Philippe Ramette : "J’ai ce désir d'être un élément permanent de mon travail, sans ego disproportionné"

Philippe Ramette (2022) - © Frédéric Lanternier
Philippe Ramette (2022) - © Frédéric Lanternier
Philippe Ramette (2022) - © Frédéric Lanternier
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Le sculpteur Philippe Ramette revient sur son parcours, ses inspirations et ses méthodes de travail au micro d'Arnaud Laporte. Le temps d'un entretien au long cours, il développe son art et sa manière de contempler le monde, en bousculant, du même coup, son regard et celui des spectateurs.

Avec

Artiste protéiforme, Philippe Ramette abandonne la peinture vers 1992 pour se mettre en scène dans des photographies, prises par son complice Marc Domage depuis 1995. S'il se considère avant tout comme un sculpteur, et non comme un photographe, rien ne l'empêche de faire des pas de côté vers d'autres formes d'art, et signe par exemple la coréalisation d'un spectacle de danse avec Fanny de Chaillé, en 2014. Représenté par la galerie Xippas, à Paris depuis 2006, l'artiste en costume conçoit des objets irrationnels qui proposent une réflexion sur le leurre. Ainsi se décrit-il : " L’artiste que je suis est un obsessionnel qui refuse de se contenter de la présentation qu’on lui a faite du monde." À travers des dispositifs extrêmes, Philippe Ramette défie le monde et rend possible les détournements qu'il dessine, expérimentant physiquement ce qui ne devrait être qu’une pensée, à l'instar du Plongeoir (2004). En 2020, après avoir exposé dans le monde entier (Espagne, Japon, Thaïlande, Inde, Uruguay, Roumanie…) et après que ses œuvres entrent dans les Collections du Centre Georges Pompidou (Paris), du MAC/VAL (Vitry-sur-Seine), du MAMCO (Genève), de la Maison Européenne de la Photographie (Paris), du SMAK, Museum Van Hedendaage Kunst (Gand), ou encore de l'Israel Museum (Jérusalem), Philippe Ramette expose pour la première fois dans sa ville natale, à Auxerre.
Les titres de ses œuvres trouvent de nombreux échos dans une douce mélancolie qui prête autant à la contemplation qu'au vertige, tels que "L'Ombre (de moi-même)" (2007), "Éloge du pas de côté" (2018) ou encore "Pas perdu retrouvé" (2022).

À l'occasion de sa 6ème exposition personnelle à Paris, plus de quinze ans après sa toute première qui regroupait des vues sous-marines, Philippe Ramette nous parlera de ses rêves, de ses prothèses, de ses images et de ses sculptures.

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Récit d'une mue

« J'avais une sorte de monde intérieur qui m'occupait pas mal. Et puis j'ai toujours eu cette impression que j'avais peut être des choses à faire dans une école d'art, mais sans jamais trop penser que c'était possible. [...] Je me souviens des premiers instants à l'école d'art de Mâcon, où je ne connaissais vraiment absolument rien, ni à l'art, ni au milieu artistique. Mais les premiers cours, j'ai eu l'impression d'être à peu près pour la première fois de ma vie à ma place. » Philippe Ramette

« Je considérais un peu naïvement qu'être artiste, ça devait être être peintre. Il m'a fallu tout un processus relativement long pour me rendre compte que je n'étais pas à l'aise avec le médium peinture et que je me sentais beaucoup mieux avec le dessin. Mais assez vite, j'ai réalisé une sculpture et ça a été une révélation. Cette sculpture, c'était la crucifixion de la mobylette, ce qui était un acte assez un peu particulier mais qui m'a valu quand même une sorte de respect […] C'était la première fois où je considère que ma vie rencontrait ce que je pressentais comme étant ma pratique » Philippe Ramette

Les Regardeurs
59 min

Mettre en scène son point de vue

"« Le voyageur contemplant une mer de nuages » de Caspar David Friedrich est un tableau qui m'a fasciné. Ce qui m'intriguait c'était d'imaginer quel chemin il avait pris et quelles difficultés il avait pu rencontrer pour arriver à ce point de vue. Le point de vue est un élément de langage que j'emploie très souvent dans mon travail. Je recherche des points de vue différents et décalés." Philippe Ramette

"Pour moi, c'est la moindre des choses d'être l'acteur de mon propre travail, d'être le participant. Ça a commencé avec la première photographie des socles à réflexion où, pour des raisons finalement très pratiques, je me suis pas posé la question du modèle. J'y suis allé tout à fait naturellement. Puis ce personnage s'est constitué au fur et à mesure de mon travail et je pense qu'il sera définitivement permanent. Ça induit aussi une notion de temps qui m'est très chère : quand on voit une série photographique, on voit que mon corps change, il vieillit. J’ai ce désir d'être un élément permanent de mon travail, sans ego disproportionné. C'est comme une signaturePhilippe Ramette

Ses actualités :

Exposition : Philippe Ramette présente sa 6e exposition personnelle à la Galerie Xippas à Paris, visible jusqu'au 03 décembre prochain. Présentation de la Galerie : "C’est dans la continuité de ses œuvres précédentes, présentes dans l’espace public que Philippe Ramette convoque sa silhouette désormais familière, à travers onze nouvelles sculptures et une photographie inédite. Un personnage en bronze, support à la représentation fidèle de l’artiste, mais d’échelle domestique, formalise les étapes et les états d’introspection et de doute, mais non moins constructifs, que constitue le processus créatif : un cheminement ponctué de questionnements, de renoncements et de déterminations. Expression d’images mentales plutôt que d’objets figés, l’ensemble crée un scénario où le spectateur est invité à se projeter, interpellé par la représentation formelle des états d’âme de l’artiste, mais où les œuvres convoquent nos limites communes."

Sons diffusés lors de l'émission :

- Guitemie Maldonado à propos de Caspar David Friedrich dans l'émission "Peinture fraîche" sur France Culture, diffusée le 17/05/2006

- Extrait du documentaire : "Caspar David Friedrich : Le voyageur des pays intérieurs" de Frauke Schlieckau et Nicola Graef (Allemagne, 2020, 52mn) diffusé sur Arte

- Le réalisateur Cerro Guerra dans l'émission "Un autre jour est possible" diffusée sur France Culture, le 24/12/2015

- Le choix de l'invité : Bertrand Burgalat - “Rêve capital” Album : Rêve capital (2021) | Label : TRICATEL

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