenne beaucoup plus haute que sur les autres
layons (correspondant aux autres versants), le
sous-bois est plus clair et il y a beaucoup plus de
gros arbres.
Au niveau de la composition floristique du peuplement forestier, les principales familles prsentes sont les Mimosaceae, les Sapotaceae, les
Lauraceae et les Lecythidaceae. Par contre, les
Caesalpiniaceae sont peu prsentes contrairement dautres forts de Guyane.

Tableau 1 : Inventaires de chauves-souris raliss en Guyane, au


Suriname, au Guyana et au nord du Brsil. Les astrisques (*)
indiquent le nombre despces mises en vidence uniquement
laide de filets japonais, lorsque cela est prcis dans la publication. Tableau ralis daprs Cockle-Betian & Delaval, 2009

Chauves-souris et caractrisation du
milieu
Le peuplement de chiroptres en fort primaire est
caractris par une grande richesse spcifique, une trs
grande diversit mais des abondances globales et
spcifiques assez faibles. En effet, lhtrognit et la
diversit du milieu permettent la coexistence de nombreuses espces qui se partagent lespace, le temps et
les ressources alimentaires dans un quilibre apparent.
Ceci nest pas le cas dans un milieu dgrad o on
observe en gnral une diminution du nombre
despces, essentiellement des Phyllostomidae endmiques des grands blocs forestiers, et une augmentation du nombre dindividus de quelques espces opportunistes.

Matriel et mthodes
Site dtude
Ltude a t effectue sur le site du mont Itoup situ
au sud du massif montagneux des Emerillons en cur
de Parc amazonien de Guyane (figure 1). Ce massif

168

Figure 1 : Carte de localisation du mont Itoup

Captures
Les captures de chauves-souris ont t ralises avec
des filets japonais en nylon de 12 m de long avec 4
poches horizontales et un maillage de 18 mm.
Les filets taient installs au cours de laprs-midi et
ouverts de la tombe de la nuit vers 18h00 jusquau
lendemain matin. 10 filets de 12 m taient installs
soit un linaire total de 120 m.
Chaque site (400 m, 600 m et 800 m) a fait lobjet de
4 nuits de captures. Afin de procder un inventaire le
plus complet possible, les choix des lieux de captures
ont t effectus de sorte assurer une couverture la

Figure 2 : Carte de localisation des sites de captures de chiroptres sur le mont Itoup (Source SRTM/PAG/ONF).

plus large possible de la zone, en intgrant les diffrents types de milieux rencontrs. Ainsi, les filets
taient dplacs dau moins 100 m entre chaque session de capture.
La mission sest droule durant la saison des pluies
mais les captures effectues en Guyane, notamment
aux Nouragues, sur toute lanne, nont pas permis de
mettre en vidence de variations saisonnires notables
dans la composition du peuplement (Delaval, 2004).
Il est bon de noter que lefficacit des filets est trs
diffrente selon la morphologie et le comportement
des espces. Ainsi, un biais en faveur de certaines
espces est possible (Charles-Dominique et al., 2001).
La mthode utilise noffre donc pas la mme chance
de capture lensemble de la faune de chiroptres.
Seuls ceux volant faible hauteur peuvent tre capturs par les filets quvitent en partie les chauves-souris
insectivores qui volent plus haut et qui sont dotes
dun systme dcholocation plus efficace. Dans un
avenir proche il sera bon de complter linventaire
grce la bioacoustique.
Les animaux capturs ont t identifis grce la cl
de dtermination de Charles-Dominique et al. (2001)
complte par des publications spcialises plus rcentes. Le poids, la longueur de lavant-bras, le sexe,
la maturit (ossification des cartilages des articulations
des ailes) et ltat reproducteur des femelles ont t
nots pour chaque individu.

Analyse des donnes


Structure du peuplement
Les espces peuvent tre rparties en guilde partir de
la conjugaison de trois paramtres : le rgime alimentaire, la strate utilise et la technique de chasse pour
les insectivores (Delaval, 2004). Ainsi, nous avons
distingu 8 guildes :
- Les insectivores ariens : Molossidae, Vespertillionidae, Emballonuridae, Furipteridae, Thyropteridae,
Natalidae, Mormoopidae. Ces espces chassent en
plein ciel au-dessus de la canope entre les couronnes
des arbres ou dans les espaces ouverts o elles peuvent
circuler. Leurs ailes sont troites et effiles adaptes
au vol rapide en milieu ouvert (Kalko et al., 1996).
- Les insectivores glaneurs : tous les Phyllostominae
(sauf Phyllostomus spp., Trinycteris nicefori, Glyphonycteris sylvestris). Les prdateurs de sous-bois sont
pour la plupart des glaneurs , terme utilis pour
dcrire le mode de chasse consistant cueillir une
proie sur un support. Le plus souvent la chauve-souris
pendue sous un perchoir surveille lenvironnement et
fond vers la proie quelle a repr. Dautres espces
prospectent le feuillage par un vol lent, la recherche
de proies. Les glaneurs sont caractriss par des
oreilles et une feuille nasale qui sont trs dveloppes,
adaptes aux caractristiques des signaux acoustiques
appropris ce mode de chasse. Leurs ailes sont
larges permettant un vol lent et manuvrable en milieu ferme (Kalko et al., 1996).

169

- Les insectivores-nectarivores : les 4 espces du


genre Phyllostomus, Trinycteris nicefori et Glyphonycteris sylvestris. Ces espces consomment aussi
bien des insectes que du pollen ou du nectar. Certaines
de ces espces comme Phyllostomus discolor et Phyllostomus hastatus peuvent inclure leur rgime des
petits vertbrs et mme dautres chauves-souris (Fischer et al., 1997; Gardner, 1977). Les Phyllostomus
spp. sont souvent dsigns comme omnivores (Heithaus et al., 1974 ; Simmons & Voss, 1998).
- Les nectarivores, pollinivores : 7 espces (Glossophaginae) caractrises par leurs adaptations anatomiques : un museau allong ; la rduction de la taille
des dents, des oreilles et de la feuille nasale ; une
langue allonge possdant des papilles cornes sa
pointe formant une sorte de brosse.
- Les frugivores de sous-bois : toutes les espces
Sternodermatinae qui se nourrissent en sous-bois,
toutes les Carolliinae.
- Les frugivores de canope : toutes les espces
Sternodermatinae qui se nourrissent en canope (Artibeus spp., Platyrrhinus spp., Uroderma bilobatum,
Chiroderma spp., Vampyressa spp., Ectophylla macconnelli, Ametrida centurio).
- Les hmatophages ou vampires, qui se nourrissent
exclusivement de sang. En Guyane, deux espces ont
t recenses : le vampire commun Desmodus rotundus et D. youngi, plus rare, spcialis dans la consommation du sang doiseau. Aucun individu de cette
guilde na t captur durant cette tude.
- Les carnivores reprsents par trois espces: Vampyrum spectrum, la plus grande et la plus puissante de
toute lAmrique du Sud, Chrotopterus auritus et
Trachops cirrhosus. V. spectrum et C. auritus se nourrissent de petits mammifres comme des rongeurs ou
dautres chauves-souris, de petits oiseaux, mais aussi
de petits lzards. T. cirrhosus se nourrit essentiellement de batraciens mais il lui arrive aussi de consommer dautres chauves-souris (Bonato & Facure, 2000).
Lolfaction et la vision sont fortement dveloppes
chez les chauves-souris vgtariennes alors que
laudition et lcholocation sont plus utilises par les
animalivores (Findley & Wilson, 1982).

Effort et taux de captures


Labondance a t standardise par le calcul du taux
de captures : (nombre total de captures) / (effort de
capture), leffort de capture tant le nombre dheures
par le nombre de mtres de filet ayant servi
lchantillonnage.

La richesse spcifique
La richesse spcifique est le nombre despces prsentes dans un milieu donn. Un milieu sera donc
dautant plus riche que la richesse spcifique est
grande. Une batterie doutils statistiques est disponible
pour estimer la richesse spcifique. Nous avons choisi
dutiliser des courbes daccumulation despces. Cette

170

technique est utilise dans lestimation de diffrents


groupes en milieu tropical (Moreno & Halffter, 2000).
Le principe dutilisation de ces courbes repose sur
laccumulation progressive despces au fil de leffort
dchantillonnage. Cet effort est peru soit par le
nombre cumul dindividus soit par celui des occasions dchantillonnages (nuit piges, nuit filets). Le
nombre dindividus est la meilleure mesure de leffort
dchantillonnage quand la densit varie entre les sites
(Moreno & Halffter, 2001; Willott, 2001).
Ainsi, sont construites des courbes de rarfaction (ou
courbes de Mao Tau) correspondant cent rchantillonnages alatoires raliss grce au logiciel
EstimateS Software en libre accs sur Internet
(:_http://viceroy.eeb.uconn.edu/estimates)
rendant
alatoire lordre daccumulation des espces au fil des
individus. Ceci permet donc de saffranchir de
lhtrognit de lchantillonnage (Colwell et al.
2004).
Parvenir un inventaire exhaustif ncessiterait un
norme effort dchantillonnage sur du long terme ce
qui est quasi impossible. De ce fait, des estimateurs de
richesse spcifique existent en fonction du jeu de
donnes disponible. Ainsi, Chao (1984) estime le
nombre despces non observes partir de celles
observes 1 ou 2 fois en se basant sur les donnes
dabondance.
Le logiciel EstimateS permet de calculer cet estimateur.

Lquitabilit
Les indices de diversit dpendent la fois de la richesse spcifique (S) et de la rpartition des effectifs
entre les diverses espces. Des peuplements physionomie trs diffrente peuvent ainsi avoir une mme
diversit. Aussi, convient-il de calculer paralllement
aux indices de diversit, lquitabilit Eq en rapportant
la diversit observe la diversit thorique maximale, qui-rpartition des effectifs entre les S espces
prsentes.
Eq = H / Hmax o Hmax = Ln (S). Eq varie entre 0 et
1, elle tend vers 0 quand la quasi-totalit des effectifs
est concentre sur une espce et est de 1 lorsque toutes
les espces ont mme abondance. On considre que,
plus lquitabilit est forte, plus le milieu est quilibr .

Coefficient de similitude
Les diffrences dans les compositions spcifiques
entre deux habitats peuvent tre values par le coefficient de similitude de Morosita-Horn : C = 2
(aniIxBni)/ [(da+db)xaNxbN] avec da= ani2/aN2,
o aN est le nombre total dindividu dans le site A, et
ani le nombre dindividus de lespce i dans le site A
(idem pour le site B). C varie de 0 lorsque la composition spcifique entre les deux habitats est vraiment
diffrente, 1 lorsquelle est semblable.

Rsultats
La composition du peuplement
191 chauves-souris ont t captures sur le mont
Itoup. Ceci reprsente 33 espces, 28 genres et 8
familles (Tableau 2).

pour les sites dont leffort de capture a t important


nous pouvons avoir 86 espces pouvant vivre en sympatrie sur le site de Paracou (Simmons & Voss, 1998)
et 76 espces aux Nouragues (Delaval, 2004).

Le nombre despces recenses par rapport aux


nombres dindividus capturs est comparable
dautres tudes ralises en Guyane au Suriname ou
au Brsil (Tableau1).
De manire gnrale, les taux de capture sont peu
levs en fort primaire par rapport aux milieux plus
ouverts ou altrs par lhomme. Ici les taux de captures sont faibles (0,011 ind/m/h). Ils sont infrieurs
la moyenne pour la fort primaire en Guyane franaise
(0,0245 ind/ m/h, calcul sur 10 inventaires similaires,
Cockle-Betian & Delaval, 2009).
La diversit est leve (H = 3 sur lensemble des sites)
ainsi que lquitabilit (environ Eq = 0,9 sur
lensemble) indiquant que le peuplement de chiroptres est diversifi et quilibr.
Les Phyllostominae dominent le peuplement avec
36% des captures suivis des Stenodermatinae (34%),
des Carolliinae (16%), des Glossophaginae (10%) et
enfin des autres familles qui reprsentent 4% des captures. De mme, les Phyllostominae sont le groupe
taxonomique le mieux reprsent en nombre despce
(14 espces), les Stenodermatinae sont reprsents par
8 espces.

La richesse spcifique
Durant cette tude sur le site du mont Itoup nous
avons recens 33 espces de chauves-souris (Figure
3).
La courbe de rarfaction permet destimer si le milieu
a t ou non suffisamment chantillonn. Aprs 191
captures la courbe est toujours ascendante, le plateau
nest pas atteint. Ainsi, leffort dchantillonnage idal
permettant dapprocher lasymptote horizontale correspondant au nombre total despces estim sur la
zone nest pas atteint.

Figure 3: Courbe daccumulation (trait gras) et de rarfaction ou


de Mao Tau (trait simple) pour toutes les chauves-souris captures.
La courbe daccumulation consiste en la chronologie
daccumulation des espces au fil des individus ; la courbe de
rarfaction correspond un retirage alatoire des individus et du
comptage des espces quils reprsentent, faisant ainsi disparaitre
leffet de la chronologie.

Structure de la communaut
Les courbes rang-abondance, qui prsentent les abondances des espces classes par ordre dcroissant,
rvlent les caractristiques de la communaut do
est tir lchantillon, au biais dchantillonnage prs.
Lextrmit du diagramme indique le nombre total
despces et la pente de la courbe correspond la
rgularit.
Lorsque lon regarde les abondances relatives des
espces, il apparait vident que certaines espces sont
communes alors que dautres sont rares. Sur les
courbes de rang-abondance les espces rares et communes sopposent. Les espces communes occupent
une grande partie de lespace tandis que les espces
rares, occupent lespace de faon sporadique (Tokeshi,
1999) (Figure 4). Les espces qui composent le peuplement de chauves-souris sur le mont Itoup semblent avoir une distribution dans lespace, formant
ainsi une communaut quilibre.
Pour Kalko et al. (1996) des diffrences dans la disponibilit, labondance, la varit et la distribution des
ressources peuvent influencer la forme des courbes
rang-abondance.

Mao Tau calcule aussi lintervalle de confiance (95%)


qui reprsente les limites infrieures et suprieures de
la richesse observe. Cet intervalle de confiance indique quavec notre effort de capture on contacterait
dans 95 % des cas entre 28 et 38 espces.
Lestimateur Chao1 value la richesse spcifique 41
espces, mais avec un intervalle de confiance (95 %)
dont la limite suprieure est gale 65 espces. La
valeur haute de lintervalle de confiance de
lestimateur Chao1 est probablement plus proche de la
ralit et sous-estime encore trs certainement le
nombre despces total. En effet, daprs la littrature

Figure 4 : Courbe rang-abondance (en logarithme) des captures au


filet sur le mont Itoup, pour toutes les guildes (carrs), pour celle
des espces vgtariennes (triangles) et pour celle des espces
animalivores (croix).

171

Tableau 2 : Liste des espces captures par site et leur effectif. Pour les guildes : N = Nectarivores ; FS = Frugivores de Sous-bois, FC =
Frugivores de canope, IG = Insectivores glaneurs, IA = Insectivores Ariens, I-N = Insectivores-Nectarivores, C = Carnivores

172

Ces facteurs entrainent des diffrences dans la stratgie alimentaire et le partage des ressources, ce qui est
reflt par une distribution plus ou moins rgulire des
espces.
Le peuplement de chauves-souris est domin par la
guilde vgtarienne . Cette guilde ne compte que 2
espces rares (espces reprsentes par 1 ou 2
individus) qui sont Uroderma bilobatum et Vampyrodes caraccioli, tandis que la guilde des animalivores en compte 10, dont 1 carnivores, 6 insectivores glaneurs et 3 insectivores ariens. En Guyane
cest la guilde des insectivores glaneurs qui compte le
plus despces rares (Brosset et al. 1996). La raret
dune espce reflte, soit le rsultat dun biais
dchantillonnage, ce qui est certainement le cas pour
les insectivores ariens, soit une relle raret. Cette
raret peut tre due labsence dune ressource,
comme la nourriture ou le gte. Par exemple, la grande
espce carnivore, Vampyrum spectrum, est une espce
rare en raison de sa taille et de son rgime alimentaire
(Kalko et al., 1996).

Les espces dominantes

Rpartition des guildes


Sur lensemble des sites de captures, les guildes les
mieux reprsentes sont les frugivores de canope
(31%), les insectivores glaneurs (23%) et les frugivores de sous-bois (19%) (Figure 6).
A 400 m, la guilde la mieux reprsente est celle des
Frugivores de canope (35%) certainement d la
prsence darbres tel que des Ficus sp. en fruits qui a
attir un grand nombre de A. planirostris (Figure 5).
A 600 m, ce sont galement les frugivores de canope
qui dominent le peuplement (28%) suivies des insectivores-glaneurs (25%). Notons que les carnivores sont
majoritaires par rapport aux frugivores de sous-bois ce
qui est assez atypique.
A 800 m, ce sont les frugivores de sous-bois qui dominent le peuplement (29%) suivies des frugivores de
canope (25%). Cela est sans doute d la disponibilit des ressources en petits fruits (arbustes de sous-bois
et piphytes). En effet, 800 m il y a plus dpiphytes
lis lhumidit ambiante qu 600 m o le sous bois
est trs clair et o les piphytes sont quasi absentes.

Une communaut peut aussi tre caractrise par les


espces abondantes qui la composent. Comme les
communauts notropicales prsentent une trs faible
proportion de telles espces, ces dernires peuvent tre
utilises comme indicatrices de divers milieux (Tokeshi 1999, Delaval 2004).
Si on regarde la composition du peuplement site par
site (Figure 5), 400 m ce sont A. planirostris avec
16,4% des captures (frugivore de canope) et R. pumilio avec 15,1% des captures (frugivore de sous-bois)
qui dominent le peuplement.
A 600 m le peuplement est domin par T. saurophila
avec 12,1% des captures (insectivore glaneuse) suivie
de deux frugivores de canope, A. planirostris et A.
obscurus et une nectarivore L. thomasi reprsentant
chacune 10,6% des captures.
A 800 m le peuplement est domin par une frugivore
de canope A. planirostris et une frugivore de sousbois R. pumilio avec 15,4% des captures chacune. Sur
lensemble des captures 5 espces reprsentent 50%
des individus (A. planirostris, T. saurophila, A. obscurus, L. silvicolum, R. pumilio). A. planirostris domine
le peuplement avec 14,1% des captures.

173

Figure 5 : Pourcentage de chaque espce dans les diffrents sites (400 m, 600 m et 800 m) et sur lensemble des sites
(Itoup). Le code des espces est indiqu dans le tableau 1.

Figure 6 : Pourcentage dindividus par guilde dans les diffrents sites (400 m, 600 m et 800 m) et sur lensemble des sites
(Itoup).

174

Discussion Conclusion
Cette tude a permis didentifier 33 espces de chiroptres. Daprs lestimateur de Chao et de ce qui est
connu dans la littrature, notre compltude
dchantillonnage serait infrieure 50%. Le nombre
despces prsentes sur un site ne peut sestimer
quaprs un grand nombre de captures. En effet, en
fort primaire tropicale un petit nombre despces
communes est contact rapidement mais un grand
nombre despces rares trs rares ne sont recenses
quaprs un gros effort dchantillonnage (Brosset et
al. 1996).
Le peuplement du mont Itoup est caractristique dun
peuplement de fort intacte avec une grande diversit,
une communaut quilibre et de faibles taux de captures.
Les Phyllostominae sont le groupe taxonomique le
mieux reprsent que ce soit en nombre dindividus,
quen nombre despces. Les Phyllostominae sont
considrs comme caractristiques des milieux forestiers non perturbs (Delaval, 2004; Clarke et al. 2005).
La plupart sont des espces sensibles aux perturbations et indicatrices des milieux forestiers intacts (Fenton et al. 1992).

faveur de ces espces. Ainsi, nous pourrions, par


exemple, effectuer des relevs acoustiques lors de
sances dcoutes durant une heure aprs le crpuscule. Les contacts acoustiques peuvent tre identifis
instantanment avec un bat detector de type D1000
(Pettersson Elektronik) et pour les plus complexes,
tre enregistrs et identifis ensuite par analyse auditive et informatique (logiciel BatSound, Pettersson
Elektronik).
Ainsi, afin de mieux apprhender la composition et la
structure du peuplement de chiroptres du mont Itoup
il faudrait raliser une autre mission associant la bioacoustique aux captures au filet.
Enfin, chaque espce a fait lobjet dun prlvement
de patagium pour dventuelles analyses gntiques.
Ce matriel pourrait servir pour des tudes de phylogographie des espces, de barcoding ou plus simplement pour de la taxonomie sur certains complexes
despces (Platyrrhinus aff. Helleri / incarum / fusciventris par exemple).

Par contre, la guilde la mieux reprsente est celle des


frugivores de canope car A. planirostris (Stenodermatinae) domine le peuplement, sans doute cause de
la disponibilit de sa ressource.
La prsence despces troglophiles (cavernicoles)
(Pteronotus parnellii, Lionycteris spurrelli, Anoura
geoffroyi et Lonchorhina inusitata) suggre la prsence de cavits rocheuses sur le mont Itoup. Les
grottes, mme de taille modeste, sont un atout du fait
de leur raret en Guyane. Les espces infodes ce
type de gte ont donc une rpartition htrogne et
localise, elles sont plus vulnrables que les espces
gitant dans les arbres et le feuillage. Les facteurs limitants ne sont pas les mmes pour toutes les espces.
Pour certaines, la disponibilit en gtes sera limitante,
pour dautres ce sera la nature des ressources alimentaires. Tous ces facteurs entrent en jeux, mais avec des
degrs diffrents selon les espces.
Leffort de capture effectu ne permet pas de tirer de
conclusions par rapport une ventuelle rpartition le
long dun gradient daltitude. Dailleurs, le coefficient
de similitude entre les diffrents sites indique que les
peuplements sont trs proches (E400m-600m = 0,76 ;
E 400m-800m = 0,70 ; E600m-800m = 0,68).
Notons quavec la mthode de capture au filet, il
existe un biais dchantillonnage en faveur des Phyllostomidae de sous-bois qui dominent ainsi trs largement linventaire. Toutes les chauves-souris de haut
vol (Emballonuridae, Molossidae) ou les espces trs
lgres au vol papillonnant (Furipteridae, Thyropteridae) ne se font que trs rarement capturer par cette
technique. La bioacoustique fait ses dbuts en Guyane
mais pourrait permettre de complter linventaire en

175

Les espces
Glossophaginae
- Lonchophylla thomasi: 12 captures (4 f et 8 m).
Une femelle tait en fin dallaitement. Petite nectarivore de sous-bois assez commune en fort. Elle gite en
gnral dans des troncs creux au sol, elle est exclusivement forestire.

- Anoura geoffroyi : 3 captures (1 f et 2 m). Nectarivore troglophile. Sa rpartition est donc lie la prsence de cavits rocheuses. Elle tablit souvent des
colonies mixtes avec Pteronotus parnellii. Cette espce a t valide comme espce dterminante pour
les ZNIEFF (CSRPN 2010).

- Anoura caudifera : 2 captures (1 f et 1 m). Espce


trs proche de A. geoffroyi mais non troglophile
stricte.

176

- Lionycteris spurrelli : 2 captures (1 f et 1 m). Nectarivore troglophile. Sa rpartition est donc lie la
prsence de cavits rocheuses. Elle est trs commune
l o des cavits souterraines sont disponibles pour
tablir des colonies, sinon elle est absente. Elle est
exclusivement forestire. Cette espce a t valide
comme espce dterminante pour les ZNIEFF
(CSRPN 2010).

Carolliinae
- Rhinophylla pumilio : 15 individus (7 f, 6 m et 2
indtermins car chapps avant dtermination du
sexe). Deux femelles taient en dbut de gestation.
Petite frugivore spcialise sur les fruits de certaines
lianes piphytes de sous-bois (Cockle, 1997). Elle gite
sous des feuilles de palmier quelle dcoupe afin de
former des tentes . Cette espce est lune des plus
commune en sous-bois de fort primaire en Guyane
(Cockle-Betian & Delaval, 2009).

- Carollia perspicillata : 9 individus (3 f et 6 m).


Frugivore de sous-bois trs commune. Cette espce
ubiquiste connait des explosions dmographiques en
milieu secondaire. Elle se nourrit essentiellement de
plantes pionnires (Solanum spp., Piper spp., Vismia
spp.) et na pas de gite spcifique.

- Carollia brevicauda : 7 individus (3 f et 4 m). Une


femelle tait en dbut de gestation. Espce proche de
C. perspicillata mais beaucoup moins ubiquiste. Elle
se trouve essentiellement en fort primaire. Daprs
les rcentes tudes en gntique sur le barcoding il
savre que C. brevicauda regrouperait un complexe
de deux espces (Clare et al. 2006).

Stenodermatinae
- Artibeus lituratus : 6 individus (2 f, 2 m et 2 juvniles). Une femelle tait allaitante. Cest une grande et
puissante frugivore de canope. Elle est relativement
frquente trs commune dans tous les milieux, notamment dans les zones de lisires et de recru. Elle se
nourrit essentiellement de Cecropia et de Ficus.

- Artibeus planirostris : 27 individus (6 f et 21 m).


Une femelle tait allaitante et deux en dbut de gestation. Cest une grande et puissante frugivore exploitant la canope mais circulant aussi beaucoup en sousbois. Elle est trs commune partout en Guyane, surtout
dans les zones de recru et le long des lisires. Capable
de grande mobilit (plusieurs dizaines de kilomtres
en une nuit) elle a un grand domaine vital. A. planirostris se nourrit essentiellement de Cecropia, et de Ficus. Lors de fructification en fort de Ficus par
exemple elle peut devenir lespce majoritaire dans un
inventaire car de nombreux individus viennent se
nourrir sur cet arbre.

177

- Artibeus obscurus : 17 individus (8 f et 9 m). Deux


femelles taient en fin de gestation. Espce commune
en fort. Son domaine vital serait moins grand que les
deux autres grands Artibeus (Delaval, 2004). Elle se
nourrit galement de Ficus et Cecropia.

- Sturnira tildae : 5 individus (3 f et 2 m). Deux


femelles taient allaitantes. Frugivore de sous-bois
assez commune. Elle affectionnerait plus les grands
massifs forestiers que son espce jumelle S. lilium qui
est infode aux espaces ouverts et aux lisires.

- Ametrida centurio : 2 individus (2 m). Frugivore


de canope peu commune. Les deux individus ont t
capturs 600 m derrire la DZ (Droping Zone). Cette
ouverture leur a peut-tre permis de voler plus bas et
ainsi de se prendre dans les filets de sous bois.

178

- Uroderma bilobatum : 1 individu (1 f). Une femelle en fin de gestation. Frugivore de canope assez
commune. Elle gite sous des feuilles de palmier
quelle dcoupe afin de former des tentes .

- Vampyrodes caraccioli : une femelle 600 m.


Cette grosse frugivore est peu commune.

- Platyrrhinus aff. helleri : 5 individus (3 f et 2 m).


Une femelle tait allaitante. Depuis larticle de Velazco et al. (2010) dcrivant 2 nouvelles espces de ce
complexe il savre quen Guyane ne sont prsentes
que P. incarum et P. fusciventris (espce nouvelle). P.
helleri ntant prsente quau nord de la Colombie et
du Venezuela et louest de lEquateur. Dans cette
tude sur le mont Itoup les individus ont donc t
identifis P. affinis helleri sans avoir eu connaissance
de ces nouveaux lments. Il peut donc sagir soit de
P. incarum ou de P. fusciventris. Les 5 individus ont
fait lobjet dun prlvement de patagium pour
dventuelles tudes gntiques. Il serait donc intressant de les analyser. P. aurarius serait potentiellement
prsente dans le sud de la Guyane. Cette chauve-souris
trouve en altitude au Guyana (Lim & Engstrom,
2000) et au Suriname (Hollowell & Reynolds, 2005)
laisse prsager sa prsence sur le mont Itoup.

- Lophostoma silvicolum : 16 individus (10 f et


6_m). Insectivore glaneuse de taille moyenne assez
grande, rgulirement rencontre en fort primaire.

- Lophostoma schulzi : 3 individus (3 m). 2 mles


400 m et un 600 m. Cette espce est relativement
rare partout en Guyane. Cest une endmique du plateau des Guyanes. Cette espce a t valide comme
espce dterminante pour les ZNIEFF (CSRPN 2010).

Phyllostominae
- Tonatia saurophila : 18 individus (9 f et 9 m). Une
femelle tait allaitante. Insectivore glaneuse de sousbois trs commune en fort.

- Trachops cirrhosus : 11 individus (4 f et 7 m). Il se


nourrit essentiellement de batraciens mais il lui arrive
aussi de consommer dautres chauves-souris (Rodrigues et al., 2004). Daprs les rcentes tudes en
gntique sur le barcoding il savre que T. cirrhosus
regrouperait un complexe de trois espces (Clare et al.
2006).

179

- Phyllostomus elongatus : 5 individus (5 m). Omnivore de taille moyenne. Elle est gnralement commune lchelle de la Guyane en fort primaire.

- Mimon crenulatum : 1 individu (1 m). Insectivore


glaneuse, rgulirement capture en fort primaire.

- Phyllostomus hastatus : Un individu (1 m). Grande


espce principalement forestire et assez commune en
Guyane. Cet omnivore a un rgime allant du pollen
(ou du nectar) de petits vertbrs (y compris des
chauves-souris) en passant par les insectes.

Micronycteris microtis : 3 individus (1 f et 2 m). Toute


petite insectivore glaneuse trs lgre et de ce fait sans
doute mal reprsente dans les captures. Elle est tout
de mme rgulirement capture un peu partout en
Guyane, y compris en fort secondaire et dans les
zones plus ouvertes.

180

Phylloderma stenops : Un individu (1 m). Grande


omnivore consommant des insectes (notamment
du couvain dhymnoptres (Jeanne, 1970) et des
fruits (Kalko et al., 1996; Delaval, 2004). Elle est
souvent considre rare mais serait en fait assez
largement distribue en milieu forestier primaire,
et mme parfois commune. Daprs les rcentes
tudes en gntique sur le barcoding il savre
que P. stenops regrouperait un complexe de deux
espces (Clare et al. 2006).

- Trinycteris nicefori : Un individu (1 f). Petite insectivore glaneuse de fort primaire, peu commune.

- Vampyrum spectrum : 2 individus (2 f). La plus


grande espce dAmrique et la plus grande espce de
micro-chiroptres. Une femelle tait allaitante 800 m
et lautre sans tat reproducteur 400 m. Cette espce
est rarement capture mais serait en ralit largement
rpandue dans toute la zone notropicale et prsente
dans plusieurs types dhabitat. Carnivore trs puissante elle se nourrit dautres chauves-souris, doiseaux
et de petits reptiles comme des lzards.

- Glyphonycteris daviesi : Un individu (1 f). Insectivore glaneuse de fort primaire, peu commune.

- Chrotopterus auritus : 5 individus (4 f et 1 m).


Cest la deuxime plus grosse chauve-souris, et elle
est carnivore. Quatre individus ont t capturs
600_m, 3 femelles dont une en dbut de gestation et
un mle, laissant penser quun gite avec une colonie
de reproduction tait prsente dans le secteur. Un autre
individu a t captur 400 m. Cette espce nest
dhabitude que trs rarement capture.

181

- Lonchorhina inusitata: 1 individu (1 f) a t captur 600 m. Il sagit dune spectaculaire Phyllostominae de par la taille de sa feuille nasale et de ses
oreilles. Troglophile elle a une rpartition trs localise : les Nouragues (Brosset et al. 1996 ; Delaval
2004), Sal (Brosset et al. 1996), Piton Remarquable
de lArmontabo (Cockle- Betian & Coullet 2007) et
montagne de Kaw. Dcrite trs rcemment (Handley
& Ochoa 1997), elle serait prsente au Venezuela,
dans les trois Guyanes et dans louest du Brsil (Rondnia). Cette espce a t valide comme espce dterminante pour les ZNIEFF (CSRPN 2010).

Mormoopidae
- Pteronotus parnellii : 4 individus (4 m). Cet insectivore de canope troglophile peut vivre en grosse
colonie. Trs commune partout o il y a des grottes ou
abris sous roche. Il peut nanmoins sadapter sur la
cote douvrages tels que les ponts. Cette espce a t
valide comme espce dterminante pour les ZNIEFF
(CSRPN 2010).

Emballonuridae
- Cormora brevirostris: Un individu (1 m). Certainement commune un peu partout mais trs rarement
capture au filet. La bioacoustique nous permettra de
connaitre un peu mieux son statut en Guyane.

182

Vespertillionidae
- Myotis riparius : 2 individus (2 f). Toute petite
insectivore forestire pas trs commune car sans doute
peu capture dans les filets. Daprs les rcentes
tudes en gntique sur le barcoding il savre que M.
riparius regrouperait un complexe de trois espces
(Clare et al. 2006).

Thyropteridae
- Thyroptera discifera : une femelle capture 800
m. Cette petite chauve-souris (3g) appartient la famille des Thyropteridae, famille qui possde des ventouses. En 1928 Thomas (Thomas 1928 cit dans
Simmons & Voss 1998) mentionne un spcimen de T.
discifera Cayenne. Depuis, un autre spcimen a t
collect aux Nouragues (Delaval, 2004) et sur le plateau Lucifer (Cockle-Betian, 2007). Cette donne sur
le mont Itoup est donc la quatrime pour la Guyane.
Une espce trs proche T. tricolor est commune en
Guyane, on la trouve dans les jeunes feuilles roules
de bananier ou de balisier. Elle se reconnait facilement
grce son ventre blanc ce qui la distingue facilement
de T. discifera. Le spcimen a t gard en collection
(fixation au formaldhyde 6% puis conservation
lthanol) et est disposition du PAG. Un prlvement
gntique a galement t ralis et est conserv dans
lthanol.

Remerciements
Nous tenons remercier le Parc amazonien de Guyane
et tout particulirement Nicolas Surugue pour
lorganisation de cette mission. Merci galement
Mal Dewynter (ONF), Vincent Pelletier (Ecobios) et
Nicolas Surugue (PAG) pour leur aide prcieuse sur le
terrain. Merci lONF et particulirement le Directeur
Pierre-Jean Morel et la chef du service Sylvtude
Berengre Blin pour avoir permis cette collaboration
ONF/PAG. Enfin, merci tous les participants de
cette mission pour la bonne entente et pour le bon
droulement du travail sur le terrain.

183

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185

Lherptofaune du mont Itoup


Mal Dewynter1
1

Office National des Forts de Guyane

Rsum
Linventaire des amphibiens et reptiles du mont Itoup a permis didentifier la prsence de 45 espces
danoures, ce qui daprs les connaissances actuelles reprsente entre 70 et 80% du peuplement rel.
Lordre des squamates a t bien reprsent avec18 espces identifies, tandis que lordre des Serpentes a t
peine effleur.

Mots cls
Parc amazonien de Guyane, mont Itoup, Herptofaune, Herptologie, amphibiens, reptiles, ONF

Introduction
Les cycles climatiques du Plistocne ont install, tour
tour, des priodes glaciaires et interglaciaires. Sous
les latitudes tropicales, les priodes plus froides et plus
sches, dites glaciaires, rduisent la couverture forestire et la remplacent par une vgtation plus sche.
En revanche, les interglaciaires favorisent lexpansion
dune fort trs humide. Pendant ces priodes humides, forts sches et formations ouvertes (savanes,
savanes-roches) deviennent relictuelles, tandis que les
priodes sches relguent les forts humides dans des
zones refuges. Lalternance de ces deux climats permet lisolement biogographique, l'un des principaux
mcanismes de la spciation.

Nous le verrons, cette premire tude met bien en


vidence un seuil altitudinal au-del duquel apparait
un cortge d'espces dites submontagnardes. Elle met
galement en avant les limites de la mthodologie
pour un suivi long terme des populations d'amphibiens tout en explorant de nouvelles pistes. Ce rapport
se prsente galement sous la forme d'un catalogue
des espces du mont Itoup. Cela afin de servir de
guide de terrain aux agents du Parc amazonien.

Les massifs montagneux de Guyane reprsentent donc


des refuges pour un petit cortge d'espces vgtales
et animales trs spcialiss. Ces massifs et leur biocnose constituent ainsi d'excellents candidats au titre
dobservatoire des changements climatiques.

Etat des connaissances sur les


communauts forestires
damphibiens

Lorsque l'ide d'une mission pluridisciplinaire sur le


mont Itoup a t lance en 2009, l'intrt d'tudier la
communaut d'amphibiens a tout de suite t suggr
l'quipe du Parc amazonien de Guyane. Certains
amphibiens sont intimement lis aux grands massifs
montagneux et il tait prvisible de les retrouver sur le
mont Itoup ; la dcouverte de nouvelles espces
n'tant pas exclue. En ayant l'esprit que le mont
Itoup tait susceptible de s'inscrire dans un rseau de
placettes permanentes pour le suivi des changements
globaux, nous avons propos un protocole de caractrisation des communauts d'amphibiens par un chantillonnage de quatre stations altitudinales (200, 400,
600 et 800 m). Il s'est avr que la faune prsente
400 m tait tout fait caractristique des forts de
plaine, tandis que la batrachofaune au-del de 500 m
prsentait bien un cortge singulier. Le protocole a
donc t modifi in situ : afin d'augmenter l'effort
d'chantillonnage sur les stations 400, 600 et 800 m,
l'tude de la station 200 m a t annule.

Depuis les donnes de lAtlas des amphibiens de


Guyane (Lescure & Marty, 2000), plusieurs missions
ddies notamment linventaire de lherptofaune
ont t organises dans le sud de la Guyane. Le tableau I prsente une synthse des rsultats de ces
missions. Les donnes ponctuelles issues de lAtlas de
Lescure & Marty (2000) n'ont pas t prises en
compte dans ce bilan. La carte 1 permet de se rendre
compte de la rpartition des stations inventories.
Nous y avons galement fait figurer les sites bien
tudis au nord du Parc amazonien de Guyane (rserves naturelles nationales de la Trinit et des Nouragues et rserve biologique de Lucifer Dekou-dekou),
ainsi que quelques localits dignes d'intrt dans les
tats voisins : Parque Nacional das Montanhas do
Tumucumaque dans l'tat d'Amapa (5 sites tudis) et
Nassau Plateau et Lely Plateau au Suriname (inventaires trs prliminaires).

186

Enfin, dans le chapitre "Perspectives", quelques


thmes de recherche sur les amphibiens avec des applications l'cologie de la conservation sont proposs

Tableau 1 : Inventaires batrachologiques (localits du Parc amazonien de Guyane et localits voisines).

Carte 1 : Principaux sites inventoris en foret guyanaise intrieure.


Sources : fond de carte daprs des donnes NASA. Les zones
transparentes ples constituent la zone de cur du Parc amazonien
de Guyane et le Parque Nacional das Montanhas do Tumucumaque.

Carte 2 : Le mont Itoup fait partie d'un imposant massif montagneux d'environ 45 km2.

187

Tableau 2 : calendrier de la mission Itoup (altitude des bivouacs et regroupement en stations altitudinales 400, 600 et 800 m).

Site d'tude
Le mont Itoup se prsente sous la forme d'un plateau
d'environ 1 km2, s'levant quelques 830 m d'altitude.
Il merge d'un imposant massif montagneux, situe
230 km l'intrieur des terres (carte 2) dans la zone
cur du Parc amazonien de Guyane. L'essentiel de la
surface du massif (prs de 45 km) dpasse l'isoplethe
500 m considr comme la limite infrieure des forts
submontagnardes dfinies par de Granville (1994).
Du point de vue climatique, le mont Itoup se situe
plus ou moins sous l'isohytes 2250 mm (moyenne
annuelle 1971- 2000 ; Mto-France Cayenne in Barret, 2008), mais la topographie accidente et l'altitude
leve modifient sans aucun doute les conditions climatiques locales en "pigeant" les nuages. Cela permet probablement un apport en pluie trs suprieur
la valeur fournie par Mto-France Cayenne. Cela
entraine galement la persistance de brumes qui maintiennent le massif des niveaux extrmes d'hygromtrie quelle que soit la saison.
Le camp de base et la Dropping Zone, installs
585_m d'altitude (UTM 267026-334416), s'ouvrent
vers le piedmont (ouest) par le layon C (pente
moyenne : 12%) et vers le plateau (est) par le layon A
(pente moyenne : 18%). Le plateau est parcouru, selon
un transect sud-ouest/nord-est par le layon F dont
l'altitude est relativement constante (774 831 m). Les
secteurs prospects (sites des bivouacs), figurant sur la
carte 3, ont t regroups autour de trois stations
correspondant des tages altitudinaux : la station
400 m (bivouacs et prospections entre 350 et 400 m
d'altitude le long du layon C) ; la station 600 m
(bivouacs et prospections entre 570 et 630 m d'altitude
le long du layon A) et la station 800 m (bivouacs
et prospections entre 800 m et 830 m d'altitude le long
du layon F).

Mthodologie
Les inventaires herptologiques et batrachologiques se
sont ports exclusivement sur le flanc ouest et le plateau du mont Itoup. La pente a t prospecte selon
un gradient altitudinal (de 350 m 830 m) le long des
layons C et A ; le plateau, selon le layon F.
Quatre jours conscutifs ont t consacrs au plateau
du mont Itoup (station 800 m ), tandis que le camp
de base (station 600 m ) a fait l'objet de 6 jours de
prospections non continues. Quant la station
400 m , elle a t inventorie durant 5 jours conscutifs.

188

Le calendrier de la mission est repris dans le tableau 2


et les diffrentes stations prospectes dans la carte 3.
Les amphibiens ont t inventoris selon les mthodes
du VES (Visual Encounter Survey) et du AES (Acoustic Encounter Survey) sans standardisation, au cours
de prospections diurnes et nocturnes : tous les amphibiens dtects la vue ou au chant, quelque soit leur
distance lobservateur, sont pris en compte dans
linventaire. Bien que les mthodologies VES et AES
non standardises ne permettent pas d'analyses quantitatives, elles demeurent bien plus pratiques et efficaces que le Standardized Visual Transect Sampling
(SVTS) et le Standardized Acoustic Transect Sampling (SATS) qui imposent de parcourir de manire
rcurrente des transects (environ 500 m de long) en ne
tenant compte que des individus prsents sur une
bande d'un mtre de large.
Le mode de prsentation des donnes et les analyses
sont repris dans le chapitre suivant : Analyse de la
communaut d'amphibiens .
Les serpents, lzards, tortues et camans ont t observs fortuitement au cours des dplacements.
Toutes les espces captures ont t photographies
sur le terrain laide d'un reflex numrique Canon
EOS 40D quipe dun objectif macro 100 mm. Les
photographies qui figurent dans ce rapport reprsentent uniquement des individus capturs sur le mont
Itoup.

Carte 3 : Dtail du mont Itoup et secteurs prospectes pour les inventaires herptologiques (sources : SRTM/PAG/ONF)

Rsultats
Les prospections ont permis de noter la prsence de 46
espces d'amphibiens dont 45 espces d'anoures et une
espce de gymnophione (amphibien apode appel
galement ccilie). Elles ont galement fourni une
liste de 27 espces de squamates (10 serpents et 17
lzards), une tortue et un caman.
A ces donnes, il convient de rajouter les observations
des autres membres de l'expdition. Les identifications
ont t faites d'aprs photographies aprs la mission.
Ainsi, deux espces de serpents supplmentaires sont
documentes (Boa constrictor et Bothrops atrox) par
l'quipe d'Ecobios et une espce de lzard (Anolis
ortonii), par l'quipe du Parc amazonien de Guyane.
Ces observations portent donc le nombre de squamates
30 espces (12 serpents et 18 lzards).

Le tableau 3, ci-aprs, reprend sous la forme d'une


matrice prsence/absence (1/0) les espces d'anoures
contactes en fonction des jours de prospections (les
chantillons) regroups par stations altitudinales. Les
45 espces sont classes par ordre dcroissant d'occurrences.
L'analyse de ces donnes est prsente dans le chapitre
suivant. Les amphibiens observs sur le mont Itoup
sont galement prsente plus bas sous la forme d'un
catalogue illustr et comment.

Les donnes concernant les squamates, trop prliminaires, ne feront pas l'objet d'une analyse spcifique
dans ce rapport. Les reptiles sont prsents en deuxime partie sous la forme d'un catalogue illustr et
comment.
En revanche, les donnes concernant les amphibiens
sont suffisamment toffes pour permettre une premire analyse des communauts des diffrentes stations altitudinales.

189

Tableau 3 : Occurrence des espces par chantillons (regroups par stations altitudinales)

190

Analyse de la communaut d'amphibiens


Analyse globale : la diversit
Le manque d'exhaustivit est une caractristique gnrale des relevs de biodiversit. Parvenir, en fort
guyanaise, un inventaire complet des amphibiens
ncessite ainsi un effort de prospection long et coteux.
Toutefois, l'analyse des donnes rcoltes lors d'tudes
prcdentes a mis en vidence que deux sessions d'inventaires complmentaires d'une dizaine de jours
permettaient d'obtenir un tat des lieux satisfaisant et
une estimation fiable de la diversit des communauts
d'amphibiens anoures. Le cas des ccilies (gymnophiones) est trait part car leurs murs fouisseuses
rendent les inventaires fastidieux.
Par ailleurs, relever le nombre exact d'individus de
chaque espce reprsente dans un chantillon s'avre
extrmement complexe (mles chanteurs nombreux et
isols, milliers d'individus dans certaines mares de
reproduction...). Cependant, les travaux rcents de
Dawson & Efford (2009), qui associent une combinaison d'enregistrements sonores et la mthode SECR
(Spatially Explicit Capture- Recapture) pourraient
permettre d'estimer les densits d'espces territoriales
et offrir un outil de suivi de la sant des populations
d'espces sensibles. Nous y reviendrons dans les perspectives.
Dans le cas d'chantillons rpts dans le temps et
dans l'espace, les donnes d'incidence (prsence/absence) sont, en revanche, faciles collecter.
Selon Chao (2005), le terme "chantillon" peut s'appliquer de nombreuses situations pour peu que la
mthodologie soit relativement standardise : quadrat,
site, transect, priode fixe de temps... Dans notre cas,

un chantillon correspond une journe complte de


prospection (globalement de 05h00' 23h00'). Cela ne
signifie pas une prospection continue de 18h00, mais
la prise en compte de tous les indices de prsence
(observations directes, chants, pontes ou ttards...)
dans ce laps de temps. Les individus de ces chantillons sont les espces contactes.
Les rsultats sont alors prsents sous forme d'une
matrice d'incidence (1/0 - prsence/absence) espce
par chantillon (cf. Tableau 3, page prcdente).

Etat de l'inventaire
Afin de saffranchir de la dimension chronologique de
la mission et de lhtrognit de lchantillonnage
due aux conditions climatiques inconstantes, il est
intressant de calculer une courbe daccumulation de
la richesse spcifique (appele galement courbe de
rarfaction). Cette fonction, calcule analytiquement,
sappelle encore la courbe Mao Tau (Colwell et al.,
2004). Les courbes Mao Tau ne sont pas des estimateurs de richesse au sens des estimateurs classiques
Chao ou ICE. En fait, Mao Tau calcule la richesse
spcifique dun sous-chantillonnage du jeu complet
de donnes (bas sur toutes les espces recenses sur
la zone). Il est alors possible de comparer les richesses
de diffrents sites (mais galement celles calcules sur
un mme site lors de deux sessions d'chantillonnage),
en comparant les courbes Mao Tau de diffrents inventaires effort d'chantillonnage gal.
La courbe de rarfaction permet destimer si la zone
d'tude a globalement t chantillonne de faon
convenable. On peut ainsi estimer qu'un secteur a t
chantillonn de faon acceptable si la croissance de
la courbe tend ralentir, cest--dire que le nombre
despces nouvelles diminue avec laugmentation du
nombre dchantillons. Leffort dchantillonnage
idal permettrait dapprocher lasymptote horizontale
(correspondant au nombre total despces prsentes
dans la zone).
Si lasymptote est atteinte pour plusieurs communauts (de diffrents sites tudis), il peut y avoir comparaison directe des richesses. Si lasymptote nest pas
atteinte, les courbes Mao Tau permettent la comparaison des richesses en rduisant la taille des chantillons
(pour arriver une taille commune).

Figure 1 : Courbe de rarfaction (et son intervalle de confiance) de


la richesse d'amphibiens observe sur le mont Itoup en avril 2010.
Apres 15 chantillonnages, l'asymptote, caractristique d'un inventaire exhaustif, est loin d'tre atteinte.

La courbe Mao Tau (Figure 1) est figure avec son


intervalle de confiance (95 %). Cette reprsentation
permet d'illustrer qu'en 15 jours de prospection, entre
38 et 51 espces seraient inventories dans les conditions de la mission d'avril 2010. Un effort d'chantillonnage complmentaire de 15 jours permettrait de
recalculer la courbe et de resserrer l'intervalle de confiance autour d'une courbe tendant l'asymptote.

191

Estimation de la richesse globale


Notons l'occurrence, dans le jeu de donnes, d'uniques
et de duplicates (des espces observes qu'une seule
fois pour les uniques - lors d'un seul chantillonnage ou deux fois pour les duplicates) Sur l'ensemble de
l'tude, dix espces d'anoures constituent des uniques
et trois espces des duplicates. Face ce constat, il est
intressant de compenser le biais inhrent un chantillonnage non exhaustif, en faisant appel des estimateurs non-paramtriques.
Le logiciel EstimateS (Colwell, 2009) permet de calculer facilement des estimateurs partir de la matrice
espce par chantillon . Diffrents estimateurs,
bass sur l'incidence, ont t compars: Chao estime
ainsi le nombre despces non observes partir de
celles observes 1 ou 2 fois. L'estimateur Chao 2 value cette richesse 55,5, mais avec un intervalle de
confiance s'talant de 47 90 espces.
L'estimateur ICE (Incidence Coverage-Estimator)
value la richesse 51,5. Ces estimations (autour de
50 55 espces) rejoignent les richesses obtenues sur
d'autres sites (RN Trinti, notamment) la faveur de
deux missions complmentaires. Elles sous-estiment
toutefois, sans aucun doute, la diversit du mont Itoup.

Que faut-il en dduire ?


Tout d'abord, les conditions mtorologiques ont t
favorables l'inventaire des amphibiens. L'observation
de 45 espces d'anoures est un score trs correct au
regard des missions (de dures quivalentes) menes
dans le sud de la Guyane. Cependant, tant les estimateurs de richesses que l'exprience dmontrent que
l'inventaire est loin d'tre achev. Une dizaine d'espces pourraient venir complter la liste la faveur
d'une seconde mission dcale dans la saison, tandis
qu'une autre dizaine d'espces bien plus discrtes et
difficiles contacter viendraient probablement s'ajouter la faveur dune mission adapte un objectif
dinventaire exhaustif.
L'analyse du gradient altitudinal, travers la rpartition des espces observes, repose donc sur 80 %
voire 70 % du peuplement rel.

Richesses spcifiques locales : les diversits


Les trois tages chantillonns (400 m, 600 m et
800 m), malgr une pression d'observation htrogne,
ont livr des communauts d'anoures de richesses
spcifiques tonnamment proches. Les richesses spcifiques observes 400 m et 600 m s'lvent, toutes
deux 27 espces. Celle constate 800 m s'avre
lgrement suprieure avec 32 espces. Toutefois, la
prsence d'une grande mare sur le plateau du mont
Itoup biaise quelque peu cette valeur. La mare
sommitale prsente un cortge d'espces inattendu
dont certaines composantes sont tout fait surprenantes dans cette rgion recule et loigne des grands

192

axes fluviaux. Scinax boesemani et Dendropsophus


minutus sont des espces caractristiques des rgions
ctires tandis que Phyllomedusa tomopterna et Trachycephalus coriaceus, probablement uniformment
rparties en fort, ne se rencontrent dans les mares
temporaires qu' la faveur des grosses averses. Bien
que la prsence de ces quatre espces mrite d'tre
souligne (elle sera discute plus bas), elle apporte peu
d'informations quant l'influence de l'altitude sur la
communaut d'amphibiens. Ces espces exclues, la
richesse spcifique utile l'analyse s'lve 28
espces. Trois communauts tages, trois diversits
locales quivalentes...
Du point de vue strict de la richesse spcifique, il n'y
pas de gradient ni de diffrence li l'altitude. Le
nombre d'chantillons (4 rptitions 800 m, 5
400 m et 6 600 m) demeure cependant trop faible
pour calculer puis comparer les courbes de rarfaction.
En revanche, l'analyse de la composition des communauts apporte des lments forts intressants quant
un tagement des espces...

Diversit et tagement altitudinal


La diversit bta est une mesure de la biodiversit qui
consiste comparer la composition de communauts
entre cosystmes ou le long de gradients environnementaux. Cela suppose de comparer le nombre de
taxons qui sont uniques chacun des cosystmes. De
l'analyse qui suit, nous avons exclu les quatre espces
de la mare temporaire, non significatives notre sens.
L'indice le plus couramment utilis est l'indice de
similitude de Sorensen. Trs simple calculer, l'indice
varie de 0 lorsque les communauts n'ont aucune
espce en commun 1 (100 %) lorsque les communauts sont identiques.
Les rsultats sont les suivants : (400-600) = 0,7 ;
(600-800) = 0,77 ; (400-800) = 0,26
Chaque tage altitudinal partage donc les trois-quarts
de ses espces (70 et 77%) avec l'tage le plus proche,
mais les deux tages loigns n'ont qu'un quart (26%)
de leurs espces en commun. Il y a donc bien un
changement progressif dans la communaut d'amphibiens anoures le long du gradient altitudinal.

Des espces submontagnardes ?


L'volution de la communaut d'amphibiens selon un
gradient altitudinal est flagrante. Les communauts
d'amphibiens 400 m et 800 m prsentent chacune
des espces originales tandis que la communaut intermdiaire, 600 m, partage ses espces avec l'un ou
l'autre des tages voisins.
La diffrence norme de composition entre 400 m et
800 m - 74 % des espces sont diffrentes - sur ce
flanc du mont Itoup, permet de distinguer deux
grands ensembles : l'un, constitue des espces classiques de plaine , l'autre caractris par certaines

espces propres aux grands massifs guyanais : les


espces submontagnardes. Nous verrons d'ailleurs
qu'il s'agit d'espces dj connues par ailleurs, mais
non dcrites par la science.
15 espces sont communes aux trois tages, 13 espces sont communes deux tages et 17 sont limites
un seul tage.
Les quinze espces omniprsentes constituent une
partie du bruit de fond de la majorit des inventaires forestiers. Dans l'ordre d'abondance, nous trouvons donc : Leptodactylus andreae, Osteocephalus
oophagus, Leptodactylus heyeri, Otophryne pyburni,
Dendrobates tinctorius, Pristimantis chiastonotus,
Pristimantis zeuctotylus, Leptodactylus pentadactylus,
Rhaebo guttatus, Allobates femoralis, Ameerega hahneli, Anomaloglossus aff. degranvillei, Pristimantis
inguinalis, Pristimantis sp. 3 et Leptodactylus knudseni.
Parmi les treize espces communes deux tages,
certaines, notamment prsentes 400 m et 600 m,
constituent galement des espces large rpartition.
Il s'agit de Leptodactylus stenodema, Allobates granti,
Leptodactylus mystaceus, Pristimantis marmoratus,
Dendropsophus sp. 1, Leptodactylus rhodomystax,
Osteocephalus taurinus et Atelopus spumarius barbotini. Quant Anomaloglossus aff. baeobatrachus,
Anomaloglossus degranvillei, Pristimantis sp. 2, Rhinella cf. castaneotica et Allobates aff granti, elles
constituent les fameuses espces submontagnardes et
sont, naturellement, communes aux tages 600 m et
800 m.

ctire (Dendropsophus minutus et Scinax boesemani)


et 5 espces que l'on peut qualifier de submontagnardes (Anomaloglossus aff. baeobatrachus, Anomaloglossus degranvillei, Pristimantis sp. 2, Rhinella cf.
castaneotica et Allobates aff. granti).
Sur le flanc prospect du mont Itoup, les espces
submontagnardes, communes aux stations 600 m et
800 m, apparaissent vers 500 m d'altitude. La limite
infrieure de rpartition de la petite grenouille Pristimantis sp. 2, aisment identifiable son chant, se situe
autour de 500 m sur le layon C. A l'inverse, certaines
espces franchissent difficilement l'isoplethe 500 m et
se cantonnent aux basses altitudes. Bien qu'il soit
dlicat de se prononcer sur l'absence d'une espce (la
prsence d'une espce est une donne robuste tandis
que son absence peut rsulter d'un dfaut de prospection), il semble bien quAllobates granti et Anomaloglossus baeobatrachus n'atteignent pas le sommet et
soient progressivement remplacs par Allobates aff.
granti et Anomaloglossus aff. baeobatrachus qui constitueraient alors des espces parapatriques.

Enfin, parmi les 17 espces dont la rpartition observe se limite un seul tage, 13 sont des espces
large rpartition (Anomaloglossus baeobatrachus,
Ranitomeya ventrimaculata, Hypsiboas dentei, Hyalinobatrachium crurifasciatum, Rhinella castaneotica,
Scinax cf. cruentommus (sp2), Chiasmocleis hudsoni,
Leptodactylus gr. wagneri, Phyllomedusa bicolor,
Phyllomedusa tomopterna, Pristimantis gutturalis,
Trachycephalus hadroceps, Trachycephalus coriaceus), deux reprsentent des donnes absolument
singulires car elles sont connues des forts ctires
(Dendropsophus minutus et Scinax boesemani), quant
aux deux dernires, elles mritent une attention particulire : Rhinella cf. martyi est un gros crapaud forestier dcrit rcemment du sud de la Guyane et Leptodactylus myersi est une grenouille imposante strictement infode aux savanes-roche. Nous reviendrons plus bas sur ces cas particuliers et sur l'apport de
telles donnes la connaissance des amphibiens de
Guyane.
Pour synthtiser, l'ensemble de la zone d'tude prsente 36 espces large rpartition plus ou moins
communes toutes les stations forestires, 1 espce
caractristique de la zone sud de la Guyane (Rhinella
cf. martyi), 1 espce typique des inselbergs (Leptodactylus myersi) dont nous verrons que la donne priori
aberrante trouve une justification, 2 espces d'origine

193

Les amphibiens
Catalogue des espces du mont
Itoup

Pristimantis gutturalis (Hoogmoed, Lynch &


Lescure, 1977)

Espce assez largement rpartie en fort guyanaise de


l'intrieur, mais peu observe. Un juvnile observ
500 m d'altitude le 28/03 dans la litire proximit
d'un petit ruisseau. nb : dterminante ZNIEFF

Gymnophiona Mller, 1832


Famille Rhinatrematidae Nussbaum, 1977
-

Rhinatrema bivittatum (Guerin-Meneville,


1838)

Un individu a t captur le 18/03 vers 600 m d'altitude. Deux autres individus ont t observs par les
autres membres de l'quipe en dbut de mission
600 m d'altitude. Il s'agit d'une espce largement rpartie en Guyane, mais dont les murs fouisseuses
rendent l'observation difficile. Les fortes pluies lors de
la mission peuvent expliquer l'observation, assez surprenante, de trois individus.

Pristimantis inguinalis Parker, 1940

Espce commune relativement commune et aisment


reprable son chant. Aucun individu n'a t observ
mais le chant a t entendu dans toutes les stations. nb
: dterminante ZNIEFF
-

Anura Fischer von Waldheim, 1813


Famille Strabomantidae Hedges et al., 2008
-

Pristimantis chiastonotus (Lynch & Hoogmoed, 1977)

Il s'agit de l'une des espces du genre les plus communes en fort. Elle a t observe rgulirement dans
les trois stations. Des mles chanteurs ont galement
t entendus tout au long de la mission. nb : dterminante ZNIEFF

194

Pristimantis marmoratus (Boulenger, 1900)

Espce priori commune en fort primaire, selon les


donnes de Lescure & Marty (2000). Toutefois, au
cours des dix dernires annes, nos prospections intensives n'ont livr que deux localits fiables. Aucun
individu observ, mais le chant caractristique a t
entendu 400 m et 600 m.
-

Pristimantis zeuctotylus (Lynch & Hoogmoed, 1977)

Espce commune en fort primaire. Observe ou entendue dans les toutes les stations prospectes.

Pristimantis sp. 2 (sensu Lescure & Marty


2000)

Dcouverte en 1997 dans la rserve naturelle de la


Trinit, sur un mont daltitude suprieure 500 m,
cette petite espce a depuis t retrouve sur plusieurs
sommets guyanais, mais essentiellement une altitude
suprieure 300 m autour de massifs levs
(> 400 m). Rcemment, V. Alt a dcouvert, lors d'un
stage ddi cette espce, qu'elle descendait
160 m d'altitude sur les flancs de l'inselberg des Nouragues. Actuellement, elle est connue de la rserve de
la Trinit (mont tabulaire, Roche bnitier, monts sud,
mont 501 m), du pic Coudreau des monts Bakkra, du
mont Cottica (Ph. Gaucher, com.pers), du mont Lucifer et de linselberg des Nouragues. Cest, et jusqu'
preuve du contraire, une espce endmique de
Guyane. La rpartition nettement disjointe de ce petit
Pristimantis, associe au caractre trs particulier de
son biotope (forts daltitude) en font une espce trs
probablement sensible aux changements climatiques
globaux. Les mles chanteurs se cantonnent dans les
trois premiers mtres de la vgtation et vocalisent
dans un crneau horaire trs troit (entre 17h45 et
18h40). Les chants reprennent brivement au lever du
jour. Sur le mont Itoup, la limite de rpartition infrieure se situe autour de 500 m. Discrte 600 m,
l'espce devient trs abondante 800 m ou des churs
fournis fusent la tombe de la nuit.

Dendropsophus minutus (Peters, 1872)

Cette petite rainette est caractristique des forts secondaires et dgrades de la bande ctire. On la
trouve l'occasion en fort mature le long des axes
fluviaux ou routiers, mais elle parait peu coutumire
des forts de l'intrieur. En 2006, une population en
reproduction a t trouve sur le plateau de Lucifer
(550 m) dans une grande mare temporaire. Sur le mont
Itoup, Dendropsophus minutus a t trouve dans des
conditions trs similaires : une centaine de mles
chantaient dans la vgtation herbace de la mare
sommitale (800 m). Dans l'tat des connaissances, il
semble que Dendropsophus minutus, ds lors qu'elle
est note en fort de l'intrieur, se cantonne aux alentours immdiats de grandes clairires. Elle n'a ainsi
jamais t trouve dans les mares forestires du sousbois. La prsence de vgtation herbace dense, uniquement disponible dans les grandes clairires, semble
un facteur dcisif pour la reproduction de l'espce.
Doit-on voir dans les groupes priori isols de Lucifer
et d'Itoup des populations relictuelles? Seules des
tudes gntiques faisant appel des marqueurs prcis
(squences microsatellites ou squences variables de
mtDNA) permettront de rpondre cette question.

Pristimantis sp. 3

Les sifflements caractristiques de cette petite espce


ont t rgulirement entendus dans les diffrentes
stations prospectes. Les mles chanteurs, priori
posts sur les branches proximales des arbres, nont
pas pu tre observs.
Famille Hylidae Rafinesque, 1815
-

Hypsiboas dentei (Bokermann, 1967)

Quelques mles chantent dans un secteur marcageux


400 m d'altitude, les 25, 26 et 27 mars. Il s'agit d'une
espce assez commune en fort de plaine, ou elle
affectionne les bas-fonds marcageux et les pinotires.

195

Dendropsophus sp. 1

Bien qu'elle ne soit pas encore dcrite pas la science,


cette petite rainette est un dnominateur commun des
inventaires forestiers. Par temps pluvieux, les mles
chantent depuis le bord des cours d'eau ou dans la
vgtation entourant les mares forestires. Elle a t
observe trois reprises 800 m et 400 m d'altitude.

Osteocephalus oophagus Jungfer & Schiesari, 1995

Rainette trs commune dans l'ensemble des sites forestiers prospects. Son chant typique, l'un des rares
rsonner en saison sche, permet rapidement de l'intgrer aux inventaires. Vue ou entendue tous les jours
400, 600 et 800 m.
-

Osteocephalus taurinus Steindachner, 1862

Grande rainette large rpartition en Guyane et relativement commune. Contrairement sa congnrique


O. oophagus qui pond dans des phytothelmes, O.
taurinus est dpendante de points d'eau temporaires
pour sa reproduction. Elle a t vue et entendue 800
et 600 m d'altitude les 19, 20 et 23 mars.

Scinax boesemani (Goin, 1966)

Rainette caractristique des milieux ouverts qui colonise le bloc forestier en suivant les grandes ouvertures
de la vgtation. Elle se retrouve de manire tout fait
anecdotique autour des mares herbaces qui forment
des vastes clairires en fort. Totalement absente dans
le sous-bois, sa prsence dans des lieux reculs
comme le sommet Itoup ou le plateau de Lucifer
demeure mystrieuse.
-

Trachycephalus coriaceus (Peters, 1867)

Grande rainette forestire rarement observe, si ce


n'est la faveur des premires averses soutenues des
dbuts de saisons des pluies. Le caractre clair de sa
reproduction induit une dtectabilit trs faible. Un
jeune individu a t observ de nuit, le 20 mars dans la
vgtation dense aux alentours de la mare sommitale
(800 m).

- Scinax sp. 2
(syn : Scinax cruentommus sensu Lescure & Marty, 2000)
Petite rainette (non dcrite) qui frquente les mares
forestires temporaires la saison des pluies. Elle a
t observe les 19 et 20 mars sur le plateau (800 m).

196

Trachycephalus hadroceps (Duellman &


Hoogmoed, 1992)

Rainette forestire se reproduisant exclusivement dans


les phytothelmes en canope. Son observation est
extrmement rare au sol, mais son chant puissant de
mtronome permet de la contacter dans la majorit des
sites forestiers. Sur le mont Itoup, elle n'a t entendue que le 19 mars sur le plateau.
-

Phyllomedusa bicolor (Boddaert, 1772)

L'une des rainettes les plus imposantes de Guyane.


Phyllomedusa bicolor demeure une espce peu commune mais sa rpartition couvre la Guyane de manire
homogne. Observe le 19 mars sur le plateau.

les rcents travaux de phylogntique mettent en vidence des synonymies. Hyalinobatrachium cf. crurifasciatum (sensu Dewynter et al. 2008) devient Hyalinobatrachium cappellei (Castroviejo-Fischer et al.
sous presse).
Famille Leptodactylidae Werner, 1896 (1838)
-

Petite grenouille omniprsente en fort guyanaise.


Observe et entendue tous les jours dans toutes les
stations.

Phyllomedusa tomopterna (Cope, 1868)

Magnifique rainette, commune dans l'ensemble du


bloc forestier ou elle se reproduit dans les mares temporaires. Observe en reproduction le 20 mars dans la
mare sommitale du mont Itoup.

Leptodactylus heyeri (Boistel, de Massary &


Angulo, 2006)

Rcemment dcrite, cette petite espce s'avre prsente dans la plupart des sites forestiers. Elle a t vue
et entendue pratiquement tous les jours et dans toutes
les stations.

Famille Centrolenidae Taylor, 1951

Leptodactylus andreae Muller, 1923

Leptodactylus knudseni Heyer, 1972

Grande espce terrestre omniprsente en fort. Son


chant puissant a t entendu dans toutes les stations
mais elle n'a t observe qu' une occasion.

Hyalinobatrachium cappellei (van Lidth de


Jeude, 1904)

Il s'agit de l'unique Centrolenidae contact sur le mont


Itoup. Identifi au chant les 19 et 20 mars sur le plateau sommital le long d'un ruisseau. Une ponte a t
observe, mais aucun individu n'a t dcouvert. La
connaissance de la famille des Centrolenidae a normment progress cette dernire dcennie avec la
dcouverte de 6 espces en Guyane. Certaines rivires
peuvent ainsi hberger en microsympatrie jusqu'a 5
espces (RN Trinit et RN Nouragues). Par ailleurs,

197

Leptodactylus myersi Heyer, 1995

Grande espce infode aux inselbergs et savanesroches. Sa prsence 400 m d'altitude sur le mont
Itoup pourrait surprendre si cette situation n'avait pas
dj t note dans des conditions trs similaires. Dans
la rserve naturelle de la Trinit, alors que les juvniles semblent totalement dpendants des secteurs de
roche nue, les grands adultes se retrouvent parfois en
fort. Un adulte a ainsi t observ en 2000 sur les
pentes du mont Tabulaire de la Trinit plusieurs
kilomtres d'une savane-roche. C'est galement le cas
Itoup : une savane-roche est situe quelques 6
kilomtres l'ouest du camp de base. Il y a donc clairement une dispersion des adultes en fort, parfois loin
des secteurs favorables la reproduction. En revanche,
aucun chant n'a t entendu et aucun juvnile n'a t
observ.

Leptodactylus pentadactylus (Laurenti, 1768)

Grande grenouille terrestre omniprsente en fort. Elle


a t vue et entendue tous les jours 400 et 600 m. En
revanche, aucune donne de prsence sur le plateau
800 m n'a t note.

Leptodactylus rhodomystax Boulenger, 1884


"1883"

Espce forestire commune. Observe et entendue


uniquement 800 m sur le plateau.

Leptodactylus mystaceus (Spix, 1824)

Espce forestire commune. Observe et entendue


600 et 800 m.
-

Leptodactylus stenodema Jimenez de la Espada, 1875

Espce peu commune, mais probablement omniprsente en fort. Observe 400 m et 600 m. La photo
reprsente un juvnile.

198

Leptodactylus gr wagneri

Les Leptodactylus du groupe wagneri forment un


complexe d'espces dont l'identification fiable passe
par des analyses gntiques. Plusieurs individus chantaient le 20 mars dans la fort marcageuse jouxtant la
mare sommitale du plateau du mont Itoup. Un couple
a t collect et le chant du mle enregistr.

Grand crapaud forestier large rpartition en Guyane.


Observ 400 et 600 m d'altitude. Les chants ont t
entendus uniquement 400 m.

Famille Bufonidae Gray, 1825


-

Atelopus spumarius barbotini Lescure, 1981

Petit crapaud forestier dont la limite de rpartition sud


connue stendait jusqu'aux sources de l'Approuague
et de l'Inini. Cette nouvelle localit tend la rpartition
d'une cinquantaine de kilomtres vers le sud. Cette
donne est loin d'tre anodine car elle prolonge la
rpartition de l'espce dans l'aire d'une "espce" parapatrique appele Atelopus spumarius hoogmoedi cantonne au sud de la Guyane. Il est probable que les
deux espces se retrouvent en sympatrie dans un secteur compris entre le mont Itoup et le flat de la Waki.
Observ et entendu 400 et 600 m. L'espce n'a cependant pas t vue 800 m.

Rhaebo guttatus Schneider, 1799

Rhinella cf. martyi Fouquet et al. 2007

Dcrit rcemment par Fouquet et al. (2007), Rhinella


martyi fait partie d'un complexe d'espces, trs
proches morphologiquement mais gntiquement bien
distinctes. [] Les critres morphologiques nots sur
le mont Itoup correspondent d'avantage l'espce R.
martyi qu' R. margaritifera. La localit trs australe
milite galement priori pour R. martyi. Nous avons
toutefois prlev des spcimens afin de confirmer
l'identification : ce type de donnes est essentiel car le
mont Itoup se situe plus ou moins sur une ligne de
suture correspondant la rencontre de faunes
d'origines allopatrique. Espce relativement abondante
dans la litire 400 m d'altitude. Elle n'a pas t observe 600 et 800 m.

Rhinella castaneotica (Caldwell, 1991)

Petit crapaud forestier trs commun en fort. Les individus observs 400 m ressemblent morphologiquement ceux connus ailleurs en Guyane. En revanche,
les individus des stations 600 m et 800 m prsentent
un patron de coloration trs homogne et diffrent de
ceux de 400 m. Nous les traitons plus bas sous l'appellation R. aff. castaneotica.

199

Anomaloglossus aff. baeobatrachus

Les stations 600 et 800 m hbergent une espce


d'Anomaloglossus probablement nouvelle pour la
science. Le chant de cette espce, trs commune autour du camp de base, est diffrent de celui d' A. baeobatrachus. Le patron de coloration prsente galement
des diffrences notables. Des spcimens ont t collects des fins d'analyse gntique.

Rhinella aff. castaneotica

Au-del de 500 m d'altitude, les petites Rhinella prsentent un morphe trs constant et une granulomtrie
de la peau assez diffrente de celles des altitudes infrieures. Doit-on y voir un haplotype diffrent ou alors
sommes-nous en prsence d'une espce nouvelle ? Des
spcimens ont t collects des fins de vrification
gntique.
-

Famille Aromobatidae Grant et al. 2006


-

Anomaloglossus degranvillei (Lescure, 1975)

Les travaux de Fouquet en Guyane ont mis en vidence la prsence de trois espces cryptiques d'Anomaloglossus du groupe degranvillei. Deux nouvelles
espces sont en cours de description (Fouquet et al.
paratre) tandis quAnomaloglossus degranvillei voit
sa distribution se limiter aux grands massifs montagneux. Anomaloglossus degranvillei a t observe
dans les ruisseaux et torrents encaisss 600 et 800 m
d'altitude. Il s'agit d'une espce limite, dans l'tat des
connaissances actuelles, aux monts autour de Sal et
Attachi Bakka (Fouquet, com. pers.) et au sommet
Itoup. Des spcimens ont t collects des fins
d'tudes gntiques.

Anomaloglossus baeobatrachus (Boistel &


de Massary, 1999)

Petite espce de la litire largement rpartie en fort.


Observe et entendue uniquement 400 m d'altitude.
Les stations 600 et 800 m prsentent une espce diffrente (chant et patron de coloration bien distincts)
traite plus bas sous l'appellation A. aff. baeobatrachus. Les chants ont t enregistrs et des spcimens
rcolts afin de comparer les deux espces parapatriques sur des critres gntiques.

Anomaloglossus aff. degranvillei 1

Observe et entendue 400, 600 et 800 m. Il s'agit de


l'espce du groupe A. degranvillei la plus rpandue
en Guyane. Elle fait actuellement l'objet d'une description par Fouquet et al. ( paratre).

200

Allobates
"1883")

femoralis

(Boulenger,

1884

Espce forestire omniprsente en Guyane. Observe


et entendue dans toutes les stations altitudinales.

Ameerega hahneli (Boulenger, 1884 "1883")

Petite dendrobate commune en fort et largement


rpartie en Guyane. Observe et entendue dans toutes
les stations.

Allobates granti (Kok et al., 2006)

Observe et entendue 400 et 600 m d'altitude. L'espce n'a pas t contacte sur le plateau sommital. Il
s'agit d'une espce largement rpartie en fort.

Famille Dendrobatidae Cope, 1865

Ranitomeya ventrimaculata (Shreve, 1935)

Observe uniquement sur le plateau 800 m. Cette


petite dendrobate utilise les retenues d'eau la base
des feuilles de bromliaces pour dposer ses ttards.
Il s'agit d'une espce large rpartition, mais souvent
localise (ou du moins plus commune) dans des secteurs favorables aux grandes bromliaces.

Allobates aff. granti

Observe et entendue 600 et 800 m d'altitude, cette


petite Allobates est morphologiquement trs similaire
Allobates granti. Le chant est cependant diffrent et
permet de l'attribuer sans aucun doute une nouvelle
espce non dcrite. Dj signale par Philippe Gaucher dans dautres secteurs de la Guyane. Des spcimens ont t collects des fins d'tudes gntiques.

201

Dendrobates tinctorius (Cuvier, 1797)

Observe tout le long du gradient altitudinal. Dendrobates tinctorius est une espce dont la coloration aposmatique est extrmement variable. Les individus du
mont Itoup prsentent un polychromatisme notable.
Les photographies qui suivent illustrent un peu cette
variabilit. D. tinctorius se limite, semble-t'il, aux
alentours immdiats des massifs montagneux de
Guyane. Certaines populations prsentent une remarquable homognit de coloration (montagne de Kaw,
mont Grand Matoury, monts de l'Observatoire...) tandis que d'autres affichent leur polychromatisme (RN
Nouragues, Sal, mont Itoup...). La question de la
slection et de la fixation de ces patrons de coloration
dans une population sont tudies par diffrentes
quipes de chercheurs (Bibiana Rojas ; Brice Noonan)
dans la station de recherche des Nouragues.

Famille Microhylidae Gnther, 1858


-

Chiasmocleis hudsoni Parker, 1940

Petite espce de la litire trs discrte connue de peu


de localits en Guyane. Son chant peu puissant mais
caractristique a permis de la localiser le 27 mars
400 m d'altitude, sans pour autant parvenir la capturer.
-

Otophryne pyburni Campbell & Clarke, 1998

Infode aux berges des petites rivires et des torrents


forestiers, Otophryne pyburni met avec rgularit un
chant puissant trs caractristique. Elle a t entendue
pratiquement tous les jours et dans toutes les stations
le long des petits cours d'eau. Un individu a t captur le 23 mars.

Thecadactylus rapicauda (Houttuyn, 1782)

Grand gecko forestier discret mais omniprsent en


Guyane. Trois individus observs 400 et 600 m
d'altitude.

Les reptiles
Catalogue des espces du mont
Itoup
Ordre Squamata Oppel, 1811
Famille Phyllodactylidae Gamble et al. 2008

202

Famille Sphaerodactylidae Underwood, 1954


-

Coleodactylus
1918)

amazonicus

(Andersson,

Minuscule gecko de la litire omniprsent en fort


parfois des densits leves. Un individu observ le
29 mars 400 m.
-

Gonatodes annularis Boulenger, 1887

Petit gecko arboricole commun sur les troncs morts ou


dans les anfractuosits des grands arbres. Deux individus observs 600 et 800 m.

Ordre des Serpentes Linnaeus, 1758

Famille Leptotyphlopidae Stejneger, 1891


-

Leptotyphlops
1801)

septemstriatus

(Schneider,

Petit serpent dont les murs fouisseuses rendent les


donnes extrmement rares. Un individu partiellement
digr est rgurgit par un Anilius scytale le 1er avril
2010 au camp de base.
Famille Aniliidae Stejneger, 1907
-

Anilius scytale (Linnaeus, 1758)

Serpent fouisseur coloration tigre saisissante. L'individu captur le 1er avril 2010 sur la DZ 600 m
d'altitude, a rgurgit un Leptotyphlops septemstriatus.
Famille Boidae Gray, 1825
-

Corallus hortulanus (Linnaeus, 1758)

Boa arboricole relativement commun et probablement


omniprsent en Guyane. Un juvnile captur le 28
mars 400 m.
-

Gonatodes humeralis (Guichenot, 1855)

Petit gecko arboricole visible dans le sous-bois la


base des troncs. Il peut tre trs abondant localement,
notamment dans les forts secondaires. Omniprsent
en Guyane. Observ 400 m d'altitude le 29 mars.
-

Famille Scincidae Gray, 1825

Mabuya surinamensis (Hallowell, 1857)

Grand scinque visible essentiellement dans les chablis


qu'il parcourt aux heures chaudes. Omniprsent en
Guyane. Rcemment extrait de la synonymie de Mabuya nigropunctata par Miralles & Carranza (2010).

203

Famille Dipsadidae Bonaparte, 1840


-

Atractus zidoki Gasc & Rodrigues, 1979

Petite couleuvre terrestre peu commune. Un individu


rgurgit par le serpent Erythrolamprus aesculapii le
22 mars sur le plateau sommital.
-

Dipsas copei (Gunther, 1872)

Couleuvre arboricole trs rarement observe. Un individu captur et relch le 18 mars (600 m d'altitude),
dans un arbuste 1 m du sol. Pholidose : 219 ventrales
/ 135 sous-caudales.

Umbrivaga pygmaea (Cope, 1868)

Petite couleuvre de la litire dcouverte pour la premire fois en Guyane en 2005 sur le plateau Lucifer
lors d'une mission de l'ONF. Observe depuis
quelques occasions (montagne de Kaw...). Un juvnile
captur le 31 mars 600 m, mais chapp avant la
prise de photos.
-

Erythrolamprus aesculapii (Linnaeus, 1758)

Couleuvre terrestre au motif aposmatique, mimtique


des serpents corail du genre Micrurus. Deux individus observs : l'un par l'quipe d'Ecobios, l'autre le
21 mars sur le plateau sommital. Sous l'effet du stress,
lors de la manipulation, l'Erythrolamprus a rgurgit
sa dernire proie : un serpent Atractus zidoki.

Helicops angulatus (Linnaeus, 1758)

Couleuvre aquatique trs commune et omniprsente


en Guyane.

204

Famille Viperidae Oppel, 1811


-

Bothrops bilineatus (Wied, 1825)

Anolis nitens (Wagler, 1830)

Lzard de la litire trs commun et omniprsent en


Guyane. Observ les 18 et 20 mars 600 et 800 m.

Vipre arboricole relativement commune et probablement omniprsente en fort. Un juvnile captur 600
m d'altitude le 22 mars.

Famille Tropiduridae Bell, 1843


-

Plica plica (Linnaeus, 1758)

Lzard arboricole trs commun en fort mature le long


des grands troncs. Observ le 28 mars 600 m.

Bothrops brazili Hoge, 1953

Elgante vipre terrestre la livre mimtique. Trois


individus observs lors de la mission. Le 20 mars, un
adulte sur le layon F 800 m d'altitude.
Famille Polychrotidae Fitzinger, 1843
-

Anolis fuscoauratus Dumeril & Bibron, 1837

Lzard arboricole commun dans le sous-bois aussi


bien en fort mature que secondaire. Deux individus
observs les 22 et 23 mars 600 et 800 m.

Famille Teiidae Gray, 1827


-

Ameiva ameiva (Linnaeus, 1758)

L'un des lzards terrestres les plus communs de


Guyane. Observ tonnamment une seule fois le 20
mars sur le plateau.
-

Kentropyx calcarata Spix, 1825

Lzard terrestre trs commun et familier des chablis.


Observ trois occasions 600 et 800 m.

205

Famille Gymnophthalmidae Merrem, 1820


-

Alopoglossus angulatus (Linnaeus, 1758)

Lzard assez rare frquentant les secteurs marcageux


(bords de ruisseaux vaseux, minotires...). Deux individus capturs : l'un 500 m, l'autre a400 m d'altitude
le long du layon C.

Neusticurus bicarinatus (Linnaeus, 1758)

Lzard aquatique commun dans les petites rivires aux


eaux rapides. Omniprsent en Guyane. Observ le 24
mars au camp de base (600 m).
-

Arthrosaura kockii (Lidth de Jeude, 1904)

Lzard commun de la litire. Observ les 20 et 21


mars sur le plateau, les 26 et 31 mars aux alentours du
camp de base.

Leposoma guianense Ruibal, 1952

Petit lzard de la litire trs commun et omniprsent


en fort. Observ les 20, 22 et 26 mars dans toutes les
stations.

Cercosaura sp.1

Lzard semi-arboricole frquentant la vgtation qui


borde les zones humides (mares, ruisseaux). Il s'agit
d'une espce assez rare, non dcrite par la science. Un
individu captur par Serge Fernandez dans la vgtation de la mare sommitale le 24 mars.

Tretioscincus agilis (Ruthven, 1916)

Lzard terrestre trs lgant assez commun en fort ou


il frquente souvent les vieux chablis. Observ les 24
et 29 mars 400 et 600 m.
-

Amapasaurus tetradactylus Cunha, 1970

Ce petit lzard terrestre constitue l'immense surprise


de la mission Itoup. priori trs similaire Leposoma guianense, il aurait pu passer totalement inaperu
si les membres de la SEAG ne l'avait pas rcolt.
L'examen en main a tout de suite permis de constater
des diffrences morphologiques fines et d'orienter
l'identification. Les critres ont t vrifis l'aide de
la publication d'Avila-Pires (1995) et de la description
originale (da Cunha, 1970). L'identification ne fait
aucun doute. Nous sommes en prsence de l'un des
vertbrs les plus rares au monde.
Seuls 5 spcimens taient connus ce jour de l'tat
d'Amapa au Brsil. Des lors, une attention accrue a
permit de rcolter deux spcimens supplmentaires.
Nous disposons donc, en collection de deux femelles

206

gravides au moment de la capture (qui ont pondu


chacune deux ufs) et d'un juvnile. Des prlvements des fins d'analyse gntique permettront de
clarifier la position phylogntique de cette trange
espce dont la morphologie laisse parfois perplexe :
prsence uniquement de 4 doigts aux mains, caillure
cphalique totalement originale... Ces donnes feront
l'objet d'une publication dtaille en collaboration
avec Nicolas Vidal et Jean-Christophe de Massary du
MNHN.

Les Tortues
Famille Chelidae Gray, 1825
-

Platemys platycephala (Schneider, 1792)

Une platmyde tte orange, l'une des rares tortues


protges de Guyane, a t observe dans la mare
sommitale le 20 mars. Son statut d'espce protge est
plus li son attractivit pour les terrariophiles qu'
une relle raret. C'est d'ailleurs l'une des espces les
plus souvent rencontre dans les mares forestires.

Perspectives

Les Camans
Famille Alligatoridae Cuvier, 1807
-

Paleosuchus trigonatus (Schneider, 1801)

Un jeune caman gris a t observ de nuit le 25 mars


400 m dans un secteur marcageux le long du layon
C. Il s'agit d'une espce commune en fort et qui
s'aventure souvent haut dans les ttes de criques.

Cette premire mission d'inventaire herptologique a


permis d'identifier la prsence de 45 espces
d'anoures. L'analyse des donnes et notre connaissance empirique permettent d'estimer que cette valeur
reprsente entre 70 et 80 % du peuplement rel. Il
resterait donc entre 10 et 15 espces d'anoures dcouvrir sur le mont Itoup.
Quant l'inventaire des squamates, il demeure largement prliminaire. L'ancien groupe des lzards est
bien reprsent, avec 18 espces, mais celui des serpents a t peine effleur. C'est l l'une des caractristiques des inventaires de squamates en forts
tropicales : la faible densit des serpents ne permet pas
d'obtenir des donnes significatives sur le peuplement
sans un effort de prospection dmesur (plusieurs
annes de recherche en continu ou mise en place de
dispositifs de pigeage techniquement lourds, fortiori dans des endroits reculs).

207

Des espces indicatrices ?


Revenons cette question fondamentale : le peuplement d'amphibiens du mont Itoup peut-il servir de
groupe indicateur pour le suivi des changements globaux ?
La sgrgation altitudinale de certaines espces, notamment le maintien d'une petite communaut dite
submontagnarde au-dessus de 500 m d'altitude,
apporte une rponse positive cette question. Il existe
bien un petit groupe d'amphibiens, facilement dtectables au chant, dont les populations sont susceptibles
de ragir des changements progressifs du microclimat du mont Itoup.
Se pose alors un problme mthodologique : doit-on
se contenter de donnes de prsence/absence le long
d'un transect altitudinal ou faut-il dployer une mthode d'estimation des densits des populations pour
un suivi long terme ?
Nous avons voqu les travaux de Dawson & Efford
(2009), qui associent une combinaison d'enregistrements sonores et la mthode SECR (Spatially Explicit
Capture-Recapture) pour estimer les densits d'espces territoriales et offrir un outil de suivi de la sant
des populations d'espces sensibles. La technique,
mise au point pour l'tude des oiseaux ou des ctacs
pourrait s'avrer tout fait applicable aux amphibiens
forestiers. Elle permet d'estimer la densit de population d'animaux qui vocalisent en combinant l'information provenant de plusieurs microphones judicieusement positionns. Un son qui se propage en fort
laisse une sorte de trace. L'importance de celle-ci
dpend de la vitesse de l'attnuation sonore. Il existe
une relation mathmatique unique entre la densit
d'une population et cette vitesse qui dtermine de
faon optimale la taille et l'intensit des sons mis.
Des mthodes informatiques permettent de dcouvrir
cette combinaison et d'estimer la densit des chanteurs. La mthode mise en place par Dawson & Efford
pourrait alors s'avrer un prcieux outil de suivi des
populations d'espces vulnrables (en particulier les
amphibiens lis aux forts nuages). Sa mise en
uvre parait tout--fait raliste tant du point de vue
financier que du point de vue mthodologique.

tudes taxonomiques et phylogographie


La taxonomie des amphibiens de Guyane est loin
d'tre grave dans le marbre. Il suffit de regarder le
nombre d'espces guyanaises non nommes par la
science pour se rendre compte que nous sommes encore incapables de rpondre la simple question :
Combien y-a-t'il d'espces d'amphibiens en Guyane?
Cette dernire dcennie, la contribution des mthodes
molculaires l'identification des amphibiens ( l'aide
de marqueurs gntiques) a fait passer la liste des
amphibiens de Guyane d'une centaine d'espces
presque 130 taxons. Certaines espces, priori morphologiquement identiques, montrent ainsi des patrimoines gntiques trs divergents. Il est essentiel de
connaitre prcisment le nombre d'espces et leur aire
de rpartition si l'on souhaite mettre en uvre un dveloppement de la Guyane compatible avec le maintien de la biodiversit.
Dans ce but, plusieurs spcimens des espces nouvelles trouves Itoup ont t prlevs et conservs
en alcool. Avec l'accord du Parc amazonien de
Guyane, ils seront transmis Antoine Fouquet de
l'Universit de So Paulo au Brsil pour tre dcrits
(tant morphologiquement que gntiquement).
Par ailleurs, l'utilisation de marqueurs molculaires
plus variables (microsatellites), partir des mmes
chantillons, peut permettre de reconstituer l'histoire
des populations des amphibiens sur le plateau des
Guyanes. Cette discipline, la phylogographie molculaire, peut ainsi apporter des donnes sur les centres de
dispersion des espces, sur les dates d'isolement des
populations (espces submontagnardes, espces d'inselbergs...), et ainsi permettre de reconstituer l'volution de la vgtation et du climat au cours des derniers
millnaires. En dcrivant ces mcanismes de colonisations et de retraits (dans des biotopes relictuels comme
les forts submontagnardes), cela devient galement
un outil prdictif des ractions des populations aux
changements globaux.
Tous ces constats militent pour la poursuite des efforts
de recherche sur les amphibiens dans les sites isols
du Parc amazonien de Guyane. Une mission complmentaire sur le mont Itoup, une priode diffrente,
permettra sans aucun doute d'accroitre la liste des
amphibiens du sommet de la Guyane et pourquoi pas
d'initier un programme scientifique de suivi des densits des espces phares du sommet.
Ces questions mritent d'tre soumises au comit
scientifique du Parc amazonien de Guyane afin d'intgrer un programme de recherche long terme sur
l'effet des changements globaux.

208

Bibliographie

caise). Mmoires du Musum National d'Historie


Naturelle. Nouv. Ser 132 : 4352.

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KOK P. J. R., 2000 b. Addenda to "A survey of the
anuran fauna of Montagne Belvedere, county of Saul,
French Guiana". The Herpetological Bulletin, 73: 1
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Inventaire et diagnostic des peuplements d'amphibiens
du haut bassin de la crique Limonade (Sal), 32 pp.
ECOBIOS : dossier de la demande de permis minier
de la societe Rexma.

Remerciements
La mission Itoup a t organise et finance pro
parte par le Parc amazonien de Guyane. Cesar Delnatte et Olivier Tostain (Ecobios) en sont les instigateurs et Nicolas Surugue (PAG) s'est charg de l'organisation rigoureuse (et sans failles) de l'expdition.
L'Office National des Forts est l'origine du partenariat qui a permis cet change de comptence entre
tablissements. Merci Pierre-Jean Morel (DR
Guyane) et Brengre Blin (Responsable de Sylvtude) pour leur soutien dans le montage de cette mission
cumnique
(PAG-ONF-IRD-EcobiosSEAG).
L'quipe vertbrs regroupant Marguerite Delaval
(ONF), Vincent Pelletier (Ecobios) et Nicolas Surugue
(PAG) a apport son aide tout au long de la mission.
Les membres de la SEAG, Serge Fernandez, Julien
Touroult, Eddy Poirier et Pierre-Henri Dallens, outre
leur bonne humeur, nous ont rgulirement transmis
les amphibiens et les reptiles glans au cours de leurs
prospections. Nous leur devons, entre autres, deux
spcimens du trs rare Amapasaurus tetradactylus (et
donc, une reconnaissance ternelle).
L'quipe d'Ecobios nous a galement transmis des
photographies et des spcimens collects au hasard de
leurs rcoltes botaniques. Merci Olivier Tostain et
Guillaume Leotard. Merci tous les participants de la
mission pour le professionnalisme et la bonne humeur
dont ils ont fait preuve pendant ces quinze jours.
Enfin, rendant Csar ce qui est Csar. Csar Delnatte est l'origine de ce beau projet. Nous regrettons
qu'il n'ait pas pu tre des ntres pour des raisons de
sant et esprons qu'il aura l'occasion, sa thse acheve, de dcouvrir la fort des brumes d'Itoup.

209

Analyse Ichtyologique
du mont Itoup
Inventaire ichtyologique, structure des communauts, analyses gntiques et
biogographiques
Juan Montoya1
1

Dpartement de Zoologie et Biologie Animale, Universit de Genve

Rsum
L'inventaire ichtyologique ralis sur les cours d'eau du mont Itoup a permis de mettre en avant la faible diversit spcifique pour ces criques de milieu notropical, diversit comparable celles rencontres dans d'autres
milieux comparables.
La variation de richesse spcifique entre stations peut tre, elle, explique par les paramtres de l'habitat.
Les chantillons gntiques quand eux ont permis d'illustrer pour la premire fois, l'hypothse d'changes
entre bassins, pouvant entre autre expliquer l'norme biodiversit des notropiques.

Mots cls
Parc amazonien de Guyane, mont Itoup, Inventaire, Ichtyologie, Poissons, Gntique des populations

Introduction et objectifs
Ce document est le rapport de la mission ichtyologique effectue sur le mont Itoup entre le 1 et le 10
octobre 2010. Il est galement le rapport final de la
Convention de recherche entre : lUniversit de Genve, 24, rue du Gnral Dufour, 1211 Genve 4,
reprsente par son Vice-recteur, Prof. Pierre SPIERER, et son Dpartement de Zoologie et Biologie
Animale de la Facult des Sciences, ci-aprs dnomm DZBA, 30 Quai Ernest Ansermet, 1211 Genve
4, SUISSE, reprsent par son Directeur, Monsieur
Denis DUBOULE dune part et le Parc amazonien de
Guyane, ci-aprs dnomm PARC NATIONAL,
tablissement public administratif, ayant son sige
social 1, Rue Lederson
97354 REMIREMONTJOLY, reprsent par son Directeur, Monsieur
Frdric MORTIER.
Cette mission de terrain, mene notamment par le Dr.
Juan Montoya, du DZBA, et Nicolas Surugue, du parc
national, pour objectif de dresser le premier inventaire ichtyologique du mont Itoup et dcrire la
structure des communauts en place. De plus, cette
mission permet de raliser une campagne
dchantillonnage des poissons pour conduire des
tudes gntiques afin de mieux comprendre la diversit ichtyologique ainsi que les processus ayant men
cette biodiversit. En particulier, cet chantillonnage

210

permettra de tester lhypothse dchanges passs


dichtyofaune entre le bassin de lOyapock et celui du
Maroni par les ttes de criques situes dans le secteur
sud du mont Itoup. Ces donnes ont permis dores et
dj deffectuer des analyses gntiques pour valuer
le statut despces de certaines populations du mont
Itoup. Elles ont galement permis dinfrer les liens
de parents au sein de taxons slectionns.
Ces phylognies, en association avec les informations
biogographiques, apportant les premiers rsultats
concernant les changes dichtyofaune entre le bassin
de lOyapock et du Maroni.
Pour le Parc amazonien, cette mission contribue
caractriser la biodiversit dun site remarquable, le
mont Itoup, et rechercher si certains spcimens
animaux sont susceptibles de remplir la fonction
dindicateur de modifications climatiques, dans un
relief o tout changement est susceptible de gnrer
des modifications au sein des aires de rpartition des
peuplements.
Cette mission permet galement la consolidation des
partenariats scientifiques et lalimentation de la rflexion relative llaboration de la stratgie scientifique du Parc amazonien concernant les patrimoines
naturels.

Prsentation du secteur dtude

Participants

Le mont Itoup, galement appel sommet Tabulaire,


se trouve au sud du massif montagneux des merillons, dans la zone du cur du Parc amazonien de
Guyane. Le sommet Tabulaire s'lve 830 mtres
d'altitude. C'est le second plus haut sommet de
Guyane aprs la montagne Bellevue de Inini-Camopi
(851m). Le mont Itoup est un massif orient nordsud, qui ralise, dans cette rgion, la division des basins versants du haut fleuve Oyapock et du haut fleuve
Maroni.

Pour laccomplissement du programme de recherche


contenu dans la convention entre le parc national et le
DZBA, les personnes suivantes ont particip
linventaire ichtyologique du mont Itoup, au relev
des diffrents paramtres de terrain et
lchantillonnage pour tudes gntiques, entre le 1 et
le 10 octobre 2010:
- Juan I. Montoya Burgos, DZBA, Universit de
Genve, Suisse
- Nicolas Surugue, charg de mission cologie, Parc
amazonien
- Sbastien Brosse, UPS, UMR EcoLab, CNRS
Toulouse
- Alain Thomas, hydrobiologiste membre du Conseil Scientifique du Parc amazonien
Il est noter quAlain Thomas a non seulement particip au relev ichtyologique mais il a galement effectu un relev des insectes aquatiques sur le mme
secteur dtude.
Un relev ornithologique a aussi t ralis sur le
mme secteur dtude par les personnes suivantes :
- Olivier Claessens, ornithologue, Cabinet O. Claessens
- Alexandre Renaudier, ornithologue, GEPOG

Le site se trouve exclusivement sur des gabbros (roche


intrusive basique grains de taille moyenne) ce qui a
pu tre vrifi sur de nombreux affleurements et talwegs. Cette roche dure mais peu siliceuse est
lorigine de sols gnralement profonds, dominante
argileuse, bien drains mais avec une charge en cailloux souvent assez forte (ONF, Compte rendu de la
mission Itoup, mars 2010).
Pour la ralisation des diffrentes missions ayant
compos la campagne dtude sur le mont Itoup en
2010, les responsables de parc national ont tabli un
camp de base situ 585 m daltitude, sur le versant
ouest du mont Itoup, avec une DZ daccs en hlicoptre (coordonnes de la DZ: UTM22N 267026334416). Ils ont galement tracs une srie de layons
en toile permettant de parcourir la zone dtude (voir
figure 1).

Figure 1 : Carte topographique prsentant le mont Itoup. Les layons de prospection sont indiqus en pointills ainsi que les stations
de pche (St1 St8), le camp de base et le bivouac. Le sommet Tabulaire est clairement visible. Carte prpare par le parc national
et lONF

211

De plus, cette mission a t en partie documentes par


des prises de vues daction de capture et dinventaires
in situ, ralises par :
- Michel Huet, producteur-ralisateur, parc national

Chronologie de la mission
1/10 Dplacement en hlicoptre de Cayenne au mont
Itoup ; tablissement du camp de base; premire
pche sur la crique en bordure du camp de base dans
la Station 1, affluent de la crique Petite Waki, bassin
du Maroni; nuit au camp de base.
2/10 Dplacement sur le layon D et pche sur la deuxime crique partir du camp de base, Station 2 (affluent de la crique Petite Waki, bassin du Maroni);
laprs-midi, descente sur le layon C jusqu la courbe
de niveau 340 m, trac de layon jusqu la Station 3,
sur la crique coulant paralllement et au nord du layon
C en aval des stations 1 et 2 (affluent de la crique
Petite Waki, bassin du Maroni); dpose du matriel
sur le layon C et retour au camp de base, nuit au camp
de base.
3/10 Descente sur le layon C, continuation en aval de
la station 3 pour atteindre et pcher dans la Station 4
(affluent de la crique Petite Waki, bassin du Maroni).
Retour au layon C puis trac de layon sur 1.5 km vers
le sud, tablissement du bivouac.
4/10 Suite du trac de layon 600 m vers le sud, pche
la Station 5, sur un affluent de la crique Petit Tamouri, bassin de lOyapock. Nuit au bivouac.
5/10 Trac de layon sur 600 m vers le sud, pche la
Station 6, sur un autre affluent de la crique Petit Tamouri, bassin de lOyapock. Nuit au bivouac.
6/10 Dmontage du bivouac et retour au camp de
base. Nuit au camp de base.
7/10 Suivi du layon D jusqu la courbe de niveau
710 m puis trac de layon vers lest sur 1.2 km jusqu
atteindre la tte de la crique Sable, affluent de
lOyapock, flanc est du mont Itoup ; pche la Station 7. Retour et nuit au camp de base.
8/10 Suivi du layon A jusquau flanc est du mont
Itoup, puis trac de layon jusqu couper un autre
affluent de la crique Sable, plus au sud. Pche dans la
Station 8. Retour et nuit au camp de base.

10/10 Dmontage du camp de base. Dplacement en


hlicoptre du mont Itoup Cayenne.

Mthodologie
Mthodologie de pche
La mthode principale a t la pche la rotnone. Cet
ichtyotoxique reprsente la seule mthode exhaustive
de pche mais son effet se fait sentir sur plus dune
centaine de mtres en aval du lieu de dversement.
Les poissons ont t collects tout dabord sur un
secteur restreint pour les tudes cologiques effectues
par Sbastien Brosse, puis sur tout le tronon ayant
subi leffet de la rotnone, savoir une centaine de
mtres.
Afin de prospecter dautres micro-habitats ou de combler de manire cible lchantillonnage pour tudes
populationnelles, des pches lpervier (3 m de diamtre et maille de 1 cm) et lpuisette (maille de 4
mm) ont t galement ralises.

Mesure des paramtres


chimiques et dbits

Pour chaque station de pche, les paramtres physicochimiques suivants on t prlev laide dun appareil de mesure multiparamtres numrique Multi 3430
de WTW: temprature de leau, pH, conductivit,
oxygne dissout. De plus, la turbidit a t mesure
laide dun Turbidimtre TN-100 de Eutech Instruments Le dbit hydrique a t estim en utilisant les
mesures de largeur, profondeur et vitesse du courant
prises par Sbastien Brosse. La moyenne de deux
quatre mesures a t utilise.

Prlvement dchantillons de tissus et


prservation des spcimens
Pour les tudes gntiques, un prlvement de morceau de nageoire a t effectu sur tous les individus
jusqu concurrence de vingt par espce et sur chaque
station. Le morceau de tissu a t tiquet et conserv
dans le lthanol 80%. Un numro correspondant a
t fix sur lindividu chantillonn, qui a t son
tour fix dans du formol 4% pour des tudes morphologiques ultrieures. Les spcimens fixs seront
dposs au Musum National dHistoire Naturelle
(MNHN), Paris.

9/10
Rangement, prparation du matriel et des
chantillons pour le retour. Nuit au camp de base.
.

212

physico-

Analyses gntiques
LADN a t extrait des tissus avec le Kit PeqGold
Tissu DNA kit de Peqlab. Les amplifications par Polymerase Chain Reaction (PCR) ont t ralises dans
un volume de 50 l avec 0.3 units de Taq DNA Polymerase de New England BioLabs. Le profil PCR est
le suivant : dnaturation initiale de 2 min 94C, puis
38 cycles avec dnaturation 94C pendant 30 sec,
accrochage des amorces 53-55C (selon le couple
damorce) pendant 30 sec, puis longation 72C
pendant 1.5 min. Les PCR ont t termines avec une
longation finale de 5 min 72C. Pour ltude sur les
Ancistrus, le gne nuclaire 1cAn25 a t amplifi
avec les amorces 1cAN25-D et 1cAN25-RO (Montoya-Burgos et al., in prep). Pour l analyse des genres
Lithoxus et Harttiella, le gne mitochondrial COXI a
t amplifi avec les amorces silCOI-D et silCOI-R
(Bahechar and Montoya-Burgos, in prep). Les squences ont t faites par la compagnie Fasteris
Genve. Les squences ont t manuellement alignes
avec le programme BioEdit de Tom Hall.
(www.mbio.ncsu.edu/bioedit/bioedit.html)

Rsultats
Stations de pche avec liste despces et
abondances
La station 1 se situe sur la petite crique du camp de
base, sur le flanc ouest du mont Itoup (figure 1). Elle
coule en direction de la crique Waki, qui fait partie du
bassin du Maroni. Les coordonnes GPS ainsi que les
caractristiques de cette station sont prsentes dans le
tableau 1.
Les espces de poissons captures dans la station 1
sont :
- Lithoxus stocki (Siluriformes, Loricariidae)
- Ituglanis nebulosus (Siluriformes,
Trichomicteridae)
Ituglanis nebulosus est lespce dominante, reprsentant 95% de tous les individus capturs (figure 2).
Figure 2 : Schma reprsentant labondance relative des espces
captures dans la station 1

Le meilleur modle dvolution des squences a t


dtermin avec le programme ModelTest (Posada and
Crandall, 1998). Les reconstructions phylogntiques
ont t infres avec le programme Treefinder de
Gangolf Jobb (www.treefrinder.de). Pour lanalyse du
genre Harttiella, ce mme programme a t utilis
pour calculer la matrice de distance gntique.
Pour le genre Harttiella, uniquement la rgion correspondant au standard du Barcode of Life section FishBOL a t analyse (570 bp). Le calcul de la matrice
de distance gntique entre les reprsentants de diffrentes populations et espces a t effectu avec le
modle K2P , comme standardis dans FishBOL.

213

La station 2 se trouve sur la seconde crique partir du


camp de base sur le layon D, flanc ouest du mont
Itoup (figure 1). Elle coule en direction de la crique
Waki (bassin du Maroni). Les coordonnes GPS ainsi
que les caractristiques de cette station sont prsentes
dans le tableau 2.
Les espces captures dans la station 2 sont :
- Lithoxus stocki (Siluriformes, Loricariidae)
- Ituglanis nebulosus (Siluriformes,
Trichomicteridae)
- Rivulus geayi (Cyprinodontiformes, Rivulidea)
Ituglanis nebulosus est lespce dominante avec 73%
des captures (figure 3).

Figure 3 : Schma reprsentant labondance relative des espces


captures dans la station 2

Tableau 1 : Caractristiques de la station 1

Tableau2 : Caractristiques de la station 2

214

La station 3 se trouve en aval de la confluence des


criques des stations 1 et 2, sur un secteur parallle et
au nord du layon C, sur le flanc ouest du mont Itoup
(figure 1). Elle coule en direction de la crique Waki
(bassin du Maroni). Le dbit est plus important quaux
stations 1 et 2. Les coordonnes GPS ainsi que les
caractristiques de cette station sont prsentes dans le
tableau 3.
Les espces captures dans la station 3 sont :
-

Avec 58% des captures, Ituglanis nebulosus est toujours lespce dominante bien que reprsentant une
moins grande proportion que dans les stations 1 et 2.
Labondance des autres espces est domine par Ancistrus cf. leucostictus puis Lithoxus stocki (figure 4).

Lithoxus stocki (Siluriformes, Loricariidae)


Ancistrus cf. leucostictus (Siluriformes,
Loricariidae)
Ituglanis nebulosus (Siluriformes,
Trichomicteridae)
Rivulus geayi (Cyprinodontiformes, Rivulidea)
Figure 4 : Schma reprsentant labondance relative des espces
captures dans la station 3

Tableau 3 : Caractristiques de la station


34

Tableau 4 : Caractristique de la station 4

215

La station 4 se trouve sur une autre branche du mme


rseau de criques, proche de la station 3, toujours sur
le flanc ouest du mont Itoup (figure 1). Elle coule en
direction de la crique Waki (bassin du Maroni). Le
dbit est plus important quaux stations 1, 2 et 3 ; cest
le plus fort dbit de toutes les stations prospectes lors
de cette mission. Cest galement la station de plus
faible altitude. Les coordonnes GPS ainsi que les
caractristiques de cette station sont prsentes dans le
tableau 4.
Espces captures dans la station 4 :
- Lithoxus stocki (Siluriformes, Loricariidae)
- Ancistrus cf. leucostictus (Siluriformes,
Loricariidae)
- Pseudancistrus brevispinis (Siluriformes,
Loricariidae)
- Ituglanis nebulosus (Siluriformes,
Trichomicteridae)
- Characidium zebra (Characiformes,
Characidae)
- Melanocharacidum blennoides (Characiformes,
Characidae)
Avec six espces captures, la station 4 a la plus
grande richesse spcifique de toutes les stations prospectes lors de cette mission. De plus, un spcimen du
genre Bryconops (Characiformes, Characidae) a t
observ mais non captur.
Quatre espces dominent en abondance : Ituglanis
nebulosus (27%), Ancistrus cf. leucostictus (21%),
Lithoxus stocki (19%) et Characidium zebra (17%)
(figure 5). Le Melanocharacidium blennoides na t
captur qu un exemplaire, lpuisette, hors du
secteur tudi par Sbastien Brosse et avant le passage
de la rotnone.

La station 5 se trouve sur le rseau qui draine le flanc


sud-ouest du mont Itoup et qui se jette dans la crique
Petit Tamoury (figure 1). Cette dernire contourne le
mont Itoup par le sud et alimente ensuite la rivire
Camopi, faisant partie du bassin de lOyapock. Cette
particularit fait que les ttes de la crique Petit Tamoury sont gographiquement trs proches (quelques
dizaines de mtres) des ttes de criques du bassin du
Maroni. De plus, les dnivels sont peu marqus dans
le secteur de plaine. Cette rgion est donc un lieu
privilgi pour tudier dventuels changes
dichtyofaune entre le bassin du Maroni et le bassin de
lOyapock.
La station 5 possde un dbit notoire. Les coordonnes
GPS ainsi que les caractristiques de cette station sont
prsentes dans le tableau 5.
Les espces captures dans la station 5 sont :
- Lithoxus boujardi (Siluriformes, Loricariidae)
- Ancistrus cf. leucostictus (Siluriformes,
Loricariidae)
- Ituglanis nebulosus (Siluriformes,
Trichomicteridae)
- Rivulus igneus (Cyprinodontiformes, Rivulidea)
Labondance relative de ces quatre espces est assez
quilibre, entre 19% pour Lithoxus boujardi et 31%
pour Ituglanis nebulosus (figure 6).

Figure 6 : Schma reprsentant labondance relative des espces


captures dans la station 5

Figure 5 : Schma reprsentant labondance relative des espces


captures dans la station 4

216

Tableau 5 : Caractristiques de la station 5

Tableau 6 : Caractristiques de la station 6

La station 6 est situe sur une petite crique faible


dbit qui fait partie du mme rseau que la crique de la
station 5 (flanc ouest du mont Itoup, bassin de
lOyapock ; figure 1). Les coordonnes GPS ainsi que
les caractristiques de cette station sont prsentes
dans le tableau 6.
La seule espce capture dans la station 6 est : Rivulus
igneus (Cyprinodontiformes, Rivulidea)
Cette station possde la richesse spcifique la plus
faible, compose 100% de Rivulus igneus.
La station 7 est situe sur une crique du flanc est du
mont Itoup (figure 1), coulant dans la branche nord
de la crique Continent (qui change ensuite de nom et
devient la crique Sable), qui fait partie du bassin de
lOyapock. Le flanc est du mont Itoup semble recevoir plus de prcipitations et/ou de brumes que le flanc

ouest, probablement en raison des vents dominants


venants de lest charg dhumidit. Cela expliquerait
le dbit important estim pour la station 7 (38.6 l/sec)
une altitude leve (625 m). Les coordonnes GPS
ainsi que les caractristiques de cette station sont prsentes dans le tableau 7.
Les espces captures dans la station 7 sont :
- Lithoxus boujardi (Siluriformes, Loricariidae)
- Harttiella sp. (Siluriformes, Loricariidae)
- Ituglanis nebulosus (Siluriformes,
Trichomicteridae)
- Rivulus igneus (Cyprinodontiformes, Rivulidea)
Lespce la plus abondante est Hartiella sp., avec 51%
de toutes les captures.
Vient ensuite Ituglanis nebulosus qui ne reprsente
quun peu plus du quart des captures (figure 7).

217

Tableau 7 : Caractristiques de la station 7

Tableau 8 : Caractristiques de la station 8

Figure 7 : Schma reprsentant labondance relative des espces


captures dans la station 7

218

La station 8 se situe galement sur le flanc est du mont


Itoup, coulant dans la branche sud de la crique Continent (bassin de lOyapock) (figure 1). Le dbit la
station 8 est aussi relativement important par rapport
laltitude leve de cette station (528 m). Les coordonnes GPS ainsi que les caractristiques de cette
station sont prsentes dans le tableau 8.
Les espces captures dans la station 8 sont :
- Lithoxus boujardi (Siluriformes, Loricariidae)
- Harttiella sp. (Siluriformes, Loricariidae)
- Ituglanis nebulosus (Siluriformes,
Trichomicteridae)
Lespce dominante est Harttiella sp. avec 61% des
captures, suivie par Ituglanis nebulosus reprsentant
29% des captures (figure 8).

Figure 8 : Schma reprsentant labondance relative des espces


captures dans la station 8

Relations entre dbit hydrique et richesse spcifique


Pour expliquer les variations de richesse spcifique
entre les stations prospectes, plusieurs variables peuvent intervenir comme des variables topographiques
(altitude, surface du bassin versant), daphiques (type
de sol), climatiques (prcipitations), de vgtation, le
type et le nombre de microhabitats, la largeur ou la
profondeur du cours deau ou encore les proprits
physico-chimique de leau. Comme montr dans la
figure 9, les paramtres physico-chimiques sont relativement constants entre stations et ne peuvent donc pas
expliquer les variations. Le seul paramtre montrant
une diffrence entre station est la turbidit. Cependant,
les valeurs sont dans une gamme de faible turbidit et
la valeur relativement plus levs de la station 4 correspond un pisode de pluie survenu la veille du
prlvement.
Quant au facteur altitude, il ne montre pas de corrlation significative avec la richesse spcifique, comme
indiqu dans la figure 10. De manire plus gnrale, la
plupart des facteurs topographiques, daphiques, cli

Figure 10 : Relation entre laltitude des stations prospectes et leur


richesse spcifique. Lquation de la droite de rgression est donne ainsi que le coefficient de dtermination (R). La corrlation
ngative nest pas significative (P=0,206 ; r=0,339 ; N=8 ; df=-)

matiques et de vgtation peuvent tre intgrs dans


un seul paramtre : le dbit. Ici, les variations de dbits permettent dexpliquer 56% des variations de la
richesse spcifique entre stations, comme indiqu par
la corrlation prsente en figure 11.

Analyses phylogntiques et biogographiques


Le massif du mont Itoup, orient nord-sud, forme
dans cette rgion la ligne de partage des eaux entre le
bassin du Maroni, louest, et le bassin de lOyapock,
lest. Ltude gntique des espces apparentes,
captures de part et dautre de la ligne de partage des
eaux, permet de tester lhypothse dchange trs
occasionnel dichtyofaune entre deux bassins. Ces
changes se produiraient par capture de rivire ,
cest--dire, quun affluent changerait de cours pour se
jeter dans lautre bassin cause, par exemple, de
changements topographiques. Ce phnomne, thoriquement possible, na pas encore t clairement illustr dans la rgion des Guyanes.

Figure 9 : Comparaison des valeurs des paramtres physico-chimique entre stations

219

Tableau 9. Matrice de distances gntiques entre un individu du flanc est du Mont Itoup (en gras) et un individu de chaque espce ou
population rcemment dcouvertes. Les distances gntiques correspondent la rgion 5 du gne COXI, corriges selon le modle
K2P et sont exprimes en nombre de mutations par site.

Pour tester lhypothse de capture de rivire, des


tudes gntiques sur plusieurs genres de poissons
sont en cours dans mon laboratoire. Grce aux nombreux chantillonnages prcdents, il a t possible de
montrer que certains poissons capturs sur le mont
Itoup prsentent des signatures gntiques dchange
dichtyofaune dans le pass via des captures de rivires.
Une nouvelle espce de poisson-chat de la famille des
Loricariidae a t dcouverte sur le mont Itoup. Cette
espce se dmarque des autres espces du mme genre
par une divergence gntique notoire.

Phylognie et biogographie du genre Ancistrus en Guyane


Dans les Guyanes, les espces du genre Ancistrus sont
encore mal comprises du point de vue morphologique
et gntique. La raison principale semble tre la prsence de nombreux hybrides interspcifiques. La seule
espce bien dfini est A. temminckii, qui habite les
fleuve Maroni, Comewijn, Surinamee, Saramaca et
Tabiti au Suriname. Le morphotype nomm A. cf.
leucostictus semble tre un proche parent de A. temminckii mais ne forme pas une ligne monophyltique.
Plusieurs lignes gntiques se distinguent. En ce qui
concerne les individus capturs sur le mont Itoup et
identifis comme A. cf. leucostictus, ceux provenant
des affluents du Maroni apparaissent dans larbre
phylogntique comme trs proches de A. temminckii
(carr vert suprieur dans la figure 12). Par contre,
ceux provenant des affluents de lOyapock sont placs
deux endroits diffrents de larbre. Un groupe
branche la base de la ligne regroupant A. temminckii et les A. cf. leucostictus qui lui sont proches (carr
vert intermdiaire dans la figure 12) alors que lautre
groupe est gntiquement plus distant et se place avec
dautres reprsentant de A. cf. leucostictus capturs en
1999 dans la bas fleuve Oyapock (carr vert infrieur

220

dans la figure 12). Les deux identits gntiques qui


coexistent dans les criques du mont Itoup affluentes
de lOyapock, dont lune est trs proche de lidentit
gntique trouve dans les criques du mont Itoup
affluentes du Maroni, rvlent un vnement
dchange dAncistrus entre bassins dans cette rgion.

Phylognie et biogographie du genre Lithoxus


dans les Guyanes
Les espces du genre Lithoxus sont particulirement
intressantes pour tudier lhypothse dchange
dichtyofaune entre bassins par capture de rivire car
elles sont trs rhophiles et sont gnralement prsentes trs haut dans les ttes de crique, proche de la
ligne de partage des eaux. Lanalyse phylogntique
du genre Lithoxus dans les Guyanes (figure 13)
montre clairement que lindividu analys provenant
des criques du mont Itoup appartenant au systme du
Maroni et identifi comme Lithoxus stocki appartient
bien cette espce (carr vert dans la figure 13). Par
contre, les individus capturs sur les criques du mont
Itoup appartenant au bassin de lOyapock sont placs
deux endroits de la phylognie (carrs rouges dans la
figure 13). Un individu groupe bien avec dautres
reprsentants de lespce L. boujardi, de la forme de
lOyapock (carr rouge infrieur dans la figure 13). Le
second groupe se place comme groupe frre de
lespce L. stocki (carr rouge du haut dans la figure
13). Ce positionnement reflte le partage dun anctre
commun rcent entre L. stocki et cette deuxime ligne. Il est donc fortement probable quun change de
Lithoxus aie eu lieu entre le bassin de lOyapock et du
Maroni, expliquant ainsi lexistence de cet anctre
commun rcent entre L. stocki et sa ligne sur vivant
actuellement dans les criques du mont Itoup
scoulant dans le bassin de lOyapock.

Figure 12. Arbre phylogntique des Ancistrus temminckii et des


diffrentes lignes de A. cf. leucostictus rencontres dans les
Guyanes. Cet arbre a t obtenu sur la base des squences partielles du gne 1cAN25, par la mthode de Maximum de vraisemblance et avec le modle GTR. Les individus capturs sur le mont
Itoup sont encadrs en vert.

Discussions

Figure 13. Arbre phylogntique du genre Lithoxus dans les


Guyanes. Cet arbre a t obtenu sur la base des squences partielles du gne COXI, par la mthode de Maximum de vraisemblance et avec le modle GTR. Lindividu provenant des criques du
mont Itoup appartenant au bassin du Maroni est encadr en vert.
Les individus provenant des criques appartenant au bassin de
lOyapock sont encadrs en rouge.

Richesse spcifique
La dtermination de paramtres pouvant expliquer les
variations de richesse spcifique entre localits est
importante dans ltude de la biodiversit et des communauts. Lors de cette mission, nous avons prospect
8 stations montrant des variations de richesse spcifique que nous pouvons considrer comme relle,
cest--dire, sans un grand biais dchantillonnage
tant donn la mthode de pche exhaustive que nous
avons employe et la taille rduite des cours deau
tudis. Il est possible de mener des analyses complexes, multivaries, pour comprendre les facteurs
ayant un rle explicatif dominant dans la comprhension des variations de richesse spcifique. De telles
analyses ont t conduites par Sbastien Brosse, de
lUniversit de Toulouse. Une autre approche est de
slectionner un paramtre qui puisse intgrer dautres
variables explicatives importantes. Ici, jai montr que
seules les variations de dbit peuvent expliquer une
part considrable des variations de richesse spcifique.
Il est cependant utile de souligner les biais potentiels

sur la mesure de ce paramtre, en particulier si lon


effectue les mesures juste aprs une forte pluie ou en
des saisons diffrentes. Lors de cette mission, les
mesures ont t prises dans un intervalle de 9 jours,
avec un seul vnement relativement mineur de pluie
le 2 novembre au soir.
Les stations prospectes lors de cette mission montrent
une richesse spcifique peu leve en comparaison
avec dautres cours deau de dbit comparable (en
saison sche). Par exemple, la crique Aya, dont jai
particip linventaire ichtyologique en 2007, qui se
situe dans la rserve de la Trinit et fait partie du bassin de la Mana, na pas un dbit bien suprieur aux
stations 4 et 5 mais prsente une richesse spcifique
dix fois suprieure (62 espces contre 6 pour la station
4). Lexplication la plus probable rside dans le type
de cours deau. Par comparaison aux criques des stations 4 et 5, la crique Aya est plus varie en microhabitats, avec une succession de secteurs profonds
faible courant, de rapides substrat rocheux, de radiers, et de secteurs avec plantes aquatiques et bois.
Ce type de cours deau se trouve gnralement des

221

altitudes moins leves que les criques prospectes sur


le mont Itoup (le secteur tudi de la crique Aya se
situe une altitude denviron 110 m). Par contre, si
lon compare des criques possdant les mmes caractristiques et micro-habitats que ceux des criques
prospectes lors de cette mission, alors il devient visible que la richesse spcifique de ces criques est tout
fait comparable. Mol et al. (2007) relve 8 espces
dans les criques daltitude de la montagne Lely et 11
pour la montagne Nassau, qui font partie du bassin du
Maroni, au Suriname. En Guyane franaise, jai relev
3 espces dans les criques daltitude du mont Lucifer
(altitude 380 m ; bassin de la Mana) ; 5 espces dans
la crique Cascade et 7 espces dans la crique Kwack
de la station CNRS des Nouragues (altitude 210 m ;
bassin de lApprouague) ; dans la mme station, jai
relev 4 espces dans la crique scoulant en direction
de la Comt, sur lautre versant de lInselberg (altitude
290 m); dans la partie amont de la crique de la montagne de Cacao, jai recens 4 espces (altitude 140 m
; bassin de la Comt). Il en rsulte donc que la richesse spcifique des criques du mont Itoup semble
tre dans la norme des criques daltitude avec des
micro-habitats peu varis.

Illustration de lhypothse dchange


dichtyofaune par capture de rivire
Les analyses phylogntiques combines aux connaissances biogographiques de rpartition des espces
mont permis de rvler deux situations o des
changes despces ont eu lieu entre le bassin du Maroni et le bassin de lOyapaock, dans la rgion du
mont Itoup. Ces rsultats, rendus possible grce
cette mission, reprsentent les deux premires illustrations soutenant lhypothse dchange dichtyofaune
par capture de rivire dans la rgion des Guyanes. Il
est important de comprendre ce phnomne, en particulier les rgions gographiques o il a eu lieu ainsi
que les frquences dchanges, car il pourrait bien tre
un moteur important dans le processus de diversification biologique, expliquant en partie lnorme biodiversit rencontre dans les milieux notropicaux.

222

Conclusions
La diversit spcifique des criques daltitude du mont
Itoup est globalement faible pour des petits cours
deau en milieu notropical mais nanmoins conforme
aux situations rencontrs dans dautres milieux directement comparables. Une part importante des variations de richesse spcifique entre stations peut tre
explique uniquement par les variations de dbits. En
effet, ce paramtre intgre des nombreuses autres
variables (topographiques, daphiques, climatiques,
environnementales) pouvant avoir une influence sur la
diversit spcifique. Il est noter que lestimation de
ce paramtre est simple et ne ncessite pas
dinstruments sophistiqus.
Les chantillonnages effectus dans cette mission,
combins aux nombreuses autres donnes dj obtenues dans mon laboratoire, permettent dillustrer, pour
la premire fois dans les Guyanes, lhypothse
dchange dichtyofaune entre bassins par capture de
rivire. Ce phnomne pourrait expliquer une part
importante de lnorme biodiversit ichtyologique des
notropiques.

Recommandations
Il est important deffectuer ce mme type de travail de
terrain sur les autres massifs localiss sur le territoire
du parc national.
Concernant lutilisation de la rotnone, la plupart des
espces peuvent rcuprer aprs une exposition la
rotnone si elles sont places rapidement dans de leau
fraiche (sans rotnone). Seules les espces les plus
sensibles au manque doxygne rcuprent mal. Il
faudrait donc disposer des seaux deau fraiche tout au
long du tronon dimpact de la rotnone, pas uniquement sur le secteur dintrt qui peut tre bien plus
court ! Dautre part, pour limiter ltendue de leffet
de la rotnone, il est recommand de positionner le
secteur de pche juste en amont dune confluence de
sorte diluer fortement la rotnone en aval du secteur
dintrt.

Remerciements

Rfrences

Malgr des conditions de travail pas toujours faciles,


jai eu un plaisir norme effectuer cette mission avec
mes collgues du Parc amazonien et de lUniversit de
Toulouse, dans une rgion extraordinaire de diversit
et totalement prserve des impacts humains, pour
linstant. Je remercie Nicolas Surugue et le Parc amazonien de Guyane pour lorganisation trs efficace de
cette mission. Merci Nicolas Surugue pour son nergie sur le terrain, son implication scientifique dans
tous les projets et son enthousiasme. Je remercie Sbastien Brosse et Alain Thomas pour leur collaboration scientifique, leur exprience de terrain et pour
leur compagnie. Jai fortement apprci la compagnie,
les connaissances et les changes au camp de base
avec Olivier Claessens, Alexandre Renaudier et Michel Huet. Cette mission t soutenue financirement par le Parc amazonien de Guyane, la DIREN de
Guyane et de Dpartement de Zoologie et Biologie
Animale de lUniversit de Genve.

MOL J., WAN TONG YOU K., VREDE I., FLYNN


A., OUBOTER P. AND F. VAN DER LUGT. 2007.
Fishes of Lely and Nassau Mountains, Surinamee. In
ALONZO M.E. & MOL J.H. (eds). A Rapid Biological Assessment of the Lely and Nassau Plateaus, Surinamee (with additional information on the
Brownsberg Plateau). The RAP Bulletin of Biological
Assessment. 43. Conservation International.
POSADA, D. AND K. A. CRANDALL. 1998. Modeltest: testing the model of DNA substitution. Bioninformatics 14: 817-818.

223

Les communauts de poissons du


mont Itoup
Influence relative des facteurs biogographiques, du gradient amont-aval et du
microhabitat sur la structure des communauts, la richesse spcifique et
labondance des poissons
Sbastien Brosse1
1

UMR EDB, Universit Paul Sabatier, Toulouse

Rsum
Linventaire des poissons du mont Itoup a permis de caractriser des assemblages de poissons originaux mais
pauvres en nombre despce. Sur chacune des 8 stations rfrences, seules 1 5 espces diffrentes ont t
collectes pour 9 espces au total. Cette pauvret peut tre explique par la difficult daccs au cours deau, les
poissons ne pouvant remonter en amont des cascades et zones forts courants. Les habitats sont aussi mettre
en cause de par leur particularit biogographique ne permettant limplantation que despces adaptes ce
genre de milieu. Il a t notamment mis en avant une addition graduelle despces en se dirigeant vers laval.
Une disparit entre les bassins de lOyapock et du Maroni a aussi t dmontre, les espces semblent ne stre
jamais mlanges et chaque bassin prsente des communauts despces diffrentes. Les assemblages de poissons sont donc dpendant des facteurs biogographique, climatique et du gradient amont-aval.

Mots cls
Parc amazonien de Guyane, mont Itoup, ichtyologie, poissons, biologie des populations, UMR EDB

Chronologie
01/10/2010 Cayenne - Itoup (hlicoptre) ; Echantillonnage du site I1 (affluent crique Petite Waki) ; nuit
au camp de base
02/10 Echantillonnage des sites I2 et I3 (affluents
crique Petite Waki) ; nuit au camp de base
03/10 Echantillonnage du site I4 (affluent crique Petite
Waki) et installation du camp secondaire ; nuit au
camp secondaire
04/10 Echantillonnage du site I5 (affluent crique Petit
Tamouri) ; nuit au camp secondaire
05/10 Echantillonnage du site I6 (affluent crique Petit
Tamouri) ; nuit au camp secondaire
06/10 Dmontage du camp secondaire et retour au
camp de base ; nuit au camp de base
07/10 Echantillonnage du site I7 (affluent crique
Sable) ; nuit au camp de base
08/10 Echantillonnage du site I8 (affluent crique
Sable) ; nuit au camp de base
09/10 Rangement du matriel et des chantillons ; nuit
au camp de base
10/10 Dmontage du camp de base ; Itoup Cayenne
(hlicoptre)

224

Objectifs du volet
communauts de poissons
Ltude des communauts de poissons du mont Itoup
vise :
- tablir un inventaire faunistique des poissons du
mont Itoup, en collaboration avec Juan Montoya
- dcrire la structure des communauts en place en
fonction de descripteurs locaux (habitat), rgionaux
(altitude ; gradient amont-aval) et biogographiques
(bassin versant ; versant est vs versant ouest).

Figure 1 : Carte topographique prsentant le mont Itoup. Les layons de prospection sont indiqus en pointills ainsi que les stations
de pche (St1 St8), le camp de base et le bivouac. Le sommet Tabulaire est clairement visible.
Carte prpare par le Parc National et lONF

Mthodologie
Slection des stations
Pour atteindre les objectifs dcrits ci-dessus, il est
ncessaire
de
slectionner
des
stations
dchantillonnage reprsentant au mieux la diversit
des caractristiques biogographiques, rgionales et
locales des cours deau du mont Itoup (Figure 1).
Nous avons donc chantillonn des stations appartenant des bassins distincts : 8 stations sur le bassin du
Maroni et 9 stations sur le bassin de lOyapock. Ces
stations sont reparties sur les deux versants du mont
Itoup : 5 stations sur le versant est et 12 stations sur
le versant ouest. La comparaison des assemblages de
poissons en fonction du bassin et/ou du versant vise
dterminer linfluence de facteurs agissant large
chelle spatiale et temporelle sur les communauts de
poissons (facteurs biogographiques, historiques et
ventuellement climatiques). Il est galement ncessaire dchantillonner des stations situes dans une
large gamme daltitude de manire apprhender
linfluence de la position du site dtude au sein du
gradient amont-aval sur les communauts de poissons.
Enfin, sur chacun des 8 cours deau, deux trois stations prsentant un habitat contrast ont t prises en
compte de manire dterminer le rle de lhabitat
local sur les communauts de poissons.

Echantillonnage des poissons


Sur chacun des 8 sites de pche, les poissons ont t
collects sur 2 stations ( lexception du site I7 pour
lequel 3 stations ont t chantillonnes). Ces 2 3
stations sont reprsentes par des tronons contigus du
cours deau, mesurant chacun 4 15 mtres de long.
La longueur de chaque station est dtermine en fonction de la topographie du cours deau dans le but de
reprsenter le plus fiablement possible la diversit
locale dhabitats, mais galement de manire maximiser lefficacit de capture des poissons. Les tronons ont t dlimits lamont et laval par des
filets mailles fines (4 mm de vide de maille), de
manire viter un chappement des poissons durant
lchantillonnage. Ceci permet non seulement
dobtenir une liste faunistique, mais galement
dacqurir des informations quantitatives sur
labondance des diffrentes espces de poissons.
La collecte des poissons a t ralise laide de rotnone. Cette mthode, bien que destructive, reste le
seul moyen dobtenir rapidement une image fiable de
la densit de lensemble des espces. La mortalit des
poissons laval du site dchantillonnage a t rduite au minimum par lutilisation rpte de faibles
doses de rotnone, vitant ainsi un dversement massif
et ponctuel susceptible de causer des mortalits massives (Merigoux et al. 1998). De plus, nous avons,
lorsque cela tait possible, localis nos stations
dchantillonnage lamont dune confluence, permettant ainsi une dilution rapide de la rotnone
laval du site de pche. Enfin, une vrification de la
mortalit induite par la rotnone laval du site de

225

pche a t systmatiquement effectue. Sur


lensemble des sites, le nombre de poissons morts
collects laval reste faible (i.e. nettement infrieur
au nombre de poissons collects sur une station), attestant dune attnuation rapide de la toxicit de la rotnone. Lensemble des poissons collects sur chaque
site (i.e. poissons capturs sur les stations et poissons
morts collects laval des stations de pche) ont t
conservs par J. Montoya des fins de taxonomie et
de mise en collection. Pour chaque station, tous les
poissons capturs ont t identifis et mesurs.

Paramtres environnementaux
En parallle des collectes de poissons, une description
de chaque station a t ralise. Les paramtres pris en
compte sont :
- la longueur de la station
- la largeur du cours deau, mesure en 2 3 points.
Chacune de ces mesures de largeur a t associe un
transect de mesures de profondeur (3 5 points de
mesure par transect en fonction de la largeur du cours
deau et de lhtrognit du lit).
- la vitesse du courant, mesure deux reprises pour
chaque station en chronomtrant la distance parcourue
par un objet flottant
- limportance relative des diffrents facis
dcoulement ainsi que la granulomtrie du substrat
ont t estimes visuellement
- la couverture vgtale a t prise en compte sous
forme dune valeur estime de pourcentage dombrage
du lit.
- la physico-chimie de leau a t mesure par J.
Montoya laide dune sonde multiparamtres. Les
paramtres pris en compte sont : la temprature de
leau, le pH, la conductivit, loxygne dissous et la
turbidit de leau.
En complment des informations propres chaque
station de pche, nous avons relev la position (latitude et longitude) et laltitude de chaque site (Tableau
1).

Traitement des donnes


Les donnes environnementales ont t synthtises
laide dune Analyse en Composantes Principales
(ACP). Cette analyse permet de visualiser la position
des 17 stations en fonction de leurs caractristiques
environnementales. Nous avons dans un premier
temps effectu une ACP en utilisant lensemble des
variables
environnementales.
Pour
simplifier
linterprtation des donnes, nous avons ensuite effectu une seconde ACP en utilisant seulement une
slection de 5 variables considres comme
intgratrices de lhabitat et du gradient amont-aval :
laltitude, la profondeur moyenne, la vitesse moyenne
du courant, la largeur du cours deau et le % de
couverture du lit par des substrats grossiers (galets,
blocs, dalle).

226

Le rle des diffrents facteurs environnementaux sur


la richesse et labondance des poissons et t dtermin laide de modles linaires gnraliss (GLM).
Les variables explicatives prises en compte dans les
modles dabondance et de richesse spcifique sont :
le bassin (Maroni/Oyapock) ; le versant (est /ouest) ;
lhabitat local (synthtis par les coordonnes des
stations sur laxe 1 de lACP) et le gradient amontaval (synthtis par les coordonnes des stations sur
laxe 2 de lACP). Linfluence relative des facteurs
biogographiques (bassin), topographiques (versant),
du gradient amont-aval et de lhabitat local sur les
assemblages despces ont t dtermins grce une
MANOVA non-paramtrique.

Rsultats
Caractristiques des sites et des stations
Lensemble des sites chantillonns prsentent des
caractristiques de cours deau torrentiels et prsentent
donc une alternance marque entre zones calmes de
type vasque (pool) ou plat courant avec des zones
nettement plus turbulentes (chutes, rapides, radiers). Il
est noter une forte abondance de particules grossires (blocs, galets). Le courant est marqu sur
lensemble des stations, mme si localement les vitesses de courant sont faibles, le substrat est minral et
les zones de dpt sont rares. Lensemble des stations
sont situes en milieu forestier et sont par consquent
fortement ombrages. Les macrophytes aquatiques
sont absentes.
De manire plus anecdotique, une trace de prsence
humaine ancienne est noter sur le site I5, puisque
nous avons trouv plusieurs bouteilles en verre dans et
proximit du cours deau. Ces bouteilles, de par leur
forme, semblent dater de la fin du XIXme ou du
dbut du XXme sicle.
Tous les cours deau sont de petite taille, avec une
largeur moyenne de 1.2 4 mtres pour une profondeur moyenne de 10 20 cm. Les caractristiques
physico-chimiques sont relativement homognes entre
les cours deau, lexception de la conductivit qui
sest rvle relativement leve (>40 s) dans les
sites I3, I5 et I6.La prise en compte simultane des
diffrentes variables environnementales laide dune
ACP montre que les stations se distribuent en fonction
dun double gradient correspondant : 1) aux caractristiques locales de lenvironnement (ou habitat) reprsent par laxe 1 de lACP ; et 2) au gradient amontaval reprsent par laxe 2 de lACP (Figure 2).
La comparaison des rsultats dune ACP obtenue en
utilisant lensemble des variables environnementales
(non prsente ici) montre des rsultats similaires
ceux obtenus en utilisant seulement 5 variables intgratrices (Figure 2). Seule cette dernire analyse est
prsente ici dans un souci de lisibilit du rapport.

Tableau 1 : Localisation et caractristiques environnementales des 8 sites dchantillonnage. Pour chaque site, les chantillonnages
ont t effectus sur 2 stations ( lexception du site I7 pour lequel 3 stations ont t chantillonnes). Les valeurs indiques sont des
valeurs moyennes par site.

Figure 2 : Distribution des 17 stations sur le plan 1-2 de lACP en fonction


de 5 variables intgratrices de lenvironnement local et du gradient
amont-aval.

227

Photo 1. Exemples de stations dchantillonnage. (A) site I1 (Petite Waki) ; (B) site I2 (Petite Waki), (C) site I4 (Petite Waki) ; (D) site I7
(crique Sable) ; (E) Site I8 (crique Sable)

228

Tableau 2 : Espces captures dans chacune des 17 stations

La distribution des stations sur lACP montre que


lensemble des stations reprsentent bien la diversit
dhabitat local (i.e. sur laxe 1), avec cependant 2
stations qui prsentent des conditions atypiques. Il
sagit des stations 7a et 7b qui sont caractrises par
une vitesse de courant particulirement forte. Ces
deux stations prsentent en effet des facis de type
chute (ou cascade), associ des dalles rocheuses et
des gros blocs. Le gradient amont-aval est lui aussi
bien reprsent sur laxe 2 avec une rpartition relativement homogne des stations.

ces diffrences dabondance semblent indpendantes


du bassin.
Ces rsultats sont confirms par le GLM qui montre
une influence significative du versant sur labondance,
alors que les autres facteurs ninfluencent pas significativement ce paramtre (Tableau 4).

Inventaire faunistique
Parmi les 9 espces de poissons captures sur
lensemble des 17 stations (Table 2), les Siluriformes
dominent le peuplement de poissons avec 6 des 9
espces, viennent ensuite les Cyprinodontes avec 2
espces de Rivulus (Table 2). Les Characiformes sont
quant eux trs peu reprsents avec seulement
quelques Characidium capturs sur un seul site (site
I4).
La composition spcifique de chaque station est relativement variable avec cependant une espce (Ituglanis
nebulosus) qui a t collecte dans tous les cours
deau lexception de I6. Cette mme espce domine
galement les peuplements en termes dabondance,
puisque 186 des 424 poissons capturs sont des Ituglanis (Figure 3).
Lensemble des poissons appartiennent des espces
de petite taille, et la longueur totale des individus
schelonne entre 20 et 107 mm, pour une taille
moyenne toutes espces confondues de 50 mm.

Figure 3 : Nombre de poissons capturs pour chacune des 9 espces

Tableau 3 : rsultats du GLM testant le rle des diffrents facteurs


environnementaux sur la richesse spcifique des 17 stations

Richesse et abondance
La richesse spcifique varie de 1 5 espces par site.
Il ne semble pas y avoir deffet du bassin ou du versant (Figure 4), comme le confirment les rsultats du
GLM. En effet, le seul facteur expliquant significativement la richesse spcifique est la position de la
station dans le gradient amont-aval.
Les abondances restent faibles dans toutes les stations,
avec moins de 3 poissons par mtre carr. Cependant,
les sites situs sur le versant est abritent plus de poissons par unit de surface que ceux situs sur le versant
ouest (Figure 5). Il est intressant de remarquer que
Figure 4 : Richesse spcifique dans chacun des 8 sites

229

Tableau 4 : rsultats du GLM testant le rle des diffrents facteurs


environnementaux sur la labondance des poissons dans les 17
stations

Structure des communauts


La MANOVA non paramtrique effectue sur la table
dabondance des diffrentes espces de poissons dans
les 17 stations permet dexpliquer plus de 75% de la
variabilit des donnes (Tableau 5). Cette analyse
montre que les facteurs biogographiques jouent un
rle prpondrant, puisque plus de 40% de la variabilit des donnes est explique par la nature du bassin
versant (Oyapock ou Maroni). Lorientation du cours
deau intervient en second lieu, mais garde un rle
important puisque lappartenance de la station au
versant est ou ouest du mont Itoup explique plus de
28 % des variations de structure des communauts. La
position de la station au sein du gradient amont-aval
affecte elle aussi significativement la structure des
communauts, bien que linfluence de ce paramtre
soit modeste (environ 6%). Enfin, les caractristiques
locales de lhabitat ninfluencent pas significativement
la structure des communauts de poissons.

Discussion
Les cours deau du mont Itoup prsentent des assemblages de poissons originaux mais peu diversifis.
Nous avons en effet collect de 1 5 espces par station, alors que des tudes antrieures menes sur des
cours deau de taille semblable situs en zone de
plaine (affluents de lArataye dans la rserve des

Figure 5 : Abondance des poissons dans chacun des 8 sites

230

Tableau 5. Rsultats de la MANOVA non-paramtrique montrant


lInfluence relative du bassin, du versant, de lhabitat local et du
gradient amont-aval sur la structure des communauts de poissons.

Nouragues) abritent de 15 30 espces (Brosse et al.,


2011). Cependant, des travaux mens sur des zones
montagneuses du Suriname corroborent nos observations (Mol et al. 2007), bien que les richesses observes par Mol et al. (2007) restent lgrement suprieures celles observes sur le mont Itoup.
Bien que la bibliographie disponible sur les communauts de poissons des petits cours deau daltitude de
la rgion des Guyanes soit trs limite, la composition
des assemblages de poissons de ces milieux semble
trs caractristique. En effet, notre tude, comme celle
de Mol et al. (2007) sur les monts Lely et Nassau
(Suriname), montre une dominance de 3 groupes de
poissons : les Rivulus, des petits Loricaridae (Lithoxius, Harttiella), et des Trichomycteridae. Il faut
cependant remarquer quaucun Synbranchiforme na
t captur sur le mont Itoup, alors quils ont t
rencontrs sur la plupart des sites chantillonns sur
les monts Lely et Nassau au Suriname (Mol et al.
2007), et que ces poissons sont prsents sur certains
cours deau de montagne de Guyane. Synbranchus
marmoratus a en effet t observ sur les cours deau
du mont Galbao proximit de Sal (Brosse, observation personnelle).
Les espces de poissons rencontres sur le mont Itoup, bien que peu nombreuses, prsentent un intrt
systmatique, cest le cas pour la plupart des Loricaridae capturs (Harttiella, Lithoxius, Ancistrus et Pseudancistrus) et pour les Ituglanis.

Photo 2. Quelques poissons du mont Itoup. A) Ituglanis nebulosus ; B) Rivulus geayi ; C) Rivulus igneus ; D) Harttiella sp. ; E) Lithoxius boujardi

Je ne dvelopperai pas ici cette partie puisque elle


correspond la thmatique dveloppe par Juan Montoya. Il est cependant ncessaire de noter que la robe
des Ituglanis sest avre trs variable en fonction des
sites. De plus les Lithoxius boujardi capturs sur les
sites du versant est prsentent des taches dores sur la
partie latrale antrieure du corps (qui sestompent
rapidement la mort de lanimal), ce qui semble assez
atypique. En effet, Le Bail et al. (2000) ne fait aucune
rfrence cette caractristique.
La faible richesse des poissons rencontrs sur le mont
Itoup est probablement due deux raisons :
- dune part, la partie amont des cours deau est
difficile atteindre pour les poissons, qui doivent
probablement remonter des cascades ou des zones
trs fort courant, puisque les pentes du mont sont
localement trs abruptes. Seules quelques espces,
capables de franchir ce type dobstacle ont donc pu
coloniser la zone amont des cours deau. Cela explique probablement labsence de certains ordres tels
que les Perciformes et les Characiformes,
lexception de quelques Characidium dans le site I4
qui est le site situ la plus basse altitude. Ainsi, bien
que localement les habitats paraissent favorables des
espces de plaine (Photo 3), ces poissons nont srement pas pu atteindre ces zones a cause dobstacles
physiques (tronons de cours deau trs pentus par
exemple) situs laval.
- dautre part, les habitats disponibles sur la plupart
des sites sont suffisamment particuliers (faible lame
deau, courant marqu, granulomtrie trs grossire du

substrat) pour slectionner des espces adaptes ce


type de milieu. Cela explique la prsence despces de
petite taille, capables de se fixer aux rochers (Loricaridae), de se soustraire au courant grce un corps trs
allong et un mode de vie souvent fouisseur (Ituglanis) ou dtre capable de se dplacer hors de leau
pour franchir des obstacles (Rivulus).
Ces contraintes environnementales expliquent, au
moins en partie, le gradient amont-aval de richesse
observ entre les diffrentes stations. Ainsi, nous
pouvons penser que de lamont vers laval, les conditions environnementales deviennent moins restrictives
et permettent de nouvelles espces datteindre les
sites et de sy tablir. Il faut cependant noter que nous
navons pas observ de rel changement dassemblage
de lamont vers laval, mais simplement une addition
graduelle despces (Figure 4, Tableau 3).
Au contraire, il apparat que les assemblages
despces diffrent nettement entre les deux bassins
(Tableau 5). Nous observons donc une faune propre au
Maroni qui diffre fortement de celle de lOyapock,
mais ces diffrences sont en large partie dues la
prsence despces congnriques propres chaque
bassin (e.g. Rivulus igneus dans le bassin de
lOyapock et R. geayi dans le bassin du Maroni). Bien
que les deux bassins soient extrmement proches
(quelques centaines de mtres) et spars par des
crtes de seulement quelques mtres de hauteur, il ne
semble pas y avoir eu dchanges de faune entre les
deux bassins, mme pour des espces capables de se
dplacer hors de leau telles que les Rivulus.

231

Photo 3. Stations chantillonnes sur le Site I5. Bien que prsentant priori un habitat favorable pour des Characidae (Characiformes)
et des Cichlidae (Perciformes), ces groupes de poissons nont pas t capturs sur ce site.

Nous avons cependant remarqu dimportantes diffrences faunistiques entre les cours deau des deux
versants du mont Itoup (Tableau 5). Les Harttiella
sp., par exemple, nont t rencontrs que sur le versant est. Ce genre tant strictement infod aux zones
fort courant (Mol et al. 2007), nous avons mis
lhypothse que par un effet de Foehn, le versant est
reoit des prcipitations plus rgulires que le versant
ouest, maintenant ainsi un dbit assez constant, alors
que le versant ouest serait plus perturb du fait des
prcipitations irrgulires entranant des variations
importantes de dbit au cours de lanne. Cette hypothse est galement taye par les abondances de poissons qui sont significativement plus leves sur le
versant est (Figure 5, Tableau 4), attestant dun environnement probablement plus stable que sur le versant
ouest. Cette hypothse ncessiterait des travaux complmentaires pour tre valide (ou rfute).
Les assemblages de poissons du mont Itoup sont
donc sous la dpendance des facteurs biogographiques, climatiques et du gradient amont-aval et
fournissent donc un bon exemple de la thorie des
filtres hirarchiques (Jackson et al. 2001). Bien que
les facteurs structurant les assemblages soient relativement bien connus dans les cours deau temprs, les
connaissances sont cependant beaucoup moins avances dans les zones tropicales pour lesquelles la structuration spatiale des assemblages a essentiellement t
aborde large rsolution spatiale, dans le but
dtablir une zonation gnrale des grands cours deau
(e.g. Araujo et al. 2009), comparable celles proposes dans les zones tempres. Les travaux effectus
sur le mont Itoup fournissent donc les premiers lments expliquant la structuration des communauts de
poissons dans les petits cours deau daltitude de
Guyane.
Dans ce contexte, Il faut noter que lhabitat local na
pas t considr comme un facteur expliquant la
structure des communauts. Ceci parait atypique

232

puisque la grande majorit des tudes, aussi bien en


milieu tempr quen milieu tropical soulignent
limportance de lhabitat local. Il est probable que les
assemblages daltitude soient suffisamment pauvres en
espces pour ne pas prsenter de sgrgation dhabitat
marque, toutes les espces habitant par consquent
les diffrents facis du cours deau. Il serait cependant
intressant de sintresser maintenant au microhabitat
des poissons, c'est--dire au partage de lhabitat entre
espces trs fine chelle au sein dune mme station.
Cela permettrait dapprhender les relations entretenues entre les diffrentes espces.
Enfin, les communauts de poissons du mont Itoup,
mme si elles sont peu diversifies, sont trs caractristiques des systmes aquatiques de montagne, et ce
titre, mritent dtre conserves. Elles prsentent de
plus un probable intrt taxonomique (cf rapport de
Juan Montoya). Dun point de vue fondamental, cette
tude est ma connaissance le premier travail visant
dterminer linfluence relative de diffrents facteurs
(biogographie, climat, gradient amont-aval, habitat
local) sur les assemblages de poissons de petits cours
deau de montagne en zone notropicale.

Perspectives
Les rsultats prsents dans ce rapport de mission ont
fait lobjet dun article scientifique:
BROSSE S., MONTOYA-BURGOS J.I. GRENOUILLET G. & SURUGUE N. 2013. Determinants
of fish assemblage structure in Mount Itoupe mountain
streams (French Guiana). International Journal of
Limnology. 49: 43-49.

Bibliographie
ARAUJO F.G., PINTO B.C.T. & TEIXEIRA T.P.,
2009. Longitudinal patterns of fish assemblages in a
large tropical river in southeastern Brazil: evaluating
environmental influences and some concepts in river
ecology. Hydrobiologia 618:89-107

LE BAIL P.Y., KEITH P. & PLANQUETTE P. 2000.


Atlas des poisons deau douce de Guyane. Siluriformes (Tome 2, fascicule II). MNHN Paris, France
MERIGOUX S., PONTON D. & DE MERONA B.
1998. Fish richness and species-habitat relationships in
two coastal streams of French Guyana, South America. Environ. Biol. Fish. 51:25-39
MOL J., WAN TONG YOU K., VREDE I., FLYNN
A., OUBOTER P. & VAN DER LUGT F. 2007.
Fishes of Lely and Nassau Mountains, Suriname. In
Alonzo M.E. & Mol J.H. eds, A Rapid Biological
Assessment of the Lely and Nassau Plateaus, Suriname (with additional information on the Brownsberg
Plateau). The RAP Bulletin of Biological Assessment.
43. Conservation International.

BROSSE S, GRENOUILLET G., GEVREY M.,


KHAZRAIE K. & TUDESQUE L. 2011. Small-scale
gold mining erodes fish assemblage structure in small
neotropical streams. Biodiversity and Conservation
20: 1013-1026
JACKSON D.A., PERES-NIETO P.R. & OLDEN J.D.
2001. What controls who is where in freshwater fish
communities the roles of biotic, abiotic, and spatial
factors. Can. J. .Fish. Aquat. Sci. 58: 157170.

233

tude et inventaire entomologique


du mont Itoup
P.H. Dalens1, Denis Blanchet1, Eddy Poirier1, Serge Fernandez1, Julien Touroult1
1

SEAG

Rsum
Linventaire entomologique du mont Itoup a permis, au moyen de diffrentes techniques de pigeage, la rcolte
de plus de 8000 spcimens de 1903 taxons diffrents. Trois placettes de sous-bois daltitudes diffrentes et ayant
une composition floristique homogne ont t chantillonnes. Les assemblages despces entre 400 et 600 m
sont proches en termes de diversit alors que la communaut dinsectes rcolte 800 m se dmarque clairement. 99% de la faune observe sur le mont Itoup correspond au fond de faune commun la Guyane, caractrisant une relative homognit des forts tropicales de basse altitude. Quelques espces rares voir jamais observes ont pu tre captures, dmontrant un certain endmisme de ces individus aux sommets ou plus vraisemblablement aux reliefs du plateau des Guyanes.

Mots cls
Parc amazonien de Guyane, mont Itoup, inventaire, entomologie, insectes, SEAG

Prsentation et Objectifs entomologiques de la Mission :

Conditions de ltude

Une grande expdition pluridisciplinaire (oiseaux,


chiroptres, flore, amphibiens, reptiles et insectes) a
t organise par le Parc amazonien de Guyane sur un
des grands reliefs (sommet Tabulaire) de la zone sud,
inaccessible, de la Guyane.

Les conditions de terrain furent assez difficiles :


- la saison des pluies,
- un campement de fortune spar des autres quipes
pour assurer les rotations nocturnes au pige lumineux,
- la pente et la quantit de matriel porter : la DZ a
t ralise 570 m et le sommet est 830 m, les
difficults de portage ont donc t importantes puisque
lquipe a d installer plus de 200 kg de matriel sur 3
placettes distinctes (400 m, 600 m et 800 m pour le
gradient altitudinal) pour ltude altimtrique et
570_m pour le complment dinventaire,
- une partie du matriel a t rcupr J3 suite
des problmes dhliportage et la mise en place du
dispositif a t faite en urgence afin de respecter les
dures prvues dchantillonnage.

L'entomofaune de la zone du mont Itoup a t chantillonne l'aide de techniques varies (piges d'interception, pige lumineux, pige arien, recherche active, mise en mergence) durant la Mission de marsavril. Au total, plus de 8000 spcimens de 1903 espces ont t rcolts et examins.
Les objectifs entomologiques de la Mission taient :
Objectif 1 : tudier l'effet de l'altitude sur l'entomofaune
Objectif 2 : dresser l'inventaire du site, et y dtecter
des espces particulires.

Remerciements
Nous tenons tout dabord remercier, pour le Parc
amazonien de Guyane, Frdric Mortier, Ccile Guitet
et Nicolas Surugue respectivement Directeur, chef du
Service Patrimoines Naturels et Culturels et Charg de la mission Ecologie pour les tudes menes sur
le mont Itoup, pour avoir permis ltude entomologique de ce site exceptionnel et pour leur confiance.
Nous remercions aussi vivement lensemble de nos
collgues taxonomistes (cf. Tableau p.3) pour avoir
accept de collaborer cette tude. Sans eux, les travaux mens par la SEAG ne pourraient tre aussi
complets.

234

Mto / configuration du site

Equipes
Deux quipes de la SEAG se sont relayes durant un
mois (mars-avril 2010)
- Equipe 1 : (du 08 au 18/03/2010)
o Denis BLANCHET
o Pierre-Henri DALENS
o Eddy POIRIER
- Equipe 2 : (du 18/03 au 02/04/2010)
o Serge FERNANDEZ
o Eddy POIRIER
o Julien TOUROULT
Nous signalons que Eddy POIRIER a fait une crise de
paludisme le 23/03, paludisme trs probablement
contract Sal le jour avant le dpart pour Itoup et a

donc d tre rapatri sur Cayenne ; par consquent,


lensemble du dispositif a t dmont et reconditionn par les 2 personnes de la SEAG encore prsentes.

Positionnement des placettes


Afin de pouvoir comparer l'effet de l'altitude sur les
communauts d'insectes, trois placettes situes en
sous-bois relativement homogne ont t disposes
une altitude prcise :
- 400 m (N 0103'49'' W 5306'24''),
- 600 m (N 0301'20'' W 5305'41'')
- 800 m (N 0301'19'' W 5305'03''),
Cette dernire placette tant situe sur la zone sommitale tabulaire du mont Itoup.
Ces placettes ont t disposes en vitant la prsence
de bois mort frais, connu pour attirer de nombreux
insectes xylophages. Les placettes de 400 et 600 m
correspondent un sous-bois assez sombre, avec peu
de sous-tage. La placette de 800 m est typique du
milieu rencontr sur le sommet : un sous-bois plus
clair d une canope clairseme, la prsence d'une
strate arbustive relativement dense compose d'une
abondante Rubiaceae.

Dispositif utilis
De nombreuses techniques ont t utilises :
- Piges interception vitrs (vitre-plan),
- Piges malaises,
- Piges Polytrap,
- Piges appts ferments (bouteilles et piges
Charaxinae/Satyrinae),
- Piges lumineux,
- Piges en toile agrippante (piges coprophages
avec latrines en toile),
- Extracteur de litire (Berlze),
- Ramassage de bois mort (8 caisses de 15 kg),
- Battage,
- Recherche vue et capture au filet,
- Recherche de larves et fouille darbres creux.
C'est essentiellement sur la base des grandes rcoltes
des piges vitres plan que nous avons pu raliser des
analyses statistiques.

- Sur chaque placette, 3 vitres de 2m, 3 Polytrap,


2 malaises ont t installs 2 zones de litire de 40cm
par placette ont t passes au Berlze ;
- Sur la DZ, lquipe a install 5 vitres, 12 piges
appts, 1 Polytrap et 50m de cryld ;
- Sur le chemin de liaison, 12 piges charaxes et 4
piges appts ont t installs ;
- Afin dchantillonner notamment les lpidoptres
nocturnes, 24 nuits de pigeage lumineux ont t effectues dont 22 nuits sur la DZ et 2 nuits 800m.

Rsultats
Etude altitudinale
Malgr le manque de rptition et la faible dure de
lchantillonnage, on peut dgager les tendances suivantes :
- les communauts chantillonnes 400 m et
600_m sont assez proches tant en termes de diversit
que de faune ;
- la communaut despces de 800 m daltitude se
dmarque des deux autres ;
- labondance et la densit despces par pige sont
plus leves au sommet ;
- rapporte un effectif constant, la diversit est par
contre plus faible 800 m daltitude, avec une rpartition moins quitable des espces ;
- la diversit lie laltitude est un peu plus leve
que celle lie la variabilit au sein dune mme placette ;
- 800 m, la proportion despces rares et despces
exclusives dune altitude est sensiblement plus importante, ce qui tmoigne de lexistence dun cortge
despces particulier ;
- les rponses varient selon les groupes taxonomiques.
Les bons rsultats de linventaire gnral sont principalement dus la prsence de la DZ qui a permis un
chantillonnage efficace des lpidoptres nocturnes au
pige lumineux et lattraction de nombreux coloptres xylophages pris dans les piges dinterception
placs sur la zone de coupe.
La qualit de linventaire gnral aurait t encore
largement amliore par la ralisation de ltude lors
de la saison sche, beaucoup plus propice pour de
nombreux groupes dinsectes.

Lensemble du dispositif a t install de la faon


suivante :

235

Inventaire gnral

236

Conclusions

Hemiptera Reduviidae :

Conclusions gnrales

- Chryxus tomentosus, Chryxinae : sous-famille trs


peu reprsente en collection et gnralement par
quelques individus ;

La faune observe sur le mont Itoup correspond


99% au fonds de faune commun toute la Guyane,
caractristique de cette relative homognit (forte
diversit alpha et faible diversit beta entre sites) des
forts tropicales de basse altitude (Novotny et al.,
2007).
Nous avons cependant russi mettre en vidence
quelques espces jamais observes dans les forts du
proche intrieur de la Guyane ni mme vers Sal,
endmiques possibles dun sommet ou plus vraisemblablement dun ensemble de reliefs du plateau des
Guyanes. Ces espces sont des taxa rares dans la
communaut mais un chantillonnage plus pouss et
plus cibl sur le sommet (le camp de base plac 570
m na pas facilit la prospection du sommet lors de
cette expdition) permettrait peut-tre de trouver
dautres espces de ce type. Voici quelques exemples
de ces espces rares dans plusieurs familles tudies :

- Macrocephalus incisus, Phymatinae : unique exemplaire pour linstant captur en Guyane ;


- Tribelocodia ashei, Tribelocephalinae : unique reprsentant de cette sous-famille en notropical. 2 spcimens capturs en ce lieu ; description rcente (Weirauch, 2010) ;
- Eidmannia matogrossensis, Peiratinae : encore une
espce rare reprsente ici par 4 exemplaires ;
- Microlestria plebeja, Reduviinae : Connue du Brsil,
premires captures en Guyane et uniquement en cet
endroit.

Phasmatoptera Prisopodidae :
Prisopus sp. II un mle.
Le seul spcimen connu de cette espce trs probablement nouvelle pour la science.

Phasmatoptera Diapheromeridae :
Phanocloidea sp. I un mle.
Une nouvelle espce du genre Phanocloidea. Le seul
spcimen connu jusqu'ici.

237

Lepidoptera Riodinidae :
Une nouvelle espce pour le dpartement a t dcouverte au sommet du mont Itoup (altitude 830 mtres).
Il sagit de Mesosemia messeis (Hew.1860). Lespce
est connue seulement du haut Amazone : Rio Putumayo (Brsil), Pebas (Prou). Plusieurs sous-espces,
M.m. amona Hewitson, 1876, M.m. juncta Stichel,
1910 (Rv. G. Lamas & C. Callaghan, 2004) sont des
htes des forts daltitude de Bolivie et du Prou. Elle
nest pas connue des zones basses de tout louest amazonien. Cest aux abords de la mare sommitale que le
premier mle a t rencontr. Il arrive vers 13h 30 et
se poste sur un arbuste ensoleill 1,50m du sol. Les
quatre autres mles ont t trouvs les jours suivants
sur le mme site. La femelle na pas t observe.
Une nouvelle sous-espce de Mesosemia messeis
(Lepidoptera Riodinidae) est donc en cours de description (Gallard & Fernandez, in litteris).

Orthoptera Tettigoniidae :
Les espces Eurymetopa obesa et Dectinomima sagittata (Tettigoniidae, Conocephalinae) sont nouvellement signales en Guyane.
Plusieurs autres espces de Tettigoniidae sont galement en cours de description.
Coleoptera :
10 nouvelles espces de Coloptres ont t dcrites
daprs des spcimens collects lors de la Mission
Itoup :
- Buprestidae :
o Agrilus longelineatus
o Agrilus figuratus
- Carabidae :
o Mizotrechus dalensi
o Mizotrechus grossus
- Cerambycidae :
o Agloaschema vinolenta
- Cicindelidae :
o Ctenostoma (Myrmecilla) dalensi
- Curculionidae :
o Macrocopturus flavoguttatus
o Lechriops mephisto
- Elateridae :
o Achrestus itoupei

238

- Lampyridae :
o Magnoculus brulei

Propositions dajustement du protocole


pour missions ultrieures
Idalement, pour obtenir les meilleurs rsultats, une
tude de ce type devrait tre ralise en 2 parties, 15
jours en saison des pluies et 15 jours en saison sche
(centres sur les nouvelles lunes).
Ceci permettrait galement daffiner les tudes statistiques : recrutement des groupes abondants dans les
deux saisons, optimisation des pigeages lumineux
(ces derniers pouvant tre utiliss dans une approche
altitudinale, par exemple par ltude des Geometridae)
avec leur recentrage sur les phases lunaires propices.
De plus, certains groupes prometteurs nont pas
t tests (comme ragissant laltitude), comme les

Satyrinae (Lepidoptera, Nymphalidae). Le protocole


utiliser pourrait aussi permettre des les chantillonner
par le biais des piges charaxes distribus selon les
gradients.
Propositions pour une tude ultrieure :
- Espacement des piges pour viter leffet site (par
exemple placer un pige tous les 50 m sur une courbe
de niveau) ;
- Supprimer les Polytrap ;
- Multiplier les piges interception vitrs (pose de
vitres plus petites) ;
- Remplacer les piges malaise par des piges SLAM ;
- Ajouter des piges charaxes (pour chantillonnage
des Satyrinae) ;
- Mettre 2 piges lumineux en parallles 2 altitudes
distinctes (pour chantillonnage des Geometridae).

239

Chrysomelidae de Guyane, mont Itoup.


Prparation et photographies de Robert Constantin

240

ANNEXES
Articles publis sur la base de ltude entomologique du mont Itoup
TOUROULT J., DALENS P.-H., POIRIER
E. & BRULE S., 2011. Rponse des communauts de coloptres un faible gradient
altitudinal : tude exploratoire sur le mont
Itoup (Guyane). ACOREP-France - Coloptres de Guyane - Tome III, p.38-51
TOUROULT J., DALENS P.-H., POIRIER
E. & BRULE S., 2011. Influence d'une
troue sur la diversit des coloptres : tude
de cas sur le mont Itoup (Guyane). ACOREP-France - Coloptres de Guyane Tome III, p.3-7
BRL S., 2011. Etat des connaissances sur
les buprestes de Guyane (Coleoptera, Buprestoidea). ACOREP-France - Coloptres
de Guyane - Tome III, p. 62-87
CURLETTI G. & BRL S., 2011. Agrilus,
Agriloides et Autarcontes de Guyane. Collection Ex Natura, Vol.2. 81pp. [descriptions de
Agrilus longelineatus n.sp et Agrilus figuratus n.sp]
CASSOLA F. tudes sur les cicindles.
CLXXXVIII. Les cicindles de Guyane franaise, avec description de deux nouvelles
espces de Ctenostoma Klug, 1821 (Coleoptera, Cicindelidae). ACOREP-France - Coloptres de Guyane - Tome III, p. 8-18 [description de Ctenostoma (Myrmecilla) dalensi
n. sp.]
CHASSAIN J., 2010. Les latrides de
Guyane (Coleoptera, Elateridae). ACOREPFrance - Coloptres de Guyane - Tome II,
p. 14-30
CHASSAIN J., 2010. Les Anchastus LeConte, 1853 de Guyane (Coleoptera, Elateridae, Physorhininae). Le Coloptriste, 2010,
13 (1) : 43-53

CHASSAIN J. 2010. Note concernant les


espces guyanaises du genre Achrestus Candze, 1869 et description d'un Achrestus
nouveau de Guyane (Coleoptera Elateridae
Dricrepidiinae). Le Coloptriste, 13 (3) :
174-177. [description dAchrestus itoupei
n.sp.]
CHASSAIN J. & TOUROULT J., 2011. Les
eucnmides de Guyane (Coleoptera, Eucnmeidae). ACOREP-France - Coloptres de
Guyane - Tome III. p 78-88
CONSTANTIN R., 2010. Les genres de Cantharidae, Lampyridae, Lycidae et Telegeusidae de Guyane franaise (Coleoptera, Elateroidea). ACOREP-France Coloptres de
Guyane - Tome II, p. 32-44
CONSTANTIN R., 2011. Contribution
l'tude du genre Magnoculus MacDermott,
1964 (Coleoptera, Lampyridae) avec description de cinq espces nouvelles de Guyane.
ACOREP-France - Coloptres de Guyane Tome III, p.52-59 [description de Magnoculus brulei n. sp.]
DALENS P.-H., TAVAKILIAN G. L. &
TOUROULT J., 2010. Rvision des Compsocerini Thomson, 1864 de Guyane (Coleoptera, Cerambycidae, Cerambycinae). Les Cahiers Magellanes NS, 2 : 79-111. [description d'Agloaschema vinolenta n.sp]
DEGALLIER N., ARRIAGAGA G., BRL S., TOUROULT J., DALENS P.-H. &
POIRIER E. 2010. Coleoptera Histeridae de
Guyane franaise. VI. Mise a jour du catalogue et contribution a la connaissance des
Hololeptini. ACOREP-France - Coloptres
de Guyane - Tome II, p. 62-75

241

DEGALLIER N., LEIVAS F. & MOURA


D., 2011. Histerid beetles of French Guiana.
V. Revision of the genus Ebonius Lewis (Coleoptera, Histeridae, Omalodini). Zootaxa
2824: 44 52 (2011).
ERWIN T., 2011. Rainforest understory
beetles of the Neotropics, Mizotrechus Bates
1872, a generic synopsis with descriptions of
new species from Central America and northern South America (Coleoptera, Carabidae,
Perigonini). ZooKeys 145: 79-128 (2011).
[descriptions de Mizotrechus dalensi n. sp. ;
Mizotrechus grossus n. sp.]
HERRMANN A. & HAVA J., 2011. Contribution to knowledge of the genus Cryptorhopalum Gurin-Mneville, 1838 (Coleoptera:
Dermestidae: Megatomini) from French
Guiana. Studies and Reports Taxonomical
Series 7 (1-2): 147-152.
PONCHEL Y., 2010. Prsence dAmblyodus
taurus Westwood, 1878 en Guyane. ACOREP-France - Coloptres de Guyane Tome I, p. 9

242

RHEINHEIMER J., 2010. Les Hylobiini de


Guyane (Coleoptera, Curculionidae). ACOREP-France - Coloptres de Guyane Tome I, p. 59-72
RHEINHEIMER J., 2011 Les Conoderinae
de Guyane (Coleoptera, Curculionidae).
ACOREP-France - Coloptres de Guyane Tome III, p.65-88 [descriptions de Macrocopturus flavoguttatus n. sp. ; Lechriops mephisto n. sp.]
SOULA M., 2010. Les Rutelinae : prsentation des tribus et genres de Guyane (Coleoptera, Scarabaeidae). ACOREP-France - Coloptres de Guyane - Tome II, p. 50-61
TOUROULT J. & DALENS P.-H., 2010.
Lapparente disparition de Gymnetis flaveola
? (Coleoptera, Cetoniidae). ACOREP-France
- Coloptres de Guyane - Tome I, p. 88
TRONQUET M. & DEGALLIER N., 2010.
Peplomicrus uyttenboogaarti (Bernhauer,
1928), espce nouvelle pour la Guyane franaise (Coleoptera, Staphylinidae, Micropeplinae) ACOREP-France - Coloptres de
Guyane - Tome II, p. 31

Remerciements
A lensemble des personnes et organismes ayant particip au programme :
Ccile Guitet1, Gatan Mathoulin1, Antonio Lopes1, Emeric Auffret1, Atidong
Nano2, Franois Bagadi1, Guillaume Longin1, Jean-Pierre Simonnet2, Olivier
Brunaux2, Stphane Guitet2, Sophie Gonzalez4, Jean-Franois Molino3, Daniel
Sabatier3, Michel Tarcy3, Olivier Tostain5, Guillaume Lotard5, Vinvent Pelletier5, Michel Boudrie, Ccile Richard-Hansen6, Pierre Alunawale1, Tapinkili
Anaiman1, Kamran Khazraie1, Olivier Claessens, Alexandre Renaudier7, Marguerite Delaval2, Mal Dewynter2, Nicolas Surugue1, Juan I. Montoya Burgos8,
Sbastien Brosse9-10, Alain Thomas9, Denis Blanchet11, Pierre-Henri Dalens11,
Eddy Poirier11, Serge Fernandez11, Julien Touroult11.
1 Parc amazonien de Guyane (PAG)
2 Office National des Forts Guyane (ONF)
3 Institut de Recherche pour le Dveloppement (IRD) ; UMR AMAP, Botanique et bioinformatique de larchitecture des plantes Montpellier
4 Institut de Recherche pour le Dveloppement (IRD) ; Herbier de Guyane - Cayenne
5 Ecobios, bureau dtude
6 Office National de la Chasse et de la Faune Sauvage Guyane (ONCFS)
7 Groupe dEtude et de Protection des Oiseaux en Guyane (GEPOG)
8 Dpartement de zoologie et biologie animale, Universit de Genve (DZBA)
9 Universit Paul Sabatier, UMR Ecolab - Toulouse
10 Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS)
11 Socit Entomologique Antilles-Guyane (SEAG)

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