Cédric Kahn : "Je fais souvent un rêve dans lequel je dois terminer le tournage tout seul"

Cédric Kahn au 80e Festival international du film de Venise, septembre 2023 ©AFP - GABRIEL BOUYS
Cédric Kahn au 80e Festival international du film de Venise, septembre 2023 ©AFP - GABRIEL BOUYS
Cédric Kahn au 80e Festival international du film de Venise, septembre 2023 ©AFP - GABRIEL BOUYS
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Cinéaste remarqué en 2023 avec "Le Procès Goldman", Cédric Kahn revient pour son nouveau film "Making of, le monde merveilleux du cinéma". Sa première comédie suit un réalisateur dépassé qui a pour seul allié un jeune figurant chargé de réaliser… le making of. À retrouver en salle le 10 janvier.

Avec

Eva Bester reçoit le cinéaste autodidacte Cédric Kahn qui sort son film « Making of, le monde merveilleux du cinéma », une comédie douce-amère. Il met en scène Simon, joué par Denis Podalydès, un réalisateur éprouvé devant jongler entre l'ego de son acteur principal, de drastiques coupures de budget, la démotivation justifiée de ses techniciens et les affabulations de son pleutre de producteur.

Tandis qu'il tourne son film sur des ouvriers se battant pour sauver leur usine, il affronte un conflit social au sein même de son équipe. Il essaye, à distance, de convaincre sa femme de ne pas le quitter. Les choses semblent mieux vues à travers différents écrans, dont celui derrière lequel se trouve un jeune débrouillard rêvant de faire du cinéma et auquel on confie le making-of du tournage… Au casting : Denis Podalydès, Jonathan Cohen, Stefan Crépon, Souheila Yacoub, Emmanuelle Bercot, Xavier Beauvois et Valérie Donzelli. Mais aussi de vrais techniciens du vrai film et de vrais ouvriers du faux film…

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La sortie du film, une petite fin

À écouter : Cédric Kahn
Ciné qui chante
52 min

Eva Bester le reçoit à deux jours de la sortie du film. Un moment difficile selon le réalisateur : « On a l'impression que le temps s'arrête un peu, comme avant de sauter dans le précipice. C'est le moment où on va abandonner le film. C'est la fin de quelque chose, et en même temps, c'est le vrai début de la vie du film. C'est un passage et le début du chômage aussi : on se demande ce qu'on va faire ensuite. La vie de cinéma est faite de séquences. Il n'y a pas de continuité, il faut se réinventer tout le temps. La sortie, c'est une petite fin. »

À l’origine du film, une dépression liée au Covid-19

Cédric Kahn, honnête, explique : « J'avais écrit un scénario que je n'arrivais pas à financer. On était en plein Covid-19. Je n’ai pas très bien vécu cette période, j'avais vraiment le blues. Je me suis demandé si j’arrêtais le cinéma ou si je faisais un film sur un réalisateur en dépression. C'est un métier avec vraiment des hauts, des bas, et des doutes. Cela fait partie de la création. Je me suis lancé dans l’écriture en me disant que j’allais parler d'un réalisateur en burn-out. Et cela a été très cathartique. Je conseille donc aux gens de parler de leurs angoisses. Ensuite, ce tournage a été incroyable, joyeux, et amical : tout le contraire de ce que je raconte dans le film. Et cela a été une sorte de cure de jouvence qui m'a vraiment remis en selle. Et derrière, j'ai tourné avec beaucoup d'énergie, et d'entrain. C'était une très bonne solution ! »

Organisation d’un tournage vs la création artistique

Remède à la mélancolie
47 min

Malgré son expérience, le réalisateur continue de s’émerveiller : « L'utopie et la passion traversent les tournages. Du producteur jusqu'au dernier assistant, et même les figurants, tous partagent une sorte de passion, d'émerveillement d'être là, de participer à la fabrication d'un film. Cela reste quand même quelque chose de magique. » Même si le tournage d’un film est au service d’un objet artistique, Cédric Kahn l’a constaté : « L'organisation très militaire avec sa hiérarchie est une sorte de violence sociale qui s'exerce sur un plateau. Je la ressentais encore plus quand j'étais stagiaire, tout en bas de l'échelle. Mais même en ayant grimpé les échelons, je continue de la voir et je pense qu'elle est nécessaire. Cette hiérarchie permet l'organisation. C'est vrai, quand on est pris par le temps, l'économie, etc. Mais c'est contraire à l'esprit de création. »

La vérité de l’équipe en échangeant les rôles

Dans Making of existe un mélange entre acteurs, techniciens et ouvriers dans le vrai film et dans le faux film du vrai film… Pour Cédric Kahn, ces changements de rôles étaient très cohérents avec l'idée du film : « Il fallait qu'il soit participatif. Je voulais filmer l'aspect documentaire du film, donc je voulais que les techniciens participent au tournage. Je m'étais même fixé comme objectif que chaque personne du plateau passerait au moins une fois devant la caméra. Donc il y avait des gens qui se cachaient derrière les loges pour pas que je les attrape (rires). Un acteur qui joue un technicien, ce n'est pas du tout la même chose. Donc je voulais aussi que cette vérité de l'équipe infuse le film. »

Un film non pas sur le cinéma, mais sur le tournage

On aura tout vu
46 min

Plus qu’un film sur le cinéma, c’est un film sur un tournage que le réalisateur a voulu faire. Il souhaitait « vraiment raconter le cinéma sous un angle presque trivial, j’ai voulu montrer le travail du cinéma et le 7e art, un lieu de travail comme un autre. J'ai fait un film sur le labeur. »

« Les corons » de Bachelet en B.O

Pour Cédric Kahn, "Les corons" de Pierre Bachelet est une des plus belles chansons du répertoire français. Comme le film est un hommage aux ouvriers, je voulais absolument la programmer. La force des chansons est de dire en quelques mots des choses fortes. Quand il dit : « Ils étaient de la fosse comme on est d'un pays », je trouve cette phrase incroyable, c'est quasiment de la sociologie. Cette chanson est devenue l'hymne d'une région et elle lui rend sa fierté. Elle est chantée par les supporters de Lens et les écouter met vraiment les larmes aux yeux. »

Les budgets des films

L’argent, les gros budgets ne sont pas une garantie pour Cédric Kahn qui témoigne « Personnellement, ce n'est pas comme ça que j'ai fait mes meilleurs films. Tandis qu'à chaque fois que j'ai pris des chemins de traverse, ou que j’ai fait les choses de façons plus marginales, j'ai fait des choses plus intéressantes. Le chemin de facilité n'est jamais le chemin intéressant.

Dans ce film, je voulais témoigner de comment, sur un tournage, la pression de l'argent et du temps intervient sur l'artistique. Les films sont faits de ça. Mais je voulais le faire sous l'angle de la comédie qui permet de dire plein de choses de façon plus légère. Et je ne voulais surtout pas faire un film plaintif ou complaisant. Je voulais une forme de distance et d'ironie. »

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La suite est à écouter...

Archives

Extrait du film Living in Oblivion de Tom DiCillo (1995).
Discours de Maurice Pialat lors de la réception de sa Palme d'or pour le film Sous le soleil de Satan au Festival de Cannes en 1987.

La découverte de l'invité

La pièce Les Justes d' Albert Camus (1949).

Le choix musical de l'invité

Pierre BACHELET - Les corons
Joan BAEZ - Diamonds And Rust

Programmation musicale

LUIDJI et TUERIE - Joueur 1
TELEPHONE - Un autre monde
FATOUMATA DIAWARA et M.anifest - Mogokan

Programmation musicale

  • Luidji

    Joueur 1 (feat. Tuerie)

    Album Saison 00 (2023)

    Label FOUFOUNE PALACE BONJOUR

  • Telephone

    Un Autre Monde

    Album Illimite (best of) (2006)

    Label EMI

  • FATOUMATA DIAWARA (Compositeur)

    Mogokan (feat. M. Anifest)

    Album London Ko (2023)

    Label 3 EME BUREAU / WAGRAM

  • Joan Baez

    Diamonds & rust

    Album Diamonds and Rust (1975)

    Label AM RECORDS (393233-2)

L'équipe

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